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  • Le Palais « Universul » de Bucarest

    Le Palais « Universul » de Bucarest

    Fondé par l’Italien
    Luigi Cazzavillan et devenu, avec le temps, une référence de la presse écrite
    roumaine jusqu’à sa suppression par le régime communiste au début des années
    1950, le journal « Universul » avait sorti son premier numéro le 20
    août 1884. La rédaction, dont les bureaux se trouvaient à l’intérieur du bâtiment
    également appelé « Palatul/Le Palais Universul »,
    au centre-ville de Bucarest, a multiplié les suppléments, finissant par créer
    un véritable empire de presse.

    Luigi Cazzavillan, ancien volontaire garibaldien
    établi dans la capitale roumaine, où il a enseigné l’italien, tout en étant le
    représentant du fabricant de vélos Bianchi, est salué de nos jours pour ses
    contributions essentielles au développement de la presse populaire roumaine à
    travers des publications qui rendaient accessibles à tout un chacun des
    informations culturelles et scientifiques. Cazzavillan est malheureusement
    décédé à seulement 52 ans, au début de l’année 1904. Durant la première guerre
    mondiale, le journal « Universul » cesse de paraître, mais après le
    retour de la paix, le quotidien est repris par des patrons successifs, dont le
    journaliste et homme politique de centre-droit Stelian Popescu fut le plus
    connu. Celui-ci s’est trouvé à la tête de la rédaction jusqu’en 1943, couvrant
    ainsi, entièrement ou presque, la période de l’entre-deux-guerres et marquant
    de son empreinte, notamment de ses options politiques, le travail des
    journalistes de la rédaction. Malgré l’abandon de sa neutralité politique, « Universul »
    a continué d’être le quotidien le plus vendu, ayant même réussi à survivre sous
    le régime communiste jusqu’en 1953.

    Le Palais Universul, siège de la rédaction
    à l’entre-deux-guerres, date lui-aussi de l’époque où Stelian Popescu dirigeait
    le journal. Imaginé par le grand architecte roumain Paul Smărăndescu, ce
    bâtiment imposant est un mélange de deux styles : le néo-roumain,
    caractéristique de l’architecture d’après la Grande Union de 1918, et le
    moderniste. L’historienne de l’art Oana Marinache parle de Paul Smărăndescu, un
    architecte prolifique né le 26 juin 1881, qui avait des racines profondes dans
    une des zones historiques de Bucarest, restée quasi inchangée jusqu’à nos jours: Il est né dans une famille aisée, dans le faubourg Mântuleasa. Par ses
    deux parents, il était le descendant de la grande famille de commerçants Solacolu,
    originaire du sud du Danube, de l’Empire ottoman à l’époque. Le jeune Paul
    Smărăndescu et ses petites sœurs naissent donc dans une famille de la
    bourgeoisie montante. À la fin du XIXe siècle, il est élève à l’école des
    garçons Mântuleasa, près de la maison familiale. Il continue ses études
    générales au lycée « Matei Basarab » et, après l’examen de
    Baccalauréat, il passe le concours d’entrée à la Faculté d’architecture déjà
    créée à Bucarest. Plus tard, grâce aussi au soutien de sa famille, Paul
    Smărăndescu se rend à Paris pour visiter l’Exposition universelle de 1900, où
    il côtoie l’élite de l’architecture mondiale. Cela amorce un changement de
    parcours, car il décide de suivre les cours de l’École d’architecture de la
    capitale française. Il obtient son diplôme de fin d’études en 1906 et en 1907
    il travaille déjà à Bucarest.


    De retour en
    Roumanie, Paul Smărăndescu devient peu à peu un représentant du style
    néo-roumain, auquel il ajoute des éléments modernistes. Oana Marinache raconte: Son activité suit deux directions, deux parcours professionnels. Le
    premier est à son compte, par le biais de son propre bureau d’architecte. En
    parallèle, il occupe un poste dans l’administration publique. Durant les
    premières années, il est architecte en chef au ministère des Cultes et de
    l’Enseignement public, ensuite il rejoint le service technique du ministère de
    l’Intérieur, d’où il partira à la retraite à l’approche de la deuxième guerre
    mondiale. Vers la fin de sa carrière, Paul Smărăndescu commence à travailler
    sur le projet du Palais du ministère de l’Intérieur, un bâtiment devenu par la
    suite l’ancien siège du Comité central du Parti communiste roumain et du Sénat
    de la Roumanie postcommuniste. Puisque c’était sa dernière année active avant
    la retraite et puisque des changements politiques se faisaient jour à la fin du
    règne de Carol II, ce bâtiment bucarestois très connu a été réalisé par un
    autre architecte, en fait par son collègue du ministère, Emil Nădejde, qui
    prend le relai. Sa capacité à traverser tous les styles, depuis l’éclectique
    français au néo-roumain, dont il devient un représentant de marque, est
    impressionnante. Dans les années 1930, il s’adapte aux demandes reçues et à
    l’air du temps. Autrement dit, il crée des immeubles modernistes, avec une
    décoration simplifiée, selon la mode de
    l’époque. C’est le cas, par exemple, des édifices modernistes, à plusieurs
    étages, qui longent le Boulevard Magheru.



    Le Palais Universul,
    inauguré en 1930, a lui-même sept étages. Érigé non loin de l’Université
    bucarestoise et de Calea Victoriei (l’avenue de la Victoire), près des sièges d’autres
    publications importantes des ces temps-là, le bâtiment abritait, en plus de la rédaction du
    journal, l’imprimerie, les bureaux de la direction et le
    département financier. Nationalisé en 1948, l’édifice ne change pas de
    destination et continue d’accueillir des rédactions de presse. Entre 2015 et 2016,
    il a subi de gros travaux de restauration, qui ont globalement préservé la
    forme imaginée par Paul Smărăndescu. (Trad. Ileana Ţăroi)