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  • Le Courrier des auditeurs du 30.07.2021

    Le Courrier des auditeurs du 30.07.2021


    Bucarest fond sous la canicule, et cea ne fait que commencer. En fin de semaine, la ville est désertée de ses habitants qui vont se rafraîchir, notamment au bord de la mer Noire. Ainsi, la semaine dernière, 150 000 touristes avaient investi la côte roumaine, un record pour cet été. D’ailleurs, c’est la saison des vacances ; d’autres, et j’en fais partie, ont choisi de faire un tour en Roumanie. Un tour de 2 000 km en 9 jours, qui a été très apprécié par ceux qui ont vu les photos ou qui connaissent déjà les endroits. Je me propose de vous le raconter pour vous donner des idées de voyage, vu que nous l’avons imaginé aussi pour un membre de la famille qui est étranger.



    Partis de Bucarest, nous avons rejoint Dunavăţu de Jos, une commune du delta du Danube, dans le département de Tulcea (sud-est). En chemin, vous pouvez également visiter la ville-port de Constanţa, Mamaia, la perle de la côte roumaine de la mer Noire, et l’ancienne cité de Histria, fondée par les colons grecs au 6e s. avt. J.-C. Cette dernière est aussi la ville la plus ancienne attestée sur le territoire de la Roumanie. Sachez que la Dobroudja est, à cette époque, pleine de champs de tournesol d’une très grande beauté ; nous nous sommes arrêtés pour faire un nombre impressionnant de photos. Le delta nous a accueillis avec une météo très agréable, ce qui nous a permis de faire deux promenades en barque. L’une à partir de Dunavăţu de Jos, pour aller jusqu’à la plage sauvage de Perişoru, à la mer Noire, à travers plusieurs canaux de toutes les dimensions, dont certains – minuscules. Nous avons eu la joie de voir pélicans, cormorans, aigrettes, cygnes, foulques, grèbes huppés, hérons cendrés et autres évoluer parmi les nénuphars et les roseaux. Le lendemain, nous avons pris un petit bateau de Jurilovca pour aller jusqu’à Gura Portiţei, une langue de terre où vous avez d’un côté le lac Goloviţa et de l’autre — la mer Noire. Pour ceux qui souhaitent assaisonner leurs vacances d’histoire, ne passez pas sans visiter la citadelle médiévale d’Enisala, construite dans les années 1300 en haut d’une colline empierrée. Les fouilles archéologiques qui y ont été pratiquées ont permis de mettre au jour deux logements du premier âge du fer. De là, vous avez une superbe vue sur les environs.



    Nous avons quitté à regret le delta, traversé le Danube en bac à Brăila et mis le cap sur une autre attraction dont nous vous avons souvent parlé à l’antenne : les Volcans de boue de Berca, au département de Buzău. Un paysage lunaire, tout à fait inédit, avec de petits cratères bouillonnants et des coulées de boue nous attendait — contrastant avec les forêts avoisinantes. Je n’ai jamais rien vu de semblable, je peux dire qu’il vaut bien le détour. Le lendemain, nous avons visité le camp de sculpture en plein air de Măgura, dans le même département. En effet, c’est sur ces collines qu’un camp de sculpture pour artistes émoulus de l’Académie d’architecture de Bucarest et même pour des lycéens avait été organisé, entre 1970 et 1985. Les sculpteurs ont laissé leurs 256 œuvres monumentales là, et aujourd’hui l’exposition s’étale sur 21 ha. On dit que des phénomènes paranormaux se produisent à proximité, dans la forêt ; je ne les ai pas expérimentés. A l’hôtel où nous avons passé la nuit, en pleine forêt, nous avons eu un visiteur tout à fait inattendu le matin : un renard qui a pris son petit déjeuner avec nous. Les hôteliers le connaissent depuis trois ans et il vient se faire servir des victuailles tous les jours ; il en emporte pour nourrir aussi sa famille.



    Nous avons de nouveau pris la route pour aller à Şirnea, un petit village éparpillé sur des collines, au département de Braşov (centre). Jusque-là, nous avons admiré le paysage et le superbe lac de Siriu, à l’eau turquoise. Aux environs de Braşov, nous avons visité l’église médiévale fortifiée de Prejmer, du XIIIe siècle, incluse au patrimoine mondial de l’UNESCO. C’est toujours un plaisir de la revoir, surtout quand il fait beau. Bien entendu, nous ne pouvions pas passer à côté de Braşov sans faire un tour au centre-ville. La rue piétonne était très animée, nous y avons pris du bon temps. Nous sommes passés par Poiana Braşov et sommes arrivés à Şirnea, dans un paysage bucolique, avec beaucoup d’animaux. Nous y sommes allés pour faire des randonnées dans les alentours. Un trajet trouvé sur une application semblait séduisant ; 15 km par monts et par vaux, partiellement à travers la forêt, s’est avéré très très beau, mais aussi particulièrement fatigant. Nous l’avons parcouru en 6 heures ; on se reprend de la fatigue, on ne garde que les bons souvenirs. Néanmoins, il convient d’y aller avec un équipement approprié, et aussi d’emprunter un itinéraire adapté à sa condition physique.



    Il existe au département de Braşov un site rupestre très intéressant, qui est aujourd’hui un monastère, celui de Şinca Veche, creusé dans les Monts Făgăraş. Il est présumé par certains être vieux de 7 000 ans et avoir des origines daciques ou même plus anciennes. Un lieu très calme, très beau et très intéressant que les gens visitent pour ses légendes et ses mystères. Il comporte cinq pièces, et une sorte de tour haute de 10 m, par laquelle la lumière naturelle pénètre dans ce lieu étrange. Il a deux autels, ce qui indique ses origines préchrétiennes. On dit que cet endroit de recueillement est béni de Dieu et plein d’énergie positive. On y a découvert un symbole similaire au Yin et Yang et aussi l’étoile de David. Selon d’autres, c’est un lieu où des phénomènes paranormaux se passeraient, aussi. Au-delà de tout, un endroit vraiment intéressant à visiter.



    En route ! Avant de rejoindre notre gîte à Viştişoara, dans le département de Braşov, en pleine nature, nous avons visité le monastère Brâncoveanu (XVIe siècle), à Sâmbăta de Sus. A proximité, vous avez aussi un lieu appelé La Vâltori, dans le village de Lisa. Les vâltori, ce sont des tourbillons construits sur un cours d’eau, où les villageois lavaient leur linge par la seule force motrice de l’eau, sans lessive. Des machines à laver traditionnelles, si vous voulez. Il y avait aussi un métier associé, qui pouvait ou non être en rapport avec le traitement de la laine. Nous avons ainsi vu tous ces équipements des années 1900, et aussi des équipements pour traiter et filer la laine datant de la même époque et toujours fonctionnels. Là encore, très intéressant !



    Pas loin, au département de Sibiu, je vous recommande de voir l’Abbaye cistercienne de Cârţa, unique en Roumanie, une construction d’art roman et gothique fondée par les moines bourguignons et érigée d’abord en bois, vers 1202-1209, et ensuite en pierre, par des tailleurs de pierre français. Sa première attestation documentaire remonte à 1225. Les moines avaient un style de vie ascétique et leur activité était vouée à l’intérêt de la communauté. On y voit des chapiteaux, des clés de voûte, des fenêtres ainsi que le portail ouest, du XVe siècle. Vous verrez aussi l’église évangélique du XIIIe s. Cette abbaye a eu un rôle majeur dans l’histoire politique, économique et culturelle de la Transylvanie.



    Ne passez pas à côté de la citadelle de Făgăraş, dans la ville homonyme. Même si l’extérieur est en rénovation pour lui rendre l’aspect d’il y a 200 ans, présenté dans les gravures d’époque, l’intérieur est visitable. Forte d’une histoire de 600 ans, elle a conquis les tenanciers du site de voyages Hopper qui l’ont déclarée le deuxième plus beau château du monde voici quelques années — article présenté par le Huffington Post. Faire quelques pas dans l’ancien centre-ville de Sibiu est aussi un must ; laissez-vous envoûter.



    En quête de beauté, nous avons emprunté la Transalpina, la route la plus haute de Roumanie, qui traverse les Monts Parâng du nord au sud, et qui culmine à 2 145 m. Une route construite d’abord par les Romains, semble-t-il. En tout cas, les bergers des alentours de Sibiu l’empruntaient avec leurs moutons pour se rendre en Valachie. Modernisée à compter de 2009, elle est spectaculaire aujourd’hui. La beauté des paysages est à couper le souffle. 138 km parfois à travers des forêts et parfois même à travers les nuages, avec des lacs, et des paysages bucoliques. Une fois arrivés à Horezu, vous pouvez visiter le monastère de Hurezi du XVIe s., figurant au patrimoine mondial de l’humanité, et aussi les ateliers des potiers. Nous avons terminé le tour par les Cule, ces maisons fortifiées de Măldăreşti, au département de Vâlcea (sud).



    Chers amis, pour ceux qui seraient intéressés, je peux révéler les noms des hôtels et des gîtes que j’ai choisis, et qui se sont avérés excellents. Voilà, j’ai été un peu longue, mais j’espère que mon récit vous donne des idées de vacances en Roumanie.

  • Pour et contre la chasse des espèces protégées des Carpates roumaines

    Pour et contre la chasse des espèces protégées des Carpates roumaines

    Le Sénat roumain a récemment adopté une proposition législative visant à modifier la Loi de la chasse afin de permettre la chasse de plusieurs espèces protégées. Il s’agit plus précisément des ours bruns, des cormorans et des chamois. Jusqu’ici une espèce strictement protégée, l’ours figurera pendant 5 ans parmi les animaux sauvages dont la chasse est autorisée au cours de certaines périodes de l’année. Une décision qui a été tout de suite contestée par les ONGs écologistes, mais aussi par la société civile. Une pétition a d’ailleurs été signée par 30.000 personnes en 4 jours seulement.

    Précisions avec Cristian Remus Pop, spécialiste des grands carnivores, des corridors écologiques et de la gestion des aires protégées chez le Fonds mondial pour la nature (WWF) Roumanie : « Normalement, pour prendre une telle décision, il faut avoir des données solides et connaître entre autres les tendances de la population d’ours, ainsi que de nombreux autres paramètres. En l’absence de tels arguments, cette décision du Sénat n’est pas correcte. D’autres amendements ont également été adoptés, mais ils sont moins dangereux. Par exemple, toute activité de capture à des fins scientifiques serait assimilée à la chasse, ce qui n’est pas normal. Par conséquent, on tente d’alléger la législation et d’affaiblir les activités et les efforts que nous déployons pour la protection des animaux. En même temps, on ne dispose pas d’assez de données pour avancer de telles propositions. Nous avons demandé à plusieurs reprises qu’une statistique aussi précise que possible de la distribution des ours soit faite pour pouvoir prendre les meilleures décisions de gestion. Si la législation devient moins sévère, la conservation de l’ours brun sera en danger ; surtout que l’ours est une espèce strictement protégée, il figure sur toutes les listes importantes de la Directive Habitats de l’UE. Normalement, il faudrait créer des aires protégées spécialement pour conserver cette espèce et pour lui garantir un statut favorable. Si la Chambre des députés valide à son tour cette décision, il y aura aussi des conséquences économiques. »

    Bien que le chamois soit une espèce emblématique des Carpates et qu’elle ne représente pas de danger pour l’homme, la nouvelle Loi permet la chasse de 609 chamois au cours de la saison de chasse 2019-2020. Une fois de plus, les contestations fusent. Les écologistes mettent en garde contre le fait que la seule raison réelle de chasser des chamois, c’est d’obtenir des trophées. Et pour cause : ils ont une très grande valeur ; un tel trophée vaut entre 880 et 3000 euros.

    Enfin, à cause du danger qu’ils représentent pour la pisciculture, les cormorans ont été placés eux aussi sur la liste des espèces que l’on pourra chasser.

    Pour leur part, le Fonds mondial pour la nature (WWF) Roumanie et 20 autres organisations environnementales ou qui luttent pour la protection des animaux ont transmis à la Chambre des députés leur position commune, lui demandant de rejeter les amendements proposés pour la Loi de la chasse, principalement en ce qui concerne l’ours brun. (Trad. Valentina Beleavski)

  • Les cormorans, ennemis de la pisciculture?

    Les cormorans, ennemis de la pisciculture?

    De par son statut d’oiseau protégé, le cormoran prolifère. Les pisciculteurs tirent la sonnette d’alarme et déplorent les dégâts que ces oiseaux produisent. On estime que chaque cormoran mange quelque 600 grammes de poisson par jour, soit 150 kilos par an, une quantité impressionnante si on la multiplie par le nombre de cormorans. Dans le camp adverse, les ornithologues se rangent du côté des oiseaux et disent que tant que la pisciculture se déroule dans le milieu naturel des cormorans, ceux-ci continueront à faire des dégâts.

    Il faudrait mettre en place des bassins spécialement aménagés pour l’élevage des poissons, opine Ovidiu Bufnila, chargé de communication au sein de la Société roumaine d’ornithologie : « Les cormorans sont des oiseaux piscivores qui existent depuis toujours en Roumanie et qui se sont nourris depuis toujours de poisson. Il convient de mentionner que leurs populations étaient beaucoup plus nombreuses avant 1950 quand on s’y prenait différemment pour faire de la pisciculture. Par la suite, au moment où les communistes ont pris le pouvoir en Roumanie, les zones humides ont été complètement détruites au profit de l’agriculture. Ce qui fait que les plans d’eau restants se sont agglomérés. Je pense aux lacs naturels ou artificiels où se concentrent toutes les populations de poissons et qui, du coup, attirent les oiseaux ichtyophages: les pélicans, les cormorans, les guifettes ou encore les sternes. Si on n’avait pas détruit les zones humides, peut-être n’aurait-on pas assisté à cette concentration d’oiseaux sur les lacs. En fait, ce que ces oiseaux font à présent, c’est de refaire leurs effectifs réduits sous le régime communiste. Sauf que voilà, la décision de pratiquer la pisciculture dans les lacs naturels qui s’étalent tout au long du Danube ou des grandes rivières n’est pas la bonne. Dans un réseau trophique où le cormoran se situe en position supérieure par rapport au poisson, le fait d’avoir trop de poisson fait que les cormorans en mangent davantage, se reproduisent davantage et deviennent trop nombreux. Pratiquée dans des fermes de petites dimensions, la pisciculture n’aurait pas à souffrir en raison des colonies des cormorans. En revanche, si on la pratique dans des bassins de grandes dimensions comme c’est le cas en Roumanie, alors du coup, impossible de protéger les poissons des oiseaux piscivores tels les cormorans ou les pélicans. Ce n’est pas de leur faute si on a mis le poisson là où ils venaient se nourrir. »

    Protégés suite à une directive européenne, les cormorans continuent à provoquer des pertes aux pisciculteurs qui réclament des dédommagements.

    Ovidiu Bufnila explique : « On ne saurait mettre en place une solution qui autorise de tuer des centaines ou des milliers d’oiseaux. Partout dans le monde, les cormorans ont été chassés et les études scientifiques indiquent ce qui se passe quand leurs colonies souffrent. En fait, même si les cormorans quittent les endroits où l’on a détruit leurs nids, ils reviennent pour se nourrir. En plus, leurs populations se refont très très vite. »

    Confrontées à ce problème, les autorités roumaines s’activent pour imaginer des solutions, comme l’a affirmé le ministre de l’Agriculture, Petre Daea, qui a promis de mettre en place un projet de gestion des populations de cormorans.