Tag: guerre civile

  • La Syrie, cinq ans de conflit

    La Syrie, cinq ans de conflit

    La seule chose qui demeure inchangée c’est que Bashar Al Assad règne toujours à Damas. En chiffres nets, les cinq ans de guerre civile ont fait 470 mille morts, dont 70 mille à cause de la famine et des maladies, près de 2 millions de blessés, plusieurs millions de réfugiés et d’innombrables personnes qui ont perdu leurs maisons ou qui ont été déplacées à l’intérieur du pays.

    L’analyste de politique étrangère, Iulian Chifu souligne combien grave est la situation dans la région. « Y sont impliquées pour la première fois depuis la crise de Cuba de 1962, non seulement les principales puissances nucléaires, les Etats-Unis et la Fédération de Russie, mais aussi toutes les puissances régionales détentrices de capacités militaires susceptibles de produire un incident capable d’aboutir à une escalade du conflit. Y sont présents, l’Arabie Saoudite, l’Iran, la Turquie et toutes les factions, de toutes les couleurs, depuis Al-Qaïda, le front Al-Nusra, Daesh, pratiquement un rassemblement, une tempête parfaite où il ne manque qu’une allumette pour faire sauter tout le Proche Orient. »

    Démarrée en septembre 2015, l’intervention militaire de Moscou en Syrie a introduit une coalition alternative à celle déjà formée contre l’organisation terroriste Etat Islamique et qui rassemble les Etats sunnites du Golfe, la Turquie, les Etats-Unis et d’autres Etats occidentaux, rappelle Iulian Chifu. La nouvelle coalition, mise en œuvre à la demande de Bashar Al Assad et composée par la Russie, l’Iran, le gouvernement pro-chiite de Bagdad, le Hezbollah libanais et enfin les Syriens alaouites, également de facture chiite, n’a fait qu’introduire une nouvelle axe, chiite cette fois-ci, dans le conflit. Un autre résultat a été la montée en puissance de Daesh, qui a réussi à recruter en six mois 30 mille combattants supplémentaires et ramasser des fonds énormes pour soutenir les sunnites de la région, ajoute Iulian Chifu.

    Il fait également une analyse des décisions prises par le président russe Vladimir Poutine pour intervenir en Syrie et respectivement pour retirer la majorité des militaires et de l’armement russes de la région à la mi-mars 2016 : «La lutte contre l’organisation Etat Islamique et la réduction de la vague de réfugiés vers l’Europe, les deux objectifs formellement annoncés par le président Poutine au début de cette campagne militaire, n’ont pas été atteints. Daesh y est toujours bien installé et possède la capacité de projeter la force au beau milieu de l’Europe, au cœur même du vieux continent, je dirais. Par ailleurs, nous voyons que les vagues de réfugiés se sont au contraire amplifiées pendant cette période. Quels sont donc les objectifs atteints par la Russie ? Eh bien, nous voyons qu’elle a créé une zone d’interdiction de l’accès aérien en Syrie, en fait sur tout le territoire, mais surtout à l’est de la Méditerranée, et une zone d’interdiction navale dans la région du port de Tartous et dans l’ouest de la Syrie. C’est un objectif majeur, stratégique, militaire, puisque c’est la formule qui lui facilité l’accès aux mers chaudes ; de ce point de vue aussi, le port de Novorossiysk et la Crimée, qui couvrent l’ensemble de la mer Noire, ont joué un rôle important de projection de la force. C’est un objectif stratégique de la Russie. Le deuxième objectif que Moscou semble avoir atteint c’est de faire sortir la Russie de son isolement. Cet isolement était une conséquence de son annexion de la Crimée et de son agression dans l’est de l’Ukraine. Ce qui plus est, la Fédération de Russie ambitionne également d’imposer ses points de vue au Proche Orient. »

    L’intervention militaire russe en Syrie, ciblée sur le terrorisme selon le Kremlin, a modifié l’équilibre des forces dans la guerre civile syrienne, puisqu’elle a aidé l’armée à démarrer l’offensive et à regagner des territoires, obligeant les rebelles à demander la fin des hostilités et offrant à Bashar Al-Assad la possibilité d’imposer ses propres conditions aux négociations de paix, affirment les analystes. « La coalition internationale menée par les Etats-Unis a échoué en Syrie, parce qu’elle n’a pas coordonné ses actions avec celles du gouvernement de Damas. Nous plaidons en faveur de la création d’une coalition internationale contre le terrorisme, mais uniquement en coopération avec le gouvernement syrien », a déclaré le responsable syrien Bashar Ja’afari lors des négociations de paix de Genève.

    Demander aujourd’hui aux Etats-Unis et à l’Occident en général de négocier avec Bashar al-Assad constitue un geste infâme, affirme l’analyste Iulian Chifu : « Ce serait abandonner pratiquement toute l’opposition syrienne et maintenir en fait le grand problème syrien qui ne date pas d’hier. La Syrie est quand même majoritairement sunnite. Elle était dirigée de main forte par une minorité alaouite, de hauts dignitaires, proches de Bashar al Assad. Cet équilibre allait de toute façon se rompre. Et le printemps arabe n’a été qu’une occasion pour que ce genre d’équilibre disparaisse et se réorganise sur des critères de nature démocratique. De toute façon, l’Etat syrien sera complètement différent. Soit la majorité sunnite arrivera tout naturellement au pouvoir, soit des arrangements selon le modèle de l’Irak et du Liban seront établis afin de partager les attributions entre les différents groupes religieux et ethniques. »

    Le très fragile accord de cessez-le-feu a besoin de beaucoup plus pour produire une formule de paix. De toute façon, tout gouvernement de transition à Damas devrait refléter la réalité ethnique et religieuse de Syrie, conclut l’analyste de politique étrangère Iulian Chifu. (trad. Alex Diaconescu)

  • 6.04.2015 (mise à jour)

    6.04.2015 (mise à jour)

    Bucuresti — Le MAE de Bucarest continue les opérations pour évacuer les ressortissants roumains du Yémen, pays en proie à une guerre civile qui a fait plus de 500 morts des deux dernières semaines. Six Roumains ont été rapatriés à la fin de la semaine dernière, tandis que 17 autres avaient regagné la Roumanie fin mars. La cellule de crise mise en place au MAE continue à fournir de l’assistance et de la protection consulaire aux compatriotes touchés par la détérioration grave de la situation sécuritaire au Yémen. La diplomatie roumaine collabore avec les organisations internationales impliquées dans les opérations d’évacuation et avec les Etats qui agissent pour le rapatriement de leurs ressortissants de ce pays africain. Les miliciens chiites houthis, fidèles à l’ancien président Ali Abdallah Saleh et appuyés par l’Iran, contrôlent une grande partie du territoire yéménite, y compris la capitale Sanaa. Leurs adversaires sont les Comités populaires et les forces loyales au président légitime Abd Rabbo Mansour Hadi.



    Justice- La Haute Cour de Justice et de Cassation doit se prononcer mardi sur la rêquete avancée récemment par l’ex ministre des Finances, Darius Valcov, d’annulation de son détention provisoire et son remplacement par la sentence d’assignation à résidence. Darius Vâlcov est accusé d’avoir accordé des contrats privilégiés en échange pour 2 millions d’euros en 2008 — 2009, lorsqu’il était maire de la ville de Slatina, dans le sud de la Roumanie. La semaine dernière, le Sénat a accepté d’élargir l’enquête dans le cas de Valcov, accusé cette fois -ci, de trafic d’influence. Selon les procureurs anticorruption, ces quatre dernières années, pendant ses mandats de ministre et de sénateur, Darius Vâlcov a effectué des opérations financières incompatibles avec les fonctions qu’il détenait.



    Cyber-sécurité — La loi sur la cyber- sécurité est impérieusement nécessaire, a déclaré lundi le ministre pour la Société informationnelle, Sorin Mihai Grindeanu. Dans une interview à Radio Roumanie, celui-ci a précisé que dans le courant de l’année dernière, le monde a recensé plus de 80 millions de cyber alertes, de 30% de plus qu’en 2013. Le Parlement roumain a adopté fin 2014 la loi de la sécurité cybernétique que la Cour constitutionnelle a par la suite déclarée contraire à la loi fondamentale du pays. Selon la Cour constitutionnelle, le texte était contraire aux dispositions de la Constitution concernant l’Etat de droit et le principe de la légalité, ainsi qu’aux celles concernant la vie personnelle, familiale et privée, ainsi que le secret de la correspondance.



  • La Roumanie et la guerre civile grecque (1946-1948)

    La Roumanie et la guerre civile grecque (1946-1948)

    La Roumanie entre dans la sphère d’influence soviétique et dans un processus de soviétisation. En même temps, la Grèce entre sous l’influence anglo-américaine qui y installe la démocratie. Jusqu’en 1941, les deux pays avaient eu de bonnes relations, à l’exception du dernier quart du 19e siècle et de la première décennie du 20e. Lorsque les troupes allemandes transitent la Roumanie en route vers les Balkans, à l’automne 1941, la Grèce condamne la violation du protocole de l’Entente balkanique de 1934 signé avec la Roumanie et la Yougoslavie.



    Les relations roumano — grecques se compliquent davantage après 1945. Se trouvant sous occupation soviétique, la Roumanie ne peut pas reprendre ses relations normales avec le gouvernement grec légitime à cause des pressions exercées à l’intérieur par le gouvernement communiste et en Grèce par les guérillas communistes qui vont projeter leur pays dans une guerre civile qui durera de 1946 à 1949. A l’instar des autres gouvernements communistes des pays occupés par les soviétiques, les autorités communistes roumaines ont agréé la position de l’Union Soviétique qui soutenait les partisans grecs.



    Apostolos Patelakis, professeur à l’Université de Salonique, passe en revue les pays les plus actifs en ce sens : «Dans la première étape de la guerre civile, entre 1946 — 47, les communistes grecs ont été soutenus principalement par Tito et par Staline, qui leur ont offert du soutien moral et matériel. Ils ont été par la suite aidés par la Bulgarie de Dimitrov et l’Albanie d’Enver Hogea. Les communistes grecs voulaient créer ce qu’ils appelaient « une Grèce libre » dans le Nord de leur pays; ils demandaient donc aux pays socialistes de les aider avec tout ce dont ils avaient besoin pour accomplir cet objectif grandiose. En août 1947, dans la station de Bled en Slovénie, les représentants de la Yougoslavie, de la Bulgarie et de l’Albanie ont convenu d’offrir de l’aide morale et matérielle à l’armée démocratique grecque demandant en même temps à la Roumanie et à la Hongrie de renforcer leurs contributions respectives. Lors du conseil de création du Kominform, organisé en septembre 1947, en Pologne, les débats ont été ciblés sur la guerre civile de Grèce. Dans ce contexte, le chef de l’Etat roumain, Gheorghe Gheorghiu–Dej, a proposé que tous les partis communistes soient obligés à aider le parti frère de Grèce. Pour sa part, le représentant polonais, Wladyslaw Gomulka, a proposé que la question grecque devienne le symbole de la lutte de tous les partis communistes et des forces démocrates. »



    Les divergences entre Tito et Staline allait se répercuter sur l’aide que les pays socialistes accordaient aux communistes grecs. Ceux-ci vont transférer leur centre de coordination de Belgrade à Bucarest. Une ambassade du gouvernement communiste du général Markos y est créée et c’est Lefteris Apostolou qui en est désigné ambassadeur. Une radio et une agence de presse sont également mises sur pied. Apostolos Patelakis. « Le 14 janvier 1948, Lefteris Apostolou envoie au secrétariat du Parti Communiste Roumain un rapport d’une trentaine de pages, où il présente la situation en Grèce et les cause de la guerre civile et demande à la Roumanie d’établir la première relation d’amitié avec le gouvernement provisoire. Je cite : « Je dois ajouter que l’aide offerte par le peuple roumain excède à présent toute autre aide des pays démocratiques et cela, ni mon parti, ni le peuple grec ne l’oublieront jamais. » Evidemment, ce n’était pas vrai, l’aide la plus importante, les Grecs l’avaient reçue de Yougoslavie et cette déclaration était faite dans le but de flatter les Roumains. En 1947-1948, les Roumains avaient envoyé en Grèce des denrées alimentaires — conserves, farine, semoule de maïs, sucre, riz, haricots blancs —, des vêtements, des médicaments, de l’armement — armes semi-automatiques, mitrailleuses, grenades, explosifs — ainsi que des chevaux et des combustibles. Dès avril 1948, quand la guerre battait son plein, des milliers d’enfants grecs et des centaines de partisans malades ou blessés ont commencé à arriver en Roumanie. »



    Les ententes entre Soviétiques et Britanniques allaient décider du sort des communistes grecs et des partisans anticommunistes de Roumanie. Le marché conclu était simple : Saline renonçait à financer les guérillas communistes et Churchill n’encourageait pas la politique menée par le souverain roumain et par les partis politiques démocratiques contre le gouvernement communiste de Roumanie.



    Apostolos Patelakis. « Au moment où les émigrants politiques grecs ont commencé à arriver en Roumanie, les enfants en 1948, les adultes une année plus tard, ils s’y sont plu beaucoup plus qu’ailleurs. 7 pays ont accueilli des émigrants grecs. Or, en Pologne, en Tchécoslovaquie, en Ouzbékistan, les populations locales n’avaient même pas entendu parler des Grecs, et ceux-ci se trouvaient dans un environnement étranger. Par contre, en Roumanie il y avaient déjà des communautés grecques, des personnes bilingues, ils pouvaient se faire comprendre et ils se sentaient plus proches de la Grèce, moins dépaysés. Une partie des 28 mille enfants évacués après la guerre civile sont arrivés en RDG. Imaginons le choc de ces enfants, un peu plus grands et plus instruits, comme les Allemands l’avaient exigé : entendre à la maison parler des Allemands, des fascistes, et puis se retrouver là, être obligés à parler leur langue ! Ceux qui sont arrivés en Roumanie ont été plus chanceux — du moins au début. La guerre civile avait touché le nord de la Grèce, zone montagneuse où vivaient de nombreuses familles aroumaines. Parmi les enfants réfugiés en Roumanie se trouvaient donc également des enfants aroumains qui ont servi d’interprètes aux autres et qui ont eu, eux mêmes, moins de difficultés, car ils ont appris plus vite le roumain, auquel l’aroumain est apparenté. »



    Un grand nombre de communistes grecs ont pris le chemin de l’exil, se dirigeant vers la Roumanie. Ainsi, les négociations l’ont-elles emporté sur les idées et les attentes.


    (Trad. : Valentina Beleavski, Dominique)

  • Evolutions de la situation en Ukraine

    Evolutions de la situation en Ukraine

    Séparée de la Roumanie par une frontière mesurant des centaines de kilomètres le long de laquelle est concentrée la minorité roumaine comptant un demi-million de personnes, l’Ukraine est, côté territorial, démographique et géopolitique perçue par Bucarest comme le plus important de ses voisins. L’annexion en mars dernier de la péninsule de Crimée par la Russie et le déclenchement le mois dernier d’une rébellion sécessionniste dans les régions majoritairement russophones et russophiles de l’est et du sud ont été unanimement et à maintes reprises condamnés par l’intégralité de la classe politique roumaine.



    Ce dimanche dernier, le président Traian Bàsescu a réaffirmé que la Roumanie soutient sans réserves l’intégrité territoriale de l’Etat voisin à propos duquel il a dit qu’il se confronte au danger d’éclatement d’une guerre civile, surtout après le carnage de vendredi de Odessa, grande ville-port à la Mer Noire située tout près de la frontière roumaine: « Les événements de Odessa deviennent dangereuses. Ils peuvent constituer l’élément déclencheur d’une guerre civile massive, non pas seulement du début d’une guerre civile. Il n’y a pas de risque pour la Roumanie d’être entraînée dans une guerre mais la Roumanie peut être fortement affectée par la situation d’instabilité engendrée par une guerre civile en Ukraine. L’instabilité va se matérialiser par la manière dont la Roumanie pourra emprunter des marchés extérieurs. »



    A son tour, le premier ministre Victor Ponta a annoncé le fait que le gouvernement fait l’analyse détaillée des implications de la crise ukrainienne et a demandé une réunion spéciale du Conseil suprême de défense du pays: “La Roumanie n’est pas menacée directement mais nous avons l’obligation d’âtre extrêmement attentifs et( coordonnés avec tous nos alliés. J’estime que cette responsabilité implique des structures constitutionnelles et que toute discussion concernant la sécurité de la Roumanie, la sécurité de la région , notre stratégie de concert avec nos alliés trans-atlantiques et européens ne peut se dérouler qu’au sein du Conseil suprême de défense du pays. »



    Dans le contexte, le premier ministre a réaffirmé que Bucarest continuerait d’agir en égale mesure pour assurer l’intégrité et la sécurité de la Rép. de Moldova (ex-soviétique, majoritairement roumanophone) qui, à son tour, se confronte avec des foyers de séparatisme pro-russe dans la Transdniestrie(est) et la Gagaouzie( sud). Auparavant, le ministre roumain des Affaires étrangères avait à son tour désapprouvé fermement les violences de Odessa. La diplomatie de Bucarest a exprimé sa solidarité avec le peuple ukrainien et son soutien de son parcours européen et des efforts des autorités de Kiev de stabiliser la situation interne. Le ministère précise encore qu’à travers le Consulat Général de Roumanie de Odessa on surveille en permanence la situation des ethniques roumains de la région…(trad. : Costin Grigore)