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  • “N’attendez pas trop de la fin du monde” de Radu Jude

    “N’attendez pas trop de la fin du monde” de Radu Jude

    Chef-d’œuvre de collage et de montage,
    dramatique et comique à la fois, le dernier titre du cinéaste roumain, Radu
    Jude, N’attendez pas trop de la fin du monde représente la proposition de la
    Roumanie aux Oscars du meilleur film étranger en 2024. La comédienne Ilinca
    Manolache și l’acteur amateur Ovidiu Pîrșan sont les protagoniste de ce long
    métrage récemment sorti en salle, en Roumanie. Présenté en première au Festival
    international de film de Lucarno, le film a été récompensé du Prix du jury, de
    la Maintien du jury oecuménique et du Prix du public jeune.

    Considéré comme l’un des cinéastes les plus
    importants du moment, Radu Jude fait ses débuts en 2009 quand son premier long
    métrage, La Fille la plus heureuse du monde décroche le prix de la
    Confédération internationale des cinémas d’art et d’essai à la Berlinale. En
    2015, son film Aferim est sélectionné en compétition officielle au 65e
    festival international du film de Berlin et obtient l’Ours d’argent du meilleur
    réalisateur. En 2018, le film Peu m’importe si l’Histoire nous considère comme
    des barbares est couronné par le Globe de cristal du Festival de Karlovy Vary.

    Dans un article sur la publication en ligne
    les Inrockuptibles, Robin Vaz affirme et nous citons En montant ces séquences
    avec des extraits d’un film produit dans les années 1980 sous la dictature de
    Ceaușescu et à la gloire d’une chauffeure de taxi modèle, le cinéaste met en
    perspective le pouvoir économique d’aujourd’hui avec le pouvoir politique
    d’hier. Dans les deux cas, les images dominantes reposent sur des mécanismes pervers
    qui dépouillent les plus démuni·es de leurs propres reflets, paroles et
    histoires. Par le zoom et le ralenti, Jude exhume alors du fond de la pellicule
    des figures du lumpenprolétariat que la censure avait tenté de dissimuler
    derrière le visage d’une brave travailleuse héroïque.



    En octobre dernier, lors d’une conférence de
    presse, la Roumanie annonçait sa proposition aux Oscars. Invités aux micro de
    RRI, le réalisateur Radu Jude et la protagoniste, Ilinca Manolache, se penchent
    sur l’avatar numérique créé dans le film.

    Ce film se nourrit de mon désir de mettre à
    profit ma frustration envers ce type de dynamique si présente dans la société
    roumaine. Moi, j’avais déjà travaillé avec Ilinca pour des rôles secondaires et
    je voulais absolument lui offrir un rôle principal. J’ai été séduit par l’idée
    de cet avatar car il m’a permis de formuler des critiques d’une manière très
    intelligente. Après, les collages ont ouvert plusieurs voies à l’exploration.Et
    puis, enfin, j’ai tenté de répondre à travers ce film à la question qu’est ce
    que c’est qu’une image? Qu’est-ce qu’une image représente-t-elle en rapport
    avec la réalité? Qu’est ce que l’humanité perd avec toutes ces images
    virtuelles qui ont le vent en poupe, avec l’Intelligence artificielle qui rend
    les choses parfois plus compliquées. Il y a une certaine énergie qui se
    dégagent de toutes ces plateformes en ligne qui nous renvoient au début du
    cinéma.




    Effectivement, Robin Vaz affirme sur le même
    site les Inrockuptibles que tous ces
    collages déconstructivistes de Radu Jude évoquent les films de Godard, tout en
    se parant d’un humour dévastateur. Comment le cinéaste a-t-il construit ce
    film, et comment a-t-il fait pour insérer
    la partie en noir et blanc datant des années 1980?


    A parler de tous ces extraits du film en noir
    et blanc, les choses se sont construites pas à pas, parce que même le projet,
    dans son ensemble, il s’est construit pas à pas. Je n’ai pas eu dès le départ
    l’idée de faire un montage qui mélange le fil principal à l’histoire d’un avatar
    et aux images en noir et blanc extraites du long-métrage de Lucian Bratu,
    Angela avance. Tout cela est venu au fur et à mesure que le projet avançait.
    Nous avons décidé de tourner non seulement en noir et blanc, mais aussi sur une
    pellicule cinématographique d’une largeur de 16 mm, par souci de faire une
    sorte d’expérience en voie de disparition
    .






    Comment Ilinca Manolache a-t-elle reçu la
    proposition de faire un tel rôle?


    Pour moi, le plus important a été de rester
    attentive à tout ce que Radu voulait de moi, à me concentrer sur les choses
    qu’il me prétendait à faire. Quand j’ai lu le scénario, je m’y suis retrouvée,
    donc, le personnage était assez proche de moi. Je suis tellement fière d’avoir
    fait ce rôle qui me représente beaucoup que j’avoue que parfois, il m’arrive de
    me poser la question: et maintenant, comment ma carrièreva évoluer? Est-ce que
    l’avenir pourrait-il m’apporter un autre rôle tout aussi important que celui du
    film de Radu?




    Interrogé sur sa participation, l’acteur
    amateur Ovidiu Pîrșan a ajouté:


    Pour moi, ce projet reste ma plus belle
    expérience de vie. C’est pour la première fois que j’ai joué dans un film et je
    suis comblé. Quant à mon personnage, je l’ai vite incarné, car, je ne sais pas
    si vous le savez, mais moi, dans ma vraie vie, je suis vraiment immobilisé dans
    un fauteuil roulant. Donc, en quelque sorte, j’ai porté à l’écran ma propre
    histoire, mais d’une manière différente
    . (trad. Ioana Stancescu)