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  • Les débuts de la radiophonie en Roumanie

    Les débuts de la radiophonie en Roumanie

    La radiophonie a été une fabuleuse invention du XIXe siècle, intimement liée à l’information pendant très longtemps. Et pour cause ! Sa vitesse de diffusion de l’info surpassait la presse et le télégraphe, mais elle s’est vue, à son tour, détrôner par les inventions qui ont suivi, la télévision et internet. Cependant, l’invention de Guglielmo Marconi n’est en aucun cas passée de mode. Le fait qu’elle soit toujours en fonction témoigne de la force encore considérable de la radio.En Roumanie, la radiophonie fait son apparition au début du XXe siècle, avec l’ouverture de la première station radiotélégraphique à Constanța, au bord de la mer Noire, en 1908. Elle appartenait au Service maritime roumaine. Pourtant, il a fallu attendre encore vingt ans avant d’assister à l’inauguration officielle d’un service de radiophonie public. 1928 est considéré comme l’année de la transmission ininterrompue de la radio nationale. Dans une interview enregistrée en 2001 pour le Centre d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine, le professeur Radu Grigorovici mettait en lumière l’histoire de la radiophonie d’avant 1928.

    Durant la seconde guerre mondiale, Radu Grigorovici a travaillé au Centre de censure de la presse, qui s’était occupé aussi de la radio : « L’on essayait d’installer une station au troisième étage du bâtiment où le mathématicien Horia Hulubei donnait ses cours. Il y avait là un maître de conférences, qui était, je crois, embauché à l’Institut électrotechnique de l’Université. Mes collègues plus âgés me racontaient comment était vérifié le fonctionnement de l’émission, au troisième étage du département de maths, et de la réception, au deuxième étage du département d’acoustique et d’optique. Quatre personnes sortaient dans le hall et demandaient « Est-ce que ça fonctionne ? » ou « Est-ce qu’on entend quelque chose ? ». Dès fois, la réponse était « On n’entend rien ». On y travaillait beaucoup et je sais que ces personnes étaient impliquées dans cette activité. »

    Les souvenirs d’enfance sont les plus chers de la vie d’un être humain. Avec le temps qui passe, des gens, des objets, des circonstances et des rencontres deviennent tous plus agréables et plus chargés de nostalgie. La rencontre de Radu Grigorovici avec la radiophonie a été rendue possible par celle avec des gens dédiés à cette nouvelle technologie : « Le premier poste de radio, je l’ai vu à Cernăuţi, en 1921-22, je crois. J’étais enfant, ma mère était chargée de l’administration d’un hôpital-maternité, dans le jardin duquel se trouvait notre logement. Le professeur de physique Eugen Bădărău habitait dans une rue aux confins de la ville. Né en Bessarabie, il avait fait des études en Autriche, en Italie, il avait travaillé à Saint-Pétersbourg, qu’il avait fui au moment de la révolution bolchévique. Enfin, il était arrivé en Roumanie où il avait nommé professeur de physique expérimentale à Cernăuţi. Eugen Bădărău s’était fabriqué lui-même un poste de radio et, comme il connaissait mon père et qu’on était aussi voisins, un soir il nous a invités à écouter la radio. »

    Radu Grigorovici vivait en Bucovine, province austro-hongroise où son père député avait milité pour l’union avec la Roumanie. C’est là qu’il avait vu pour la première fois dans sa vie le moyen le plus fascinant d’être en contact avec le monde : « C’était une boîte de 50 centimètres sur 40, plutôt rectangulaire et fourrée de lampes Miniwatt, produites par la compagnie Philips et qui consommaient moins d’électricité. Il y avait 5 ou 6 lampes, des condenseurs, des transformateurs et ainsi de suite, un couvercle. L’amplification était contrôlée par deux bobines qui se rapprochaient ou s’éloignaient l’une de l’autre, jusqu’au niveau maximum. Au-delà du maximum, ça rentrait en auto-oscillation et produisait un sifflement. L’écoute n’était possible qu’avec des casques, qui étaient attachés à une colonne et utilisables par 5 ou 6 auditeurs. C’était tout ce que le poste pouvait faire et nous écoutions des stations en ondes longues. Radio Bucurest n’existait pas encore, mais il y avait Moscou, Varsovie, Vienne, Paris, une station allemande, près de Berlin, et parfois, même d’Angleterre. J’ai aussi écouté de la musique de gitans de Budapest. »

    Radu Grigorovici s’est ensuite acheté ses propres postes de radio, qui l’ont aidé à connaître le monde : « J’habitais encore à Cernăuţi, donc ça devait être avant 1935, quand je me suis acheté un Philips, un appareil avec deux boutons latéraux, très moderne, parfaitement contenu dans une boîte en plastique, avec juste les lampes en positions accessibles, pour pouvoir les remplacer en cas de besoin. Plus tard, j’ai acheté un Fileta, un poste bien plus petit et peu cher, qui captait les ondes longues et les ondes courtes. C’est sur lui que j’ai écouté la BBC durant la guerre, une diffusion puissante et sans brouillage. L’écoute sur les autres stations, en roumain, était brouillée. Nous connaissions les émissions des stations françaises et de la BBC en français, qui diffusaient beaucoup de propagande, alors que nous cherchions des infos correctes. C’est comme ça que j’ai appris l’anglais. »

    Les débuts de la radiophonie en Roumanie ont été en phase avec ceux de l’espace où elle avait été inventée. La radiophonie prouve que le monde se synchronise dans toutes les tendances d’une époque.

  • Vasile Ionescu

    Vasile Ionescu

    Considérée jadis comme la 8ème merveille du monde, la radiophonie accompagne l’histoire humaine depuis la fin du XIXème siècle. Plus précisément, depuis 1930, année de l’apparition des premières autoradios. En Roumanie, les débuts de la radiophonie sont associés au nom du juriste Vasile Ionescu, premier PDG de la Société Roumaine de Radiodiffusion dont le mandat a duré 9 ans, de 1935 à 1944.

    Né en 1898 à Slanic Prahova, au sein d’une famille de fonctionnaires, Vasile Ionescu fait des études de droit à l’issue desquelles il intègre l’équipe qui représente les intérêts juridiques de la Société roumaine de Radiodiffusion. Mise en place à l’initiative de l’Etat roumain, la radiophonie a dès le début pour rôle de répondre aux intérêts publics. Les Archives de la Radio contiennent des documents sonores où Vasile Ionescu raconte les grands moments historiques des années 1930 et 1940 auxquels il a participé en tant que directeur de la Société de Radiodiffusion roumaine.

    A titre d’exemple, l’assassinat le 21 septembre 1939 du premier ministre, Armand Calinescu, par des fascistes membres de la Garde de Fer qui, par la suite, sont venus à la radio pour annoncer sur les ondes la mort du dignitaire. Un autre moment décisif de l’histoire roumaine est le jour du 23 août 1944, quand la Roumanie rejoint la coalition internationale anti-fasciste. Un événement dont Vasile Ionescu se souvient parfaitement, comme il le raconte lors d’une interview en 1974: Le mercredi 23 août 1944, à 17h00, j’ai reçu un coup de fil du Commandement militaire de Bucarest. On me demandait d’enfiler l’uniforme militaire et de me présenter à 17h30, au cabinet du commandant en chef de la capitale. A ma grande surprise, je l’ai trouvé en compagnie du général du corps des armées Iosif Teodorescu et du chef de l’Etat major, le colonel adjudant Demeter Damaceanu, tous les deux habillés en civils bien qu’ils soient militaires de carrière. A ce moment-là, le général Teodorescu m’a adressé la parole, et m’a dit Monsieur le directeur général, dorénavant, vous n’obéirez qu’aux ordres de sa Majesté, le roi Michel et du premier- ministre, le général adjudant, Constantin Sanatescu. Je vous invite à vous rendre tout de suite au palais, en empruntant le chemin le plus court. C’est à ce moment là que le colonel adjudant Demeter Damaceanu a téléphoné au Palais royal de l’Avenue Victoria pour parler avec le ministre de l’Intérieur de l’époque, le général adjudant Constantin Sanatescu, et le prévenir de ma visite.

    En 1944, Vasile Ionescu se voit contraint de quitter la direction de la Radiodiffusion roumaine. Il est décédé à Bucarest, à la fin des années 1970. (trad. Ioana Stancescu)