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  • Le Festival des arts performatifs Caleido

    Le Festival des arts performatifs Caleido

    Déroulée du 21 au 25 mai, la 4e édition du Festival des arts performatifs Caleido a proposé au public une vingtaine de productions artistiques indépendantes, dont quatre premières. Avec pour but de renforcer le dialogue interdisciplinaire, interculturel et interethnique, l’événement s’est penché sur des thèmes tels la stéréotypie sociale, le féminisme ou encore l’histoire récente. Cette année, la direction artistique du festival a été assurée par la chorégraphe et artiste indépendante Andreea Novac. « C’est pour la première fois dans l’histoire de ce festival que j’ai procédé à la sélection artistique. Les précédentes éditions ont fonctionné, elles aussi, dans la même direction de la diversité et de la multiculturalité. Aux dires des organisateurs et des initiateurs de Caleido, ce festival a démarré pour combler un besoin. Le besoin de réunir sous la même ombrelle des spectacles extrêmement différents. Et quand je dis différent, je pense aussi bien à la thématique qu’à l’approche esthétique et au discours sur lequel ils reposent. A la base, ce festival s’est proposé de réunir au même endroit des spectacles divers afin que le public présent sur place puisse faire des connexions et avoir plusieurs perspectives sur la même chose. Moi, je suis chorégraphe et en 2019, le Festival Caleido a inclus un spectacle que j’ai réalisé avec le comédien István Téglás et qui a beaucoup plu aux organisateurs de l’époque. Voilà pourquoi ils ont décidé de me proposer cette année de faire une édition autour de la danse et des arts performatifs. Et comme l’idée m’a beaucoup plu, j’ai accepté sur le coup, surtout que personnellement, je ne crois pas en cette classification des spectacles en spectacles de danse ou de théâtre. Je me dis qu’un spectacle peut tout simplement mélanger différents arts et de ce point de vue, Caleido s’est avéré la plateforme idéale pour me laisser déployer mes options ».

    En charge de la direction artistique du festival de cette année, Andreea Novac nous présente les quatre productions portant le label Caleido et qui se proposent de tirer la sonnette d’alarme sur la situation fragile et instable du théâtre indépendant et des arts performatifs en général. « J’ai pris en compte les propositions des organisateurs aussi, et du coup, pour l’édition de cette année, on a mis en place deux appels à projets. Le premier pour faire inscrire à l’affiche du festival des spectacles déjà existants et le second pour produire des spectacles pendant toute la période de cet événement. En 2020, Caleido a produit quatre spectacles, ce qui n’est pas mal pour une seule édition, surtout pour une édition si difficile comme celle de l’année dernière. Les quatre productions sont sorties en 2021. En ce qui concerne les appels aux projets, moi, j’ai insisté à coopter au sein du festival des spectacles produits en dehors de Bucarest aussi. Il y a beaucoup d’artistes indépendants à travers la Roumanie et j’ai tenu à faire connaître leurs visions au public. Pour vous donner un exemple, j’ai accordé toute la liberté à Paul Duncă, ou Paula Dunker, comme il/elle se présente au sein du mouvement queer dont il/elle fait partie. Avec son équipe, cet artiste a réalisé un spectacle intitulé « l’Adoration de la Performance radicale », où il est question du Voguing (ou Vogue en français), un style de danse urbaine né dans les années 1980 sur les scènes des bals fréquentés par des homosexuels et transgenres afro-américains, essentiellement à New York. A ma connaissance, il s’agit d’un des rares spectacles de Roumanie qui traite de ce sujet et en plus, d’une façon profonde, à plusieurs niveaux. Bien sûr qu’il y a dans cette production une dimension personnelle, mais il y a aussi beaucoup d’information sur la culture Voguing, plutôt méconnue en Roumanie. Ce n’est qu’une raison de plus de voir ce spectacle, aussi bien pour son côté éducationnel que pour la manière dont il arrive à nous remplir d’énergie et pour sa beauté visuelle qui le rend accessible au public large. L’édition de cette année de Caleido a présenté aussi « Bildungswoman » d’Elena Morar, un spectacle qui nous est parvenu suite à un appel à projets. C’est un acte artistique aussi bien visuel que riche en contenu, qui traite des femmes et de leur processus de mûrissement. Je me méfie à employer le terme de manifeste féministe pour décrire ce spectacle, quoique son côté féministe soit très prononcé. Un autre spectacle produit dans le cadre de notre festival est « Mademoiselle Iulia », mis en scène par Andreea et Andrei Grosu, d’après un texte classique écrit à la fin du XIXème siècle, et qui demeure de très grande actualité. Enfin, la dernière production s’appelle « Libretto Impostura », de Matei Lucaci-Grünberg. Deuxième partie d’une trilogie, ce spectacle traite avec beaucoup d’humour et d’ironie du sujet de l’imposture », a conclu Andreea Novac, directrice artistique de la 4e édition du Festival des arts performatifs Caleido. (Trad. Ioana Stancescu)

  • Le programme d’arts performatifs du Musée national d’art contemporain de Bucarest

    Le programme d’arts performatifs du Musée national d’art contemporain de Bucarest

    Depuis près d’un an, plus exactement depuis mai dernier, le Musée national d’art contemporain de Bucarest a ouvert ses portes aux arts performatifs de Roumanie, grâce à un programme initié et coordonné par la metteuse en scène Ioana Păun: « Beaucoup d’initiatives indépendantes naissent à Bucarest et elles ne trouvent pas toutes un endroit pour porter leurs fruits. Ces projets d’art performatif, pour la plupart hybrides, avaient besoin d’un espace. Or, le Musée d’art contemporain est un espace réservé à l’art nouveau, à l’art du temps présent et même à l’art de l’avenir. Donc, toute forme nouvelle et expérimentale d’art y trouve naturellement sa place. Il faut savoir que le Centre national de la danse, qui accueille régulièrement des projets d’art performatif, est le seul espace de Bucarest consacré à ce genre d’art. »

    La metteuse en scène Ioana Păun s’intéresse depuis plusieurs années aux arts performatifs et elle a suivi des formations dans ce domaine et travaillé avec des artistes roumains : « Cela fait longtemps que je me sens poussée à soutenir ce genre de démarches artistiques apparentées au théâtre, mais dans lesquelles sont également engagés des artistes visuels. Je me suis aventurée dans ce domaine en 2010, après avoir fait un mastère d’art performatif à l’université Goldsmiths de Londres, qui a complètement changé mon point de vue sur les arts du spectacle. De retour à Bucarest, j’ai proposé des ateliers d’art performatif à l’Université nationale d’art théâtral et cinématographique. Y participaient des enseignants de cette université, mais aussi beaucoup de personnes de l’extérieur : des musiciens, des anthropologues curieux d’explorer ce genre d’art, plutôt méconnu chez nous. Au fil des ans, j’ai proposé des ateliers et j’ai essayé de découvrir de nouveaux artistes auxquels je puisse transmettre ce que j’avais appris moi-même. Les festivals d’art performatif étaient très rares ici et j’étais toujours en quête d’espace où ce genre de travail puisse se concrétiser. Grâce aux ateliers, j’ai réuni autour de moi un noyau d’artistes qui sont devenus de plus en plus autonomes et ont commencé à travailler ensemble. J’avais déjà l’expérience du travail dans ce domaine très très spécial, car là il n’y a plus nécessairement une histoire, comme au théâtre, il n’y a pas un dialogue, comme les spectacles de théâtre nous avaient habitués, donc c’est un peu plus difficile à déchiffrer. »

    Par ce projet, Ioana Păun propose un programme mensuel au Musée national d’art contemporain: « Il y a, en principe, trois événements par mois. Un spectacle de performance, qui se déroule tout au long d’une soirée, qui accompagne toujours les vernissages importants. Le programme est à consulter sur le site du musée ou encore sur notre page Facebook. D’habitude, on a des projets créés à l’avance, mais qui sont si délicats et si fragiles qu’ils ont eu du mal à se trouver un espace propre pour se faire admirer par le public. Or notre musée est prêt à les accueillir. C’est le cas, par exemple de « Entre deux cachets » de Cinty Ionescu, qui parle de la déprime au sein d’un projet mêlant les projections vidéo à la représentation en temps réel. Ou encore, c’est le cas des «Nocturnes » qui en sont à leur troisième édition et qui proposent de la musique d’avant-garde à un public réuni dans un espace plongé dans l’obscurité. Il convient de mentionner que nous avons déjà organisé deux événements qui ont cartonné auprès des mélomanes, dont le deuxième a été diffusé en direct. Les événements musicaux ont lieu une fois tous les 45 ou 60 jours et les billets sont mis en vente sur place ».

    Cette année, le Musée national des arts contemporains produira ses premières représentations par le biais d’un programme intitulé « Territoires libres » par lequel l’institution inaugure un nouvel espace consacré à l’art performatif. Ioana Paun: « Ces projets d’art performatif seront réalisés aussi bien par des artistes bucarestois et du reste de la Roumanie que par deux groupes d’artistes étrangers. On s’attend à ce qu’ils apportent un souffle nouveau car ils seront imaginés afin de répondre le mieux possible aux besoins des artistes qui sont invités à s’y inscrire d’ici la fin du mois. Le projet concerne tous les exemples d’art performatif qui ont lieu ailleurs, à Bucarest ou encore dans d’autres salles du musée, en ligne ou sur les ondes. J’espère que d’ici la fin de l’année, je puisse répertorier au moins 8 productions de ce type ».

    Le premier projet a eu lieu le 10 février, au Musée national d’art contemporain. Il s’est agit du spectacle Nok, nok mis en scène par la comédienne Nicoleta Lefter d’après le livre « L’année de la pensée magique » de Joan Didion, avec à l’affiche l’actrice Flavia Giurgiu. Ioana Paun affirme à propos du programme du mois de février : «En février, nous aurons donc une autre édition des Nocturnes en musique. Et puis, bien sûr, le spectacle Nok, nok de Nicoleta Lefter qui parle du moment où l’on apprend la mort d’un proche et de la façon dont on arrive à s’y habituer et à surmonter la douleur. Nous aurons aussi des projets à l’intention des couples. L’artiste Ruxandra Hule a mis en œuvre un projet qui s’appelle « Nous contre nous-mêmes ». C’est un projet qui s’adresse aux couples pas forcément d’amoureux, ils peuvent être frères, mère-enfant, amis très proches et que Ruxandra invite, une heure durant, à utiliser différents instruments artistiques pour entrer dans cette zone relationnelle dont on a du mal à parler. Cet atelier a réuni pas mal de participants dont certains ont affirmé avoir vécu une expérience profonde, tandis que d’autres se sont plutôt amusés. L’artiste a recours aux mots, aux textos ou encore aux techniques de modelage pour atteindre son but. Et puis, toujours en février, nous aurons la première du spectacle « Le cheval blanc » sur le tortionnaire Ioan Ficior, une production de notre musée. On essaie d’utiliser l’art pour rapprocher le public des aspects économiques, sociaux de sa vie de tous les jours ».

    Moins d’un an après son lancement, le programme d’art performatif a déjà son public fidèle. « Ce sont des personnes d’horizons les plus divers qui semblent avoir attendu qu’un tel projet soit mis en place » se félicite Ioana Paun. (Trad Dominique, Ioana Stancescu)