Tag: salles de cinéma

  • « Ici vous auriez pu voir Monstres »…

    « Ici vous auriez pu voir Monstres »…

    Le film « Monstres », présenté cette année dans la section Forum du Festival de Berlin et récompensé du Prix des lecteurs du quotidien Tagesspiegel, sort en salle en Roumanie à la fin du mois de septembre. Mais avant la rencontre avec le son public roumain, Transilvania Film, le distributeur, et Marius Olteanu, le réalisateur, veulent tirer la sonnette d’alarme sur le nombre de plus en plus réduit de salles obscures où l’on peut voir des films roumains. Ils se sont alors mis à marquer les espaces de Bucarest qui accueillaient tous les jours, jusqu’à il y a peu, des centaines de cinéphiles. « Ici vous auriez pu voir Monstres à partir du 27 septembre ». Des affiches énormes, qui s’adressent directement aux passants, couvrent les façades de deux cinémas bucarestois fermés récemment, Corso et Studio. C’est ainsi que le distributeur du seul film roumain présent cette année à la Berlinale entend sensibiliser le public et relancer le débat sur la situation dramatique des salles de cinéma en Roumanie, victimes d’abandon, de dégradation et poussées à la disparition.

    Le réalisateur du film « Monstres », Marius Olteanu : « Le but de cette campagne était d’attirer l’attention sur le fait qu’on s’habitue au pire. Dans ce cas précis, le pire c’est l’absence de cinémas d’art et d’essai à Bucarest. Il semblerait qu’au début des années ’90, il y avait environ 70 cinémas dans la ville. Or, aujourd’hui, il n’en reste plus que cinq, y compris les deux salles de la Cinémathèque. Et malheureusement, je crois que cela affecte directement l’identité culturelle de la capitale. Il existe sûrement beaucoup de gens qui ne savent même pas que des cinémas fonctionnaient auparavant dans tous ces bâtiments. De même, beaucoup de monde ne se rend pas compte de l’impact culturel de cette absence de salles d’art et d’essai. J’espère que cette campagne nous apportera des réponses de la part des autorités sur le statut de ces lieux, pour décider de la marche à suivre pour chacun. »

    Paradoxalement, malgré le nombre croissant de productions roumaines récompensées chaque année dans les grands festivals internationaux, le nombre de salles de cinéma continue à décroître en Roumanie. Dix villes couvrent à elles seules 70% du public roumain, alors que la plupart des communes ne comptent même pas un seul écran. Les chiffres le prouvent : nous sommes le pays européen avec le moins d’écrans de cinéma rapportés au nombre d’habitants. En 1990, le public roumain avait à disposition environ 450 salles d’art et essai. Seulement 90 cinémas fonctionnent encore aujourd’hui et la grande majorité est constituée des multiplexes des centres commerciaux.

    Après le Prix des lecteurs du Tagesspiegel reçu à Berlin, « Monstres », long métrage de début de Marius Olteanu, a obtenu le Grand prix au Festival international du film de Sofia, en Bulgarie, et le trophée Golden Mimosa du meilleur scénario au Filmski Festival Herceg Novi au Monténégro. En Roumanie, il a été présenté en première au Festival international du film Transilvania de Cluj-Napoca, d’où il est reparti avec le prix des Journées du film roumain pour le meilleur Début.

    Marius Olteanu : « La situation en Roumanie est très frustrante, surtout si je la compare avec les projections de Berlin, où plus de 3.000 personnes ont vu mon film. J’ai eu huit projections en tout, dans différentes salles, toutes dotées d’un équipement très performant. C’est alors une situation très frustrante, préparer la première à Bucarest d’un film récompensé d’un prix du public à Berlin, et savoir que les salles ne sont pas au point. Et on ne peut pas tenir le public pour responsable, dire que les gens ne viennent pas voir le film au cinéma. En fait, il n’y a pas de salle pour voir ce type de film. Pour moi, le cinéma commercial et les multiplexes ont leur place, ils sont très utiles pour ceux qui veulent se détendre après une journée stressante. Mais ce n’est pas la seule façon de faire ça. Je crois qu’il existe des films qui mélangent ces deux aspects, ils ont un côté divertissant, mais ils font aussi en sorte que les gens sortent de la salle de cinéma en étant plus intelligents. »

    « Monstres » présente une journée, peut-être la dernière, de la vie d’un couple. Dana (Judith State) et Arthur (Cristian Popa) se trouvent devant la plus importante des décisions. Elle cherche de la validation. Il cherche de la compagnie. Ils partagent le même lit depuis des années, mais ça fait un moment qu’ils ne semblent plus aller dans la même direction. Quelles sont les chances de survie d’une relation marquée par des compromis et des pressions sociales ? Les problèmes de communication, ne pas assumer ses faits et ses gestes, tout ça peut miner un couple. Mais l’amour ne crée jamais des monstres. Le film, produit par Parada Film Roumanie et Wearebasca, est distribué en Roumanie par Transilvania Film. (Trad. Elena Diaconu)

  • Quel avenir pour les salles publiques de cinéma?

    Quel avenir pour les salles publiques de cinéma?

    Les Films de Cannes à Bucarest, arrivé à sa 9ème édition, est un événement déjà bien connu par les cinéphiles roumains. C’est le rendez-vous de l’automne devenu incontournable dans la capitale et dans plusieurs villes de Roumanie. L’événement a été initié en 2010 par le réalisateur Cristian Mungiu, le seul réalisateur roumain à avoir gagné, en 2007, la prestigieuse Palme d’Or. Les Films de Cannes à Bucarest bénéficie chaque année d’une programmation très riche : les films primés à Cannes et dans d’autres festivals prestigieux et les dernières productions roumaines en avant-première. Tout se passe en compagnie d’invités de Roumanie et de l’étranger et vise à créer un dialogue avec le public par l’organisation de nombreux moments de rencontre. Une des rencontres de cette dernière édition a attaqué le fâcheux sujet de l’avenir des salles publiques de cinéma en Roumanie. Elena Diaconu y était présente. Quel avenir pour les salles de cinéma jetées à l’oubli ? Enquête.

  • Maurice Mericer (France) – combien de cinémas multiplex dans la capitale ?

    Maurice Mericer (France) – combien de cinémas multiplex dans la capitale ?

    Eh bien, j’ai fait quelques recherches, et le résultat est assez surprenant. Il faut dire qu’avant 1989, Bucarest était plutôt bien loti côté cinémas. Après 1989, nombre d’entre eux sont tombés dans l’oubli, n’ont plus été fréquentés, ni modernisés sinon ont carrément mis la clef sous la porte. Avec la construction du premier centre commercial arrivait aussi la grande nouveauté – le premier cinéma multiplex. C’était en 2000.

    Actuellement, j’en ai dénombré neuf de ce type, et même un IMAX, pour quelque 2 millions d’habitants. Mais il convient aussi de mentionner les cinémas traditionnels – une douzaine.

    Bien sûr, un spectacle de qualité, confortablement assis dans votre fauteuil, avec une bonne visibilité, une bonne sono, les technologies les plus performantes – tout cela n’est pas gratuit. Pourtant, surprise ! Le billet le moins cher que vous puissiez avoir dans un multiplex à Bucarest commence à l’équivalent de 2,65 euros ! Du lundi au vendredi avant 17h00, s’entend. C’est une règle qui vaut dans les autres aussi. Il convient de dire que plus le nombre de cinémas multiplex a augmenté, et plus les prix se sont démocratisés.

    Au début, c’était hyper-cher. Maintenant, le billet plus cher, en week-end, est à 5,75 euros! Ainsi, dans le plus ancien des multiplex de la capitale, qui est très à la page, le billet en semaine coûte l’équivalent de 3,75 euros. Après 17h00, il faut compter 4,25 euros. Du vendredi au dimanche avant 17h00, le prix d’un billet est de 4,70 euros ; après cette heure, c’est 4,90 euros. Pour une avant-première, ce n’est pas très cher non plus : 5,60 euros. Après, il y a les salles VIP. Non, pas pour les VIPs, mais pour que vous fassiez l’expérience d’un VIP. Là, vous avez les billets les plus chers : 15,20 euros.

    Mais à la différence près que vous avez droit à manger et boire tant que vous souhaitez, car il y a un buffet garni et tout le monde peut se servir, même pendant le film. Inutile de dire que ce genre de cinémas propose les derniers films en date, une grande variété de films, et dans certains le parking est gratuit. Et non dernièrement, les effets 3D sont les plus performants du monde, lit-on sur le site d’un de ces cinémas. Voilà, Maurice. Bon visionnage !

  • Jean – François Meile (France) – Y a-t-il encore des salles de cinéma de quartier ?

    Jean – François Meile (France) – Y a-t-il encore des salles de cinéma de quartier ?

    En un mot : désastreuse, telle est la situation des salles de cinéma de quartier. Vu que les grands centres commerciaux poussent comme des champignons en Roumanie et surtout à Bucarest, les petites salles de cinéma – qu’elles soient de quartier ou sises au centre-ville – n’ont pas trop de chances de survie.

    Prenons l’exemple de Bucarest, la capitale. Avant 1989, on y recensait 87 cinémas publics appartenant à la Régie autonome de distribution et d’exploitation des films (RADEF). Aujourd’hui il n’en reste plus que 5 salles, et celles-ci ont été quasiment jetées dans l’oubli. Que sont devenues les autres ? Certaines ont été transformées en terrasses, bars et cafés, d’autres – en discothèques de luxe, d’autres encore sont en ruine. Vu cet état de choses, la Régie a décidé de ressusciter ces salles. Depuis 2008, quelques-unes ont été rénovées et dotées d’équipements modernes. Certaines proposent les mêmes films que les multiplex, mais à des prix nettement moins chers. D’autres visent différentes niches de public et proposent uniquement des films européens ou accueillent des festivals de film. Malgré tous leurs efforts, ces petites salles ont du mal à attirer les Bucarestois. « La plupart des gens les évitent, en pensant qu’elles sont obsolètes, que la qualité des écrans est douteuse et que les films sont vieillis », lit-on dans un article paru à ce sujet dans le quotidien Adevarul. En fait, « le public ne sait pas qu’une partie de l’univers des cinémas du Bucarest d’antan est toujours vivant et que derrière les portes démodées il existe des salles complètement remises à neuf, qui disposent de bonnes conditions techniques et d’un design moderne et dont les tarifs dont beaucoup plus accessibles.

    En voici quelques exemples. Europa Cinéma est une salle accueillante et coquette, d’environ 300 places, qui fait partie du réseau du même nom et à l’affiche de laquelle on retrouve uniquement des films européens. La Cinémathèque Union fait partie du même réseau, Europa Cinéma, avec la précision qu’elle offre des réductions importantes de prix aux étudiants de l’Université d’art théâtral et cinématographique et de l’Université nationale des beaux-arts. Elle est située, évidemment tout près de l’Université de Bucarest. Toujours au centre-ville, à deux pas du centre historique en fait, il y a le cinéma Corso. On peut y regarder les films les plus récents, les mêmes blockbusters américains que dans les multiplex. Puis, au cœur même de la ville, sur l’avenue de Magheru, le Cinéma Studio est considéré comme une des salles les plus intimes de Bucarest, l’endroit où l’on peut voir de bons films dans le cadre de différents festivals internationaux.

    De l’autre côté du boulevard Magheru, le Cinéma Patria tente lui aussi de survivre, à sa manière. Avant l’arrivée des multiplex, à la fin des années 90, ce fut le premier cinéma de Bucarest à être doté d’une sonorisation de dernière génération, le Dolby Surround, qui était à ses débuts en Roumanie. A l’époque, on faisait la queue pendant plus d’une heure pour y acheter des billets. Puis, les jeunes ont tout de suite préféré les grandes surfaces et leurs salles ultra-modernes et ultraconfortables. Le Cinéma Patria est passé dans l’oubli, à l’instar d’autres salles publiques. Plusieurs années se sont écoulées avant qu’il ne soit rénové. Il fallait surtout le doter d’un bon système de chauffage central, car c’est un grand cinéma, avec un millier de places. Comme je le disais tout à l’heure, une fois modernisé, il tentait de survivre à sa manière en proposant non seulement des films, mais aussi des spectacles de théâtre et de stand-up comedy. Toutefois, fin 2015, le terrible incendie de la discothèque Colectiv de Bucarest a mis en lumière le fait que la grande majorité des salles (de théâtre, cinéma, concerts ou des restaurants) se trouvant dans les vieux bâtiments n’étaient pas conformes aux normes de sécurité en situation d’urgence. Par conséquent, elles ont été fermées. Ce fut le sort de toutes les boutiques de l’avenue Magheru, salles de cinéma et de théâtre comprises. Ce qui plus est, la quasi-totalité de ces bâtiments datent des années 1930 et courent un énorme risque sismique. Le cinéma Patria n’y fait pas exception. Il a donc fermé ses portes fin 2015.

    Avant de terminer, je voudrais préciser qu’à Bucarest, les grands centres commerciaux sont à l’intérieur de la ville. En fait, il y en a plusieurs dans chaque quartier. Les gens les préfèrent, parce qu’elles sont très accessibles, parce qu’on y trouve tout – boutiques en tout genre, librairies, restaurants, grandes surfaces, aires de jeux et… cinémas. Vu cette offre tellement riche, je me demande bien ce que les petites salles de quartier pourraient offrir de plus….