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  • L’art naïf du milieu rural, à l’honneur au Musée du paysan roumain de Bucarest

    L’art naïf du milieu rural, à l’honneur au Musée du paysan roumain de Bucarest

    Présenter la vie du village roumain dans les moindres détails : c’est la mission
    du Musée national du Paysan roumain, une des institutions culturelles les plus
    importantes de Bucarest et de Roumanie. Cet automne, le musée propose une
    approche de l’art en milieu rural, pour montrer que cet espace recèle lui aussi
    des œuvres d’art valeureux et des artistes qui n’ont rient à envier aux peintres
    consacrés, bien qu’ils restent quasiment inconnus du large public. Bref – les peintres
    amateurs du monde rural sont ramenés dans l’attention publique grâce à l’exposition
    de l’artiste Ion Burticală, peintre d’art naïf vivant au village de Leu, dans
    le département de Dolj (sud).






    Pour parler de cet événement intéressant, nous avons invité au micro Virgil
    Nitulescu, manager du Musée du paysan roumain. Pour commencer, il nous dit comment
    ce peintre a été découvert et ne quoi consiste l’inédit de cette exposition d’art
    naïf : « Ion Burticală est un artiste méconnu du public actuel, en
    2021. Il s’était fait connaître à la fin des années 1960 et au début des années
    ’70. Il s’est fait remarquer d’abord dans sa région d’origine, le département
    de Dolj et dans ses alentours. Puis, il fut découvert par un critique d’art de
    Bucarest, Radu Ionescu de son nom. Celui-ci s’est rendu compte du talent inné
    de ce peintre et du fait que cela valait la peine de le promouvoir. Il a donc
    collectionné de nombreux ouvrages de cet artiste, les faisant don, en 1999, à
    notre musée, grâce à la forte amitié qui le liait à Horia Bernea, le directeur
    du musée de l’époque. C’est à ce moment-là que les ouvrages d’Ion Burticală ont
    été mis en valeur par une petite exposition dans notre musée. Certains ont été
    publiés dans des revues spécialisées. Cette fois-ci, mes collèguesCosmin Manolache et Irina Pasima ont voulu
    créer une exposition plus ample pour rendre connu ce peintre. Ils ont tenté de
    montrer le contexte dans lequel Ion Burticală s’est affirmé, ils ont fouillé
    dans les archives, dans les musées, dans les collections et ont fini par trouver
    des documents très intéressants sur ce peintre d’art naïf et sur le mouvement
    des créateurs d’art naïf qui était encouragé jadis par les autorités publiques.
    »






    Effectivement, à l’époque communiste, la peinture naïve était soutenue par
    les autorités. Virgil Nitulescu, manager du Musée du paysan roumain, nous parle
    de la vision du régime communiste sur ce type d’art, mais aussi sur la place d’Ion
    Burticală dans l’art contemporain : « C’était une époque où les paysans
    artistes étaient encouragés à travailler. Sans doute, cette attitude des autorités
    publiques s’inscrivait dans la tradition de la culture prolétaire soviétique
    des années ’50, lorsque l’on tentait de montrer qu’il ne fallait pas forcément
    avoir des études universitaires pour être une valeur de l’art. Dans les années ’50
    on propageait l’idée qu’un simple ouvrier pouvait faire des cours de soir et créer
    aussi des inventions capables de renforcer la productivité du travail etc. Cette
    tendance d’encourager l’art naïf est similaire à cette pratique. Mais à part
    cela, il est évident que l’art naïf, partout dans le monde, est une
    manifestation artistique digne de toute notre attention. Certains artistes ont
    beaucoup de talent et leur vision du monde est très intéressante. Ion Burticală
    en est un. Il n’avait pas une formation artistique, mais il avait le sens des
    couleurs et un talent remarquable pour le dessin. Plusieurs critiques d’art
    contemporains ont avoué été ravis par les créations d’Ion Burticală, d’avoir
    découvert un peintre avec une vision fraîche, avec de la personnalité et d’avoir
    redécouvert un climat de création artistique qui avait été jeté à l’oubli en
    Roumanie, ces deux dernières décennies. »






    Somme toute, Virgil Nițulescu se dit très fier du fait que le Musée du
    paysan roumain de Bucarest ait organisé cette exposition d’art naïf, car elle
    en dit long sur la vie rurale roumaine : « Je dirais que notre exposition
    est très intéressante, puisqu’elle présente l’approche d’un musée de la
    civilisation paysanne d’un phénomène artistique de son passé récent, une
    approche professionnelle et minutieuse, offrant au public une vision assez ample
    de la personnalité de cet artiste qui n’a pas été apprécié à son époque, mais
    qui a été redécouvert et apprécié de nos jours ».






    Suivez le Musée du Paysan Roumain de Bucarest sur son site http://www.muzeultaranuluiroman.ro
    ou bien sur sa page Facebook pour découvrir les multiples facettes du monde
    paysan roumain d’hier et d’aujourd’hui. (trad. Valentina Beleavski)

  • L’art et la révolution –  le peintre Constantin Daniel Rosenthal

    L’art et la révolution – le peintre Constantin Daniel Rosenthal

    Ses œuvres figurent dans les manuels d’histoire et de nombreuses générations les ont admirées et se sont imprégnées des idéaux qu’elles expriment. Deux sont ses toiles les plus connues : « La Roumanie brisant ses chaînes sur le Champ de la Liberté », réalisée en 1848, et « La Roumanie révolutionnaire », réalisée en 1850. Elles ont eu une influence considérable sur l’idée – moderne à l’époque – de création de l’Etat unitaire et de la nation roumaine. Constantin Daniel Rosenthal a vu le jour en 1820 à Pest, en Autriche-Hongrie. Bien que né dans une famille de marchands juifs qui parlaient le hongrois et l’allemand, il a consacré sa vie aux aspirations nationales roumaines.

    Il est mort à l’âge de 31 ans, dans une prison de Pest, après avoir été arrêté par les autorités autrichiennes pour espionnage et incitation à des activités révolutionnaires. Il a fait des études d’art à Vienne et il a adhéré aux idées révolutionnaires radicales. Selon les historiens de l’art, Rosenthal serait arrivé à Bucarest vers l’année 1842, pour des raisons demeurées obscures. A Vienne, il semble s’être lié d’amitié avec le peintre roumain Ion Negulici, qui allait participer activement à la révolution de 1848 à Bucarest. Dans la capitale de la principauté de Valachie de l’époque, Rosenthal fréquente les cercles révolutionnaires radicaux, représentés par les libéraux francophiles menés par le journaliste et homme politique C.A. Rosetti. Les deux toiles mentionnées furent la plus importante contribution de Rosenthal à la révolution roumaine. La femme qui lui a servi de modèle a été la célèbre Mary Grant, d’origine écossaise, devenue Maria Rosetti par son mariage avec C.A. Rosetti.

    Personnalité remarquable, douée d’une énergie débordante, Maria Rosetti incarnait, dans les deux toiles, la beauté de la Roumanie et sa détermination à se forger un nouveau destin. Dans « La Roumanie révolutionnaire », elle porte une blouse roumaine et un collier de pièces d’or brille sur sa poitrine blanche. Un ample voile de gaze spécifique du costume traditionnel roumain couvre ses cheveux noirs luisants et elle tient entre ses mains le drapeau tricolore. Maria Rosetti comme symbole la Roumanie révolutionnaire faisait partie de l’iconographie de l’époque, où souvent une jeune femme incarnait les idéaux politiques et sociaux.

    L’historien de l’art Adrian-Silvan Ionescu résume la contribution de Rosenthal à l’imaginaire politique et révolutionnaire roumain de 1848. Inspiré par ses sentiments patriotiques, dans sa toile « La Roumanie brisant ses chaînes sur le Champ de la Liberté », Rosenthal a illustré impeccablement le mouvement révolutionnaire roumain. Cette peinture de petites dimensions a été lithographiée et distribuée aux masses populaires, contribuant à perpétuer les nouvelles idées de l’époque. Il faut également noter que Rosenthal a pris pour modèle Maria Rosetti, qui était écossaise. Il est très amusant de constater que la Roumanie a été représentée par une Ecossaise – mais cette Ecossaise était mariée à C.A. Rosetti et elle avait le cœur roumain.

    Comme toute ville en train de se moderniser, Bucarest était en pleine effervescence durant la première moitié du 19e siècle. Eminemment orientale jusqu’en 1800 et sans monuments publics, la ville de Bucarest était qualifiée de marginale par les voyageurs étrangers du point de vue des conditions qu’elle offrait et de la qualité de la vie de ses habitants.

    Le 23 juin 1848, dans l’ancienne cour de la mairie, sur l’emplacement actuel du Musée des collections d’art, avenue de la Victoire, fut placée la statue « La Roumanie libérée », réalisée par Constantin Daniel Rosenthal. Le journal révolutionnaire « Pruncul român » (« L’enfant roumain ») en donnait la description suivante : « Le monument représente une femme enveloppée dans une toge, une couronne de lauriers dans ses cheveux longs, qui lui tombent sur les épaules. A ses poignets, on voit les restes des chaînes qui l’avaient tenue prisonnière. Dans sa main droite, elle tient un long bâton qui se termine par une croix, dans sa main gauche, elle tient une balance, symboles de la foi et de la justice. Un de ses pieds écrase les ennemis, représentés par un serpent » . Dans le même journal, C.A. Rosetti décrivait la démolition de la statue : « La statue représentant la Roumanie libérée, portant la balance et la croix, symboles de la justice et du christianisme, qui se trouvaient dans la cour de la mairie, fut démolie sur l’ordre de M. Emanoil Băleanu. Cet acte de vandalisme, il l’accompagna de mots si méchants et ignobles que notre plume refuse d’en noircir le papier. Le socle fut également démoli, sans respecter le droit de propriété » .

    Adrian-Silvan Ionescu explique. Peu nombreux sont ceux qui savent que Rosenthal a été le premier sculpteur de monuments publics de Roumanie. Il a réalisé cette statue de la Liberté, installée Place de la mairie, sur l’actuelle Avenue Victoria. La statue était pourtant faite d’un matériel périssable : le plâtre. Au moment où le gouvernement provisoire s’est réfugié en Transylvanie, fuyant les Turcs, la statue a été démolie par les réactionnaires. Elle resta debout quelques semaines et ce fut tout. En 1849, une année après la révolution, cette sculpture a été reproduite dans les pages de la revue « Illustrirte Zeitung » de Leipzig, très probablement d’après un dessin de Rosenthal. Celui-ci parlait très bien l’allemand, son oncle était le rédacteur d’une revue de langue allemande de Buda. Il était donc en contact avec le monde de la culture et avec la presse européenne. Rosenthal a été à la fois un révolutionnaire et un artiste. Il a été dévoué à son art, fin connaisseur des physionomies, de la psychologie humaine et un excellent observateur du caractère roumain. Il a même souhaité être roumain, il s’est toujours considéré Roumain, en dépit du fait qu’il ne parlait pas le roumain. Et il est devenu roumain non seulement pour avoir reçu la nationalité, mais aussi et surtout par son œuvre.

    Constantin Daniel Rosenthal a été le Juif, le Magyar et le Roumain qui a fait siennes les idées de son temps, leur a consacré sa vie et les a représentées à travers son art. La révolution fut, sans doute, une d’entre elles. (Trad. : Dominique)

  • Rosenthal – un artiste de la révolution

    Rosenthal – un artiste de la révolution

    Le Musée national dart de Roumanie (MNAR), qui siège dans lancien Palais royal de Bucarest, consacre lexposition temporaire « Rosenthal – Un artiste de la révolution » au peintre du 19e siècle Constantin Daniel Rosenthal, dont le vernissage a eu lieu récemment. Cristina Verona Tobi, directrice par intérim du Musée, avec des détails sur ce moment spécial :



    « Cette année, le Musée national des beaux-arts de la Roumanie célèbre le 70e anniversaire de louverture de sa première galerie, et bien sûr, nous ne pouvions pas manquer de marquer cet événement. Il sagit du 200e anniversaire de la naissance de lartiste Constantin Daniel Rosenthal – celui qui nous a légué la célèbre œuvre « La Roumanie révolutionnaire ». Au fil des ans, le Musée national dart a non seulement organisé les expositions dart les plus importantes du pays, il a toujours établi une relation importante entre lart, dune part, et lévolution de la vie sociale, politique et culturelle, de lautre. Nous avons une pensée rétrospective pour les moments les plus importants de notre histoire en tant que peuple, pour la révolution de 1848 – fondée sur dimportantes valeurs libérales et sur des idées novatrices – et qui a apporté lidée de modernisation. Il sagit donc dune exposition extrêmement importante, car nous portons à lattention du public des éléments de nouveauté, des œuvres qui nont jamais été exposées auparavant. Cest une invitation pour nous tous, pour le grand public, pour le public informé, et surtout pour le jeune public. Cest une invitation à embrasser le passé ensemble pour regarder et déchiffrer lavenir. »



    La commissaire de lexposition, Monica Enache, responsable de la section dart roumain moderne du MNAR, a parlé, elle, des nouveautés que cette exposition apporte dans le monde de lart :



    « Notons quil sagit de la deuxième exposition monographique réalisée en Roumanie, après celle de 1970 – qui ne comprenait cependant que 11 œuvres et nétait accompagnée daucun catalogue. A noter que le catalogue qui accompagne cette exposition rassemble toutes les œuvres de lartiste que nous avons réussi à identifier à ce jour, dans le pays et surtout à létranger, dans les collections publiques, mais aussi dans les collections privées. Voilà déjà une première. Certaines, comme vous le verrez si vous consultez le catalogue, sont complètement inconnues et évidemment inédites. Nous avons inclus dans ce volume une deuxième première : toutes les lettres encore conservées aujourdhui en Roumanie, certaines dentre elles à la Bibliothèque nationale et une autre partie à la Bibliothèque de lAcadémie roumaine, lettres que Rosenthal avait adressées à ses amis – à lhomme politique et publiciste C. A. Rosetti et au Dr. Adolf Gruno. Lexposition présente, à première vue, les caractéristiques dune exposition monographique. Au-delà de cette composante scientifique, de recomposition de lœuvre de Rosenthal, qui na pas été suffisamment étudiée jusquà présent, il en existe une seconde – celle de son activisme révolutionnaire, assumé pleinement et sans hésitation. Je vous invite à réfléchir un peu à cette dimension de la personnalité du peintre et à savoir à quel point nous sommes aujourdhui prêts à assumer des causes communes et à militer pour leur réalisation. Ensuite, portons un regard en arrière, sur les personnalités et les moments décisifs de notre histoire récente ou lointaine, en essayant de les libérer sous les couches successives de contenu de propagande qui leur ont été attribués. Pouvons-nous encore déchiffrer et retrouver leur vrai sens ? »



    Pour Monica Enache, commissaire de lexposition consacrée au peintre Constantin Daniel Rosenthal, cet événement ouvre à nouveau les portes du Musée national dart de Roumanie.



    « Moi je dirais que je vois ça effectivement comme une réouverture du Musée… Cette fois-ci, jai beaucoup travaillé chez moi, ce qui ma aidée à me munir dune documentation bien plus en profondeur, plus substantielle et plus appliquée. Bref, à chaque mal, Dieu donne son remède. Pour moi, cette exposition doit parler au public, car je suis sûre que tout citoyen de ce pays a dû voir, au moins une fois dans sa vie, le tableau « La Roumanie révolutionnaire ». Il mest impossible de croire le contraire et cest le pari que je fais quand je dis que cette expo intéressera du moins le public bucarestois, puisquon na plus de touristes. Personnellement, jaimerais montrer aussi les parties moins connues de la vie et de lœuvre de Rosenthal, car, en fin de compte, son activité politique passe devant son activité artistique, et je pèse mes mots. Mais nous devons dire la vérité et je recommanderais la lecture des lettres incluses dans le catalogue de lexposition : elles sont éloquentes, sans elles on ne comprendrait rien. »



    Dans une lettre du 26 juillet 1848, adressée à C.A. Rosetti, un des dirigeants de la révolution de cette année-là en Valachie et militant pour lunion des Principautés roumaines, le peintre Constantin Daniel Rosenthal, Juif dorigine, écrivait: « Il y a tant de gens raisonnables dans notre pays et tant demportements à endiguer. Hélas ! Pourquoi ne suis-je le plus fort, ne serait-ce que lespace dun instant ? Vous nallez pas croire combien je souffre pour votre cause. Je naurais jamais cru être à ce point valaque. »


    (Trad. : Ligia Mihăiescu, Ileana Ţăroi)


  • L’artiste Miliţa Petraşcu et l’adaptation au communisme

    Attirée par les arts plastiques, elle va faire des études d’art en Russie, alors tsariste, pour partir à Paris juste après la Première Guerre mondiale, où elle va continuer ses études en suivant les conseils de Constantin Brancusi. Son parcours professionnel l’amènera, donc, en contact avec les mouvements d’avant-garde européens et la proximité avec eux va s’accroître avec son établissement à Bucarest, en 1925.

    Elle va intégrer le groupe affilié à la revue « Contimporanul », groupe qui, comme la plupart des courants d’avant-garde, se rapprochait de la gauche politique. Dans le cas de Miliţa Petraşcu, ces propensions sont évidentes depuis 1925 même, année quand Ana Pauker, la future ministre des Affaires étrangères pendant les premières années du régime communiste, apparaît photographiée dans son atelier. Miliţa Petraşcu était donc une artiste qui, apparemment, depuis 1948 – quand le communisme s’installe en Roumanie – aurait dû bénéficier pleinement des grâces du nouveau pouvoir politique. Mais cela n’a pas été le cas.

    Après la Deuxième Guerre mondiale, sa carrière a eu beaucoup de hauts et de bas, car elle a été soit accablée par des honneurs et des commandes officielles, soit critiquée par le Parti communiste pour ses divers dérapages de la doctrine esthétique de ce dernier. Quel a été le contexte culturel et politique dans lequel Miliţa Petraşcu a continué sa carrière après la guerre ? On l’apprend de l’historien Cristian Vasile : « Le discours officiel d’après 1948, qui a été réitéré par l’Union des artistes plasticiens, nouvellement fondée, insistait sur l’idée qu’il n’y avait pas un cadre qui « exploite » plus les artistes, hommes ou femmes, comme il n’y avait plus de marché de l’art déformé, avec des commanditaires « onéreux ». Par contre, il y avait un Etat socialiste qui assumait et garantissait l’égalité entre les sexes, qui faisait des acquisitions d’art raisonnables et qui ne faisait pas de discriminations de genre, ni pour les commandes d’art, ni pour les achats. Il y a eu une période d’accommodation avec ce système, parce qu’au début, des noms prestigieux de l’ancienne génération de peintres et de sculpteurs, parmi lesquels des femmes artistes aussi, ont été attirés et convaincus d’accepter, tôt ou tard, ce nouvel ordre artistique et idéologique. Cela a engendré aussi des honneurs publics, d’acquisitions commanditées par l’Etat, des répartitions d’habitations et des avantages matériaux. »

    Parmi eux, on a compté aussi, dans une première phase, Miliţa Petraşcu, artiste déjà reconnue et bien mise en valeur même depuis la période d’entre les deux guerres. Paradoxalement, dès 1950, elle allait entrer dans un cône d’ombre à cause même de son rapprochement d’Ana Pauker, une communiste répudiée à un moment donné par ses propres camarades du parti, en bonne tradition stalinienne. Cela n’a pas été la seule tache noire dans le « dossier » politique de Miliţa Petraşcu, d’après les propos de notre interlocuteur, Cristian Vasile : « Il y a eu aussi des créations artistiques controversées de Miliţa Petraşcu qui ne lui ont pas rapporté de gloire professionnelle du tout. Il est intéressant de voir que dans les monographies du temps dédiées à Miliţa Petraşcu, le buste a moitié nu de l’actrice Elvira Godeanu n’apparaît pas. Cela a alimenté la rumeur qui courait à l’époque, selon laquelle l’actrice et le dirigeant politique Gh. Gheorghiu-Dej étaient très proches. Une autre raison pour la disgrâce dans laquelle la sculptrice et peintre est tombée à un moment donné semble être le portrait du collectionneur d’art Constantin Doncea. Doncea était devenu une sorte de Némésis, d’adversaire politique numéro 1 du chef de l’Etat de l’époque, Gheorghe Gheorghiu-Dej lui-même. Pourquoi? Parce que Doncea aussi, comme Gheorghiu-Dej, était très lié aux ateliers ferroviaires de Griviţa et à la révolte de 1933 des ouvriers de là-bas, moment symbolique pour Dej et pour la création de son image de leader des prolétaires. En 1958, L’Institut de l’histoire du PCR a convoqué les anciens illégalistes de l’entre-deux-guerres pour enregistrer des témoignages oraux concernant la grève de Griviţa de 1933. Doncea, représenté artistiquement par Miliţa Petraşcu, a déposé une déclaration lui aussi, et par la suite, Gheorghiu-Dej a déclenché, en juin 1958, la répression contre lui et contre d’autres dirigeants du Parti communiste qui avaient l’air de défier son statut. Miliţa Petraşcu est entrée dans ce collimateur politique et elle allait tomber victime d’une soi-disant « exposition » qui a eu lieu en avril 1959 dans l’Auditorium de la Faculté de Droit où ont été apportés des ouvriers et des membres de la Securitate, l’ancienne police politique roumaine, pour faire honte aux artistes. Au-delà de l’exposition de 1959, Miliţa Petraşcu allait pourtant garder, dans les décennies suivantes, un certain esprit non-conformiste, en déclarant même: « Je suis une matérialiste imprégnée de mysticisme. »

    Miliţa Petraşcu est morte en 1976, et pour le grand public son œuvre le plus connu reste la mosaïque sur la fontaine Mioriţa de Bucarest et qui a été créée au milieu de la troisième décennie du siècle dernier.

  • Le peintre Corneliu Baba

    Le peintre Corneliu Baba

    Né le 18 novembre 1906 à Craiova et décédé en décembre 1997, à Bucarest, l’artiste peintre Corneliu Baba a, pour plus d’un demi-siècle, apporté sa touche personnelle à la peinture roumaine. Par leur jeu chromatique, ses toiles renvoient aux grands thèmes classiques à partir desquels Baba a créé son propre style. Un style à part au milieu d’un tas de conventions artistiques que l’avant-garde de l’entre-deux-guerres qualifiait de démodées.

    Corneliu Baba a débuté en 1934 à Herculane les Bains, par une exposition organisée grâce au soutien de son père, le peintre d’églises Gheorghe Baba. Le succès de ce premier vernissage fut d’autant plus surprenant que le jeune artiste n’avait jamais fait d’études à l’Ecole des Beaux Arts, mais à la Faculté des lettres et de philosophie. L’exposition de Herculane a donc marqué un tournant dans la vie du jeune Corneliu qui, à compter de ce moment-là, décide de quitter la capitale pour s’installer à Iasi et rejoindre l’Académie des Beaux Arts, dans la classe du maître Nicolae Tonitza.

    Les 16 années qui suivirent, Corneliu Baba les passa à Iasi. En 1946, il devient professeur des universités. C’est à commencer par ce moment-là que l’artiste entre dans le collimateur du régime communiste qui l’accuse de formalisme et de s’inspirer des œuvres des grands classiques tels Grigorescu, Tonitza, Goya ou encore Rembrandt. Licencié de l’Académie et transféré à Bucarest, Cornelia Baba a fini par être sauvé de la disgrâce par… les peintres soviétiques. Enthousiasmés par l’humanisme esthétique de Baba, ceux-ci l’ont considéré, à tort, comme un proche du réalisme socialiste. Une prise de position qui a réhabilité Baba, en lui permettant de faire une brillante carrière.

    Le critique d’art Pavel Şuşară, auteur d’une monographie sur l’art de Baba, explique: « Adepte de l’humanisme, Baba plaçait l’homme au centre de son univers artistique. C’était donc l’être humain qui fut le principal protagoniste de la vision de l’artiste sur le monde. Or, les peintres russes et soviétiques de l’époque étaient justement les adeptes de ce paradigme de la grandeur humaniste, à mi-chemin entre la propagande réaliste-socialiste et la vocation du grand art. Par son style, Baba répondait, malgré lui, aux aspirations de l’art soviétique censé privilégier l’héroïsme de la nature humaine. Aucun rapport pourtant avec le réalisme socialiste. Sauf que ses promoteurs allaient profiter des artistes adeptes de l’humanisme pour en faire leurs précurseurs. Cela ne veut pas dire qu’un peintre comme Baba fût contraint à modifier son style. Pas du tout. Il aurait préservé la même manière de peindre même en l’absence du réalisme socialiste. La preuve? Dès que la propagande communiste a cessé de dominer les beaux arts en Roumanie, Baba a pourtant continué son programme artistique en parfait rapport avec tout ce qu’il avait créé jusqu’à ce moment-là. »

    De nouveau en grâce suite aux appréciations formulées par ses confrères soviétiques, Corneliu Baba continue son parcours artistique. Il devient professeur de peinture à l’Institut des Beaux Arts de Bucarest, se voit accorder de nombreuses distinctions et a des expositions à l’étranger. Membre de l’Académie roumaine, membre d’honneur de l’Académie russe et membre correspondant de celle de Berlin, Baba n’a jamais cessé d’être « un humaniste tragique à même de surprendre aussi bien la grandeur de l’être humain que ses vulnérabilités et sa fragilité accentuées par le passage du temps » allait constater le critique d’art Pavel Susara. Des propos dont la justesse devient évidente notamment dans les séries de rois-pantins et des autoportraits réalisés en fin de carrière.

    Quant à l’héritage artistique que Corneliu Baba a laissé derrière lui, Pavel Susara conclut: « Corneliu Baba n’a jamais joui d’une appréciation honnête de la part du régime communiste. Il a fini par développer avec ce dernier une relation de compromis, tendue et pleine de suspicions. Les communistes n’ont jamais pu se servir de lui comme ils l’ont fait avec d’autres artistes de propagande disponibles. Si, à l’heure actuelle, un peintre comme Adrian Ghenie mène une carrière à succès, c’est à Baba qu’il la doit, puisqu’il continue d’une certaine façon le projet cauchemardesque et la vision dissolutive que Baba avait de notre monde. Elève de Cornel Brudasca, élève à son tour de Corneliu Baba, Ghenie est comme un petit-fils de ce dernier, puisqu’il a choisi de partager la même vision sur l’humanité. » (Trad. Ioana Stancescu)

  • La nature, l’homme et l’univers

    La nature, l’homme et l’univers

    Le Musée national Cotroceni, de Bucarest accueille jusqu’au 21 juin une exposition consacrée aux peintures d’Emil Ciocoiu, intitulée La nature, l’homme et l’univers”, d’après les trois grands thèmes de la création de l’artiste. La centaine de toiles exposées reflète « la grandeur de l’homme, la perfection de la nature et la splendeur de l’univers » affirme le critique d’art Marius Tiţa.



    L’artiste roumain Emil Ciocoiu, diplômé, en 1974, de l’Académie d’art Nicolae Grigorescu” de Bucarest, vit en Allemagne, à Aix-la-Chapelle (Aachen) depuis 1980. Ses liens avec la Roumanie restent pourtant très solides, comme le soulignait d’ailleurs le maire de la ville, Marcel Philippe: “il garde au fond de l’âme les racines roumaines. L’optimisme et une profondeur brillante se dégagent de son art”.



    A l’invitation du peintre, Marcel Philippe a également participé au vernissage de l’exposition que l’on peut admirer sur les cimaises du Musée national de Cotroceni : “C’est un geste d’amitié que je voulais faire depuis longtemps envers le peintre Emil Ciocoiu. L’artiste est très apprécié en Allemagne, tout comme ici en Roumanie, comme je peux le constater. Les habitants d’Aix la Chapelle connaissent tous ses ouvrages et les thèmes qu’il illustre vont droit au cœur des gens. Dans bien de ses peintures, on retrouve des endroits d’Aix-la-Chapelle, mais aussi des scènes parlant du dialogue entre les différentes religions, un sujet très important. Notre ville décerne chaque année le Prix Charlemagne censé encourager le dialogue entre les peuples et les religions. Cette année, la distinction est attribuée au pape François. Cela fait maintenant plusieurs années que le peintre Ciocoiu se penche sur dialogue interreligieux. En outre, ses peintures sont vraiment extraordinaires et témoignent d’une technique spéciale. Je suis aussi très heureux que l’exposition ait lieu dans un cadre merveilleux comme celui-ci”.



    Voici ce que le peintre Emil Ciocoiu nous a déclaré peu avant le vernissage de son exposition “La nature, l’homme et l’univers” : “J’aime bien les endroits où il y a des rivières, la mer, qui me fascinent et m’inspirent… J’ai peint à Baltchik, sur l’île de Grande Canarie ou à Venise. Ce sont surtout les contrées méridionales qui m’attirent, peut-être parce que moi-même je viens du Sud. J’adore aussi travailler en Italie, en France, dans le Midi, en Espagne. J’y ai puisé maintes sources d’inspiration. Parmi mes ouvrages, vous retrouverez des paysages d’Andalousie, de Mykonos, de Santorin, du Mont Saint-Michel, de Normandie. Sans oublier de mentionner la toile intitulée « Bonjour, Aix-la-Chapelle », où l’on peut voir la cité de Charlemagne et le Dôme érigé du temps de son règne, ainsi que l’Hôtel de ville”.



    Dans la plupart des toiles d’Emil Ciocoiu, les couleurs chaudes dominent: “Ça peut être le rouge, comme dans « Sant Egidio », par exemple — une œuvre inspirée par la rencontre mondiale des religions, tenue à Aix-la-Chapelle. On y voit tous les représentants des religions tenir un seul livre dans leurs mains. A l’arrière plan, on aperçoit le Dôme. Devant lui, au premier plan, les nombreux représentants des différentes religions du monde figurent, petit à petit, un édifice, un Dôme. Sant Egidio est un mouvement mondial des religions, un dialogue des religions. Il ne s’agit pas d’unifier les religions, mais d’ouvrir le dialogue, car la paix, c’est par le dialogue qu’elle se met en place. Nous devons être tolérants les uns avec les autres, comprendre que nous appartenons à différentes cultures. Les cultures se conjuguent dans le dialogue, dans une harmonie que je souhaite — c’est ma façon de voir les choses. Nous traversons une période complexe, en raison des divergences entre les ethnies, les cultures, les religions, finalement. C’est pourquoi je propose la toile « Consensus » – il s’agit des symboles des 4 grandes religions réunis dans une seule œuvre monumentale. Ma suggestion est d’unir ces symboles dans un système harmonieux d’entente et de paix”.



    Ceux qui franchissent le seuil de l’exposition « La nature, l’homme, l’univers » sont accueillis, à l’entrée, par une autre œuvre monumentale du peintre Emil Ciocoiu, intitulée “Source”: “Je l’ai choisie parce qu’elle contient des éléments qui nous exaltent, nous touchent, nous expriment… C’est l’océan primordial, dont nous sommes issus. Elle représente une source qui jaillit de l’océan, qui dégage une énergie — car nous sommes de l’énergie en mouvement — et qui monte vers l’infini. C’est ainsi que l’on peut résumer cette œuvre. Pourtant, on doit la contempler et la comprendre, car elle a une vibration tout à fait spéciale, qui nous incite à méditer sur le sens de notre existence”.



    Presque tous les tableaux de cette exposition se retrouvent dans les pages d’un album qui porte le même titre — “La nature, l’homme, l’univers” — et dont l’auteur est le critique d’art Marius Tiţa: “L’album nous permet de suivre de plus près cette problématique — non pas dans la succession que propose l’exposition, mais plutôt comme un débat, comme une lecture plus proche de ce thème. Il prend l’homme comme point de départ, pour aboutir à l’univers, à ses grandes explosions d’énergie, à ses vibrations, à ses vortex créateurs de nouveaux mondes. S’y ajoute le thème de l’entente entre les religions, du dialogue interreligieux que l’on retrouve dans le chapitre « L’Homme ». Le début de l’album est réservé à la Nature, avec ses grands thèmes — y compris les fameuses fleurs solitaires qui nagent dans un océan de couleur, de vibration. On y retrouve également les villes d’Emil Ciocoiu, faites de touches figurant en fait des êtres humains”.



    Une autre exposition du peintre Emil Ciocoiu a été ouverte en avril, dans le merveilleux musée de Michel-Ange, à Caprese Michelangelo. Des œuvres d’Emil Ciocoiu sont entrées dans les collections de la télévision de Cologne, de la Maison royale néerlandaise — Den Haag, du Musée d’Art sacré de Venise, de la Fondation Ludwig d’Aix-la-Chapelle, du Musée national d’art de la Chine, à Pékin, et du Musée national d’art de la Roumanie, à Bucarest. (trad. Mariana Tudose, Dominique)

  • A la une de la presse roumaine – 12.02.2016

    A la une de la presse roumaine – 12.02.2016

    Le pays est sous le choc à cause du décès d’une fillette de 11 mois, qui révèle la présence de bactéries dans plusieurs hôpitaux d’enfants de Roumanie. Les journaux parlent aussi du peintre roumain Adrian Ghenie qui a vendu un de ses tableaux pour l’équivalent de 4 millions d’euros et commentent l’idée d’éliminer l’étude de l’histoire des Roumains dans les écoles du pays.




  • Le peintre Victor Brauner

    Le peintre Victor Brauner

    Le peintre Victor Brauner est un des représentants les plus importants du courant surréaliste en Europe. Son style est emblématique tant par son originalité et la force du détail, que par le caractère prémonitoire de certains de ses ouvrages.

    Cătălin Bălescu, président de l’Université nationale d’Arts de Bucarest, nous parle de la place de l’artiste dans l’histoire universelle de l’art: Victor Brauner compte parmi les peintres européens les plus importants, son nom figurant déjà dans le Panthéon de la peinture universelle. C’est un honneur pour nous, car, d’une part, il est né en Roumanie, d’autre part il a suivi les cours de l’Ecole des Beaux-Arts de Bucarest. Il s’agit des années 1919-1921, période dans laquelle il a également fréquenté l’Académie libre de peinture de Horia Igiroşanu. Comme vous pouvez le constater vous-mêmes, la Roumanie a actuellement une composante originale de surréalisme à tous les niveaux, politique, culturel, artistique et spirituel. A mon avis, la peinture surréaliste, au sens classique du terme, réalisée par Victor Brauner, enrichit le surréalisme européen d’éléments originaux, spécifiques de l’art roumain.

    Le peintre Victor Brauner a vu le jour le 15 juin 1903 à Piatra Neamţ , ville du nord-est de la Roumanie. Emigré en France, en 1930, il allait être unanimement apprécié par les grands surréalistes de l’époque. Trois ans plus tard, en 1933, il ouvre sa première exposition personnelle à Paris.

    Cătălin Bălescu : Victor Brauner est un des artistes plasticiens les mieux représentés au Centre Pompidou de Paris, où toute une salle lui est dédiée. Il est donc plus visible dans le grand musée parisien que d’autres grands surréalistes, tel que Salvador Dali ou Joan Miro. Son parcours artistique est tout à fait non-conventionnel, comme celui de n’importe quel autre artiste d’avant-garde, d’ailleurs. A Paris, il fait la connaissance des grands surréalistes des années ’30, Constantin Brâncuşi, Alberto Giacometti, Barbu Fundoianu (alias Benjamin Fondane), Yves Tanguy, André Breton. Tous l’apprécient est le considèrent comme un artiste authentique dans le paysage avant-gardiste parisien de l’époque, où l’on retrouve des noms sonores de la culture européenne moderne.

    De retour à Bucarest, en 1935, Victor Brauner collabore avec le poète Ilarie Voronca et avec certains écrivains roumains moins connus du grand public, tel Saşa Pană.

    Cătălin Bălescu : Il a également une évolution inattendue d’un point de vue politique, car, même en l’absence d’une activité politique remarquable, il s’inscrit dans le Parti Communiste Roumain, au milieu des années 1930. En ces temps-là, bien des artistes d’avant-garde se sentaient attachés à la doctrine de ce parti de gauche, minoritaire. Pablo Picasso, par exemple, André Gide et beaucoup d’autres flirtaient avec la politique de gauche.

    Les critiques d’art ont également remarqué le caractère prémonitoire de certains ouvrages de Victor Brauner.

    Cătălin Bălescu : Un épisode célèbre témoignant de son don de prémonition est celui de l’autoportrait à l’œil crevé. Il est de notoriété le fait que sept ans après avoir peint cet autoportrait, lors d’une bagarre entre deux de ses amis, alors qu’il tentait de s’interposer, il reçut un éclat de verre dans un oeil et devint borgne. Un autre ouvrage révélateur de ce même point de vue est celui réalisé en 1965, un an avant sa mort, et intitulé « La fin et le début ». Ses peintures commencent alors à avoir de l’impact. Victor Brauner devient une personnalité connue au travers de son art, mais aussi de ses commentaires théoriques.

    Victor Brauner est enterré au cimetière de Montmartre, aux côtés d’autres figures de proue de la culture mondiale. (Trad. Mariana Tudose)

  • L’artiste peintre Elisabeth Ochsenfeld

    L’artiste peintre Elisabeth Ochsenfeld

    Personnalité artistique très connue, Elisabeth Ochsenfeld est une femme peintre d’origine roumaine. Née à Timişoara, elle a émigré en Allemagne en 1986. Elle habite tantôt à Heidelberg, tantôt à Frankfort, tantôt dans son pays d’origine. Dans les années ’80, avant de s’établir en Allemagne, elle a fait de la peinture et de l’art graphique. Une de ses créations, la couverture de l’album « Cantafabule » (Chantefables) du groupe rock roumain Phoenix a été rejetée par la censure communiste.



    La plupart de son activité professionnelle s’est déroulée à l’Académie des sciences de Heidelberg, comme elle le raconte elle-même: « J’ai travaillé comme graphiste pour un projet consacré à une partie de la Route de la Soie depuis la vallée de l’Indus jusqu’à la frontière chinoise, en passant par le Pakistan. J’ai réalisé tous les dessins et la graphique pour une série de livres splendides publiés tous les deux ans. La série a compté 10 volumes, destinés à l’élite scientifique mondiale. Ils étaient publiés en 500 exemplaires et ils étaient magnifiques. C’était mon gagne-pain en Allemagne. J’ai passé un examen pour être embauchée et j’ai eu la chance d’être acceptée tout de suite. Pendant 26 ans, j’ai vécu ainsi dans un milieu extraordinaire, pourtant — comme dans tout emploi — mon temps était divisé. Après cette longue période de plus d’un quart de siècle, mon contrat avec l’Académie des sciences de Heidelberg est arrivée à échéance et à présent je peux enfin donner cours à des invitations que je n’ai pas pu honorer jusqu’ici en raison du peu de temps libre que j’avais ».



    Au début des années ’90, Elisabeth Ochsenfeld est revenue en Roumanie, elle a acheté une petite maison à Wolfsberg alias Gărâna, petit village fondé jadis par des colons allemands et tchèques venus de Bavière et de la Bohème méridionale.



    Elisabeth Ochsenfeld: « Mes parents, des réfugiés de Bessarabie, avaient tout perdu en quittant leur foyer. Alors, moi, je n’ai pas eu, dans mon enfance, ce lieu si particulier dont la plupart se régalent : la maison des grands-parents. C’est ce qui m’a déterminée à acheter une maison et à construire ce miracle que j’ai toujours souhaité. C’est un endroit mirifique; les étoiles y sont si visibles et si proches de la terre, de nous, qu’on a vraiment la sensation de toucher l’éternité. J’aime ouvrir toutes les fenêtres et écouter les bruits du village, sentir cette ambiance rurale dont je me languis sans cesse. Nous nous sommes épris de ces maisons parce qu’ils sont d’une simplicité inouïe… Dans ce village-là, toutes les maisons étaient blanches et la charpente était peinte en bleu, vert et gris… Toutes les fenêtres étaient fleuries de géraniums. Le village était d’une propreté et l’air d’une pureté auxquelles nous n’étions pas habitués. Ce village-là était, en fait, une rue. La maison que j’ai achetée était très simple et très bien construite, l’intérieur était bien agencé. Evidemment, nous n’avions pas besoin d’un étable ou d’autres annexes qui s’y trouvaient. Alors, nous avons préféré aménager un atelier et une petite galerie. Avec le temps, nous avons créé la maison de nos rêves, que nous avons appelée Art Haus — Maison de l’Art — où nous avons commencé à mener — officiellement, pour ainsi dire — l’existence qui était, en fait, depuis longtemps la nôtre. Notre maison à Timişoara et, à présent, celle de Wolfsberg, est toujours ouverte à nos amis et aux artistes du monde entier. »



    Dans sa maison de Gărâna, Elisabeth Ochsenfeld accueille chaque été des artistes heureux de connaître cette région de la Roumanie et de participer à un Symposium organisé en même temps que le plus grand festival de jazz en plein air de Roumanie.



    Elisabeth Ochsenfeld : « Cette année nous attendons 4 plasticiennes qui doivent arriver des Etats-Unis. Si l’on fait un tel voyage pour travailler, pendant une semaine, avec d’autres artistes à Gărâna, je pense que c’est fantastique d’avoir en même temps la chance d’assister à quelques spectacles. Ce que je fais n’est pas de la même envergure que le festival, mon symposium est beaucoup plus modeste, mais il est lié à cet endroit dont je souhaite préserver la mémoire par les créations des artistes qui s’y rendent. Chaque année, nous avons un thème lié à cet endroit. L’année dernière, c’était « paraphernalia », les choses qui nous entourent au quotidien ; cette année c’est l’architecture des lieux ; l’année prochaine le personnage principal sera le loup. Les écrivains qui échangent avec les gens habitant encore dans ce village, avec les Allemands venus de la région de Bohême, apprennent les histoires de vie bouleversantes de ces êtres obligés à vivre dans une forêt pleine de loups et qui ont réussi à y fonder des localités. »



    C’est aussi à Gărâna qu’Elisabeth Ochsenfeld a trouvé la source d’inspiration d’une exposition de peinture encore ouverte à la galerie Tiny Griffon, de Nürnberg — les anciennes parures de mariage des femmes de la région.



    Elisabeth Ochsenfeld : «Ces parures avaient été trouvées dans un grenier et j’en ai été ravie et très émue. Elles sont faites de petites boules, minuscules, de farine, de bâtonnets décorés, blanchis, extrêmement délicats et d’une grande simplicité. J’ai repris cette idée tout simplement pour contribuer moi aussi à cet acte d’amitié avec une petite ode. Ce sont des parures de mariage ou de fête, portées deux ou trois fois par an, même à des baptêmes. Moi, j’ai été inspirée par une parure de mariage que j’ai utilisée comme symbole non pas matrimonial, mais des rencontres de toute une vie. Il y avait de la joie et du calme dans mon âme, un grand sourire sur mon visage quand j’ai mis de la couleur, quand j’ai refait et enrichi ces parures. Tout ce que je souhaite c’est de réaliser une autre série où je raconte des destins, inventer des histoires à l’aide de ces tiares. »



    Elisabeth Ochsenfeld se déclare heureuse et affirme avoir enfin le temps de mettre sur papier toute la beauté qu’elle a ramassée dans le monde : «Quand on passe huit heures à dessiner, comme je l’ai fait à l’Académie, il est très difficile, une fois rentré, de se remettre à faire la même chose. Cela fait un an et demi que moi, je suis libre. Je n’aurais jamais imaginé être si heureuse, je croyais que le rituel des dessins quotidiens allait me manquer. Aujourd’hui, je peux passer mon temps comme je le veux. J’ai commencé cette année avec un voyage en Egypte, en janvier ; je vais me rendre prochainement en Roumanie, ensuite en France, en Autriche, toute cette année est déjà bien mise en page, avec des expositions et des résidences d’art. Je suis très contente de ce calendrier parce que j’ai le temps de peindre, de dessiner plus… »



    Les créations de l’artiste peintre Elisabeth Ochsenfeld peuvent être admirées à Nürnberg jusqu’à la mi-mars, et puis sur le site personnel de la plasticienne; mais vous pourriez tout aussi bien passer par Gărâna, en été, lorsque l’air pur sent les fleurs des champs et les fenêtres de sa maison sont grandes ouvertes. (Trad.: Dominique, Ileana Taroi)

  • L’Atelier de création Laurenţiu Dimişcă

    L’Atelier de création Laurenţiu Dimişcă

    Le peintre Laurenţiu Dimişcă est un promoteur reconnu sur le plan international de l’art « hors norme ». Il a présenté ses œuvres lors de prestigieuses manifestations internationales et il a organisé en Roumanie d’amples événements consacrés à ce genre d’art.



    Cette fois-ci, Laurenţiu Dimişcă nous propose un espace permanent de rencontre, son propre atelier, au premier étage du bâtiment accueillant le théâtre d’animation ŢĂNDĂRICĂ, situé place Lahovari, au cœur de Bucarest. C’est la première galerie de Roumanie et du sud-est européen consacrée aux types d’art disons nouveau : l’Art singulier, l’art brut, à la nouvelle peinture figurative, l’art naïf, l’art populaire, alternatif, visionnaire, schizophrénique, au raw vision et à l’art contemporain du monde entier.



    Le critique d’art Marius Tiţa nous en dit davantage: « L’atelier que Laurenţiu Dimişcă a ouvert à Bucarest est en fait la capitale de l’art brut, de l’art singulier dans cette partie de l’Europe. Laurenţiu Dimişcă est connu depuis un certain temps déjà en tant que promoteur et créateur talentueux d’art brut. N’oublions pas que c’est un peintre véritable. Il a suivi les cours du lycée d’art et la faculté de Beaux arts et il a passé son doctorat à l’Université d’art de Cluj. Cet atelier est une troisième édition des grandes expositions que Laurenţiu Dimişcă a ouvertes à Bucarest, au Palais du Parlement, au Musée du village ou au Musée du Paysan roumain, mais c’est aussi un centre permanent où l’on peut apprendre davantage sur ce genre d’art et voir les oeuvres de grands créateurs d’art brut provenant d’importantes collections de France, on pourra également assister à des événements consacrés à cet art : art « hors norme », art singulier. L’art brut est un art qui ne tient compte d’aucune convention. Il offre à l’artiste une totale ouverture. »



    L’atelier de Laurenţiu Dimişcă est la concrétisation d’un vieux rêve, celui de créer un centre international d’art qui soit en même temps un musée. Laurenţiu Dimişcă : « Initialement, j’ai acheté une vieille école tout près de Piatra Neamţ, dans le nord-est de la Roumanie, pour y ouvrir ce centre. Pourtant, j’ai pensé que je devais plutôt mettre sur pied une collection, en organisant des salons et des événements. A présent, j’ai mon atelier au centre de Bucarest, dans un bâtiment superbe, celui du Théâtre Ţăndărică. L’atelier est ouvert à tout le monde ; pourtant, ceux qui souhaitent visiter les expositions temporaires et permanentes, ainsi que mon atelier personnel doivent m’appeler pour m’avertir, afin que je sois là. La collection permanente est celle de la fondation. Quant aux collections temporaires, à présent nous accueillons le Salon international d’art singulier, arrivé à sa 3e édition. La prochaine exposition sera celle de l’artiste Aurel Cogealac, un artiste autodidacte, suivie par celle de Mimi Revencu, femme peintre autodidacte elle aussi. Avant le 8 mars, l’occasion de la journée internationale de la femme, je souhaite lancer des bijoux, réalisés en collaboration avec l’artiste Andra Margine. Ensuite, les créations prendront la voie du Musée du village, du Musée du Paysan roumain et de la Bibliothèque nationale. De nouveaux artistes s’ajouteront à chaque nouvelle exposition. Nous organiserons également un colloque d’art singulier — qui en est à sa deuxième édition. D’ici la fin 2014, je me propose d’accueillir aussi bien des expositions personnelles d’artistes qui travaillent dans l’esprit de cet art ou qui font de l’art contemporain. »



    Les peintres Laurenţiu Dimişcă, Aurel Cogealac et Mimi Revencu, comme les photographes Andrei Baciu et Sorin Onişor et le Musée national du village ont été, à l’automne dernier, invités du Consulat de Roumanie à Lyon, dans le cadre de l’exposition « La Roumanie entre tradition et modernité ».



    La galerie-atelier de Laurenţiu Dimişcă est un espace où l’artiste s’est proposé de familiariser le public avec son genre d’art, et ce non seulement par des expositions. « En dehors de l’occasion que peu de gens ont de découvrir un atelier d’artiste — parce qu’il y a des artistes dans l’atelier desquels vous n’avez aucune chance de pénétrer pour les voir peindre — il a aussi un but d’initiation. Je vais initier des enfants, mais aussi des adultes dans le domaine de la peinture, de la créativité, de l’imagination. J’ai une expérience française, où j’ai ouvert des festivals d’art singulier et j’ai travaillé avec 300 enfants de 9 maternelles d’Auvergne. J’ai ensuite ouvert le festival « Itinéraires singuliers », à Dijon ; il est consacré aux personnes handicapées, donc j’ai travaillé avec des personnes ayant des problèmes, genre alcooliques, schizoïdes. Je parle de l’interaction artiste — public, de gens qui n’ont jamais travaillé avec un artiste. Mon style est plus optimiste et j’ai de beaux projets dans les domaines de la créativité et de l’imagination ».



    A présent, environ 300 oeuvres sont exposées dans l’atelier Dimişcă. Les artistes qui les signent, plus d’une cinquantaine, sont notamment des Français ; grâce à la collaboration avec l’Association pour promouvoir l’art contemporain populaire, de France. A leurs côtés, l’on retrouve aussi quelques Roumains, mais aussi des artistes africains, cubains, argentins et norvégiens.



    Ce printemps, vous pourrez voir de nouvelles œuvres créées par le peintre Laurenţiu Dimişcă à La Haye, à la célèbre galerie Carré d’artistes faisant partie de la chaîne de galeries homonymes présentes dans le monde entier. Leur particularité, c’est qu’il est demandé aux artistes désireux d’exposer là de réaliser des travaux de petites dimensions, de manière à ce qu’ils puissent être accessibles à tout acquéreur. Le prix est le même, quel que soit le niveau de l’artiste. ( Trad. : Dominique, Ligia Mihaiescu)

  • Le peintre George Băjan

    Le peintre George Băjan

    Homme de talent et desprit ludique, ayant lœil pour le détail, le peintre George Băjan sest adonné à plusieurs passions que rien ne semblent lier entre elles : les arts plastiques, laéronautique, laéromodélisme et le culturisme. Du point de vue professionnel, son cœur balance entre deux dentre elles.



    George Băjan : «Jaime lart et les avions. Je ne saurais dire laquelle de ces deux passions est plus grande. Je me suis mis à peindre quand jétais enfant. Je me rappelle quà lépoque, javais un album de peintres roumains et que jai essayé de faire des copies de leurs toiles. Après, tout a commencé par une rébellion. Enfant, rien de ce qui mentourait ne me plaisait, jétais très exigent ; jaimais beaucoup étudier, réfléchir. Et jaimais les avions. Jallais à un club pour enfants et, à mesure que javançais dans lâge, lune ou lautre de ces deux passion prenait le dessus. Il y a eu des périodes où je ne faisais que peindre, dautres où je moccupais daéromodélisme, où jétudiais le pilotage des avions, leur construction, leur histoire. »



    Dans latelier de George Băjan sentassent des toiles, des pièces de mobilier reconstituées et repeintes en rose et des maquettes davions avec leurs couleurs et emblèmes dorigine. Dès son plus jeune âge, George Băjan peignait avec beaucoup de facilité. Son talent fut découvert lors des concours de dessins sur asphalte auxquels il participait: « Mes parents mencourageaient beaucoup à moccuper de peinture, pourtant, étant ouvriers, il ne savaient pas ce quils pouvaient faire pour moi. A lécole, on menvoyait à toute sorte de concours de dessins sur asphalte et là, mes professeurs ont été impressionnés par mon talent. Moi, je nai jamais été impressionné, pourtant jai réussi à convaincre plusieurs personnes qui ont cru en moi. Je voulais étudier les Beaux Arts et à lépoque, cétait très difficile. En 1991, peu après la chute du communisme, jai eu la chance extraordinaire dêtre admis à lAcadémie des Beaux Arts après avoir passé le difficile concours dadmission dès la première tentative. Jai étudié pendant 6 ans. Après la première année, jai opté pour la peinture. Pour suivre cette spécialisation, jai dû passer un nouveau concours. Si je lavais raté jaurais essayé la sculpture, car jaime beaucoup la sculpture aussi. Je me souviens de mes premiers professeurs. Jai commencé létude de la peinture avec Ion Sălişteanu, un professeur extraordinaire, qui ne voulait jamais empiéter sur notre démarche personnelle, il ne nous imposait rien ; cétait quelquun de très fin dans ses relations avec les étudiants. Ensuite, jai voulu essayer quelque chose de différent, changer de style, chercher, expérimenter. Jai opté, avec plusieurs de mes collègues, pour M. Alexandru Chira, lui aussi une personnalité fantastique, qui avait des convictions extraordinaires dans ce quil faisait. Il était plus technique dans la composition, moins pictural. »



    Quelles sont les préférences de George Băjan en matière de peinture ? « Moi, dans la peinture, jai été marqué par le style classique, par la Renaissance. Je reviendrais toujours à ces compositions somptueuses, symphoniques. Cest le genre de peinture qui mattire. Reste à voir si je pourrais me permettre de la pratiquer, à lavenir, de mettre le corps humain au centre de mes compositions. Ma plus importante exposition a été celle de mon début, le fruit de toute lexpérience que javais accumulée. Elle a été ouverte au Palais de Mogoşoaia, en 1999. Lexposition suivante entre dans une autre catégorie. Elle a été organisée par lintermédiaire de lInstitut Culturel Roumain et accueillie par lInstitut Titu Maiorescu de Berlin. Jy exposais avec mon épouse, Silvia Băjan, peintre elle aussi. »



    Avec la même passion, le peintre George Băjan construit des modèles davions et participe à des concours daéromodélisme, suivant une démarche similaire à celle artistique : il prend comme point de départ une idée et y ajoute sa créativité, pour en faire une œuvre. (trad. :Dominique)

  • Rodica Costianu, de Galati à Paris

    Rodica Costianu, de Galati à Paris

    Née en 1977, à Galaţi, ville du sud-est de la Roumanie, Rodica Costianu s’est établie en France à l’âge de 33 ans. Elle avait suivi les cours du lycée d’art de Galati et puis ceux de l’Université de Beaux — Arts et de Design de Cluj Napoca, section peinture. Elle voulait à tout prix faire carrière dans le domaine des arts plastiques.



    L’artiste est récemment revenue en Roumanie pour participer au vernissage d’une exposition collective intitulée — « Eclats de monde » — où elle expose deux de ses ouvrages : «Mes origines sont très modestes. Bien des gens m’ont demandé comment l’idée m’était venue d’emprunter la voie de l’art, vu que je n’avais pas de modèle parmi mes proches. J’ai flirté aussi avec d’autres professions et suivi les cours d’une deuxième faculté. Toutefois, ce sont les arts plastiques qui m’ont toujours tenu à cœur. Je suis donc revenue aux premières amours. Même si j’assumais ainsi de gros risques, j’ai choisi de poursuivre cette voie, en me disant je veux faire de l’art, quitte que quitte ».



    On a eu beau lui rabattre les oreilles de la phrase « on ne peut pas vivre de l’art ». Rodica Costianu a plié bagages et, accompagnée de sa fille, Elena, est partie pour la France, pays dont elle ne connaissait même pas la langue. Heureusement qu’elle s’y est facilement adaptée : «Peu à peu, j’ai commencé à exposer mes ouvrages à Paris et non seulement. J’avance à petits pas, mais sûrs. Tout a commencé par les petits dossiers de participation aux différentes compétitions, aux galeries. Les débuts n’ont guère été faciles, mais à présent tout va à merveille. Je n’ai plus à aller vers les galeries; maintenant, ce sont elles qui m’invitent à exposer mes ouvrages».



    Rodica Costianu a fait son entrée dans le monde artistique parisien par une exposition personnelle, organisée dans les locaux de la succursale d’une importante banque de France. Il y a eu ensuite les salons, les biennales, les compétitions à Paris et dans d’autres grandes villes de l’Hexagone. Elle s’est inscrite dans l’Union des artistes de Paris et a fondé une association, dont elle est la présidente, à savoir l’Association parisienne des artistes roumains, Apar : «Quand je dis artistes roumains je ne me réfère pas qu’aux peintres, mais aussi au théâtre et à tout ce qui a trait à l’art contemporain. Nous nous proposons de venir en aide à ceux qui veulent exhiber leur art et montrer ainsi ce dont ils sont capables. Il y a aussi une page Facebook «Apar» et une adresse de mail apar.culture@yahoo.fr ».



    « En France, l’art et l’artiste jouissent d’un tout autre statut» affirme Rodica Costianu, qui ne peut pas s’empêcher de dresser des comparaisons avec la Roumanie : «En France il y a plein de possibilités — galeries, marchés de l’art, compétitions …La gamme est très large, incomparablement plus étendue qu’en Roumanie. A un moment donné, c’est vous qui décidez d’exposer oui ou non dans tel ou tel endroit. C’est ça qui fait la différence».



    Bien qu’elle ait choisi de vivre en France, Rodica Costianu est fortement attachée à sa terre natale. A preuve, son implication, aux côtés d’autres artistes roumains, à la restauration de l’Eglise roumaine de Paris, mieux connue d’après le nom de la rue où elle est située — Jean de Beauvais. Les travaux se sont achevés cet automne. Comment l’artiste plasticienne Rodica Costianu se voit-elle dans cinq ou dix ans? «Mon rêve s’appelait Paris. Maintenant que ce rêve est accompli, je pense à Londres, à New York, pourquoi pas ? »



    Rodica Costianu a profité des quelques jours qu’elle a passés en Roumanie pour revoir sa famille et des amis. Elle a regagné la France pour continuer à vivre son rêve parisien.