Tag: comédien

  • Le théâtre roumain et l’actuel contexte pandémique

    Le théâtre roumain et l’actuel contexte pandémique

    Profondément touché par les restrictions sanitaires mises en place pendant la pandémie, le théâtre roumain s’est vu obliger de trouver des alternatives censées lui assurer la survie. Si en été le public a eu droit à des spectacles en plein air, une fois installée la saison froide, ce fut le milieu en ligne qui en a pris le dessus, en proposant aux internautes des productions en ligne.

    Le 21 septembre dernier, la vie théâtrale autochtone a enregistré une première : la 28ème édition du Gala des Prix de l’Union théâtrale de Roumanie, UNITER, accueillie pour la première fois, en plein air, par le théâtre d’été aménagé dans le parc Nicolae Romanescu de Craiova. L’événement a été transmis en direct aussi bien sur Radio Roumanie Culture que sur les sites de la télévision publique et de l’Union théâtrale de Roumanie. Créée par la libre association des créateurs du domaine théâtral de Roumanie, l’UNITER est une organisation professionnelle non gouvernementale qui vient de marquer ses 30 années d’existence. L’actuel contexte sanitaire a fait que l’Union lance le 10 septembre une campagne en ligne censée présenter au public des vidéos de présentation des comédiens en lice pour les prix. Une occasion pour les spectateurs de voter leurs préférés sur le site UNITER. Déroulé dans des conditions particulières imposées par un contexte atypique, le Gala 2020 des Prix de l’Union théâtrale de Roumanie est resté dans la mémoire du public comme un événement phare de la culture roumaine en ces temps de pandémie.

    Oana Cristea Grigorescu, critique de théâtre et membre de l’UNITER témoigne : « Le Gala Uniter 2020 est arrivé à produire un changement, à disloquer une sorte de conservatisme ancré depuis 20 ans déjà. Tout le monde a salué un format frais dû pas forcément à l’organisation de l’événement en plein air, à Craiova, mais surtout à la confiance que les organisateurs ont faite au réalisateur Bobi Pricop et à la scénographe, Irina Moscou, en charge de l’organisation. A la tête de toute une équipe, les deux ont imprimé à l’événement un souffle nouveau et ont mis en place un événement concis et correct, en nous offrant à nous, spectateurs, une bonne dose d’optimisme. Une partie des discours des lauréats a porté sur une problématique actuelle, à savoir le schisme qui existe entre les artistes indépendants et ceux issus des institutions subventionnées. En réalité, il s’agit d’une fausse rupture et les discours des intervenants lors du Gala ont mis en lumière l’importance de trouver des solutions administratives de soutien aux artistes indépendants pour mettre en évidence leur contribution à la diversité de la scène théâtrale de Roumanie. Le fait que le comédien Ion Caramitru, à la tête de l’UNITER et du Théâtre national de Bucarest, ait assumé publiquement, à la fin du Gala, le devoir de trouver des solutions de soutien au théâtre indépendant représente un aspect d’une importance stratégique. C’est ce genre de politique culturelle que l’UNITER souhaite mettre en place dorénavant »

    Déroulée du 22 au 29 novembre dernier, la 30ème édition du Festival National de Théâtre de Bucarest a eu lieu, en première, en ligne, sur la plateforme officielle de l’événement. L’intention des trois personnalités artistiques responsables de la sélection officielle a été claire : jeter un pont entre les esthétiques de jadis et la quête culturelle actuelle. Radio Roumanie a fait partie des partenaires traditionnels du Festival, la chaîne publique lui ayant consacré une section spéciale sur les ondes.

    Maria Zarnescu, maître de conférences à l’Université d’art théâtral et cinématographique de Bucarest, a fait partie du trio en charge de l’organisation de l’événement. Voici ce qu’elle déclarait le 23 novembre 2020 sur le site fnt.ro, consacré au Festival National de Théâtre de Bucarest : « Chaque spectacle sera mis en ligne pour 48 heures afin de permettre au public de le revoir, si bon lui semble. Le site est légèrement surchargé, car on a voulu revisiter aussi les archives des 30 années du festival. L’occasion de tomber sur des performances artistiques des plus remarquables renvoyant à des triptyques célèbres comédien- metteur en scène – dramaturge. Dans le cas des performances d’une durée plutôt courte, on a choisi de les regrouper dans une section spéciale baptisée « L’Art du Grand Acteur ». C’est une section qui met en avant des acteurs très connus du public roumain, ce qui ne veut pas dire que les autres artistes présents à l’affiche du festival sont moins importants ».

    L’édition 2020 du Festival de Théâtre a accueilli aussi bien des productions internationales que des spectacles « de pandémie » tels ZOOM BIRTHDAY PARTY, d’après un texte de Saviana Stănescu, mis en scène par Beth Milles, des Etats-Unis ou encore La Piscine (Pas d’eau) de Mark Ravenhill, un projet signé Radu Nica, Andu Dumitrescu et Vlaicu Golcea. Pour conclure, obligé de se réinventer dans l’actuel contexte pandémique, le théâtre roumain fait de son mieux pour continuer à rester près de son public, même si l’accès aux salles de spectacle reste limité. (trad. Ioana Stancescu)

  • Alexandru Pribeagu

    Alexandru Pribeagu

    Il est jeune, il est comédien et mime, il est enthousiaste et parfaitement francophone. Rien ne prédisait dans la famille Pribeagu la place que le théâtre et la langue française allaient occuper dans la vie du fils, Alexandru. C’est pratiquement le hasard qui y a joué le rôle principal. Le jeune comédien roumain francophone Alexandru Pribeagu se raconte au micro de RRI.


  • L’art du comédien aujourd’hui

    L’art du comédien aujourd’hui

    « Trop fou pour ce monde » (Ne-bun pentru această lume) – voilà le thème de la 19e édition du Gala du jeune comédien HOP, déroulée début septembre à Costinesti, sur la côte roumaine de la Mer Noire. Un événement destiné, dès sa première édition, à parler de l’art du comédien, selon l’acteur et professeur Miklos Bacs.

    Comment les jeunes issus des écoles de théâtre maîtrisent-ils cet art? Réponse avec Dorina Chiriac, membre du jury du gala HOP: « Dans mes spectacles, je constate qu’ils ne sont pas préparés à monter sur scène. Et je ne pense pas à leurs aptitudes pour faire ce métier, car ces aptitudes existent, elles sont même plus variées que chez ma génération, celle de ’94 – ’95. Ce qui leur manque c’est l’attitude face au métier. Et je suis persuadée que l’éducation en est la principale cause. Je crois que c’est un syndrome, parce que ce n’est pas une absence de la confiance, mais plutôt une méconnaissance du métier que je détecte chez des personnes très douées. Il y a quelque chose d’inadéquat dans la manière dont l’art de l’acteur leur a été enseigné. Tout d’abord, parce que les étudiants sont beaucoup plus nombreux que les professeurs. Or, il n’y a pas suffisamment de temps pour s’occuper de tous. En plus, le nombre des années d’étude a diminué. On est passé au système de Bologne qui, à mon avis, ne convient pas à la Roumanie en ce moment, parce que nous n’avons pas suffisamment de personnel enseignant. Nous avons besoin de professeurs spécialement formés à ce système.»

    Pour les lauréats du Gala Hop 2016, maîtriser l’art de l’acteur signifie ne jamais être content de son travail, vouloir être meilleur, mettre à profit son imagination. Parmi eux, Alexandru Voicu, diplômé 2015 de l’Université nationale d’art théâtral et cinématographique. C’est lui qui a remporté le Grand Prix du Gala du jeune comédien HOP et le Prix « 1 sur 10 pour le Film à Tiff (Transilvania International Film Festival)».

    Alexandru Voicu nous dit comment il voit son métier : « Le mécanisme que j’utilise, quel que soit mon rôle, c’est d’essayer toujours de partir à zéro, comme si je ne l’ai jamais fait auparavant. Tenter de nouvelles choses ou trouver de nouvelles facettes pour ce que j’ai déjà fait. Pour moi, il s’agit de jouer – dans les deux sens du mot (amusement et art) – et de travailler dans la joie. »

    Alina Rotaru a fini ses études à l’Université nationale d’art théâtral et cinématographique en 2012. Cette année, le Gala HOP l’a récompensée du Prix de la Meilleure comédienne: «Je viens de découvrir cette dernière année l’idée de jeu. Avec tout ce que ce mot signifie. Et je me suis dit que si je jouais dans le sens de m’amuser avec mon rôle, je pourrais avoir de meilleures chances de réussite, c’est à dire d’être authentique jusqu’au bout. Pour moi, l’art de l’acteur signifie être crédible, authentique, comprise. Voilà ! Plus que le talent et le charme, l’approche est la chose la plus importante au moment où l’on construit un rôle. »


    Dire la vérité sur scène. Ce fut le principal critère de sélection pour la comédienne Dorina Chiriac, membre du jury du Gala Hop 2016: «Je reviens toujours à Grotowski qui dit : «quel que soit le genre, quelle que soit l’époque, sur scène, l’acteur doit dire la vérité ». C’est le seul critère : l’acteur qui monte sur scène doit dire la vérité, quelle que soit la formule, le genre théâtral choisit. Pour les autres critères, on peut prendre en compte l’envergure du rôle, sa puissance, les aptitudes innées ou acquises. Mais tout cela sert à atteindre le même but : transmettre la vérité. Certes, les uns sont plus spectaculaires, les autres plus profonds… Cette année nous, le jury, nous avons remarqué plusieurs artistes qui ont des préoccupations intellectuelles très claires, dont l’univers et plus profond, des artistes qui peuvent approcher des textes importants, avec plusieurs nuances, qui sont capables de transmettre des choses, tout en gardant le mystère… Ce sont ces acteurs qui ont gagné cette année. »

    Enfin, ce même contexte a été l’occasion de réfléchir sur les manières d’améliorer le système d’enseignement de l’art de l’acteur en Roumanie. Le comédien et professeur Miklos Bacs, directeur artistique du Gala HOP 2016, affirme qu’il existe plusieurs solutions pour ce faire: «Je crois que c’est le moment de démarrer des discussions sérieuses entre les écoles : comment voit-on l’enseignement supérieur artistique en Roumanie ? Comment s’explique un nombre si grand de places dans une université d’art ? Sans doute, c’est une bonne chose. Je crois qu’il est possible de trouver des solutions de compromis. C’est bien d’avoir un grand nombre d’étudiants, mais ce n’est pas normal que cela entraîne automatiquement un grand nombre de diplômes et de rôles dans un théâtre. Je pense qu’il faudrait avoir une étape de spécialisation. On pourrait trouver de nombreuses directions, du psychodrame à la psychopédagogie, jusqu’à l’enseignement dans les lycées. On pourrait assurer un emploi à ces jeunes. Certes, tout le monde souhaite monter sur scène, c’est leur rêve. Mais moi, je crois en l’homme de théâtre, qui aime le théâtre et qui se rend compte qu’il peut travailler dans ce domaine sans être nécessairement acteur. Les universités doivent avoir une stratégie en ce sens, pour garantir un avenir à ces jeunes. Sinon, on restera avec un nombre exagéré d’étudiants avec des attentes exagérées et irréelles. Parce qu’il est impossible, pour une société, d’intégrer 200 – 300 jeunes diplômés de l’art de l’acteur en une année.» (Trad. Valentina Beleavski)

  • La condition du comédien en Roumanie

    La condition du comédien en Roumanie

    La multitude de festivals présente au public aussi bien des représentations données par les théâtres d’Etat et indépendants, que des comédiens célèbres ou en début de carrière. Ces jours-ci, en plein Festival national de théâtre, nombre de jeunes comédiens ou étudiants de l’art théâtral assistent en spectateurs aux différents spectacles. Nous nous sommes demandé quels étaient leurs projets d’avenir et surtout quelle est, en cette année 2015, la condition du comédien roumain.

    Selon Cristina Modreanu, critique de théâtre, une cinquantaine d’années sépare le théâtre roumain de celui occidental : Nous sommes, je l’espère bien, sur la bonne voie. Il se trouve pourtant que le système est bloqué actuellement, du moins pour ce qui est du théâtre. Ce blocage, qui dure depuis plusieurs années déjà, se traduit par l’impossibilité des jeunes comédiens fraîchement sortis de la faculté – et il y en a quelque 150 chaque année à travers le pays – de trouver un emploi dans les théâtres. Autrement dit, on se retrouve devant un grand nombre de freelances que le système n’encourage guère, que ce soit d’un point de vue législatif ou sur le plan organisationnel et logistique. Difficile donc de se débrouiller tout seul, vu les ressources insuffisantes de cet univers parallèle qui s’est créé entre temps. Je pense que le principal problème relève du manque de coordination entre le système éducationnel, qui forme les professionnels du théâtre et les institutions du spectacle censées absorber cette main d’œuvre. Il faudrait que les deux entités travaillent de concert pour éviter le gaspillage d’énergie et pour créer de nouvelles structures qui puissent donner une chance à ces jeunes, car certains d’entre eux n’arrivent jamais à exercer la profession pour laquelle ils se sont préparés.

    Nombre de diplômés de la faculté d’art théâtral et cinématographique prennent, bon gré mal gré, la voie difficile du théâtre indépendant. Raluca Aprodu est un des jeunes qui connaissent déjà fort bien les avantages et les désavantages du statut d’artiste indépendant. Elle joue dans des spectacles montés par des théâtres indépendants, mais se produit aussi dans les théâtres d’Etat. Enfin, ce sont surtout les rôles de cinéma qui lui ont valu d’être connue du grand public.

    Nous lui avons demandé si elle avait jamais souhaité travailler dans une institution publique. Je dois avouer que j’hésite. D’un côté, j’ai peur de me faire embaucher, et ce probablement à cause de certains clichés que j’ai entendus ou que je m’imagine. En même temps, j’aimerais également faire des films, avoir la liberté de partir et de pouvoir faire du théâtre indépendant. Je sais très clairement que certains théâtres ne sont pas d’accord avec cette pratique et que les comédiens réussissent difficilement à obtenir l’accord de la direction pour suivre en parallèle d’autres projets.Je sais qu’en tant que salarié d’un théâtre d’Etat, on a davantage de chances de travailler avec des metteurs en scène importants. On organise aussi des castings pour les collaborateurs, mais ceux-ci sont peu nombreux et visent notamment les petits rôles. Je connais aussi des gens qui se sont fait embaucher dans des théâtres et qui, en trois ans, ont réussi à travailler avec tous les grands metteurs en scène de chez nous. Pour le moment, je suis satisfaite de ma carrière, mais j’espère prendre la bonne décision au cas où je serais obligée de faire ce choix. J’oscille. Je sais que l’endroit est très important, mais en même temps je ne me ferais pas embaucher sans connaître l’équipe. J’ai peur, mais finalement les craintes il faut également les affronter !

    Même si les ressources sont beaucoup plus réduites dans l’espace indépendant, les jeunes artistes qui s’y impliquent sont beaucoup plus dynamiques et orientés vers l’avenir, affirme Cristina Modreanu, mais ils se voient confrontés à une série de situations qu’ils n’ont pas apprises à l’école : faire une demande de financement, coordonner les projets, faire des décomptes.

    Lucian Vărşăndan, manager du Théâtre allemand d’Etat de Timisoara, une des institutions de Roumanie les plus performantes et les plus ouvertes à l’innovation, trouve que les comédiens venus du secteur indépendant sont plus enclins à la compétition et plus prêts à lutter pour ce qu’ils souhaitent faire. Voilà pourquoi il est l’adepte de l’idée des contrats à durée déterminée, dans un système dominé par les CDI. A mon avis, un contrat à durée déterminée est le seul susceptible de mettre en équilibre la rigueur du système concurrentiel d’une part et la possibilité d’intégrer une troupe de l’autre. Je ne suis pas adepte de l’idée que les comédiens changent de théâtre chaque soir, suivant un système de collaboration souvent chaotique qui nuit à la personnalité artistique. Mais j’encourage la concurrence, même au sein des théâtres publics, justement par le biais des contrats à durée déterminée. Cela correspond aussi à l’idée de stratégie du répertoire, laquelle peut changer d’une saison théâtrale à l’autre et d’un mandat managérial à l’autre , a conclu Lucian Vărşăndan, manager du Théâtre allemand d’Etat de Timisoara.

  • Le Gala du jeune comédien HOP 2015

    Le Gala du jeune comédien HOP 2015

    Les comédiens Maia Morgenstern et Tudor Chirilă, le réalisateur Radu Jude, la scénographe Iuliana Vîlsan et la musicienne Luiza Zan. Plusieurs jours durant, ils se sont laissé imprégner de l’énergie et des émotions des jeunes comédiens roumains, ont eu à décider du gagnant du Grand Prix, du Prix spécial et des prix de la meilleure comédienne, du meilleur comédien. Tout cela se passait à Costinesti, station littorale roumaine de la jeunesse estudiantine, qui a accueilli, du 8 au 11 septembre, la 18e édition du Gala du jeune comédien — HOP. Cet événement culturel, organisé par l’Union théâtrale de Roumanie, a eu pour coordinateur artistique le metteur en scène Radu Afrim.



    Voici ce que déclarait la scénographe Iuliana Vîlsan, participante pour la première fois au Gala HOP en tant que membre du jury : « Je suis très exigeante et rigoureuse et j’ai tendance à juger trop sévèrement les choses. Cette première expérience de membre du jury m’a fait peur, au début, mais j’ai tenté de me laisser porter par l’énergie de la jeunesse, qui a une intensité, une disponibilité et une richesse émotionnelles à part. Je me suis détendue petit à petit et j’ai finalement réussi à montrer plus d’empathie. Dans la compétition individuelle, mon critère d’évaluation a été l’authenticité de l’émotion. J’ai cherché à voir lequel ou laquelle des jeunes comédiens et comédiennes sont parvenus à maîtriser leur trac et donc à mieux transmettre au public le message souhaité. C’est le spectacle Dada, très bien assimilé et exprimé, qui a dressé la barre plus haut. La force d’expression du thème a fait la différence entre le Grand prix et les autres distinctions. Je félicite la grande gagnante, Dana Marineci. »



    C’est donc Dana Marineci qui a remporté le Prix Ştefan Iordache” — Grand Prix du Gala du Jeune comédien HOP. Diplômée, il y a trois ans, de l’UNATC, elle a vite trouvé sa place et réussi à se faire remarquer par les metteurs en scène et les directeurs de théâtre, en participant à toutes les auditions et tous les concours possibles. Voici ce qu’elle affirmait à propos du thème de son spectacle, qui a impressionné le jury : « Un thème difficile, à bien charpenter. Même si le dadaïsme a l’air totalement désorganisé, le comédien doit garder à l’esprit le fait qu’il se trouve sur une scène et donc devant un public auquel il se rapporte. Les spectateurs sont là pour vous voir. Et c’est à vous de les modeler en quelque sorte. J’ai mis deux semaines à me documenter sur le courant dadaïste. Et pis, en cherchant sur Youtube des spectacles du même genre, je suis tombé sur « LUrsonate / La Sonate des sons primordiaux». Les 15 pages de sons portent la signature du dadaïste allemand Kurt Schwitters. J’ai mémorisé le texte, mais je me suis rendu compte que cela ne suffisait pas. Alors là, je me suis demandé ce qu’il y a de primordial. C’est l’amour qui est primordial. J’ai donc pensé qu’il serait bon pour moi et mes spectateurs que je choisisse une histoire d’amour pour remplir ce canevas. »



    Connu à travers sa création et reconnu comme un fervent défenseur des jeunes artistes, le metteur en scène Radu Afrim a été pour la troisième année de suite le directeur artistique du Gala du Jeune comédien HOP. L’édition 2015 de l’événement s’est déclinée en deux thèmes, apparemment sans aucun rapport entre eux, à savoir Dada” et Vacances au bord de la mer”. En plus, elle s’est proposé de mettre en avant non pas le texte, mais le comédien: « J’ai constaté, durant les deux premières années du Gala, que le public était très impressionné par les textes. Or, le texte, qu’il soit à fort impact, très émouvant ou très comique, relègue l’artiste au second plan. Du coup, les comédiens qui interprétaient un texte exceptionnel étaient les grands favoris du jury. Alors, j’ai fait le raisonnement suivant : je vais confier aux comédiens des textes dadaïstes, pour voir qui sortira vainqueur de cette compétition avec une œuvre presque impossible à rendre sur scène. Je peux vous dire que dans la confrontation avec des non-textes j’ai apprécié la prestation de plusieurs jeunes comédiens. Même cas de figure pour l’épreuve obligatoire des trois minutes pendant lesquelles les concurrents devaient réciter les paroles d’une chanson, sans la chanter. L’idée était de voir comment on peut exploiter d’un point de vue théâtral des textes généralement ridicules, voire ineptes. »



    Le Prix Cornel Todea” — de la meilleure troupe de comédiens n’a pas été accordé cette année, le jury ayant constaté un trop grand écart entre les deux sections – individuelle et de groupe. N’empêche. Iuliana Vîlsan est tombée sous le charme des jeunes talents en début de carrière: « Beaucoup de vulnérabilités, une forte sensibilité, un bagage émotionnel qui mérite bien d’être mis en valeur. L’énergie et l’ineffable de cette jeune génération de comédiens peuvent apporter sur scène un surcroît de fraîcheur. J’ai énormément apprécié tout cela. » (trad.: Mariana Tudose)

  • “J’ai rencontré un être humain, un comédien qui nous a montré pourquoi il est si grand !”

    “J’ai rencontré un être humain, un comédien qui nous a montré pourquoi il est si grand !”

    Début août, la ville hongroise de Szeged a accueilli une nouvelle édition de son Festival de théâtre en plein air, avec une attraction absolue à laffiche – le Français Gérard Depardieu. Il incarnait lempereur Napoléon I dans lopéra comique “Háry János”, composée en 1925-1926 par un des plus importants compositeurs hongrois et européens de lépoque, Zoltán Kodály. C’est lhistoire dun hussard de larmée austro-hongroise, un homme à limagination débordante, qui ne lésine pas sur lembellissement de ses faits darmes et de ses conquêtes amoureuses, dont limpératrice Marie-Louise, épouse de Napoléon. Un univers attachant qui ne fait plus la distinction entre mensonge et vérité, fantaisie et réalité, transformé en une super production par le metteur en scène Attila Béres. Porté aux nues par public et critique pour ce spectacle, lartiste roumano-hongrois devient ainsi un des rares metteurs en scène de lEurope Centrale et de lEst à avoir travaillé avec une star de la scène occidentale. Attila Béres raconte cette expérience.


  • Les inédits des enchères d’art, en Roumanie

    Les inédits des enchères d’art, en Roumanie


    L’année 2012 a vu toute une série de premières dans les enchères d’art organisées en Roumanie, dont la vente aux enchères de travaux signés par Constantin Brâncuşi, d’un mono poste de Formule 1, de la première maison solaire roumaine et d’objets ayant appartenu à des comédiens roumains. Cette année, lors des premières enchères sur le marché roumain de l’art, deux œuvres réalisées par Constantin Brâncuşi — un des artistes roumains les plus connus au monde – ont été emportées. « La Huppe » et « Les Peaux rouges » ont été adjugées en janvier, pour 10.000, respectivement 2.000 euros.


    « La Huppe », un dessin à la plume, a été mis en vente par un collectionneur privé de Bucarest, qui l’avait acquis auparavant à Christie’s. Cette œuvre, achetée 10.000 euros, est un projet d’illustration pour le volume de poèmes « Plantes et animaux », publié à Paris en 1929, par Ilarie Voronca, un écrivain faisant partie du cercle d’amis de l’artiste. « Les Peaux rouges » est une photo – carte postale d’objet d’art, de 1906. L’image de cette carte postale, l’œuvre « Les Peaux rouges », est une des sculptures détruites par l’artiste en 1907, dans un accès de révolte par rapport à ce qu’il avait créé dans sa période impressionniste, un courant auquel Brâncuşi avait adhéré en tant qu’élève d’Auguste Rodin. La carte postale envoyée à un ami est l’unique document présentant une des œuvres disparues. Ella a été reproduite à l’occasion du centenaire Brâncuşi de 1976 dans une revue littéraire roumaine, et provient d’une collection privée bucarestoise. La présence de Brâncuşi sur le marché de ventes aux enchères publiques est un événement unique.


    Constantin Dumitru, journaliste et commissaire d’expositions, affirme pour sa part que 2012 s’est avérée une année bénéfique pour lemarché de l’art. « Il a enregistré une évolution positive, meilleure qu’en 2011 quand il a connu les performances les plus spectaculaires depuis 1990. Je fus particulièrement impressionné de voir pénétrer sur le marché roumain de l’art de plus en plus d’objets, précieux pour le simple fait d’avoir appartenu à des célébrités, chose courante sur les marchés de l’art étrangers. Pourtant, je ne saurais ignorer l’existence sur le marché d’un segment qui n’a rien à voir avec l’art, il ne fait que mimer la valeur. Espérons que cela ne va pas tourner au kitsch ».


    Nous avons voulu apprendre auprès de Constantin Dumitru si la crise a touché le marché roumain de l’art. La réponse fut des plus catégoriques : « Oui, elle l’a influencé sans pourtant le détériorer. Le manque de confiance en l’immobilier, la chute des prix des terrains a entraîné une majoration des prix des objets d’art. Pourtant, le marché de l’art ne reflète pas la situation économique. 2013 s’annonce difficile notamment pour les petits collectionneurs. Le marché de l’art est plein de dizaines de millions d’euros mais pour des œuvres dont les auteurs sont notamment des célébrités décédées. Or, l’artiste roumain, le créateur contemporain a du mal à voir autant d’argent. On se réjouit de vendre pour 300 mille euros un objet ayant appartenu à une personnalité défunte, mais un étudiant ou un professeur aux Beaux Arts se contente de gagner 500 ou mille euros. Je voudrais qu’on exporte davantage, qu’on arrive à vendre plus d’objets sur les marchés internationaux. »


    Le journaliste Marius Tita, rédacteur en chef de Radio Roumanie Internationale et passionné d’art, affirme que le marché roumain connaît une évolution ascendante : « En Roumanie, nous assistons aussi à une diversification de l’offre. Et dans ce cas il s’agit non seulement des objets mis en vente, mais aussi des actions organisées par les maisons de ventes aux enchères. Et dans ce cas, je pense à quelques événements tels ceux organisés par ArtMark, qui hormis les enchères traditionnelles a introduit quelques idées inédites : enchères thématiques, vente d’objets ayant appartenu à la famille royale, d’objets militaires, très appréciés en Europe Occidentale et qui se vendent chez nous aussi lors d’événements spéciaux et de nombreux autres objets, non seulement d’art traditionnel. On assiste donc à une ouverture, mais aussi à une révision des prix et des opinions qui circulent sur le marché de l’art. Bref, cette évolution vers un marché de l’art mature se traduit par la réduction des prix et de la valeur des ventes. On ne peut pas parler d’un enthousiasme du marché de l’art. Il est clair, nous apprenons beaucoup de nouvelles choses, mais on ne peut pas parler d’affaires exubérants ni de revenus incroyables. »


    Une vente aux enchères inédite a proposé aux collectionneurs des objets personnels de grands comédiens roumains, ainsi qu’une série d’accessoires de films et de pièces de théâtre à succès. Le lot le mieux vendu a inclus un bracelet en or et argent à diamants, rubis et émeraudes que la comédienne roumaine Maia Morgenstern a porté dans un film. Au mois d’août, le mono poste de F1 Ferrari F399 piloté par Michael Schumacher en 1999 a été adjugé pour 177 mille euros. Trois Mercedes millésimées 1953, 1959 et 1966, une Ferrari 599 GTB Fiorano édition spéciale Carbon Kit de 2009, une Lincoln Continental 1947 et une Jeep Willys 1948 avec comme accessoires une remorque et une mitrailleuse se sont également retrouvées sous le maillet au mois d’août de l’année dernière. L’ancienne voiture officielle du roi Michel — une BMW 760 Li – a également trouvé preneur au prix de 20 mille euros.


    Le permis de conduire de la princesse Marie, datant de 1904, a été vendu à 5000 euros. Une autre session de ventes aux enchères a eu comme sujet la première maison solaire à 100% roumaine, estimée à 50 mille euros. Malheureusement elle n’a pas suscité l’intérêt du public. La toile la mieux vendue en 2012 a été « Le berger et son troupeau » par Nicolae Grigorescu, adjugée à 195 mille euros. Trois autres toiles signées Nicolae Tonitza ont trouvé preneur à pas moins de 400 mille euros.


    Selon les spécialistes, les transactions qui ont eu lieu l’année dernière se sont chiffrées à environ 40 millions d’euros. Une bonne année, donc, pour le marché de l’art en Roumanie. (trad. : Ligia Mihaiescu, Ioana Stancescu, Alex Diaconescu)