Tag: artistes

  • Le Jardin de l’art

    Le Jardin de l’art

    Cette oasis de verdure, située dans le quartier de Cotroceni de la capitale, couvre une superficie de 18,2 hectares et compte plus de 10 000 espèces de plantes. Le Jardin botanique « Dimitrie Brândză », daprès le nom de son fondateur, est organisé en secteurs extérieurs spécifiques, tels que: décoratif, plantes rares, flore de la Dobroudja, rosarium iridarium, taxonomie, flore asiatique, plantes utiles et secteurs intérieurs, tels que : serres, herbier, bibliothèque ou encore centre déducation écologique. Ces dernières années, de nouveaux secteurs ont été développés : le Jardin de grand-mère – un jardin paysan traditionnel, un Jardin des enfants, et leJardin avec des livres. Les collections de plantes vivantes du Jardin botanique « D. Brandză » comptent environ 3 000 taxons, tandis que lHerbier général comprend plus de 300 000 spécimens. En outre, dans le Musée botanique on retrouve différentes collections : plus de 1 500 aquarelles représentant des plantes spontanées et cultivées en Roumanie, des produits végétaux et des objets faits de plantes, des collections de graines et de fruits, des collections de champignons, des expositions à valeur historique et des dioramas.


    Et de mai jusquà lautomne, le Jardin botanique attend ses visiteurs pour profiter de la musique, de la poésie, de la danse et aussi de produits traditionnels.


    Suzana Roşca, responsable de la marque Weekend Sessions, nous a parlé de cette deuxième édition : « Cest la deuxième année, nous avons commencé lannée dernière avec une série de pique-niques culturels, dans lesquels nous avons essayé de restaurer les liens entre les gens et surtout les liens avec la nature, car nous sommes dans le Jardin botanique de lUniversité de Bucarest. Et chaque fin de semaine de cette année, pendant 15 week-ends, à compter du 7 mai, nous serons pendant quatre heures avec des artistes indépendants, des entrepreneurs locaux et de nombreux visiteurs, nous lespérons ! »



    Suzana Roşca, responsable de la marque Weekend Sessions, nous a expliqué doù venait lidée du projet :


    « Lévénement est né du besoin de revoir nos amis dans un cadre aéré et dans une atmosphère détendue et de vacances. Et nous avons maintenant apporté plus dactivités pour le bien-être de lâme et de lesprit. Nous aurons une série dateliers, des sections de yoga et de danse, et la tente thérapeutique, où les gens pourront venir parler aux thérapeutes. Et comme cest un festival très familial, nous aurons également des ateliers pour les enfants ainsi quune clairière qui leur sera dédiée, où ils pourront jouer librement. »



    Nous avons demandé à notre interlocutrice quels étaient les retours après les sessions de lannée dernière :


    « Les retours ont été très bons, les gens ont été heureux de découvrir le Jardin botanique, ils ont apprécié les pique-niques détendus avec la famille et les amis et des sections de musique classique, jazz, indie ou pop-rock, qui ont pu être écoutées les pieds dans lherbe. Cest comme une oasis dans le centre dune ville bondée, où nous allons pour la fraîcheur des arbres, nous apprécions la bonne nourriture, la bonne musique, à un volume décent, où nous avons des conversations et nous sommes ensemble avec dautres personnes. »



    Nous avons découvert que tous les week-ends, les samedis et dimanches, de 16h00 à 21h00, nous pouvons nous rendre au Jardin botanique, avec des billets achetés sur le site Internet de weekendsessions.ro. Quest-ce que les visiteurs peuvent faire?

    Suzana Roşca : « Ils peuvent sasseoir dans un coin pour profiter de la musique, ils peuvent participer à un atelier de yoga ou à la section de thérapie. Cette année, sur les 30 jours du festival, nous attendons environ 30 000 participants. Cest le double par rapport à lannée dernière, cette année il ny a plus de restrictions, mais le nombre est limité par la superficie de plus de 6 000 mètres carrés. Nous aimerions que les gens ne soient pas à létroit. Les visiteurs sont invités à venir découvrir les petits producteurs locaux, des entrepreneurs qui prennent grand soin des produits quils proposent, et qui sont dune qualité exceptionnelle. Et nous souhaitons quils goûtent les produits et apprennent à connaître ces petits producteurs qui ne peuvent pas se rendre dans les grands magasins. Et nous voulons les promouvoir, et le pique-nique est fourni par eux. Les visiteurs sont invités à apporter des couvertures, des coussins, des chaises longues, tout ce sur quoi ils veulent sasseoir et profiter de ce qui se passe. Nous allons avoir un peu de cinéma : « Sessions de week-end sous les arbres », il y aura une sélection de nos invités spéciaux, de lInstitut Français, et nous allons avoir des documentaires, des films comiques pour tous les âges, prêts à être appréciés sur la pelouse du Jardin botanique. »



    Les événements sont gratuits, les visiteurs ne devant payer que les frais daccès au Jardin botanique. Ainsi, les enfants de moins de 12 ans ont une entrée gratuite, et le billet pour les adultes est de 10 lei (environ 2 euros) et 5 lei pour les étudiants. Les détails sur les artistes et les invités spéciaux sont à retrouver sur le site www.weekendsessions.ro, et après avoir réservé vos sièges en ligne, vous recevrez une confirmation basée sur les sièges disponibles au moment où vous soumettez votre demande.


    Voici une façon de profiter dune atmosphère de vacances avant même quelles ne commencent !


    (Trad. : Ligia)

  • 28/04/2022 (mise à jour)

    28/04/2022 (mise à jour)

    Transnistrie — Le ministère de la défense de Roumanie précise qu’actuellement l’armée roumaine n’a pas de militaires déployés en République de Moldova, pour participer à des exercices communs ou autres. Ces précisions interviennent alors qu’une publication de langue russe avait distribué de fausses informations, selon lesquelles la Roumanie envisageait d’attaquer la Transnistrie avec l’appui de l’OTAN, afin de pouvoir annexer la République de Moldova. Elle soulignait que des militaires roumains avaient déjà été déployés sur le territoire de la République de Moldova. Les infox propagées par les médias russes interviennent après la série d’attaques dont les auteurs restent inconnus, lancées ces derniers jours en Transnistrie, région séparatiste russophone dans l’est de la République de Moldova.



    Réfugiés — Le nombre des ressortissants ukrainiens entrés en Roumanie a augmenté mercredi de 30 % par rapport au jour précédent, fait savoir un communiqué de l’Inspection générale de la Police aux frontières roumaine. Au cours des dernières 24 heures, 8 635 citoyens ukrainiens sont passés par les postes-frontières roumains depuis l’Ukraine et la République de Moldova. Depuis le déclenchement de cette crise il y a plus de deux mois, plus de 800 mille ukrainiens sont entrés en Roumanie. Par ailleurs, l’Agence des nations unies pour les réfugiés a affirmé dans une conférence à Genève que plus de 8 millions d’Ukrainiens pourraient fuir leur pays. Selon la porte-parole de l’agence onusienne, Shabia Mantoo, l’Agence et ses partenaires souhaitent recueillir quelque 1,85 milliards de dollars afin de pouvoir soutenir environ 8,3 millions de réfugiés en Hongrie, République de Moldova, Pologne, Roumanie et Slovaquie ainsi que dans d’autres Etats de la région, y compris le Belarus, la Bulgarie et la République tchèque.



    Armée — Des cérémonies militaires, des expositions, des concerts et des compétitions sportives ont lieu dans toutes les garnisons de Roumanie pour célébrer la Journée des Forces terrestres. Leur patron spirituel est Saint Georges. A Bucarest, des responsables de l’Etat, des militaires actifs et en réserve, des attachés étrangers et militaires des Etats alliés ont pris part à une cérémonie militaire et religieuse. Le chef de l’Etat major de la Défense, le général Daniel Petrescu, a souligné que la Roumanie devait rester un important fournisseur de sécurité et de stabilité dans la région, tant du point de vue des capacités défensives nationales que dans le format euro-atlantique.



    Déclaration — Les autorités ukrainiennes considèrent l’avenir avec optimisme, en dépit de la situation difficile dans laquelle se trouve le pays, a déclaré le président du Sénat roumain, Florin Cîţu, à son retour de Kiev. Il a pris part au premier congrès des pouvoirs locaux, qui a eu lieu après le déclenchement de l’invasion russe. Il a précisé que la réunion à laquelle il a été présent avait visé principalement la reconstruction de l’Ukraine après les dégâts dévastateurs qu’elle a subis. L’Ukraine a besoin d’être soutenue en matière de reconstruction et il est clair qu’ils ont besoin d’être appuyés pour se défendre, a encore indiqué le président du Sénat roumain.



    Covid — Près de 1 150 nouveaux cas d’infection au virus SARS-CoV-2 ont été recensés jeudi en Roumanie. Les autorités ont également rapporté 15 décès. 1 200 malades sont actuellement hospitalisés, dont 193 en réanimation. Entre temps, sur le fond de la baisse de l’intérêt de la population pour l’immunisation, les centres de vaccination à travers le pays fermeront ces jours-ci. Ceux qui souhaitent se faire vacciner pourront le faire à partir du mois prochain dans les cabinets des médecins traitants.



    Culture — L’Institut français de Roumanie et Europavox organisent, les 4 et 5 mai, l’événement What’s Next for European music? — deux journées de discussions, d’ateliers et de tables rondes centrées sur les politiques culturelles européennes dans un contexte en perpétuel changement, et leur impact sur la mobilité des artistes en Europe. Les rencontres s’adressent aux professionnels du domaine culturel et auront lieu à l’Institut français à l’occasion de la première édition du Festival Europavox Bucarest, cofinancé par la Commission européenne. Les 4 et 5 mai, au Festival Europavox, six artistes de six pays d’Europe donneront un concert au Control Club de Bucarest. L’artiste d’origine suisse Sophie Hunger, les art-rockeurs anglais Snapped Ankles et les artistes émergents Emilie Zoé (Suisse), Lewsberg (Pays-Bas), Jesse Markin (Finlande) et David Walters (France) enchanteront le public aux côtés des groupes roumains Zimbru et Balkan Taksim. Les billets sont disponibles sur Eventbook.ro.



    Rugby — La sélection nationale de rugby de la Roumanie a obtenu la qualification directe à la Coupe du monde 2023 de France suite au fait que l’Espagne a été disqualifiée pour avoir utilisé un joueur non éligible dans deux matchs du Championnat d’Europe de rugby 2021-2022. L’organisme de direction de ce sport avait ouvert une enquête suite à une plainte déposée par la Roumanie, après qu’elle eût terminé 3e. Rappelons que la Roumanie avait raté elle aussi la qualification à une Coupe du monde, en 2019, pour la même raison.



    Tennis — La Roumaine Simona Halep a vaincu la Chinoise Shuai Zhang en deux sets, au premier tour du tournoi de tennis de Madrid. En revanche, Sorana Cîrstea s’est inclinée devant l’Espagnole Nuria Parrizas Diaz, et irina Begu a cédé devant Belinda Bencic de Suisse. L’Open de Madrid a lieu du 28 avril au 7 mai. Simona Halep a gagné les éditions de 2016 et 2017.

  • “Des bombes et des gens. Artistes unis contre la guerre “

    “Des bombes et des gens. Artistes unis contre la guerre “


    Lart peut-il être une arme contre la guerre? Que se passe-t-il quand des artistes plasticiens se rassemblent pour protester contre les événements actuellement en cours en Europe? Lexposition « Bombe și oameni. Artiști uniți împotriva războiului/Des bombes et des gens. Artistes unis contre la guerre », ouverte à Bucarest du 12 mars au 3 avril, est un message de protestation lancé par des artistes de Roumanie et dUkraine.



    La commissaire de lexposition, Raluca Ilaria Demetrescu, nous sert de guide: « Soixante-quatorze artistes, pour être plus précis, dont dix-huit ukrainiens, ont réagi à ce quil se passe actuellement en Ukraine, à leur manière habituelle, en regardant la cité, ses défauts et ceux du monde, avant de réagir. Car les crises et les situations durgence exigent ou plutôt provoquent des réactions urgentes. Tout sest passé très rapidement, au deuxième jour de guerre, nous nous sommes dit « Ça y est, on lance lexpo ». Des collectes daides avaient lieu à « Celula de Artă » et à « Carol 53 », la galerie qui accueille lexposition, lorsque celui qui en est le coordinateur, Daniel Loagăr, ma dit « Raluca, allez, on va faire cette exposition, « Bombe și oameni/Des bombes et des gens ». Sitôt dit sitôt fait. Nous avons contacté les artistes qui ont tous accepté lidée. Il y en avait même quelques-uns à avoir déjà travaillé sur le thème de la guerre. Un artiste de Bessarabie, Valeriu Șchiau, que jaime beaucoup, avait créé cette œuvre exceptionnelle sur les conflits passés en Ukraine, quil expose dans notre exposition. Sinon, la plupart des artistes ont créé des œuvres spécialement pour nous. Beaver est lauteur de laffiche et de la couverture Facebook et Instagram. Alexandru Ranga a fourni une sculpture très intéressante. Les sculpteurs Denis Nanciu et Mircea Diaconu ont réalisé des objets en métal. Le graphiste Ștefan Radu Crețu, qui est une vieille connaissance personnelle, a réalisé et posté sur Instagram des dessins sur cette guerre. Un reporter de guerre, Alfred Schupler, nous a offert des photos bouleversantes du conflit. Maria Scarlat Malița est lauteure dun photoreportage de la manif des Roumains à Paris. Trois artistes ukrainiennes travaillaient déjà avec Daniel Loagăr dans le projet « NeoNlitic », qui a inclus des artistes des Balkans et des zones voisines. Une dentre elles a contacté des collègues, des connaissances et des amis, qui lui ont tous répondu affirmativement. Puisquil est impossible de recevoir quoi que ce soit dUkraine, on peut seulement y envoyer des aides, ils nous ont envoyé des textes, des photos, des dessins extrêmement bouleversants. Cest comme ça que nous sommes arrivés à ce chiffre de 18 artistes dUkraine. »




    Lartiste coorganisateur de lexposition, Daniel Loagăr, a lui-aussi expliqué la démarche à lorigine du projet et la complexité des œuvres exposées: « Cest une exposition qui exprime notre solidarité, notre empathie et notre soutien pour nos voisins et amis. En fait, il y a deux ans, à travers latelier « Wood Be Nice » où je travaille, javais réalisé un projet international, « NeoNlitic 2 », impliquant des artistes ukrainiens et roumains. Je me suis lié damitié avec plusieurs artistes de Cernăuți/Tchernovtsy, et maintenant, que la guerre leur a frappé à la porte, nous leur avons offert notre aide. À partir du deuxième ou troisième jour de guerre, nous avons constamment collecté des aides, des dons ; tous les deux jours, nous avons envoyé un fourgon rempli daliments, de médicaments, de vêtements chauds, à Cernăuți et même au-delà, le dernier véhicule envoyé est arrivé dans la zone de Kiev, si jai bien compris. « Bombe și oameni » est le fruit dune collaboration avec la commissaire dexposition Raluca Ilaria Demetrescu. Un soir, on parlait des menaces actuelles, la menace nucléaire, pour être plus précis, lorsque jai proposé ce projet à Raluca, qui en a dailleurs dautres, appelés « Dulciuri și oameni/Des gourmandises et des gens », « Flori și oameni/Des fleurs et des gens». Elle a tout de suite été daccord et sest mise à contacter des artistes de Roumanie, qui se sont impliqués dans le projet. Moi-même, jen ai contacté dautres, ainsi que les artistes dUkraine, pour lesquels jai reçu laide de mon collègue de latelier « Wood Be Nice ». Concernant les techniques employées, nous avons tout accepté, nous avons des sculptures, des linogravures, de lart graphique, des installations vidéo, des films. Nous avons demandé aux artistes de créer en sappuyant sur ce quils ressentent, sur ce quils pensent en ce moment. Évidemment, nous sommes tous contre la guerre et nous essayons de soutenir nos voisins ukrainiens. Cest un message despoir, de solidarité, damitié, et je crois quil faudrait transmettre aussi un message de ras-le-bol, quil faut arrêter tout ça. Touts les artistes ont accepté de vendre leurs créations, un cinquième du prix dachat ira à lUkraine. »



    Raluca Ilaria Demetrescu a insisté sur les événements actuels, sur le côté caritatif du projet et sur lavenir: « Cest un état durgence, une crise locale et planétaire. La guerre contre lUkraine est le thème rassembleur de tous ces artistes, qui ont travaillé en toute hâte. « Bombe și oameni. Artiști uniți împotriva războiului/Des bombes et des gens. Artistes unis contre la guerre » est à la fois une exposition-manif et une exposition caritative. Elle est ouverte dans un espace underground, justement pour en souligner lurgence. Quand on a quelque chose durgent à dire, on ne va pas dans un endroit confortable, propre, cest pas ça du tout. Tous ces artistes ont travaillé spécialement sur ce thème, sétant concentrés à une majorité écrasante sur la guerre déclenchée par Poutine. Cest une guerre faite par des hommes, agressifs et forts, contre des femmes, des enfants, la population civile, contre un peuple qui ne les gênait en rien, qui voulait tout simplement se rapprocher de lEurope. Pour le vernissage, nous avons eu une sorte de billet dentrée, qui était en fait sous forme daides pratiques, du genre boites à conserve, aliments non périssables ou produits dhygiène personnelle, pour les victimes de la guerre et les réfugiés dUkraine. Nous avons déjà vendu plusieurs créations des artistes et la possibilité den acheter est toujours dactualité. Nous avons donc ramassé un peu dargent qui nous permettra dacheter des objets dont les réfugiés et les victimes de cette guerre ont besoin. Cest aussi un message de paix et une protestation contre cette guerre, qui doit cesser maintenant. Quant aux artistes, ils peuvent, bien-sûr, continuer le travail, mais cela dépendra des espaces dexposition libres. Ce qui est sûr cest que les artistes continueront à travailler sur ce thème. Et puis, noublions pas que nous sommes tous vulnérables, à tout moment. », a conclu Raluca Ilaria Demetrescu, commissaire de lexposition « Bombe și oameni. Artiști uniți împotriva războiului/Des bombes et des gens. Artistes unis contre la guerre ». (Trad. Ileana Ţăroi)


  • L’école des anciens

    L’école des anciens

    Mariana Mereu a grandi dans le village de Geoagiu de Sus, dans le département d’Alba (centre), au sein d’une communauté attachée aux traditions, dans laquelle la couture, le tissage, les danses et les chants traditionnels avaient une place centrale. Aujourd’hui elle continue de promouvoir ces traditions. Pour ce faire, elle a participé à des foires du tourisme, des expositions et conférences thématiques et a fait l’acquisition d’une importante collection ethnographique. Mariana Mereu a aussi organisé « l’Ecole des anciens » (Şcoala bunicilor), où ceux qui le désirent peuvent apprendre l’art de tisser, de coudre ou de cultiver et travailler le chanvre afin de fabriquer des objets artisanaux.


    Mariana Mereu a fait de sa maison une école, « l’Ecole des anciens », un lieu de transmission des traditions :



    « J’ai toujours gardé et pris grand soin de mes costumes traditionnels, je n’ai jamais rien jeté parmi les vieux objets de la maison. Le métier à tisser à toujours fait partie des meubles et ma mère et ma grand-mère l’utilisaient. J’ai pris goût au tissage, à la couture et au filage de la laine. J’adore ça, si je pouvais je ne ferais que ça. J’aimerais que tout le monde puisse apprendre, les enfants, les gens de tout âge et de tout horizon. Même ici, au village, j’ai organisé des veillées et des ateliers. »



    Mariana Mereu constate, à regret, que ce sont surtout les étrangers qui s’intéressent à ces traditions.



    « L’année dernière nous avons accueilli une famille de Français à qui nous avons appris à coudre et à tisser, et qui s’est rendue dans la région du Maramureş (dans le nord de la Roumanie) pour apprendre à faucher l’herbe. Ils ont payé afin d’apprendre tout ça. Voilà où nous en sommes aujourd’hui ! Très peu de jeunes savent encore faucher de nos jours, car tout est automatisé. Ils peuvent le faire s’ils sont payés, car ils ont besoin de gagner leur vie comme tout le monde. »



    Mariana Mereu nous a raconté avec passion comment elle cultive le chanvre, le file et le tisse, et son envie de partager ces traditions ancestrales avec les autres. Pour le reste, elle fabrique des serviettes et costumes traditionnels en fibre de chanvre.



    « Cela fait maintenant sept ans que je cultive le chanvre. J’ai commencé sur le métier à tisser chez une dame qui n’est plus là aujourd’hui, et qui avait du chanvre dans son grenier. Ce n’est pas une mince affaire. Il faut obtenir des autorisations, c’est très difficile. Et quand on croit que tout est réglé, un nouveau problème se présente. La préparation du chanvre aussi est un sacré travail. Il faut le faire sécher, puis faire de petits paquets que l’on met de nouveau à sécher, avant le rouissage. On recouvre le tout de pierres afin de les maintenir sous l’eau, et après une semaine, lorsque la fibre commence à se détacher de la tige, alors c’est qu’il est prêt. On recueille la fibre, on la nettoie et on la met de nouveau à sécher. Lorsqu’elle commence à joliment blanchir, on peut la tiller, la peigner, la filer et la travailler. C’est un processus long et fastidieux, mais cela vaut la peine. On fait quelque chose de ses propres mains, à partir d’une plante, faire une blouse roumaine, c’est magique ! Honnêtement, je ne fais pas ça pour l’argent. Personne ne semble apprécier ce travail à sa juste valeur. Cela m’affecte, et si je ne reçois pas le juste prix, je renonce et je me contente de faire des cadeaux. »



    Mariana Mereu regrette que le travail effectué par les femmes et les jeunes filles désireuses de partager ces traditions ne soit pas reconnu à sa juste valeur.



    « Par exemple, lorsque l’on demande 50 lei (10 euros) pour une paire de bas de laine ou en fibre de chanvre, les clients trouvent ça trop cher. Mais une paire de bas ne se fabrique pas en une journée ! L’été, les bas de laine empêchent la transpiration, car la laine est vide à l’intérieur, comme les macaronis, idem pour le chanvre. Cela tient chaud en hiver, et permet de rafraîchir en été. »



    Puisqu’elle travaille le chanvre, Mariana Mereu a décidé de créer une fête en son honneur. C’est ainsi qu’elle a célébré l’été dernier la 4ème édition de la Journée du chanvre, à laquelle ont aussi pu participer les touristes. Les plus curieux ont pu découvrir l’ensemble du procédé, de la plantation à la récolte de la fibre utilisée dans la fabrication de vêtements, de tissus et de costumes traditionnels, à l’époque où chaque foyer cultivait et travaillait son propre chanvre.


    Notre interlocutrice espère voir ces traditions retrouver du soutien.



    « Je souhaiterais vraiment que les responsables politiques décident de rémunérer les artisans qui effectuent ce travail, ainsi que ceux qui souhaitent l’apprendre. J’ai cru comprendre que c’était le cas dans d’autres pays. C’est une bonne motivation pour ceux qui travaillent, cela les encourage à continuer. Ils n’ont pas à avoir honte d’être paysans, ni d’être roumains. Ils ne doivent pas oublier leur langue, leur tenue vestimentaire, car on dit que la culture d’un peuple doit se porter tel un vêtement de fête ! De quel vêtement de fête parle-t-on ici ? Du costume traditionnel ! J’encourage tout le monde à essayer, au moins une fois, de tenir une quenouille entre les doigts, à voir à quoi ressemble un mouton. Si l’on ne sait pas faire tout ce travail, on n’a aucun moyen d’en apprécier le résultat. »



    Mariana Mereu et les membres de son association sont convaincus du potentiel touristique de la région et du talent de ses artisans. C’est pourquoi ils souhaitent que Geoagiu de Sus soit la plus visible possible sur la carte culturelle et touristique du département.


    (Trad : Charlotte Fromenteaud)

  • La vie est une exposition ou l’exposition est un mode de vie ?

    La vie est une exposition ou l’exposition est un mode de vie ?


    Ils sont artistes, de Roumanie et d’Allemagne,
    et ont choisi de rester ensemble pendant la pandémie plutôt que de jouer les ermites.
    Lorsque plusieurs artistes passent autant de temps ensemble, à discuter, à explorer
    les espaces urbains ou à partager leur chambre, rien d’étonnant à ce que cela
    donne lieu par la suite à une exposition. Rien d’étonnant non plus que dans cette
    exposition les artistes partagent leur expérience de groupe : le personnel
    vs le collectif, l’universel vs l’individuel, le privé vs le public, le temps
    libre vs le travail. Catinca Tăbăcaru et Daniela Pălimariu relatent l’exposition
    Staycation et le projet dans son ensemble au micro de RRI.


    Catinca Tăbăcaru : « Staycation est né de la pandémie car nous avions tous besoin de
    trouver un espace de détente, un espace bien à nous, tout en restant chez nous.
    Nous l’avions envisagé comme une rencontre, non comme une exposition. Nous nous
    sommes réunis en juillet. Nous étions 6 artistes de Berlin et 6 de Roumanie. Avec
    Daniela Pălimariu de Sandwich et Rachel Monosov du collectif CTG, nous avons décidé
    de passer 7 jours ensemble. Nous étions 12 artistes, 12 personnalités créatives,
    nous avons fait notre propre pain, nous nous sommes promenés dans le delta de Văcăreşti,
    nous avons refait le monde pendant des heures, en parlant de l’écologie, de la
    pandémie et de la vie en général. »



    Daniela Pălimariu nous explique comment l’équipe
    s’est organisée : « Chacune de nous
    trois, Catinca, Rachel et moi-même, devions proposer un nombre de jeunes artistes
    en devenir, venus de Bucarest ou de Berlin. Nous en connaissions certains, d’autres
    avaient simplement éveillé notre curiosité. C’est comme ça que notre groupe s’est
    un peu créé tout seul. Les liens se sont tissés entre nous, notre relation s’est
    approfondie. Nous avons pris ce temps-là en juillet, et c’est ainsi que l’exposition
    a pu voir le jour. Nous voulions que les artistes travaillent différemment, sur
    différents sujets, avec un angle différent. Nous cherchions un genre d’artiste,
    des artistes vraiment impliqués, prêts à s’investir sur le long terme. Ce genre
    de chose se reflète dans leur pratique et leur façon de travailler, mais aussi
    dans leur façon de communiquer et dans leur professionnalisme. On observe que
    les très jeunes sont éduqués et prêts à entretenir la relation sur le long
    terme.
    »


    Catinca Tăbăcaru nous raconte comment les
    artistes ont découvert le meilleur moyen de collaborer et de communiquer : « J’ai
    participé à de nombreuses résidences, et l’on ressent systématiquement une
    forme de frustration, de tension. Cette fois-ci nous avons choisi des artistes
    aussi bien pour leur activité que pour leur élégance, leur ambition et leur générosité.
    Nous sommes partis de l’idée de ralentir notre rythme, car nous subissons tous
    ce rythme frénétique, nous avons pris le parti de tout faire beaucoup plus
    lentement : nous sommes allés au marché, nous avons acheté directement nos
    produits auprès des agriculteurs, nous avons cuisiné ensemble, nous avons
    discuté de sujets importants pour notre nous, nous nous sommes promenés dans le
    delta de Văcăreşti, c’était l’un des meilleurs moments d’ailleurs, et nous avons
    dormi. L’une des artistes, originaire de Taïwan, a créé une méditation à
    laquelle nous avons tous pris part. L’idée étant de méditer tous ensemble, de
    dormir ensemble et de rêver ensemble. En tant qu’adulte on a rarement ce genre
    d’idée. Les enfants, eux, dorment ensemble, mais nous les adultes, très peu.
    Nous avons donc tout mis en place pour créer cette atmosphère de bien-être et d’écoute,
    laissant de côté la parole et les anciennes habitudes, même s’il nous est
    arrivé de beaucoup discuter
    . »

    Yen Chun Lin, Isabella Fürnkäs, Lexia
    Hachtmann, Bethan Hughes, Lera Kelemen, Barbara Lüdde, Catinca Mălaimare,
    Rachel Monosov, Daniela Pălimariu, Ana Pascu, Ioana Stanca, Ana-Maria Ștefan sont
    les artistes ayant participé au projet. Le résultat de cette expérience peut
    être admiré à la Galeria Catinca Tăbăcaru et chez Sandwich Malmaison jusqu’au 12
    février. Qu’y verra le public ? Daniela Pălimariu répond : « La
    deuxième galerie, Sandwich of Space, est une extension de la galerie Sandwich
    inaugurée en 2016. Les travaux exposés dans ces deux espaces sont différents. On
    y trouve des installations de tailles variées, des peintures, des sculptures,
    des céramiques, des installations vidéo, ou encore la performance de l’artiste Catinca
    Mălaimare, visible dans l’espace Sandwich of Space, dans l’immeuble de Malmaison,
    au 2e étage. Il s’agit d’une seule et même exposition, visible dans
    deux espaces différents. Evidemment, beaucoup d’œuvres sont inspirées de l’expérience
    vécue l’été dernier et des liens que nous avons tissés à ce moment-là. On retrouve
    beaucoup de références claires et concrètes au groupe, le nombre 12 apparaît
    dans beaucoup d’œuvres ou images de cette expérience commune. Mais cela reste subtil,
    et chaque artiste a eu carte blanche pour exprimer son propre ressenti sur
    cette expérience, ce qui s’observe dans les travaux de chacun.
    »

    L’exposition est la partie la plus visible
    du projet. Elle est le point d’orgue de ce symposium de l’été 2021, au cours
    duquel les participants de sont rencontrés et ont découvert la ville de
    Bucarest. Les artistes ont trouvé un moyen de survivre à la pandémie, sans se
    perdre en chemin, et c’est le plus important. (Trad. Charlotte Fromenteau)





  • Le Club sportif des arts

    Le Club sportif des arts

    Aujourdhui, nous vous invitons à nous accompagner dans un établissement culturel privé, ouvert en 2018 : le Musée dart récent de Bucarest (MARe). Depuis mai dernier, une exposition inédite y est présentée, et nous en avons parlé avec lhistorien de lart Erwin Kessler, directeur et fondateur du Musée dart récent. Cette exposition sappelle « Le Club sportif des arts » (« Le sport dans lart roumain de 1900 à nos jours »).



    Lexposition, qui retrace le paysage très diversifié de lintérêt artistique pour le sport et léducation physique dans la culture visuelle de notre pays, présente 53 œuvres dart (peinture, dessin, sculpture, photographie, vidéo, installation), réalisées par 48 artistes roumains, provenant des collections de 12 musées du pays (dont MARe), de neuf collections privées et de quatre galeries dart, nous dit Erwin Kessler :



    Erwin Kessler : « Cest la plus ample collaboration que nous ayons eue à ce jour. Parmi les œuvres que nous exposons, il y a des œuvres du patrimoine national, voire des œuvres figurant au Trésor national, et les amener au Musée dart récent a été un effort considérable pour nous. Il sagit dune exposition couvrant une vaste période, de 1900 à 2021. Nous lavons préparée en 14 mois environ et jai réalisé à un moment donné quil y aurait un chevauchement cette année entre deux événements sportifs, les Jeux olympiques de lannée dernière et le Championnat dEurope de football. Et nous avons pensé que si de toute façon la Roumanie nest plus une force sportive, il était bien de montrer quels résultats la société roumaine a obtenus en sport au siècle précédent. »



    Une association moins commune entre lart et le sport, donc.

    Erwin Kessler : « Honnêtement, tout le monde a été surpris. Cela semble une contradiction – pourquoi soccuper du sport quand vous vous occupez de lart ? Eh bien, lart sest occupé du sport, et cela, nimporte qui peut le voir même sans venir à lexposition – parce que nous avons aussi fait un catalogue, un catalogue tout à fait spécial point de vue aspect. Cest un stade, où il ny a pas que des photos, mais aussi des introductions dans lhistoire de lart roumain qui sest rapporté au sport. Il est instructif sur tout un processus qui commence quelque part à la fin du XIXe siècle, au début du XXe siècle, lorsque, avec lart, élément essentiel de lessor de la société roumaine, les premiers clubs sportifs commencent à acquérir une visibilité sociale aussi. Lart et le sport sont dans le même bateau de la modernisation. Ce sont des vertus. »



    Parmi les artistes célèbres qui ont reflété les domaines sportifs délite, Erwin Kessler a mentionné Ştefan Luchian, Nicolae Grigorescu, se référant à léquitation – mais aussi Victor Brauner ou Hans Mattis-Teutsch, en se référant à la boxe. Lexposition illustre également la seconde moitié du XXe siècle, pendant laquelle les artistes qui reflètent le sport dans lart sont plutôt tributaires à la propagande communiste. Ensuite, nous arrivons à lactualité.

    Erwin Kessler : « Après 1989, les jeunes artistes en particulier, les artistes critiques, voient tout dun coup le sport sous un angle complètement différent, et cest ce que notre exposition montre. Une optique qui transforme le sport dune vertu en un vice, à la fois à lépoque communiste, qui manipule le sport – tout ce qui relève de la conscience aussi bien que des pratiques en matière déducation physique. La critique devient un levier entre les mains de jeunes artistes dans labolition des éléments positifs du sport. La deuxième aile de notre exposition, laile de laprès-1989, est éclairante à cet égard : des œuvres dures, qui montrent la commercialisation du sport. »



    Nous avons demandé à Erwin Kessler de nous présenter quelques-uns des objets exposés les plus provocateurs : « Parmi les œuvres les plus provocatrices que nous présentons, je pourrais vous parler dune collection tout à fait exceptionnelle et, jusquà présent, inédite. Elle comporte toutes les cartes de légitimation du club de Gheorghe Dinu, anciennement Stephan Roll, qui a été un sportif de gauche, depuis la période de lentre-deux-guerres. Nous surprenons le parcours de cet avant-gardisme par les cartes de légitimation des clubs, qui sont des cartes bourgeoises – jusquaux cartes de légitimation des clubs communistes. Cela fait état dune certaine continuité idéologique : le sport prôné par les avant-gardistes est un sport qui prépare le corps de lartiste-athlète à la véritable confrontation, celle avec les forces de lordre, pour la mise en œuvre de la révolution. Tel est laspect essentiel de la préparation sportive de lavant-gardiste : la capacité de résister à la répression, de préparer un corps valide pour la révolution prolétarienne. Cest une pièce importante qui peut passer inaperçue – mais historiquement, cest très évocateur. »



    Et Erwin Kessler dajouter : « Dans lart contemporain, je dirais que lune des pièces les plus fortes que nous ayons, cest le film dIon Grigorescu de 1977, qui sintitule « Boxe ». Un film dartiste, un film réalisé avec de léquipement en grande partie fabriqué par lartiste-même, un film extrêmement robuste, un film dans lequel lartiste est battu à plates coutures par sa propre ombre. Il sest filmé en deux hypostases en même temps, elles se superposent. Avant 1977, cette idée davoir peur de sa propre ombre était un phénomène généralisé pour la société communiste. De lart contemporain, je pense que ce qui mérite lattention, cest lune des toiles les plus intéressantes que nous présentons, appartenant à Ştefan Constantinescu, « Une salle de gymnastique », daprès une photo trouvée dans les années 80. Une salle de gym typiquement communiste, peinte dans les années 90, une salle comme une cathédrale dédiée à de nouvelles pratiques quasi-religieuses, dans laquelle les jeunes font du sport alignés comme par détachements. Et je parlerais encore dune œuvre très intéressante, tirée dune collection privée cette fois – un boxeur de Hans Mattis-Teutsch, une œuvre extraordinaire des années 50, du temps de la guerre, dans laquelle lartiste tente de réunir à la fois le caractère élitiste des sports de lentre-deux-guerres, et nous avons un boxeur avec un short presque empesé, avec les vertus prolétariennes. »



    Lexposition reste ouverte jusquau 19 septembre. (Trad. : Ligia Mihaiescu)


  • Ancien et nouveau au Musée national d’histoire de Roumanie

    Ancien et nouveau au Musée national d’histoire de Roumanie

    Posons le cadre de notre visite culturelle du jour : dans le vieux centre de Bucarest, on s’approche d’un imposant bâtiment de style néoclassique aux influences françaises. Construit au début du 20-e siècle pour abriter le Palais des postes et des télégraphes, il accueille aujourd’hui le Musée national d’histoire de Roumanie. A l’intérieur, en plus d’une exposition permanente qui vous donnera quelques clés de compréhension de l’histoire roumaine, vous pouvez visiter une exposition surprenante et même émouvante, qui met ensemble le très ancien et le moderne : NeoNlitic 2.

    Pour en parler, nous avons tout d’abord invité au micro l’un des deux initiateurs et organisateurs du projet, l’artiste Daniel Loagăr, de l’Association Wood Be Nice : « Le concept NeoNlitic, l’idée a la base de l’exposition, est parti d’une exploration personnelle. Je lisais sur Picasso qui est allé vers le cubisme après avoir visité une exposition de masques africains et ibériques. Nous avons alors pensé que nous aurions nous aussi, peut-être, des sources d’inspiration dans notre histoire qui attendaient d’être montrées au public. Nous sommes remontés loin dans le temps, jusqu’au néolithique. On connaît Cucuteni, la céramique de Cucuteni, on connaît Hamangia par la figurine du penseur de Hamangia, mais il y a plein d’autres choses qu’on ne connaît pas. Nous proposons alors cette période comme source d’inspiration, aux artistes et à nous-mêmes. NeoNlitic est cette année à sa deuxième édition et est devenu international. La première édition s’est déroulée en Roumanie avec des artistes roumains et a exploré les cultures de Hamangia et de Cucuteni. Cette année, nous avons suivi les traces de la culture de Cucuteni en Ukraine, où elle est appelé Trypillia, et celles de la culture de Hamangia en Bulgarie, dans sa période tardive. Nous nous sommes également intéressés à la culture de Varna. Une des raisons de choisir la période néolithique comme source d’inspiration est notre conviction que cette période est celle du début de l’homme moderne et même du début de l’art dans le monde. »

    La culture de Cucuteni-Trypillia a donné naissance à l’une des plus anciennes civilisations d’Europe (5e et 4e millénaires avant notre ère). Elle est nommée d’après deux villages, dont l’un près de Iași, dans le nord-est de la Roumanie, où ont été découverts, en 1884, les premiers vestiges archéologiques, et l’autre en Ukraine. La culture de Cucuteni-Trypillia s’étendait sur une partie des territoires de la Roumanie, de la République de Moldavie et de l’Ukraine actuelles. La culture de Hamangia est une culture du néolithique moyen (4e et 2e millénaires avant notre ère) qui prend son nom d’un ancien village de la région de Dobroudja, dans le sud-est de la Roumanie. La culture de Hamangia s’est développée dans l’actuelle province de Dobroudja et, dans sa période tardive, dans le nord-est de la Bulgarie.

    L’autre co-organisateur de l’exposition NeoNlitic, l’artiste Andrei Cornea, de l’Association Wood Be Nice, nous a parlé des artistes étrangers qui ont pris part à cette édition du projet et des œuvres d’art contemporain exposées au Musée d’histoire de Roumanie : « Cette année, pour la deuxième édition de NeoNlitic, nous avons travaillé avec 16 artistes de Bulgarie, d’Ukraine et de Roumanie. Les artistes roumains restent les plus nombreux. L’expo comprend des œuvres utilisant des techniques mixtes, de la sculpture, du mapping vidéo, des installations, du collage, de la peinture, de la linogravure. Notre invitation a constitué un défi pour les artistes, mais qu’ils ont relevé. Il y en a qui se sont surpassés, si je fais un parallèle avec la première édition de 2018. Nous avons essayé des techniques nouvelles, les artistes ont fait des œuvres qui les sortaient de leur zone de confort, bref, c’est un succès. En plus, le public a bien accueilli les deux éditions. Cette année, le projet a eu un caractère itinérant et s’est finalisé avec une expo dans chacun des trois pays. Nous avons démarré en Bulgarie, au Musée régional d’histoire de Varna, début octobre. Ensuite nous sommes allés à Tchernivtsi, en Ukraine, à la Galerie Vernissage. La troisième et dernière expo du projet, pour cette année du moins, est celle du Musée national d’histoire de Roumanie, à Bucarest, du 14 au 28 novembre. »

    Andreea Bîrzu, muséographe au Musée d’histoire de Roumanie, décrivait le projet comme une opportunité pour le Musée de s’ouvrir vers un public plus jeune. Quant à l’implication du Musée dans NeoNlitic, écoutons Andreea Bîrzu : « C’était un honneur et une grande joie de travailler avec l’association Wood Be Nice sur ce projet. Le Musée national d’histoire de Roumanie présente, dans l’exposition NeoNlitic, 20 artefacts chalcolithiques – des figures anthropomorphes et de la céramique appartenant aux cultures de Gumelnița et de Cucuteni. Ce sont des pièces d’une grande valeur historique et esthétique. Nous avons choisi de les présenter en pensant que ça montrera bien l’influence de l’art préhistorique sur l’art contemporain – notamment sur les œuvres présentées dans l’exposition. »

    Gumelnița est une culture néolithique située, historiquement, vers le début du 5e millénaire avant notre ère. Sa répartition géographique comprend la Munténie (au sud de la Roumanie, près de la rive gauche du Danube, sur le territoire de l’ancienne culture de Boian), la Dobroudja (où s’était épanouie la culture de Hamangia), ainsi que le Boudjak en Ukraine, au nord du Delta du Danube. Au sud, elle occupait la plupart du territoire de la Bulgarie d’aujourd’hui, jusqu’au nord de la Grèce. Pour finir, l’artiste Daniel Loagăr nous a partagé quelques-unes des difficultés rencontrées pour organiser un projet international durant une période faite de règles et de restrictions dues à la crise sanitaire : « Nous avons conçu cette deuxième édition de NeoNlitic avant la pandémie. Mais elle s’est déroulée en plein pendant, ce qui a considérablement compliqué la tâche. Nous aurions dû finaliser le projet en juin-juillet, mais en raison du confinement nous avons demandé une prolongation de l’Association du Fonds culturel national, un de nos financeurs. Au-delà de ça, nous avons travaillé avec des artistes de trois pays différents, qui parlent trois langues différentes. Sans rappeler que deux de ces pays utilisent l’alphabet cyrillique, ce qui a rendu les choses quelques peu difficiles pour nous. »

    Si vous n’avez pas déjà visité l’exposition NeoNlitic dans une des trois villes où elle a voyagé, nous vous proposons de vous rendre sur la page Facebook NeoNlitic (https://www.facebook.com/NeoNlitic/ – vous trouverez l’adresse sur notre site internet). Vous pourrez y voir des images et des vidéos, qui montrent cette rencontre entre l’ancien et le nouveau, et juger par vous mêmes de son intérêt. (Trad. Elena Diaconu)

  • Les artistes verriers en ligne

    Les artistes verriers en ligne

    Cela fait 32 ans que les artistes verriers de Roumanie se réunissent chaque année, au Salon du verre, pour présenter leurs créations les plus représentatives. Lancé en 1988 et organisé sous le patronage de l’Union des artistes plasticiens de Roumanie, le salon fut obligé de passer pour la première fois en ligne, en raison de l’actuelle pandémie mondiale. Du coup, les meilleurs artistes verriers roumains se sont donné rendez-vous cette année au sein des Ateliers du Salon du Verre déroulés virtuellement du 29 avril au 13 mai. Toutes les créations ont pu être admirées dans le cadre d’une vidéo de présentation de 25 minutes partagée sur les réseaux sociaux et vue par plus de 2000 internautes.

    A part ce chiffre record, l’édition en ligne du Salon s’est réjouie aussi d’un nombre impressionnant de participants : 54 artistes allant des plus connus jusqu’aux débutants. Le commissaire de l’exposition, Vladimir Cioroiu, nous en parle :« On a contacté tous les artistes verriers, y compris ceux habitant la province, membres des filiales locales de l’Union des artistes plasticiens de Cluj, Buzau et Targu-Jiu, pour leur demander de nous envoyer des photos de leurs créations. De toute façon, même pour une exposition réelle, on aurait dû collecter du matériel photographique pour en faire un catalogue. Toutes ces photos sont à admirer dans une vidéo qui s’ouvre par les propos de la critique d’art Alexandra Craciun. L’occasion de vous dire que dorénavant, toute exposition personnelle ou collective sera organisée pas seulement in situ, mais aussi virtuellement. Car nombreux sont ceux qui n’ont pas la possibilité de se rendre sur place pour voir les œuvres de leurs propres yeux. »

    A part la beauté et l’originalité des créations, le public peut admirer le raffinement des techniques que les artistes-designers utilisent pour travailler le verre et pour le combiner avec différents métaux, comme le fer. Si jadis, les artistes apprenaient leur savoir-faire dans les ateliers des maîtres artisans, à l’heure actuelle, les choses se passent différemment. Vladimir Cioroiu : « Au début, il y a 40-45 ans, il y avait surtout des maîtres verriers qui maîtrisaient le soufflage du verre. C’était la technologie pour ainsi dire traditionnelle. Bien que les hautes technologies n’aient pas pu pénétrer en Roumanie pendant le régime communiste, on a compensé avec notre créativité et du coup, les œuvres roumaines ont impressionné les Occidentaux. A présent, on bénéficie enfin de tous les moyens modernes pour travailler le verre. Un salon comme le nôtre offre l’occasion de passer en revue toutes les techniques depuis celles traditionnelles et jusqu’à celles avant-gardistes, telle la fusion. Le verre se laisse modeler aussi bien au chaud qu’au froid… On peut le couper, le ciseler, le graver… Il y a de nombreuses techniques que l’on utilise en même temps et ça, c’est très intéressant. »

    Si toutes ces explications ont attisé votre curiosité, on vous attend en ligne pour pouvoir admirer, ne serait-ce que virtuellement, les créations en verre des artistes roumains.

  • Musique rock et l’esprit de contestation à l’époque communiste

    Musique rock et l’esprit de contestation à l’époque communiste

    Dans les années 1970-1980, jouer ou écouter de la musique rock signifiait se distancer de la ligne musicale officielle du Parti. Mais certains artistes sont allés encore plus loin, bravant les interdits et exprimant de manière explicite leur rejet de l’état de fait. Inspirée de la musique beat en vogue en Angleterre dans les années 1960, le rock roumain se développe timidement, mais prend de l’ampleur dans les années 1970. Le canon musical officiel était certes différent. Car c’est la chansonnette roumaine qui faisait recette à l’époque, des festivals musicaux d’envergure internationale, tels le festival de Mamaia ou le Cerf d’Or, Cerbul de Aur, de Brasov, s’érigeant dans de grandes messes musicales, agréées par le parti. Et puis, en parallèle, on voit naître des troupes comme Phoenix, Sfinx, Timpuri Noi, (Temps nouveaux), ou des solistes tels Dorin Liviu Zaharia, Alexandru Andrieş ou encore Mircea Florian, dont les créations musicales battent en brèche le canon musical officiel, en essayant de raccorder la musique roumaine aux nouveaux courants musicaux en vogue en Occident.

    Pour comprendre ce que représentaient ces courants musicaux pour l’époque, nous avons parlé avec Emil Ionescu, professeur à la Faculté de Lettres de l’Université de Bucarest :« Ce qui impressionne c’est la volonté affirmée et revendiquée, le désir de ces nouveaux artistes de se distancer résolument du canon musical de l’époque et d’affirmer une identité distincte. De ce point de vue, le rock roumain était l’expression d’une forme de contestation marquée de l’establishment politique du moment. Cet élément a son influence sur l’évolution de la société toute entière, sur l’évolution d’une génération, car à la différence de la poésie, qui touche moins de gens, la musique en général, le rock en particulier, manifestent une formidable capacité de mobiliser les jeunes, de les faire vibrer à l’unisson avec, en toile de fond, le désir de contester l’ordre établi. Je pense notamment à plusieurs chansons du groupe Sfinx, surtout deux – « Nu ne temem »/« On n’a pas peur » et « Horă de băieţi »/«La ronde des garçons ». Mais, pour moi, le summum de la contestation rock des années 1980 reste « Trenul fără naş », « Le train sans contrôleur », du groupe Iris. »

    Néanmoins, les artistes avaient peu d’opportunités pour exprimer leur révolte, conscients qu’ils étaient de vivre et de devoir se produire au sein d’un système fondamentalement totalitaire et répressif. Emil Ionescu nous parle des limites intrinsèques de la contestation :« C’est difficile de préciser les limites de cette liberté de l’expression artistique musicale de l’époque. Il est évident que le régime était au courant de ce qui se tramait dans le domaine. Cela, pour moi, c’est très clair. Mais ce qui reste c’est que ces gars-là, des groupes tels Sfinx et Iris, et avant eux le groupe Phoenix, ils donnaient la voix à un véritable sentiment de révolte. Parfois habillé dans des formes subversives, parfois de manière directe. La période des Phoenix a été une période de contestation explicite. Prenez « Mamă, mamă », et bien d’autres. Ou le « Train sans contrôleur ». Car tout le monde saisissait de qui l’on parlait, qui était le contrôleur du train. « La ronde de garçons » exprimait en revanche une révolte subliminale, cachée. Le groupe Sfinx toujours a été capable de lancer la pièce « On n’a pas peur », une œuvre d’un raffinement exceptionnel. »

    Mais, comme à l’accoutumée, pour qu’une pièce rencontre son public, il fallait qu’elle ait aussi bien des paroles qu’une musique qui soient attractives. Mais pour pouvoir contester le système, il lui fallait encore quelque chose de plus. Emil Ionescu :« Les paroles ont trouvé leur public, l’ont fait vibrer, parce qu’elles avaient été mis sur des notes. C’est le pouvoir magique de la chanson. Jouer dans un club devant 200-300 personnes c’est les faire vibrer à l’unisson, créer une cohésion, les faire résonner autour d’un même esprit, des mêmes valeurs partagées. Et la période la plus prolifique du groupe Phoenix a été la période où il avait dû se réinventer, se redécouvrir, au moment où il était bannis des ondes, presque totalement interdit. Et tout cela c’est grâce aux formidables textes du grand poète Şerban Foarţă ».

    Phoenix a été perçu comme le groupe le plus rebelle du lot. Quittant la Roumanie communiste en 1977, ses membres ont laissé derrière eux un double « 33 tours » avec leur chef-d’œuvre rock, intitulé « Cantafabule », unanimement considéré comme le summum du rock roumain de tous les temps. Mais la période morne et triste des années 80 a aussi porté atteinte à la capacité de contestation du rock roumain. Emil Ionescu :« « Cantafabule », ce chef d’œuvre du groupe Phoenix, sort du lot, parce que là il n’y avait même plus de contestation explicite du canon consacré. Phœnix y affirmait carrément une nouvelle identité musicale, lançant un nouveau genre, celui de l’ethno-rock roumain. C’était un genre difficilement contestable par les idéologues du parti. Le parti, la censure n’étaient pas suffisamment armés pour pouvoir contester cela, ne trouvaient pas l’élément de culpabilité qui leur aurait permis d’interdire cette musique. Le texte parlait du Moyen Âge, des animaux mythiques, alors que la musique lançait un nouveau style, contrastant complètement avec le quotidien gris et morose des Roumains. C’était quelque chose d’inouïe. C’était faire une ouverture, une brèche dans le quotidien morose, pour laisser entrevoir un monde inattendu et fabuleux. C’était donner de l’espoir d’un ailleurs différent ».

    Quoi qu’il en soit, le rock de ces années-là a représenté une indispensable bouffée d’oxygène pour un peuple aux abois. (Trad.: Ionut Jugureanu)

  • Des hommes rue Mătăsari

    Des hommes rue Mătăsari

    L’automne est la saison des festivals. Il est pourtant vrai que d’habitude, quand on dit ça, on pense surtout aux festivals de la moisson, organisés pour célébrer le travail agricole et ses résultats. Cette fois-ci, nous restons pourtant en ville, rue Mătăsari, à Bucarest, pour un festival des hommes. En été, cette rue accueille le festival « Des femmes rue Mătăsari ». Cette édition automnale, baptisée « Des hommes rue Mătăsari » est consacrée aux petits artisans et artistes dont les boutiques dirigées par des hommes ont envahi la capitale.

    Quelle est l’origine de ce festival ? Iulian Văcărean, fondateur de l’association Beneva, organisatrice de plusieurs événements de ce genre, explique : « C’est une année où nous considérons que les hommes et les femmes sont pareils, bien que l’on parle beaucoup en ce moment de leurs différences. Ainsi, après huit éditions du festival « Des femmes rue Mătăsari », nous avons osé proposer une première édition pour célébrer nos artisans, nos artistes, nos designers, qui font de si belles choses. Nous allons les réunir rue Mătăsari – une rue pas du tout comme les autres.»

    Qui va-t-on y rencontrer ? Iulian Văcărean: « De vieux artisans, comme Daniel Leş, qui viendra avec sa roue de potier, des forgerons, qui viendront travailler le fer dans la rue et puis des hommes pratiquant des métiers artistiques nouveaux : designers, créateurs qui travaillent la peau, hommes qui dirigent des agences de publicité, musiciens, peintres. Ce sera une rue de l’amitié. « Friends Forever » est censé lier d’amitié les créatrices et les créateurs. »

    Ce qui est d’ailleurs déjà arrivé. Artistes et artisans en tous genres et des deux genres se sont donné rendez-vous rue Mătăsari : caricaturistes qui travaillaient dans la rue sous le slogan : « Si personne n’a encore ri de vous, c’est toujours possible », designers de vélos personnalisés, représentants du fabricant de bicyclettes Pegas. Et, par-dessus tout, des créatrices enchantées d’avoir connu le succès. »

    Simona Gonciulea nous explique la raison de sa présence au festival « Des hommes rue Mătăsari »: « C’est parce que j’ai aussi des produits pour eux : serviettes en cuir, pochettes ceinture, chaussures tressées et je suis venue les présenter. J’en ai vendu et j’attends aussi des commandes en ligne. »

    Cristina, designer vestimentaire présente depuis peu de temps sur le marché et fan du festival « Des femmes rue Mătăsari », a voulu profiter de son édition consacrée aux hommes pour se faire connaître : « J’ai présenté une collection vestimentaire pour enfants de 1 à 7 ans, une collection minimaliste, unisexe, en nuances de noir, beige, gris, la seule couleur utilisée étant le jaune. J’ai choisi de participer au festival « Des hommes rue Mătăsari » parce que j’aime ce festival, qui réunit beaucoup de gens bien. Je suis venue maintes fois à ce festival, mais j’ai lancé ma propre affaire il y a 7 mois seulement. Ayant raté le festival d’été, j’ai tenté ma chance à ce festival des hommes. »

    Iulian Văcărean souligne le caractère pas du tout exclusif de l’événement : « Cet événement n’est pas réservé aux hommes. Nous souhaitons tout simplement les mettre en valeur, dans ce monde où la séparation des genres est de plus en plus marquée. Dans le domaine de la créativité, les hommes et les femmes travaillent très bien ensemble. »

    Une des épreuves les plus amusantes du festival « Des femmes rue Mătăsari » est la course sur talons hauts, par catégories de taille.

    Quelle est le défi spécifiquement masculin lancé à ce festival des hommes ? Iulian Văcărean : « Couper du bois. Quelqu’un est venu nous enseigner à scier les bûches et à sculpter à l’aide d’une scie électrique. De nombreuses activités captivantes ont été prévues. Puisque c’est l’automne, nous n’avons pas pu rééditer toutes les activités de l’été, mais le festival « Des hommes rue Mătăsari » reste une extension du festival « Des femmes rue Mătăsari ».

    Cette édition s’est déroulée dans la bonne humeur, dans les sonorités des chansons des années ’80, interprétées par des chanteurs connus ou par de jeunes talents. Au-dessus de la rue Mătăsari, envahie par les produits traditionnels, planait l’arôme des boissons et des sucreries faites maison. Autant de raisons de faire des « Hommes rue Mătăsari » un festival automnal annuel. (Trad. : Dominique)

  • Paul Jamet (France) – existe-t-il une association des écrivains et artistes paysans?

    Paul Jamet (France) – existe-t-il une association des écrivains et artistes paysans?

    Il faut tout d’abord préciser que la campagne roumaine ne ressemble point à la campagne française. Les paysans roumains ne ressemblent point aux paysans occidentaux. Les paysans roumains sont des personnes très simples, qui vivent dans des villages plutôt isolés, qui perdent souvent le contact avec la réalité politique, culturelle, économique du pays en l’absence de moyens financiers pour s’assurer une éducation adéquate et une vie décente. En plus, il y a une grande différence entre les paysans roumains qui ont vécu toute leur vie à la campagne et les fermiers qui pratiquent l’agriculture comme une affaire. Donc paysan, fermier et agriculteur n’est pas la même chose en Roumanie. Ces notions peuvent se superposer, mais la plupart des fois elles désignent des catégories sociales différentes.

    Pour ce qui est de la littérature issue du milieu rural, je dois vous dire que j’ai trouvé très peu d’informations à ce sujet. Il existe apparemment une association littéraire des paysans fondée par un écrivain issu du milieu rural… mais elle n’est pas très connue et il m’a été difficile de comprendre si tout se résume à une personne ou s’il y a plusieurs écrivains impliqués dans cette initiative. J’ai aussi trouvé deux ou trois articles dans la presse locale de l’ouest du pays, portant sur un paysan – dans le sens le plus basique du terme – qui a commencé à écrire et à publier des livres dès son départ à la retraite. Les articles datent de 2013 et la personne était déjà nonagénaire.

    Par ailleurs, toujours dans la presse locale de l’ouest de la Roumanie, j’ai trouvé plusieurs articles qui parlaient d’une « génération d’écrivains paysans du Banat », un phénomène unique en Roumanie au début du 20e siècle, lorsqu’il y a eu toute une série d’écrivains, journalistes et même des compositeurs et chefs d’orchestre, sans oublier les ingénieurs ni les inventeurs. Les ouvrages de ces auteurs étaient publiés dans des revues qui circulaient dans les villages, des revues qu’ils finançaient par leurs propres moyens. Et selon le contexte politique de l’époque, les auteurs ont souvent été sanctionnés pour les opinions exprimées. Plusieurs autres écrivains du milieu rural se sont fait connaître dans les années 1950, toujours dans l’ouest de la Roumanie. De nos jours, les écrivains paysans ne sont pas trop nombreux, ce sont plutôt des exceptions. Voilà, c’est tout ce que j’ai pu trouver à ce sujet. Ce serait en fait une bonne idée de venir en aide aux esprits créateurs oubliés du milieu rural, car on ne sait jamais où et quand on pourrait découvrir de véritables trésors. Avant de terminer, je dois préciser aussi que la vie à la campagne est bien présente dans littérature classique roumaine et dans les œuvres plusieurs grands romanciers roumains du début du 20e siècle.

  • Le Festival du film d’histoire de Pessac à Bucarest

    Le Festival du film d’histoire de Pessac à Bucarest

    Du 12 au 14 mai, l’Institut Français de Bucarest accueille les projections des productions les plus appréciées de l’édition 2016 du Festival international du Film d’Histoire de Pessac. Fondé en 1990, le Festival International du Film d’Histoire de Pessac est rapidement devenu un repère de l’agenda culturel de la France et de l’Europe. C’est pour la première fois que le plus important festival du film historique d’Europe est présent à Bucarest. Les films qui seront projetées ce week-end à l’Institut Français de Bucarest tournent autour du thème culture et liberté et sont ciblés sur la condition de l’artiste dans des périodes historiques récentes. Détails avec Pierre-Henri Deleau, acteur et producteur de cinéma français en charge de la sélection des films du festival de Pessac.



  • Un nouveau théâtre privé : Apollo 111

    Un nouveau théâtre privé : Apollo 111

    Fin novembre 2016, un nouveau théâtre privé ouvrait ses portes à Bucarest. Il s’appelle Apollo 111 et c’est le résultat d’une initiative qui appartient à l’acteur Bogdan Dumitrache connu notamment pour le rôle principal dans le film « La position de l’enfant », qui a été rejoint par le réalisateur Calin Peter Netzer, par le directeur de création Catalin Rusu et par le producteur de film Dragos Vâlcu.

    Ce projet est apparu à un moment où les productions de théâtre indépendant sont de plus en plus nombreuses et visibles à Bucarest. Bogdan Dumitrache explique comment cette situation a influencé sa stratégie de management. « Le point de départ de mon idée est le fait que ces dernières années les espaces indépendants se sont multiplié et de nombreux spectacles indépendants cherchent toujours un endroit pour se produire…Bref, je crois que toutes ces manifestations ont créé un nouveau public, ainsi qu’un intérêt pour ce domaine, et que ce public a des attentes croissantes. C’est ce qui m’a fait comprendre le besoin d’un espace qui ne soit pas tout simplement un bar accueillant un petit spectacle de théâtre, d’un espace qui puisse offrir plus en qu’une table et trois lumières. »

    C’est ainsi que Bogdan Dumitrache est parti à la recherche d’un espace économiquement viable. Il a fini par trouver une salle de 850 mètres carrés au cœur de Bucarest, dans le bâtiment appelé « le palais Universul ». C’est un bâtiment qui accueille déjà plusieurs initiatives artistiques indépendantes et qui est en train de devenir un véritable centre culturel. La salle du théâtre Apollo 111 a été divisée en plusieurs sections, à destinations différentes. Le secteur consacré au théâtre contient 127 places pour les spectateurs, un foyer et des cabines pour les comédiens. Bogdan Dumitrache : « Il y a trois compartiments principaux : l’espace théâtre, une cafeteria et une zone administrative, avec des salles de répétitions et des studios de casting. Le secteur des bureaux accueille aussi l’agence de casting que j’ai montée il y a plusieurs années ; je l’ai installée là parce que j’aime grouper mes activités, afin de mieux les contrôler. Pour moi, c’est évidemment un avantage puisque cela m’aide à rester en contact avec la communauté d’artistes accueillie dans cet espace. »

    Le théâtre Apollo 111 propose un répertoire différent de celui des autres établissements théâtraux roumains. Explication avec Bogdan Dumitrache.« Nous avons adopté ce système par le biais duquel un spectacle peut être représenté pendant six semaines, en fonction de la demande du public ; ce qui est une bonne chose, puisque le spectacle a, ainsi, la possibilité de se développer, de grandir, il n’y a pas de temps morts pendant lesquels les comédiens pourraient penser à d’autres projets. Un spectacle s’affine lorsqu’il est programmé souvent. Il devient une machine qui fonctionne bien. Tout le monde interagit avec tout le monde, chacun sait très bien ce qu’il a à faire et c’est ainsi que nous devenons plus efficaces. Je gère ce théâtre avec l’aide de seulement quatre personnes et je n’envisage même pas d’en embaucher d’autres. Il y a trois techniciens et une productrice. Nous nous occupons de tout et c’est tout à fait normal que ce soit comme ça. »

    Chaque année, un directeur artistique différent est en charge de la saison en cours. Pour la première année, ce fut Bogdan Dumitrache lui-même qui a occupé cette fonction. Pour la saison 2017 – 2018, c’est le metteur en scène Radu Afrim qui assumera la direction artistique du théâtre Appollo 111. Ecoutons Bogdan Dumitrache :« Dans un monde où tellement de choses se passent et où le fait de se concentrer sur une seule chose signifie en rater cent autres, il me semble que l’actualité peut être obtenue par le biais de la diversité. Je peux devenir actuel en me penchant sur les zones d’intérêt d’un nombre plus grand de créateurs. Un directeur artistique qui fait le choix des titres d’une saison doit les subordonner à une idée. Par exemple, si on décide de consacrer une saison à la comédie musicale, tous les spectacles seront consacrés à cette idée, ou bien si on décide de nous attaquer à un sujet tel la guerre, on le traitera d’une manière temporelle, pour voir comment ce sujet est traité de 1920 à 2016 et choisir des textes d’époques différentes. Voilà le concept d’une saison théâtrale. »

    Le concept proposé par Bogdan Dumitrache pour cette première saison est celui de la rencontre entre le théâtre et le film, puisque l’acteur déroule plusieurs projets cinématographiques. Par conséquent, l’inauguration du théâtre Apollo 111 a été marquée par la première du spectacle « Tous les autres s’appellent Ali », mise en scène par le cinéaste Radu Jude, réalisateur des films « Aferim ! » et « Cœurs Cicatrisés ». C’est une adaptation d’un texte, devenu scénario de film, du célèbre réalisateur allemand Rainer Werner Fassbinder.

    A l’heure actuelle, les responsables du théâtre Apollo préparent le spectacle « Après la pluie » de Sergi Belbel, mis en scène par un autre cinéaste roumain Alex Maftei, auteur de « Hello how are you » et de « Miss Christina ». Un troisième spectacle sera « Sieranevada » d’après le film homonyme signé par Cristi Puiu, proposé aux Oscars de cette année.Ce jeune théâtre bucarestois propose également une saison théâtrale destinée aux enfants, et une troisième saison ouverte aux jeunes créateurs de moins de 35 ans. (trad. Alex Diaconescu)

  • Voyage poétique à l’intérieur du plaisir

    Voyage poétique à l’intérieur du plaisir

    Nous avons pour vous une invitation… au printemps. Comme le premier mars est tout proche, c’est le moment de penser au renouveau, à l’ouverture envers les autres, à l’affection que représente le « mărţişor ». Tout un symbole de tradition, mais aussi de créativité, car le fil rouge-blanc ainsi que le petit objet auquel il est attaché sont le produit d’un travail artisanal parfois de pointe. Toutefois, un « mărţişor » immatériel, tel une pensée, un poème, une ambiance vive et haute en esprit, fédèrent parfois les gens plus qu’un objet.



    Voilà le point de départ du « Voyage géopoétique à l’intérieur du plaisir » qui vous attend le dimanche 28 mars, au Cinéma Avesso, le hub culturel parisien. Un événement organisé par l’Association parisienne des artistes roumain, APAR. Explications avec Andreea Macea, secrétaire générale de l’association.



    Cinéma Avesso: 1 bis rue des Épinettes 94410 Saint-Maurice, à 4 min du M8 Charenton – École (Paris)


  • Soleil de l’Est

    Soleil de l’Est

    L’exposition Soleil de l’Est – deux décennies d’activité, organisée par l’Institut Culturel Roumain en partenariat avec l’Organisation Internationale de la Francophonie, a été conçue comme une rencontre d’artistes qui ont participé, pendant vingt ans, aux échanges culturels déroulés entre la Roumanie et la France.

    Chantal Moreno, présidente du bureau régional pour l’Europe Centrale et Orientale de l’OIF, nous explique ce que le vernissage Soleil de l’Est signifie pour la relation culturelle franco-roumaine: Moi, je vais repondre au nom de l’Organisation Internationale de la Francophonie, mais je pense que ça montre la qualité de la relation, puisque vous avez vingt ans de travail continu, on a cent six peintres roumains qui sont ainsi présentés, qui ont été découverts par les artistes français. Au-delà, cela montre que la diversité culturelle a un sens et que c’est au travers de cette diversité culturelle qu’on peut avoir des liens de solidarité entre les peuples et entre les artistes.

    Michel Gavaza est un des artistes qui ont participé au vernissage de l’exposition Soleil de l’Est, à Bucarest. Avant d’être une exposition, Soleil de l’Est est aussi une association qui, selon lui, contribue à la création de l’Europe Culturelle de l’avenir. Mise en place en 1994, l’Association Soleil de l’Est s’intègre et s’implique dans le mouvement d’affirmation de l’art roumain en l’Europe Occidentale.

    Depuis son inauguration, Soleil de l’Est a organisé plus de quatre-vingt-dix expositions de peinture en France et dans l’Union Européenne et a lancé onze livres d’art. En parallèle, elle mène, chaque année, une résidence pour les artistes français, roumains et d’ailleurs. Qui sont-ils, ces artistes? Chantal Moreno: Pour moi, il est difficile de les citer – comme je l’ai dit, on a cent six. Ce que je peux dire c’est que c’est également impressionnant de voir que, tout au long de ces années où les artistes roumains sont allés rencontrer d’autres artistes en France et visiter des lieus emblématiques comme Collioure, ville du fauvisme, ils ont pu de cette façon découvrir aussi des artistes français et – j’ai discuté avec certains des peintres ici présents – faire évoluer leur propre œuvre. C’est ça la coopération et je pense que ce qui est fondamentale dans l’échange c’est que, à travers de l’échange, chacun peut compléter son point de vue et améliorer sa création en prenant compte du point de vue de l’autre.

    Quant à l’avenir de la collaboration entre les artistes roumains et français, Chantal Moreno est optimiste: La Roumanie, c’est vraiment le moteur de la francophonie en l’Europe Centrale et Orientale. C’est en Roumanie qu’on trouve le plus d’apprenants de français, il y a plus d’un million, mais c’est aussi en Roumanie que l’on trouve cet enthousiasme pour les valeurs francophones. Alors, nos valeurs francophones, c’est pas uniquement la paix et la démocratie, mais c’est aussi la diversité culturelle et linguistique. Donc, moi, je suis très optimiste par rapport à la francophonie en Europe Centrale et Orientale. Grâce à des activités culturelles comme celle de ce soir, on découvre d’autres valeurs et on se rend compte que la francophonie c’est pas uniquement apprendre le français, mais c’est aussi d’autres choses. La Roumanie, avec ses artistes et ses enfants, parce que j’ai rencontre des jeunes qui commencent à bien parler le français à sept-huit ans et qui comprennent aussi ce que c’est que la diversité culturelle, c’est l’avenir de la francophonie en l’Europe Centrale et Orientale. Je reviens de la Moldavie et de l’Armenie, je suis encore plus convaincue que la Roumanie peut jouer ce rôle d’entraînement par rapport aux autres pays de la zone.

    L’exposition Soleil de l’Est est ouverte à Bucarest jusqu’au 15 novembre.