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    Dictionnaire des lieux littéraires de Bucarest

    Le Dictionnaire des lieux littéraires de Bucarest,
    cosigné par Andreea Răsuceanu et Corina Ciocârlie, raconte 167 histoires de la
    cité littéraire. Au départ, les deux autrices avaient inventorié près de deux
    mille lieux et légendes urbaines liées à des personnages des belles-lettres roumaines,
    à la géographie réelle et littéraire de la capitale. « Qu’ils relèvent de la réalité ou de la
    fiction, boulevards, rues, allées se bifurquent et se répondent, donnant
    naissance à des histoires qui s’entremêlent. Cette flânerie littéraire sur les
    traces des personnages nous emmène tantôt Place Romană et sur le marché Amzei,
    tantôt à l’Athénée ou encore dans le jardin public de Herăstrău, dans les
    quartiers de Cotroceni ou de Dudeşti. A la fin, une sorte de carte virtuelle de
    Bucarest se dessine, permettant au lecteur de se repérer dans ses promenades
    urbaines et livresques »
    , écrivent les autrices du Dictionnaire des
    lieux littéraires de Bucarest, Andreea Răsuceanu et Corina Ciocârlie.


    L’Avenue Victoriei, la rue Mântuleasa, les parcs Ioanid
    et Cişmigiu, l’Auberge de Manuc, la Chaussée Virtuţii, l’Avenue Văcăreşti, la
    maison de la rue Sirenelor, l’Hôtel Universal, la Gare de l’Est, ce ne sont que
    quelques-uns des endroits de la capitale à retrouver dans ce dictionnaire.
    Andreea Răsuceanu, écrivaine et critique littéraire nous en dit davantage : «Au
    tout début, nous avons eu un petit
    moment de panique face à la perspective assez effrayante de relire la majeure
    partie des écrits littéraires, ce que nous avons fait, d’ailleurs. On a décidé
    de commencer par certains noyaux. On a donc relu la littérature roumaine du
    XIXe siècle, puis on s’est arrêté sur les écrivains de l’entre-deux-guerres -
    un moment d’intenses tractations – pour arriver aux auteurs contemporains.
    Comme j’avais déjà écrit sur certains de ces derniers, j’ai tenté de ne plus
    revenir sur les noms évoqués antérieurement. Corina Ciocârlie a été une
    partenaire extraordinaire. Nous avons partagé le même enthousiasme et surtout
    une énorme passion pour la ville de Bucarest et ses histoires. C’est là, je
    crois, le secret de ce livre. En plus, l’une a complété tout naturellement l’autre,
    car, cette fois-ci, j’ai souhaité explorer la banlieue bucarestoise, alors que Corina
    s’est confinée aux quartiers huppés. Moi, je me suis proposé de dépeindre la
    ville pittoresque, celle des faubourgs. J’ai tenu à parler de la Fosse de Cuţarida
    (lieu baptisé d’après le nom de l’ingénieur Nicolae Cuţarida, personnage
    présent dans le roman « Groapa », de Eugen Barbu, paru en 1957 et
    traduit en français sous les titres « La Fosse » ou « Le Grand
    Dépotoir »), de la zone dite Buzeşti, avec ses charmantes guinguettes qui
    « font ouvrir les yeux sur la vie », pour citer un personnage. J’ai
    également consacré des pages à la banlieue Filantropia, à l’Avenue Griviţei, une
    zone pas encore cartographiée, un terrain vague qui rend compte du devenir
    urbanistique de la ville. »


    Le Dictionnaire des lieux littéraires de Bucarest se
    veut « une revanche pour la ville mutilée, agressée, disparue », précise Corina
    Ciocârlie, critique littéraire et docteur en philologie : « Dans notre dictionnaire, le quartier Uranus est
    toujours là, pas encore démoli, la Maison de la Presse libre, initialement
    connue sous le nom de Casa Scânteii, n’a pas pris la place de l’hippodrome de Băneasa,
    la Salle Dalles garde toujours sa façade moderniste des années ’30, tandis que,
    derrière l’hôtel Lido, on devine l’agitation des bucarestois venus profiter de
    la fameuse piscine à vagues. Petit exercice d’imagination : si l’on
    regardait par les fenêtres de la librairie Humanitas Cişmigiu, qui nous
    accueille ce soir, on verrait cette belle artère qu’est le Boulevard de la Reine
    Elisabeth. Tout un spectacle se dévoilerait à nos yeux : affiches
    multicolores, enseignes lumineuses, tenues et coiffures excentriques, passions
    amoureuses, adultères et trahisons comme on en voit au cinéma. Sur les
    trottoirs du boulevard, entre, d’une part, le Parc Cişmigiu et la brasserie Gambrinus
    et, de l’autre, le cinéma Capitol et le Palais du Cercle militaire, défilerait
    le beau monde de la Belle époque. Rien d’étonnant à ce que l’on croise tel ou
    tel personnage de roman : Nory Baldovin (protagoniste du roman Rădăcini, Racines,
    écrit par Hortensia Papadat Bengescu et paru en 1938), Emilia Răchitaru ou bien
    Madame T (personnages du roman homonyme, publié par Camil Petrescu en 1933).
    Rien ne serait terne, ni ennuyeux : pas de façades décrépies, ni de salles de
    cinémas fermées. Et puis, l’héroïne du roman Fontana di Trevi, de l’écrivaine Gabriela
    Adameşteanu, Letiţia Branea de son nom, récemment revenue de Paris, ne
    regretterait plus « le paysage désolant du boulevard Elisabeta, avec ses
    édifices aux façades écorchées et aux corniches délabrées ». Un paysage
    dont l’unique point lumineux reste la librairie Humanitas Cişmigiu, à deux pas
    de la brasserie Gambrinus, plus petite, mais remise à neuf. »


    Outre le répertoire des rues, le Dictionnaire des
    lieux littéraires de Bucarest est un inventaire précieux où l’on retrouve
    monuments, gares, carrefours, parcs, places, marchés, bistrots, cafés, hôtels,
    cinémas, voire même étals de bouquinistes ou kiosques à journaux. Autant de
    repères, de mailles du réseau de symboles de la ville. (Trad. : Mariana
    Tudose)