Tag: jardin public

  • “Agora Kiseleff” pour protéger le patrimoine paysager

    “Agora Kiseleff” pour protéger le patrimoine paysager

    Le parc Kiseleff – le premier jardin public de Bucarest

     

    Le Parc Kiseleff de Bucarest est devenu un modèle de bonnes pratiques en matière de gestion des parcs et des jardins historiques. A la fin du mois d’août, il a accueilli plusieurs événements interdisciplinaires grâce au projet « Agora Kiseleff ». Aménagé en 1832, le Parc Kiseleff a été le premier jardin public de Bucarest dont la composition s’était appuyée sur la forêt qui occupait cette zone de la capitale roumaine. L’avenue homonyme (Şoseaua Kiseleff), qui traverse le parc, fut construite la même année. La conception du parc est due à l’architecte paysagiste Wilhelm Mayer, celui qui avait aussi imaginé le Parc Cișmigiu, du centre-ville de la capitale. De nos jours, le Parc Kiseleff occupe 31.690 m², décorés de nombreuses statues de personnalités culturelles nationales et internationales, qui se sont ajoutées aux éléments naturels pour embellir les lieux. Le parc fait partie des monuments classés de Bucarest.

     

    Faire l’inventaire du parc Kiseleff

     

    Le projet « Agora Kiseleff » repose sur les résultats issus du projet plus large intitulé « Le Registre Vert pour le Parc Kiseleff. Le Registre Vert pour la Roumanie »,  qui a inclus des ateliers interactifs de restauration des jardins historiques et de gestions des arbres et des arbustes.

     

    C’est un projet – test pour une bonne gestion future des espaces verts, coordonné par l’architecte paysagiste Diana Culescu :

    « En fait, « Agora Kiseleff » fait partie de deux projets, dont l’un s’appelle « Le Registre Vert pour le Parc Kiseleff. Le Registre Vert pour la Roumanie », son but étant de mettre au point un modèle à suivre pour que la Roumanie réalise ce qu’elle aurait dû faire, selon les textes législatifs, depuis 2007, mais qu’elle n’a pas fait jusqu’à présent. Ce projet s’est également joint à un autre culturel, qui a apporté l’idée de l’« Agora Kiseleff ». Pratiquement, nous avons réuni des étudiants spécialisés et des fonctionnaires de l’administration publique pour produire cet instrument dans le contexte de la Roumanie. Un instrument qui existe à l’étranger, mais que nous devons adapter à notre contexte spécifique. Nous avons eu plusieurs actions qui nous ont permis de dresser un inventaire du Parc Kiseleff et d’analyser tous les éléments. Le plus souvent, nous faisons l’erreur de croire que le registre vert concerne uniquement les arbres, mais en réalité il s’agit aussi des bancs publics, des arbustes et ainsi de suite ; il nous sert de guide pour adapter l’application et la rendre utile pour nous. Nous avons bénéficié de l’aide de trois spécialistes en protection du patrimoine de France, des Etats-Unis et de Hongrie. »

     

    Un projet qui sera élargi

     

    Ce projet sera-t-il appliqué à d’autres parcs de Bucarest et d’autres villes du pays? La réponse de Diana Culescu est affirmative :

    « C’était justement l’idée de départ d’« Agora Kiseleff », à savoir rassembler des gens de différents bords, et des échanges sont en cours avec des participants à notre école d’été pour développer quelque chose de similaire dans les villes d’Aiud et de Călărași. Ma réponse est donc oui, c’est effectivement notre but de multiplier ces idées de projets originaux. Ce nom, « Le Registre Vert pour Kiseleff. Le Registre Vert pour la Roumanie », dit clairement que nous voulons disséminer cet instrument à travers le pays, un outil de travail qui est, comme je l’ai déjà dit, demandé par loi. »

     

    Protéger le patrimoine paysager

     

    Alexandru Mexi, paysagiste à l’Institut National du Patrimoine, s’est impliqué dans le projet « Agora Kiseleff »:

    « J’ai été doublement impliqué dans ce projet, de la part des organisateurs et de la part de l’Institut National du Patrimoine. Ce projet est très important car il nous aide à définir de nouvelles directions pour la protection du patrimoine paysager. Le registre vert est pratiquement une banque de données très importantes pour comprendre la dynamique d’un parc : quels sont ses problèmes et ses besoins? Comment résoudre les problèmes dépistés? Cet outil de travail, bien que prévu par une loi adoptée en 2008, n’a été que très peu utilisé et souvent de façon discontinue. »

     

    Des lois difficile à appliquer

     

    Le paysagiste Alexandu Mexi nous a aussi fait part de son opinion concernant les lois régissant les espaces verts et le patrimoine de Roumanie :

    « Je crois que la législation concernant la protection des espaces verts est plus difficile à appliquer. Le texte de la loi est bien fait, mais il existe des problèmes de compréhension et des instruments à mettre en œuvre, qui ont avant tout besoin d’être bien conçus et financés. Je pense que les problèmes sont assez souvent liés à la façon de mettre en page les cahiers des charges pour élaborer les registres verts. Pour ce qui est de la législation du patrimoine, la loi de la protection des monuments classés, les choses se passent un peu mieux, même si ce n’est pas extraordinaire, loin de là. Comme je l’ai dit, le registre vert est un instrument, un outil qui nous aide à mieux comprendre, plus en profondeur, les biens de patrimoine et il vient compléter les registres nationaux des biens culturels immeubles. » (Trad. Ileana Ţăroi)

     

  • Le parc Romanescu de Craiova

    Le parc Romanescu de Craiova

    Son histoire est intimement liée à la famille de boyards Bibescu-Ştirbey, dont deux représentants sont montés sur le trône de la Valachie. Au XIXe siècle, le terrain de l’actuel parc, situé à la sortie de la ville, appartenait à Iancu Ioan Bibescu, grand dignitaire à la chancellerie valaque. Il y avait fait aménager un jardin, parsemé de bancs et de pavillons. Puisque les habitants de Craiova pouvaient s’y promener à leur gré, cet espace servit donc de jardin public aussi.L’idée d’y aménager un parc est donc apparue tout naturellement au début du 20e siècle, lorsque le maire de la ville de Craiova, Nicolae Romanescu, décida de fonder un parc conçu selon un projet primé de la médaille d’or de l’Exposition internationale de Paris en 1900.

    Le projet appartenait au grand architecte paysagiste Edouard Redont, auteur du projet du parc Carol Ier de Bucarest en 1906. Edouard Redont a également gardé quelques traces que la famille Bibescu avait laissées sur les lieux, explique le paysagiste Alexandru Mexi : « La maison Bibescu se trouve toujours dans le parc, à proximité du Jardin Zoologique, qui avait été créé à la même époque. Il ne s’agit pas d’une intervention ultérieure, puisqu’il existe des documents d’époque et des plans relatifs à un enclos des loups, ainsi que sur la manière dont celui-ci devait être construit. Le terrain sur lequel le parc s’étend aujourd’hui était à l’époque une propriété privée, mais certains lopins de terre n’appartenaient à personne. En fait, des caravanes de roms nomades s’installaient le long du ruisseau Valea Fetei, la Vallée de la fille, rendant ce terrain insalubre. Edouard Redont a publié en 1904 un livre appelé « Parc Bibesco », dans lequel il présente en détail toutes les interventions que le parc avait subies. Tout un chapitre est dédié au jardin qui y existait avant l’aménagement de l’actuel parc Romanescu, expliquant le contexte qui avait mené à son apparition. La principale raison a de la création de ce parc était été celle de nettoyer la zone. »

    Au cours des travaux d’aménagement du jardin, qui a porté initialement le nom de Bibescu, Edouard Redont a collaboré avec un autre paysagiste étranger, Jean Ernest, et leur vision transposée sur les lieux resta inchangée jusqu’à nos jours, raconte Alexandru Mexi : « Le parc Romanescu est probablement l’unique jardin public du sud de la Roumanie, sinon de Roumanie, aménagé dans un style purement romantique. Ce style apparut d’abord en Angleterre, vers la fin du 18e siècle et il est répandu uniquement à travers les jardins privés. Vers le début du 19e siècle, il fut adopté aussi par les jardins publics, lorsqu’un véritable phénomène de la création de parcs publics est né. Puis, il est adopté par les Français aussi, qui modifient ce style qui atteint ainsi son apogée. A son tour, Edouard Redont, paysagiste formé en France, élève d’un autre grand paysagiste – Edouard André – est devenu lui aussi adepte du style romantique français qu’il allait utiliser pour le parc Romanescu. Dans le cas des jardins et des parcs, le style romantique présente quelques caractéristiques spécifiques, dont la plus connue est « la nostalgie des ruines ».

    Et le parc Romanescu n’y fait pas exception, puisqu’il possède quelques fausses ruines. L’exemple le plus éloquent est le château d’eau, appelé actuellement le château magique. S’y ajoute le pont aux chaines qui relie les deux rives du ruisseau Valea Fetei. Hormis ces constructions en fausse ruine, il existe aussi de constructions à architecture roumaine traditionnelle, à savoir : la maison du jardinier, l’ancien restaurant et plusieurs pavillons et kiosques ». La végétation du parc a également été alignée aux exigences du même style, explique Alexandru Mexi : « La végétation, typique du style romantique français, est exotique. Rien qu’un exemple : le cyprès chauve, arbre planté au début du 20e siècle, est très beau de nos jours encore. Il n’est pas spécifique pour le sud de la Roumanie, mais à l’époque, il s’inscrivait dans une mode apparue en France et en Espagne et c’est pourquoi il fut acclimaté en Roumanie aussi, y compris dans le parc Cismigiu de Bucarest. Le parc préserve aussi quelques exemples de la végétation d’origine avec quelques vieux tilleuls, mais aussi des frênes et des hêtres qui bordent les étangs longeant le cours du ruisseau Valea Fetei… Malheureusement ces arbres ont commencé à disparaître à cause de l’intervention humaine. Les tranchées creusées près de leurs racines pour installer des câbles, ainsi que d’autres chantiers ont tassé la terre autour d’eux et même endommagé leurs racines. »

    De nos jours encore, les visiteurs peuvent toujours admirer le projet d’origine d’Edouard Redont, tout comme l’ont fait les habitants de Craiova en 1903, lors de l’inauguration officielle du parc, qui s’est déroulée en présence du Roi Carol Ier et de la reine Elisabeth. (Trad. Alex Diaconescu)

  • Michel Minouflet (France) – Le Parc de Cismigiu

    Michel Minouflet (France) – Le Parc de Cismigiu

    Oasis de verdure au cœur de la ville, le parc de Cișmigiu est le jardin public le plus ancien de Bucarest. Etalé sur environ 16 hectares, il a été aménagé selon le style des jardins anglais. Son nom a une histoire assez intéressante. Cismigiu vient du mot « cismea » – qui signifie fontaine publique. C’est un mot aux origines turques, tout comme «cismegiu » qui désigne la personne chargée de la construction et de l’entretien des fontaines publiques.

    Mais pourquoi donner ce nom à un jardin public ? Voici son histoire. En 1779, le prince valaque Alexandru Ipsilanti fait bâtir deux fontaines publiques à Bucarest. L’une d’entre elles se trouvait au même endroit que le parc d’aujourd’hui. Le chef des travaux liés aux eaux construit sa maison non loin de la fontaine. Peu à peu l’eau qui s’en écoule créé une sorte d’étang, appelé d’abord le Lac de Dura le Marchand, selon le nom du responsable. Puis, les gens commencent à l’appeler selon la fonction de celui-ci, à savoir le Lac du Cismigiu, c’est-à-dire du responsable des fontaines.

    Malheureusement, ce lac devient un véritable foyer d’infection pour la capitale, en plus il était souvent inondé et changeait de dimensions. C’est pourquoi, 4 décennies plus tard, en 1830 il est asséché pour être transformé par la suite en jardin public. Les travaux d’aménagement ne commencent pourtant pas avant 1874, lorsque le prince Gheorghe Bibescu fait venir à Bucarest le paysagiste Wilhelm Mayer, ancien directeur des Jardins impériaux de Vienne. C’est à lui qu’incombe la mission de transformer un terrain insalubre en un des parcs les plus charmants de la ville, sinon le plus charmant.

    Le parc de Cismigiu est inauguré en 1854. Il dispose d’une centaine de bancs en bois de chêne et d’un nouveau lac, qui le relie à la rivière Dâmbovita qui traverse la ville. Il devient tout de suite le lieu de rencontre des élites. En 1883 le lac gèle pour la première fois et on y organise des concours de patinage. La même année, le jardin est élargi de 15.000 m et on y apporte des cygnes et des pélicans. Au 20e siècle, en 1943, on y construit la Rotonde des écrivains réunissant les bustes des plus grands auteurs de la littérature roumaine. De nos jours, le parc de Cismigiu recèle plusieurs monuments, dont les ruines d’un ancien monastère de 1756, le monument du Soldat français rendant hommage aux soldats français disparus lors de la Première guerre mondiale, ou encore une source d’eau connue comme la source du poète Mihai Eminescu.

    Je dois vous dire aussi, qu’à un moment donné les visiteurs du jardin de Cismigiu devaient respecter des règles très strictes : il était interdit d’y faire du bruit, d’être impoli, de jeter des ordures ou de vendre des produits. Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Les voix des enfants résonnent dans toutes les allées du parc qui compte plusieurs aires de jeux. On peut acheter des glaces, des jus, même des jouets pour les petits ou bien prendre le déjeuner dans un de ses restaurants. En hiver, le lac est envahi par les amateurs de patinage, alors qu’en été les promenades en barque sont très agréables et romantiques. Et puis, si à l’époque de nos grands-parents les gens venaient écouter la fanfare jouer dans un kiosque de Cismigiu, de nos jours de nombreux spectacles et festivals sont organisés : le Festival international de folklore en juin, un marché de Noël en décembre, des concerts de rock ou bien des activités pour les enfants à l’occasion du 1er juin, la Journée mondiale de l’enfance.

    Voilà pour cet endroit charmant de Bucarest. Merci à Michel Minouflet de nous avoir proposé cette découverte !