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  • Tramway de la poésie

    Tramway de la poésie

    Organisé par l’ONG « Arta nu muşcă » (« L’art ne mord pas »), en partenariat avec la Mairie de la capitale ainsi que la société des transports de la ville de Bucarest – STB SA, le projet « Tramvaiul poeziei » (« Tramway de la poésie ») propose de rapprocher la lecture du public. Selon le Baromètre de la consommation culturelle de 2018, cet évènement a lieu dans un contexte où 69% des Roumains et 46% des Bucarestois déclarent ne jamais avoir lu de livre, contre 9% qui affirment lire presque tous les jours. Le projet « Tramway de la poésie » a débuté le 10 septembre et s’est achevé le 1er octobre. Les Bucarestois qui ont voyagé à bord du Tramway de la poésie ont pu lire ou écouter de la poésie ainsi que du Jazz, et ont pu admirer la centaine de recueils de poésie qui ornaient l’intérieur du tramway.

    Loredana Munteanu, fondatrice et coordinatrice de l’ONG « L’art ne mord pas nous raconte comment est né le projet : « Tout a commencé cette année avec la Journée internationale de la poésie, qui a eu lieu le 21 mars, au cours de laquelle nous avons organisé un évènement en collaboration avec la STB (la Société de transports de Bucarest), qui s’est tenu dans des tramways, et la réaction du public a été plutôt bonne. Nous avons donc poursuivi sur cette lancée en choisissant de rapprocher la poésie du grand public avec un projet intitulé « Poezia nu muşcă » (la poésie ne mord pas). Nous avons invité des poètes et amoureux de la poésie qui ont fait des lectures à destination des passants des rues de Bucarest. S’en est suivi un second projet, au mois de juin, et c’est suite à ces deux évènements qu’est née l’idée d’un projet consacré à la poésie, plus concret et d’une durée plus longue, et c’est justement le Tramway de la poésie. Ce projet s’adresse à tous les voyageurs afin qu’ils puissent avoir une approche différente de la poésie, dans un contexte inédit, au sein d’une bibliothèque interactive, où ils peuvent chaque jour venir écouter les auteurs réciter leurs poèmes ».

    Au cours du premier trajet à bord du tramway jaune orné de citations de grands noms de la poésie roumaine Mihai Eminescu, George Bacovia, Lucian Blaga, Geo Bogza, Nichita Stănescu, Magda Isanos, Tudor Arghezi, Cristian Popescu, les voyageurs ont pu assister à un recital de poésie et de musique donné par l’actrice Silva Helena Schmidt accompagnée par l’artiste américain Warren Walker.

    Un récital qui a été très bien accueilli par le public comme l’explique Loredana Munteanu : « Beaucoup de jeunes ont avoué avoir pris conscience qu’ils devaient lire davantage et passer moins de temps sur leur téléphone et sur leur tablette. J’ai aussi discuté avec des personnes âgées qui ont cru s’être trompées de tramway. Pour elles, il était impossible qu’un tel évènement ait lieu à Bucarest. J’ai aussi rencontré des gens seulement de passage en Roumanie, venus rendre visite à leurs parents ou à des proches, et à qui le projet a beaucoup plu, surtout parce qu’ils n’avaient jamais vu ça ailleurs. J’étais ravie de voir leur réaction, et en me renseignant je me suis rendue compte que c’était vrai, le concept de tramway de la poésie est inédit ou du moins, le seul projet similaire organisé à Hong Kong en 2013 a été d’une durée beaucoup plus courte. En tout cas, un évènement comme le nôtre, exclusivement consacré à la poésie et d’une durée aussi longue n’existe nulle part ailleurs ».

    Dans le cadre de ce projet, un concours de poésie pour les jeunes poètes âgés de 18 à 25 ans a été organisé. Le jury a sélectionné dix gagnants qui participeront à un cours d’écriture créative. À la fin, les participants devront rédiger un poème sur le thème « Sauvons la poésie de notre ville ! ». Le poème gagnant sera inscrit sur le mur d’un des immeubles du centre de Bucarest. De même, les poèmes sélectionnés et en lien avec le projet Tramway de la poésie seront compilés dans un recueil qui sera publié par la maison d’édition Editura Paralela 45, à l’occasion de la Foire internationale du livre Gaudeamus, évènement annuel organisé par Radio Roumanie. (Trad Charlotte Fromenteaud)

  • La Caravane des Insoumises

    La Caravane des Insoumises

    Fini l’époque où les
    femmes étaient ouvertement discriminées, en leur attribuant à tort comme seules
    qualités la beauté, la douceur, la sagesse et surtout la soumission. De nos
    jours, les sociétés modernes font de plus en plus d’efforts pour placer la
    femme sur pied d’égalité avec l’homme. Pourtant, il suffit de regarder tout
    autour pour voir que le pari n’est pas encore gagné, même si la bataille se
    livre déjà sur plusieurs plans et à plusieurs niveaux. Bien que les responsables
    politiques du monde entier examinent souvent la condition des femmes et les
    iniquités auxquelles elles se confrontent, c’est aux sociétés elles mêmes de
    faire des efforts pour éradiquer la discrimination. Une solution, non pas la
    seule, mais certainement, une des plus importantes, serait l’éducation des
    masses et notamment des enfants. Aujourd’hui, on parlera justement d’un
    projet inédit et courageux comme son nom l’indique: la Caravane des Insoumises.
    A mes côtés, dans le studio, Clara Traistaru, manager de projet et Victoria Patrascu,
    écrivaine et l’une des 5 Insoumises qui a participé directement à ce projet
    déroulé dans plusieurs villages de la Roumanie profonde.

  • Matei Visniec

    Matei Visniec

    Matei Vişniec, affirmait en ouverture du salon que la Roumanie était compétitive sur le plan culturel. Il saluait en même temps le choix de l’Union Européenne comme invité d’honneur de la Foire. « La Roumanie a une chance, c’est la culture » – affirmait le dramaturge Matei Vişniec lors du débat «L’Europe du théâtre et des écrivains – la circulation des valeurs artistiques comme fondements de l’Europe », déroulé au stand « Chez nous, en Europe ».

    Matei Vişniec s’est fait remarquer dans les années ’80 comme poète, ensuite comme dramaturge. Ses pièces de théâtre, très appréciées dans les milieux littéraires, ont été interdites sur les scènes roumaines. En 1987, il quitte la Roumanie pour s’établir en France, où il travaille comme journaliste à Radio France Internationale. Ses pièces de théâtre en français sont publiées par des maisons d’éditions telles Actes Sud – Papiers, L’Harmattan, Lansman, Crater ou encore L’Espace d’un instant, et son nom figure l’affiche des théâtres de plus de 30 pays. Depuis une dizaine d’années, Matei Vişniec s’est également affirmé comme romancier. «La femme comme un champ de bataille» (paru en 2006), « Syndrome de panique dans la Ville lumière » (publié en 2009), « Monsieur K Libéré », « Le Cabaret des mots (2012), « Le marchand des premières phrases » (publié en 2013 et qui a reçu plusieurs prix en Roumanie) et j’en passe.

    Lors de la Foire Internationale du livre Gaudeamus, le critique Ion Bogdan Lefter a parlé de la complexité artistique de l’écrivain : « Il est tout d’abord poète, d’une facture très personnelle, qu’il développe ensuite dans sa dramaturgie. Prosateur, également, un prosateur très important. Un écrivain qui, par son effort de nous proposer un nouveau roman tous les deux ou trois ans, s’est gagné un nouveau public. C’est que les amateurs de théâtre sont en général plus nombreux que les amateurs de poésie et les amateurs de roman sont les plus nombreux. Aussi, les éditions Polirom ont-elles publié tous les volumes de prose de Matei Vişniec dans sa collection à grand tirage « Top 10+ ». La prose de Matei Vişniec porte le même sceau que sa poésie et sa dramaturgie des années ’80. »

    Voici, tout de suite, le plaidoyer de Matei Vişniec en faveur du roman, enregistré au stand des éditions Polirom : « Si j’écris des romans, c’est entre autres parce que les genres littéraires sont pour moi comme des enfants, je les aime tous : la poésie, l’essai, le roman, le théâtre. La poésie m’a fait grandir, le théâtre m’a formé, le roman m’a diversifié. Pourtant, à un moment donné, j’ai écrit des romans aussi parce que j’étais frustré du fait que, pour arriver au public, mes pièces de théâtre ont besoin d’intermédiaires. Elles ont besoin d’un directeur de théâtre, d’un metteur en scène, de comédiens, de scénographes. Et tous ces intermédiaires ont commencé à m’inquiéter, je n’agréais pas le fait d’être toujours dépendant d’eux. J’aimais écrire, mais sans avoir toujours besoin d’intermédiaires. J’ai donc écrit des romans aussi parce que je souhaitais créer un lien direct avec mes lecteurs ».

    Et voici également son plaidoyer pour la lecture. Matei Vişniec : « Je peux vous dire que si vous prenez un livre dans vos mains, si vous lisez de la poésie, du théâtre, un roman, de la littérature de qualité, vous ouvrez des fenêtres dans vos âmes, vous devenez vous-mêmes des fenêtres ouvertes sur l’humanité, sur l’imagination, sur la liberté. Je pense que dans un pays, la liberté peut être mesurée, il y a certainement un tel instrument de mesure. Et je pense aussi que le degré de civilisation d’un pays peut être mesuré par la capacité d’aimer la littérature, l’art, le théâtre. Autant de littérature, autant de liberté. Si nous n’apprenons pas à nos enfants à ouvrir un livre et à venir au contact de la littérature, à se raconter des contes de fées, on risque de faire d’eux des mutants. Ici, à la Foire Gaudeamus, je vois beaucoup d’enfants et de professeurs qui y ont emmené leurs élèves. C’est une foire du livre, mais aussi de l’éducation et c’est en même temps un lieu où l’on doit se proposer ce thème de réflexion: comment éduquer nos enfants pour ne pas faire d’eux des gens qui pensent en consommateurs. Et il est tellement important de rester des citoyens dotés d’esprit critique et non pas des consommateurs dans la société de consommation dont nous avons rêvé, mais je ne suis pas sûr qu’elle aille dans la meilleure direction ».

    De nombreux prix ont récompensé l’activité de l’écrivain d’expression roumaine et française Matei Vişniec. En Roumanie il s’est vu décerner le Prix de l’Union des Ecrivains, le Prix de l’Académie roumaine, ainsi que le prix de l’auteur roumain le plus joué accordé par l’Union Théâtrale (UNITER). En France, il a obtenu à plusieurs reprises le Prix de la presse au Festival international de théâtre d’Avignon, ainsi que le prix Européen accordé par la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (en 2009) et le Prix Jean-Monnet de littérature européenne (en 2016). (Trad. : Dominique)