Tag: nationalisme

  • La Roumanie et la lutte contre le terrorisme

    La Roumanie et la lutte contre le terrorisme

    Moins d’une année après le carnage dans la rédaction de l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, les djihadistes ont à nouveau frappé le cœur de la France. Parmi les victimes figure aussi un couple de Roumains, parents de deux enfants. Alliée de la France au sein de l’OTAN et partenaire dans l’UE, francophone et francophile par tradition, la Roumanie a vite fait de se rallier aux mesures adoptées par la communauté internationale qui essaie d’éviter que de telles atrocités se répètent à lavenir aussi.



    Dans le contexte des débats menés à Bucarest sur la question des quotas de réfugiés du Moyen Orient et d’Afrique du Nord que les djihadistes peuvent aisément infiltrer, le président roumain, Klaus Iohannis, a tenu à souligner qu’à l’instar d’autres pays d’Europe centrale et de l’Est, la Roumanie n’est pas une destination de prédilection de ceux-ci.



    Le terrorisme vise à susciter la peur, a affirmé le chef de l’Etat roumain: “Ce n’est qu’au moment où l’on permet à la peur de pénétrer le tissu social de nos pays que les terroristes parviennent à leur fin. Or force nous est d’empêcher que cela arrive. Nous ne devons pas laisser la xénophobie, l’ultra-nationalisme, le chauvinisme à gagner du terrain dans nos sociétés. Par ailleurs, il est hors de question de laisser cette peur nous mener à stigmatiser certaines communautés religieuses qui n’y sont pour rien”.



    Par respect pour les minorités ethniques et religieuses, la population musulmane de Roumanie ne fera pas l’objet de mesures spéciales, a fait savoir le président Iohannis. Massés surtout dans le sud-est du pays, en Dobroudja, ancienne province de l’Empire Ottoman, pendant des siècles, les quelque 70 mille musulmans de Roumanie, tatares et turcs notamment, sont un véritable modèle d’intégration et de loyauté envers l’Etat roumain. De même que les autres ethnies vivant sur le territoire roumain, les deux communautés sont dailleurs représentées doffice à la Chambre des députés du Parlement de Bucarest. Notons aussi quau début des années 2000, lorsque les troupes roumaines participaient aux campagnes anti-terroristes dAfghanistan et dIrak, le porte-parole du ministère roumain de la Défense était un officier dorigine turque, très populaire parmi les journalistes.



    Par ailleurs, le chef du culte musulman de Roumanie, mufti Murat Iousouf, a durement condamné, et sans équivoque, les attaques de Paris de même que tous ceux qui organisent ce genre dactes cruels: “Il sagit, tout dabord, dun crime contre lhumanité. Ces actions nont aucun lien avec la religion islamique, même si ces gens se disent des adeptes de lIslam. Pour ma part, jai, à nouveau, appelé tous les leaders religieux musulmans à nous réunir et à trouver des solutions pour ne plus voir apparaître de tels groupements au sein de notre communauté religieuse! Pour ne plus avoir des gens qui donnent une interprétation erronée au saint Coran. Il y a un verset dans le 5e chapitre du Coran qui dit clairement: celui qui tue une âme, un être humain, tue toute une société, toute une communauté!”, a précisé le mufti Murat Iousouf.



    Le muftiat musulman de Roumanie a également exprimé sa compassion profonde aux familles des victimes tuées et blessées dans les attaques de Paris et transmis ses condoléances à lambassade de France de Bucarest. (trad.: Mariana Tudose, Andrei Popov)

  • Symboles nationaux sicules

    Symboles nationaux sicules


    Les Sicules constituent la plus ancienne minorité de l’espace roumain. En 1116, ils sont mentionnées comme une avant-garde de la chevalerie magyare tout comme les Petchénègues, un autre peuple nomade d’origine turque. Guerriers chevronnés au Moyen Age, les Sicules ont été colonisés par le Royaume de Hongrie sur la frontière est longeant les Carpates Orientales afin de la défendre contre les invasions des peuples migrateurs provenant d’Asie. Le premier document qui les mentionne à l’intérieur de l’arc carpatique date de 1210 et affirme qu’une armée formée de Sicules, Saxons, Roumains et Petchénègues a participé à la répression d’une révolte contre le tsar bulgare Borila.


    Ce fut toujours à cette même époque, plus précisément en 1217, que les Sicules figurent parmi les combattants de l’armée du roi hongrois André II, lors de la 5e croisade contre les Arabes. Dès lors, les Sicules habitent sans interruption les mêmes territoires appelés le pays Sicule, qui s’étend sur les actuels départements de Harghita, Covasna et Mureş. Ils comptent aujourd’hui 650 mille personnes, soit environ 45% des 1.430.000 membres de l’ensemble de la communauté magyare et 6,6% de l’entière population de la Roumanie.


    L’Académicien Pál Antal Sándor explique quelle était la place et la condition sociale des Sicules dans la Hongrie médiévale, mais aussi après l’occupation autrichienne : « S’ils remplissaient des tâches militaires, ils ne payaient plus d’impôts. Les premières obligations fiscales envers la cour royale hongroise étaient celles que les sujets devaient payer trois fois pendant le règne d’un roi : à son intronisation, à la naissance de son héritier et lors de son mariage. Cette tradition a été valable jusqu’en 1555, quand à eu lieu la dernière collecte. Sur six bœufs, par exemple, il fallait en donner un. Les obligations fiscales n’ont pas existé jusqu’en 1657, lorsque les Sicules ont commencé à payer des taxes à la Sublime Porte ottomane, suite à la campagne militaire entreprise par Gyorgy Rakoczy II en Pologne, qui s’est achevée par une défaite cinglante. Pendant l’occupation autrichienne, ils ont été exemptés de la prestation de tâches militaires en 1711, parce que leurs façon de lutter était déjà obsolète. Ils sont devenus contribuables, mais leur état social était celui de personnes libres, bénéficiaires de tous leurs anciens droits. Devant la justice par exemple, ils bénéficiaient des mêmes droits que la noblesse. »


    Après 1989, des présences publiques des Sicules ont facilité l’expression des sentiments de nationalisme les plus exacerbés, alimentés par les perceptions de leur passé. Le plus récent épisode de ce genre date de février 2013, lorsque le drapeau hissé dans la ville de Sfântu Gheorghe, département de Covasna, a provoqué un nouveau scandale. Ce geste a été vu comme une nouvelle tentative des Sicules de demander l’autonomie territoriale sur des critères ethniques. Même s’il est une création récente, les origines du drapeau Sicule datent de plusieurs siècles. Pál Antal Sándor explique comment ce drapeau est apparu : « La bannière a été instituée en 2004, sur l’initiative du Conseil national Sicule, d’après un projet imaginé par Konya Adam, muséographe de la ville de Sfântu Gheorghe. Ce drapeau s’inspire d’un étendard militaire de 1601, celui des fantassins de Moïse Secuiul, le seul prince transylvain d’origine sicule. Les couleurs jaune et bleu en ont été puisées dans les documents historiques, tandis que l’étoile à huit branches est une innovation récente. Jadis, on utilisait plutôt des étoiles à cinq ou six branches… La symbolique renvoie aux huit régions habitées par des Sicules, des contrées appelées aussi « chaises ». Le croissant de lune, lui, a la forme et la signification traditionnelles. »


    Bien que très anciens, les symboles nationaux des Sicules n’ont pas été constamment utilisés tels quels. Ils ont été adaptés aux différents contextes historiques, explique Pál Antal Sándor : « Au fil des siècles, les Sicules n’ayant pas d’origines hongroises ont été magyarisés vu notamment les missions militaires qu’ils devaient assumer ; ils bénéficiaient d’un statut particulier au sein de la communauté de souche hongroise. Les Sicules vivaient sur un territoire très bien délimité, mais durant la révolution de 1848, ils ont explicitement renoncé aux droits qui les différenciaient des autres Magyars, intégrant la nation hongroise. En octobre 1848, après le rassemblement national de Agyagfalva–Lutiţa,les assemblées des régions Sicules ont reconnu toutes les lois hongroises et ont déclaré leur appartenance à la nation hongroise unique. Depuis, au sein de la Hongrie, les Sicules n’ont plus utilisé de bannière spécifique. »


    Après 1918, lorsque s’est constituée la Grande Roumanie, les symboles Sicules ont été inclus sur les armoiries de la Transylvanie. Peu de monde est cependant au courant du fait que certains d’entre eux étaient identiques à ceux faisant partie des armoiries des Principautés roumaines médiévales. Pál Antal Sándor: « Moi, j’attends la réponse des historiens roumains à ce sujet. La question est de savoir quelle est l’origine de ces symboles. En tout cas, ils sont orientaux, turcs le plus probablement. Ils ont été utilisés par les populations d’origine turque et la Valachie a subi la domination des Coumans pendant 200 ans. Il est tout à fait normal que ces symboles soient également présents dans l’héraldique de la Valachie. De telles influences existent probablement aussi dans le cas de la Moldavie. Ce n’est pas une affirmation de ma part, c’est une question que je pose. Le croissant de lune apparaît partout, mais il est possible que nous rencontrions une étoile à la place du Soleil. »


    Les Sicules sont une minorité à forte conscience ethnique, qu’ils entendent conserver. Ils investissent donc leurs symboles nationaux de la même importance que d’autres communautés ethniques et nations attribuent à leurs propres symboles. (trad. : Ileana Taroi, Alexandru Diaconescu, Andrei Popov)