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  • L’écrivaine Andreea Demirgian

    L’écrivaine Andreea Demirgian

    Après nous avoir habitués, pendant qu’elle était encore en Roumanie, aux contes pour enfants – comme par exemple « Les contes de Mlle Petit Brin » ou « Voyage à travers l’arc-en-ciel », ainsi qu’aux enregistrements de livres audio, Andreea Demirgian a inventé un « Atelier pour lire et bricoler des contes ». C’est avec ces idées en tête qu’elle est allée au Canada. L’Atelier pour bricoler des contes est à présent une occasion pour les enfants roumano-canadiens passionnés de lecture de feuilleter et d’inventer des histoires plus anciennes ou plus récentes dans leur langue maternelle ; ils jouent avec les mots et avec les contes pendant 8 séances de 40 minutes à l’école roumaine d’Oakville. Et puisque les enfants y ont accès à une bibliothèque dotée des dernières parutions sur le marché du livre pour enfants de Roumanie, je vous propose de nous familiariser avec le dernier livre signé par Andreea Demirgian. L’écrivaine avait souhaité le publier pour Noël, pourtant il est sorti en mai dernier, à petit tirage, pré-commandé en ligne avant sa parution.

    Andreea Demirgian explique: « C’est un livre que j’avais écrit pour les enfants de l’école roumaine. Pourtant, puisqu’il était très beau et que les dessins étaient extraordinaires, je me suis dit qu’il méritait sa chance en Roumanie aussi. Le livre s’appelle «A quoi rêvent les bonhommes de neige ? ». Il a été publié en édition bilingue anglais-roumain, mais je suis en train de préparer une édition bilingue anglais-français avec laquelle j’espère pouvoir participer cet automne au Festival international des écrivains d’Ottawa et y représenter la Roumanie. Le conte est illustré par Anda Ansheen, une jeune illustratrice de Braşov, que j’ai rencontrée avant de quitter la Roumanie et j’ai attendue patiemment qu’elle ait le temps de s’occuper de mes livres. Nous nous sommes entendues à merveille et elle sera dorénavant mon illustratrice pour une longue période de temps. C’est l’histoire d’un bonhomme de neige qui voit dans la maison d’un enfant un sapin de Noël et il souhaite ardemment en avoir un, lui aussi. Alors, avec le concours d’un ange de neige, il réussit à mobiliser tous les animaux de la forêt et avoir leur propre petit sapin de Noël. C’est un conte empreint de douceur et totalement exempt de violence, qui transmet aux enfants l’idée qu’ensemble nous pouvons faire de belles choses, il suffit de rêver et de réaliser nos rêves. »

    Comment Andreea Demirgian en est-elle arrivée à écrire des livres pour enfants au Canada ? « Je suis très heureuse d’avoir pu sortir au Canada deux livres en deux ans. A vrai dire, je ne m’y attendais pas. Lorsque j’ai émigré, dans les formulaires que j’ai dû remplir, il y avait une rubrique où je devais écrire ce que j’avais envisagé de faire une fois arrivée au Canada et j’ai écrit à tout hasard que j’avais l’intention d’être écrivaine de livres pour enfants. Ce fut le hasard ; pourtant, il est vrai qu’au Canada, les livres roumains pour enfants sont très rares. Mon premier livre, paru l’année dernière à Noël, je l’ai également écrit pour les enfants de l’école roumaine, c’était un cadeau pour les élèves de l’école roumaine d’Oakville, qui a joui pourtant d’un très grand succès à Bucarest. »

    Et puisqu’elle bénéficie déjà d’un grand nombre de lecteurs constants sur son blog, Andreea Demirgian a eu le courage de se promouvoir comme auteure dans le pays qui venait de l’accueillir. Et elle continue son activité de narratrice à laquelle elle avait habitué ses fans alors qu’elle se trouvait encore en Roumanie.

    Andreea Demirgian : «Parce que la Radio me manque beaucoup et que toute ma vie j’ai été une narratrice professionnelle, et parce que j’ai sorti de nombreux livres audio en Roumanie avant de m’établir au Canada, j’ai décidé d’investir dans des équipements professionnels et j’ai commencé à enregistrer des contes de fées libres de droits d’auteur. Les contes classiques, je les enregistre avec le concours d’un excellent technicien, Laurenţiu Calomfirescu ; nous en faisons, tous les deux, de petits joyaux. Ces contes peuvent être écoutés sur mon site, à l’adresse joacă.ro . Sur facebook il y a une page – Ada’s Story Time (L’Heure des contes avec Ada) – où je les annonce et je demande aux parents et aux enfants ce qu’ils souhaiteraient encore écouter. Mon plus grand bonheur, c’est d’entendre les parents dire que les enfants avaient demandé d’écouter le conte encore une fois et encore une fois et encore une fois et « L’Heure des contes avec Ada » fait déjà partie de la vie de nombre de familles. Je ne m’attendais pas à ce qu’une telle chose arrive, mais elle est arrivée. »

    Andreea Demirgian promet de nombreuses autres surprises et nous sommes impatients de l’entendre raconter. (Trad. : Diominique)

  • Les livres pour enfants – entre traductions et textes autochtones

    Les livres pour enfants – entre traductions et textes autochtones

    Après la chute du communisme, dans les années ’90, la littérature roumaine pour enfants, à l’instar d’autres secteurs de la culture, a connu des périodes de déclin. On n’écrivait plus de livres pour enfants en roumain, ce qui a permis aux traductions d’accaparer le marché et, malheureusement, leur qualité n’était pas toujours des meilleures. Cette situation a demeuré presque deux décennies, jusqu’à la fin des années 2000, car c’est à peine vers 2008 – 2009, que les livres roumains pour enfants et les traductions de qualité ont commencé à se multiplier dans les librairies.

    Florin Bican traduit des livres de l’anglais et en anglais. Il est aussi écrivain – prose et vers. Il nous explique pourquoi la littérature roumaine pour enfants a eu un tel destin : «Je pense que dans les années ’90, tout d’abord, les éditeurs roumains ont eu peur de publier de la littérature autochtone pour enfants. Confrontés à l’absence de la demande, les écrivains roumains ont bloqué l’offre, à leur tour. Peu à peu, le public sensibilisé par les traductions de littérature pour enfants a réussi à sensibiliser les maisons d’éditions, qui se sont rouvertes à ce type de livres. Jusqu’en 2000, la littérature roumaine pour enfants avait perdu beaucoup de terrain. Paradoxalement, avant 1989, malgré les rigueurs et les difficultés de l’époque, la Roumanie avait une littérature destinée aux enfants, qui était un genre pris très aux sérieux, j’ose dire. Alors qu’après 1990, elle est tombée dans l’oubli, cédant la place aux traductions, ce qui a été une bonne chose».

    Pourtant, toutes les traductions n’étaient pas de bonne qualité. Dans leur désir d’obtenir le profit sur un marché difficile, les maisons d’éditions ont publié de nombreuses traductions superficielles. Et ce aussi en raison de la réticence des écrivains roumains à se consacrer à la littérature pour enfants, un genre considéré comme difficile.

    Florin Bican explique: «On croit qu’il est très facile d’écrire pour les enfants, une idée répandue notamment par ceux qui n’écrivent pas. Beaucoup de voix disent qu’il n’y a rien de plus facile que d’écrire pour les petits. La tragédie, c’est que parmi eux il y a aussi des écrivains. Pire encore : leurs livres finissent par être publiés. Il y a aussi une autre catégorie : celle des auteurs qui estiment qu’il est difficile d’écrire pour les enfants, car il faut trouver son inspiration. Ce serait une bonne idée de regarder autour de nous, d’observer les enfants, de lire beaucoup de livres pour enfants et de les lire avec le plaisir d’un enfant. Certains d’entre eux se rappellent toujours leur enfance et cela les aide à écrire».

    En tout cas, il est essentiel d’entrer en contact avec les enfants. Pour Sînziana Popescu, c’est la communication avec son propre enfant qui l’a déterminée à écrire. En 2009, son livre «Le voyage de Vlad dans l’Autre Univers » recevait le prix de littérature pour enfants de l’Association des écrivains de Bucarest, une récompense qui n’avait plus été accordée depuis longtemps.

    Ce livre n’était que le premier volume d’une série, car l’écriture n’était pas un problème pour Sînziana Popescu, allait-elle constater: « J’ai commencé à travailler sur cette série en 2002 – 2003, lorsque mon fils était encore petit. Je l’ai fait en pensant à lui, car je voulais lui laisser un héritage, lui présenter les personnages de la mythologie roumaine, lui expliquer qu’il y avait aussi des héros roumains à retenir… A l’époque, les enfants lisaient beaucoup de livres de fantasy de la littérature anglo-saxonne, c’étaient de très beaux livres, d’ailleurs, que j’avais d’ailleurs lus. Mais nous aussi, nous avons quelque chose à prouver, les personnages de notre mythologie sont tout aussi intéressants. Je ne me suis pas proposé d’éduquer, mais d’écrire une histoire agréable et intéressante. Si on y trouve même une morale, sachez que j’ai essayé de la filtrer. Je n’ai pas voulu la cacher, mais la morale n’était pas mon principal objectif, car en général les enfants rejettent toute tentative de moraliser ».

    Ogres, fées, dragons, l’oiseau-lyre et autres personnages mythiques typiquement roumains se donnent donc rendez-vous dans l’histoire de début de Sanziana Popescu. Le personnage principal, Vlad, est un gamin qui fuit la maison parentale, jaloux car ses parents accordaient davantage d’attention à ses petits frères. Une situation de plus en plus répandue au sein des familles roumaines. Vlad s’enfuit donc dans l’Autre Univers, celui des contes, de l’imagination, des désirs et des rêves que tout enfant a, pour en rentrer plus sage et plus compréhensif, après un voyage plein de suspens et de surprises.

    Par ailleurs, c’est toujours pour échapper aux tentatives moralisatrices, mais aussi pour divertir les jeunes, que Florin Bican a écrit une version non conformiste, dans un langage urbain, du conte de fées « Harap – Alb ». (Harap – Alb est un héros roumain qui fait un voyage initiatique pour lutter contre les forces du mal). Résultat: un livre assez inattendu… pour les parents, constate l’auteur Florin Bican: «Cette idée m’est venue à l’esprit au cours des conversations avec mon fils, qui a maintenant presque 30 ans. A chaque fois qu’un texte lui semblait trop difficile, j’essayais de l’animer pour lui. C’est un exercice que j’ai fait à plusieurs reprises pour mon fils : prendre un texte consacré et le tourner à l’envers. J’ai noté toutes les réactions. Les enfants ont accepté le livre sans réserves et j’ai été étonné de découvrir en discutant avec eux que les termes non conformistes ne les dérangeaient pas. Il ont suivi le fil de l’histoire, qui a porté ses fruits. Pour eux, un personnage qui parle de manière ridicule est ridicule et finira par être puni. Il ont également compris la parodie. Toutefois, cela n’a pas été le cas de tous les profs et de tous les parents».

    Bien que les livres roumains pour enfants se soient multipliés ces dernières années, le nombre d’auteurs ne suffit toujours pas, estime Sanziana Popescu: «Le marché du livre est suffoqué par les traductions, certaines de qualité, d’autres – d’une qualité douteuse. Les genres ne sont pas trop variés non plus. En fait, on n’a que deux catégories : les best-sellers contemporains et les classiques, tels qu’Astrid Lindgren, Mark Twain ou Beatrix Potter. Mais on ne sait rien sur les écrivains suédois contemporains, par exemple. En même temps, les auteurs roumains, on peut les compter sur les doigts d’une main ou de deux mains. Il sont très peux nombreux, d’où le déséquilibre du marché roumain».

    La dernière création de Sanziana Popescu est consacrée aux enfants de 3 à 7 ans, c’est un livre bilingue roumano – suédois, paru aux éditions « Pionier Press » de Suède. (Trad. Valentina Beleavski)