Tag: SDF

  • La pandémie et les personnes en situation de rue

    La pandémie et les personnes en situation de rue

    En février 2020, Valentina Beleavski invitait
    Ionuţ Jugureanu à participer à une édition de notre émission RRI Special pour
    parler de son travail avec la fondation Parada. Une année est passé depuis et
    nos vies se retrouvent chamboulées. Mais qu’en-est-il des plus fragiles, de
    ceux qui vivent dans la rue, enfants, familles, qui sont dans la précarité, pandémie ou non. J’ai invité à mon tour Ionuţ Jugureanu pour témoigner de
    l’activité de Parada au bout d’un an de pandémie.



  • Priorités de la vaccination anticovid

    Priorités de la vaccination anticovid

    Cela
    fait presqu’une année que le premier cas de coronavirus a été confirmé en
    Roumanie. Depuis, le bilan des décès approche les 20 000 personnes. Comme
    partout en UE, la campagne de vaccination anticovid a démarré en Roumanie le 27
    décembre dernier et les données centralisées au niveau intracommunautaire nous
    placent en 3e position en ce qui concerne le taux d’immunisation de
    la population. « Le rythme dans lequel la campagne s’est déroulée
    jusqu’ici nous confirme que nous approchons l’objectif visé, celui d’immuniser
    l’ensemble de la population dans les plus brefs délais » – c’est ce qu’affirme
    le responsable de la campagne de vaccination, Valeriu Gheorghiță. Il a
    également fait savoir qu’en Roumanie, le nombre des personnes vaccinées avait
    déjà dépassé celui de personnes infectées.






    La
    stratégie de vaccination adoptée par Bucarest a visé avant toute chose le
    personnel médical et les résultats en sont déjà évidents. Et pour cause, le
    taux d’infection dans les rangs du personnel médical a baissé de 85% en
    Roumanie. Dans la phase actuelle de la campagne on se concentre en priorité sur
    les malades chroniques et sur les personnes âgées de plus de 65 ans, notamment
    celles se trouvant dans les maisons de retraite et dans les centres
    d’assistance sociale. S’y ajoutent les employés des domaines considérés comme
    essentiels pour le fonctionnement de l’Etat. Les enseignants en sont une
    catégorie. Surtout que, début février, les cours ont repris en présentiel un
    peu partout en Roumanie, après presqu’une année d’enseignement à distance.
    Selon le ministère de l’Education, depuis le retour en classe, le 8 février
    dernier, plus de 800 élèves et quelque 640 enseignants ont été dépistés
    positifs au nouveau coronavirus, ce qui fait qu’environ 700 classes ont à
    nouveau passé aux cours en ligne, temporairement cette fois-ci.






    Les
    autorités plaident donc pour une immunisation accélérée dans l’Education. Pour
    ce faire, toutes les inspections scolaires et toutes les universités doivent
    fournir au plus vite à la Direction de santé publique les listes nominales du
    personnel qui souhaite se faire vacciner contre le coronavirus.




    Valeriu
    Gheorghita : « Il n’est plus nécessaire de s’inscrire sur la plate-forme dédiée,
    justement pour ne plus attendre une place libre. Les donnes seront centralisées
    par chaque unité d’enseignement et transmises aux inspections scolaires. En
    coopération avec la Direction de santé publique, on établit les centres où aura
    lieu la vaccination. En principe, chaque département dispose de deux centres. »




    A
    noter que plus de 40 000 salariés de l’Education se sont déjà fait vacciner, et
    la moitié ont reçu aussi le rappel.






    Enfin,
    mentionnons que les sans-abris sont désormais une catégorie prioritaire da la
    campagne de vaccination en Roumanie. Des équipes mobiles spécialisées s’en
    chargent, appuyées par les autorités locales et les directions d’assistance
    sociale. Pour les SDF, le plus grand défi c’est de retrouver les personnes en
    question pour leur administrer le rappel du vaccin. Jusqu’ici quelque 300 personnes
    sans-abri ont reçu la première dose du vaccin anticovid et un nombre similaire
    a en reçu aussi le rappel. (Trad. Valentina Beleavski)

  • Ian Tilling, expat en Roumanie

    Ian Tilling, expat en Roumanie

    Après la révolution de 1989, les médias internationaux regorgeaient d’images d’enfants roumains institutionnalisés dans des orphelinats épouvantables. Peu de temps après, des dizaines de convois humanitaires arrivaient en Roumanie. Des étrangers aussi y venaient nombreux, profondément touchés par ce qu’ils avaient vu dans la presse et déterminés à donner un coup de main à ces enfants en détresse. Parmi eux, notre invité daujourdhui, le Britannique Ian Tilling, qui, à cette époque-là, était agent de police. Il a travaillé pendant deux ans avec les enfants en situation de handicap, dans le centre de Plătărești, puis a décidé de retourner en Roumanie, cette fois pour toujours. Au bout de 23 ans au sein de la police de Kent, Ian a pris sa retraite et a radicalement changé de vie. Il s’est installé en Roumanie et a fondé, en 1992, le centre Casa Ioana, un lieu qui se veut un nouveau départ pour les victimes de la violence domestique et pour les familles sans abri. A la tête d’une équipe enthousiaste, Ian a attiré de nombreux expatriés dans cette aventure. En plus, il organise régulièrement des actions humanitaires pour les sans-abris de Bucarest.


    Lorsqu’il est arrivé en Roumanie pour la première fois, c’était en août 1990. Il venait de conduire à travers l’Europe un camion chargé d’aides humanitaires. Une infirmière l’accompagnait. Ian Tilling se souvient que, pour pouvoir franchir la frontière roumaine, il avait improvisé sur place un tampon en se servant d’une pièce de monnaie de 10 pennies avec l’effigie de la reine d’Angleterre. Il se rappelle aussi l’image de la Roumanie du lendemain de la révolution et explique pourquoi il a décidé de s’y installer définitivement : « Le voyage vers Bucarest a été affreux et merveilleux à la fois. Affreux parce que les routes, comme les conditions, étaient très difficiles. En revanche, les paysages et la nature étaient magnifiques, ce qui a rendu le voyage très intéressant. Quand nous sommes arrivés à Bucarest, tard dans la nuit, la ville nous a semblé terne. On ne s’y attendait pas du tout. Nous sommes finalement arrivés à l’hôtel Athénée Palace, trop luxueux à notre goût et un peu cher, mais nous n’avions pas d’autre endroit pour dormir. Je me souviens que le lendemain matin nous avons été accueillis par un enfant. Il a offert une fleur à l’infirmière qui m’accompagnait. Un beau geste de la part de ce gosse qui allait devenir notre petit guide local. Au départ, j’ai travaillé à l’orphelinat Mère Teresa, à Bucarest. Ensuite, j’ai rencontré quelques infirmières britanniques et je me suis rendu au centre de Plătărești. J’y ai travaillé pendant un mois avec les enfants atteints de handicaps physiques et mentaux sévères. Le seul endroit où je pouvais acheter de la nourriture, c’était le marché. Il y avait aussi une épicerie sur le boulevard Magheru, mais les choses essentielles, je les trouvais au marché. Il n’y avait pas de panneaux publicitaires et tout était morne, monotone. On voyait des files d’attente devant les magasins et l’éclairage public n’existait que sur les grands boulevards. Je me suis rendu aussi à Brasov. Je suis resté une nuit dans cette ville si différente de Bucarest et si belle, située dans les montagnes. Nous sommes ensuite retournés au Royaume-Uni sans aucune mésaventure. Nous avons fait halte à Vienne, où nous avons passé la nuit. Je me souviens avoir été enchanté, le lendemain matin, de regarder par la vitrine d’un magasin où l’on vendait des articles sanitaires et cosmétiques pour la salle de bains. Ce qui m’a fasciné, ce sont les couleurs et les formes de ces objets que j’ai été surpris de voir après tant de gris. Ce dont je me souviens encore, c’est que, de retour au Royaume-Uni, en faisant mes courses dans un supermarché ordinaire, j’ai réalisé avec stupéfaction que là, la nourriture pour les chiens était plus variée que celle offerte à un être humain à Bucarest. Le contraste était énorme. J’avoue avoir été content de quitter la Roumanie, après y avoir passé quatre semaines d’émotions extrêmes. Je ne pensais pas y revenir un jour. Mais, comme je l’ai dit, nous nous sommes arrêtés à Vienne et, tout le chemin du retour, nous avons pensé à la Roumanie et nous avons tous les deux changé d’avis. C’était comme si un aimant invisible nous tirait en arrière, ce qui s’est finalement produit. »


    Ian Tilling est un entrepreneur social apprécié. Pendant les 30 ans écoulés depuis son installation en Roumanie, il a coordonné plusieurs équipes qui ont mis en œuvre des programmes européens et un programme de la Banque Mondiale destiné à l’inclusion sociale des sans-abris et des familles monoparentales. L’association qu’il a fondée et qu’il dirige, Casa Ioana, abrite 20 familles et neuf femmes qui reçoivent des soins, des conseils psychologiques et professionnels censés les aider à mener une vie indépendante. Au bout d’une année, soit la période daccueil proposée par Casa Ioana, plus de 80% de ceux qui y ont vécu trouvent un logement et un travail. Au fil des trois décennies vécues en terre roumaine, Ian a remarqué de nombreux changements pour le mieux en matière d’infrastructure, mais il déplore toujours labsence d’autoroutes. Quant aux besoins des catégories défavorisées de notre pays, Ian estime que l’Etat roumain ne les prend pas en compte au niveau requis. Il se réjouit pourtant d’avoir réussi à fermer les orphelinats. De l’avis de Ian Tilling, la pauvreté, le manque d’éducation et la mentalité selon laquelle la violence domestique est quelque chose de presque normal qu’il faut résoudre exclusivement au sein de la famille comptent parmi les problèmes majeurs auxquels la Roumanie est confrontée.


    « Beaucoup de choses ont changé et continuent de changer en mieux. Je suis content de le constater. La Roumanie est membre de l’OTAN et fait partie de l’Union européenne. Lors des nombreux voyages que j’ai faits, les gens m’ont fait part de leurs bonnes impressions sur la Roumanie. Bien des Roumains sont allés travailler à l’étranger et la grande majorité d’entre eux ont apporté une contribution bénéfique aux pays dans lesquels ils vivent. La Roumanie devrait – et je pense qu’elle le fait déjà – promouvoir la beauté naturelle de ces lieux fabuleux qui ont conquis le cœur du prince Charles et de certaines autres personnalités intéressées par la nature et les riches traditions de ce pays. Un autre aspect important serait l’industrie hôtelière, un domaine dans lequel la Roumanie doit progresser, dans le sens qu’il faut comprendre la nécessité de développer une culture de l’accueil et de la convivialité. Et ce n’est pas quà lEtat roumain, mais à nous tous de nous investir dans les efforts visant à promouvoir une meilleure image et nos succès à l’étranger. »


    Ian pense souvent à ses proches qui vivent au Royaume-Uni, mais la Roumanie est maintenant son chez soi. C’est ici qu’il est reparti à zéro, après avoir pris sa retraite à l’âge de 42 ans. Ian Tilling parle de son histoire en Roumanie comme d’une situation heureuse, dans laquelle les deux parties ont quelque chose à gagner : « Certes, la Roumanie est ma maison depuis plusieurs années. Elle est, si vous voulez, la terre de ma renaissance, puisque j’ai complètement changé de vie en arrivant ici. Il n’y a rien de spécial de mon pays natal qui me manque, peut-être parce que je sais clairement que ma maison est ici, maintenant. J’y ai pris racine et je suis reconnaissant pour cette chance. Ces trois décennies ont été extraordinaires pour moi. Le carrousel des émotions tourne toujours. J’ai énormément appris sur moi-même et je n’aurais pas pu le faire si j’étais resté au Royaume-Uni à vivre comme tous les retraités. » (Trad.Mariana Tudose)



  • Douche mobile pour les SDF

    Douche mobile pour les SDF

    La vie des SDF est un cumul de difficultés auxquelles ils se heurtent quotidiennement. L’hygiène en est un. Heureusement, depuis septembre dernier, les sans-abri de Bucarest ont une solution à ce problème : une douche mobile mise à leur disposition par l’Association Carusel, une ONG caritative qui tente depuis plusieurs années d’améliorer la vie des gens les plus marginalisés de la capitale roumaine. De quoi s’agit-il plus concrètement ? Un véhicule doté d’une douche, de lave-linge et de sèche-linge fait le tour de la ville deux fois par semaine et visite ses bénéficiaires.

    Les gens l’attendent avec impatience, affirme Carmen Voinea, responsable de communication au sein de l’Association Carusel : « Nous allons en ville chaque semaine. Nous sommes très contents de voir qu’il existe des gens désireux d’utiliser la douche. Ils emploient aussi les lave-linge et les sèche-linge. Pour le moment il est difficile de faire un calcul, mais je dirais que ces deux derniers mois, plusieurs dizaines de personnes en ont bénéficié. Cette douche mobile est une fait un véhicule utilitaire recréé à zéro selon nos indications et doté de tous les équipements nécessaires pour que son intérieur ressemble à une véritable douche. Qui plus est, nous avons des lave-linge et des sèche-linge aussi. »

    Le programme « Mobil’douche » est inspiré d’initiatives similaires mises en place aux Etats-Unis et en France. A part les facilités déjà mentionnées, le véhicule bucarestois est doté de toilettes, sèche-cheveux, instruments pour faire couper les cheveux, WiFi gratuit et espaces de stockage pour le matériel que l’équipe de l’Association Carusel distribue aux SDF, comme par exemple les vêtements reçu via des dons. Pour l’instant, la douche mobile circule au centre-ville de Bucarest, entre les Places Universitatii (de l’Université) et Unirii (de l’Union), car son fonctionnement est conditionné par le réseau d’hydrants de la capitale.

    Carmen Voinea ajoute : « Cette douche mobile est connectée aux hydrants et stationne environ 8 heures par jour dans certains quartiers. Ces quartiers avec leurs besoins spécifiques ont été identifiés lors d’autres projets que nous avons menés. Ce sont des zones qui regroupent de nombreuses personnes qui ont besoin de nos services, mais aussi des zones faciles à trouver. Nous visons actuellement la zone entre les places Unirii et Universitate, mais sous peu nous irons aussi vers la Gare du Nord. »

    Comme tous les autres programmes de l’Association Carusel, « Mobil’douche » compte beaucoup sur les bénévoles de tous âges, affirme Carmen Voinea: « Carusel a une équipe merveilleuse formée de quelque 70 bénévoles provenant de domaines d’activité les plus divers et ayant des âges très variés. Ce sont des étudiants, des membres d’autres ONGs, des informaticiens, des salariés de multinationales. Je pense que nous sommes une très belle équipe. Ce qui nous réjouit le plus, c’est de voir les gens vouloir s’impliquer, faire quelque chose de plus par rapport à leur travail quotidien. Plus encore, nous pensons que les bénévoles sont une voie d’accès à une communauté plus large. Ils peuvent transmettre aux autres notre appel à être solidaires, à renoncer aux idées reçues, aux discours qui stigmatisent ou qui marginalisent.»

    Un diplôme universitaire en Sécurité sociale dans sa poche, Florentina Croitoru travaille en tant que bénévole auprès de l’Association Carusel. « Mobil’douche » s’avère aussi bien une opportunité de mettre en oeuvre tout ce qu’elle a appris pendant ses études, mais aussi l’occasion de développer son empathie. Florentina Croitoru: « Au début, j’avais très peur de ne pas faire face. J’ai commencé le bénévolat par une sortie par semaine, à partir de 20h00, tous les mercredis. Dans un premier temps, je n’étais même pas capable de leur adresser la parole. J’avais peur de ne pas les vexer. Mais petit à petit, on a fini par mieux se connaître et à présent, ils me font confiance. La rue leur fait vivre toute sorte de traumas – physiques ou psychiques – et c’est pour cela qu’ils ont du mal à se confier aux gens qu’ils ne connaissent pas et d’accepter qu’on leur offre un thé, une couverture ou un sandwich. J’en connais pas mal qui dans un premier temps m’ont dit non et puis, au fur et à mesure que j’ai commencé à apprendre à gérer la situation, ils ont compris que je suis là pour leur donner un coup de main ».

    Sur l’ensemble de son expérience de bénévole menée dans le cadre de ce projet, Florentina Croitoru se dit touchée surtout par la façon dont elle a vu les SDF renaître, une fois sortis du camion-douche : « C’est leur transformation qui m’a touchée le plus. Quand ils sont entrés dans le camion pour la toute première fois, ils n’étaient que de pauvres SDF. Eh bien, une fois lavés, ils avaient changé. Je ne veux pas employer le terme de « comme les autres », car eux aussi, ils sont comme nous. Pourtant, le physique compte. Et souvent, dans le métro, le tramway ou dans d’autres endroits publics, on fuit ces gens en raison de leur aspect… Mobil’douche est donc un moyen censé leur rendre la dignité que malheureusement, une bonne partie d’entre eux, pensent avoir perdue dans la rue. »

    Quant aux SDF ou mal logés, ils ont accueilli à bras ouverts cette initiative. Loin de se sentir offusqués, ils espèrent pouvoir profiter le plus souvent possible des avantages que le camion-douche met à leur disposition. (Trad. Valentina Beleavski, Ioana Stancescu)

  • Un repas chaud dans l’espace réel et virtuel

    Un repas chaud dans l’espace réel et virtuel

    Afin de les aider à voir ce rêve s’accomplir, un groupe de bénévoles de Cluj a lancé en 2013 le projet « Un repas chaud ». Cette idée a fait fortune, étant adoptée par d’autres villes du pays, de sorte qu’à présent environ 900 repas sont offert à travers le pays chaque semaine à ceux qui n’ont pas la possibilité de se préparer à manger et qui ont peut-être le plus besoin de cette nourriture. Raimonda Boian, qui compte parmi les initiateurs du projet, explique : « Le projet s’est développé rapidement. Les bénéficiaires proviennent des catégories sociales défavorisées et cherchent un plat chaud à la cantine que je gère Place du Musée à Cluj. Ce sont des SDFs mais aussi des personnes qui ont un logement, mais qui manquent de nourriture. Leur statut ne nous intéresse pas, nous ne sommes pas des assistants sociaux pour faire des enquêtes, nous ne vérifions rien, l’important, pour nous, c’est qu’ils reçoivent cette nourriture dont ils ont tellement besoin.

    Bien qu’« Un repas chaud » soit un projet indépendant, il n’aurait pas pu être mis en œuvre sans le concours des municipalités ou des Directions d’assistance sociale. Au fil du temps, cette collaboration a permis au « Repas chaud » de migrer depuis Cluj vers Constanţa, Adjud, Bistriţa, Satu-Mare et Bucarest. Les aliments proviennent entièrement de dons. Cluj compte encore le plus grand nombre des cantines où un repas chaud est servi à des personnes défavorisées, grâce à un travail bénévole. Chose tout à fait surprenante, les bénévoles qui se présentent sont très nombreux et ils représentent toutes les catégories sociales et d’âge. Raimonda Boian : « A la cantine que je gère, des équipes de bénévoles sont inscrites et le calendrier est complet jusqu’en janvier 2019. Déjà je suis dans l’embarras et je sais que je vais provoquer des frustrations à ceux qui veulent se faire inscrire, puisque je vais leur répondre qu’il n’y a plus de place avant janvier prochain. Cuisiner est une activité qui les attire. Même s’ils ne sont pas des as, ils souhaitent contribuer. C’est une activité agréable, qui ne demande pas beaucoup d’efforts. Leur tour venu, souvent, nombre de bénévoles ont seulement à préparer un sandwich. »

    A Bucarest, le projet « Un repas chaud » a été mis en œuvre également par une bénévole : Monica Abagiu : « J’ai assumé ce projet en octobre dernier. Je m’étais inscrite, comme bénévole, en mai 2017. Ensuite, avec le concours de Raluca Apostol, j’ai assumé la coordination du projet à Bucarest. Nous souhaitions depuis longtemps nous engager dans un projet de ce genre. Nous avons choisi « Un repas chaud », car ça nous dit de faire un peu de cuisine et puis l’idée de venir en aide aux gens nous a également attirées. De toute façon, nous participons aussi à d’autres projets de bénévolat.

    Monica Abagiu n’a pas de difficulté à intégrer le bénévolat à sa vie quotidienne et à sa vie familiale. Les deux cantines où elle travaille comme bénévole sont situées dans deux zones défavorisées de la capitale, dans le 4e arrondissement et dans le quartier de Ferentari, du 5e arrondissement. Monica Abagiu : La cantine Ominis, du 4e arrondissement, offre des repas chauds à une centaine de personnes environ, pour la plupart des adultes. Dans le quartier de Ferentari, nous avons une cantine mobile, une ambulance transformée en cuisine et garée dans la cour d’une école. Les gens viennent nous chercher en semaine aussi, mais nous cuisinons seulement pendant le week-end. Les bénévoles aident également les enfants en difficulté à faire leurs devoirs.

    Les repas chauds offerts pour l’instant deux fois par semaine sont tellement nécessaires à ces gens démunis, que Monica Abagiu envisage de créer d’autres cantines à Bucarest. Une extension du projet pourrait lui venir en aide. Il s’agit de l’application ShareFood – Partager la nourriture. George Jiglău, un des initiateurs du projet de Cluj, a promu cette application, dont le but est, entre autres, de combattre le gaspillage alimentaire. George Jiglău : Par cette application, nous tentons de faciliter la communication entre ceux qui produisent et vendent les aliments, d’une part, et les membres de la communauté qui ont besoin de nourriture, de l’autre. Pendant les 5 années écoulées depuis le lancement du projet « Un repas chaud » – tout d’abord à Cluj, ensuite dans les autres villes – nous avons également contacté les personnes qui font des dons. Il s’agit de ceux qui disposent de beaucoup d’aliments qu’ils n’arrivent pas à vendre et qu’ils finissent bien souvent par jeter à la poubelle – même si personne ne souhaite jeter la nourriture. Cette application est profitable aux deux parties. Elle a pour but d’éviter le gaspillage alimentaire, mais elle est en même temps un instrument facilitant la collaboration entre les donateurs potentiels et les personnes qui ont besoin de nourriture.

    L’application ShareFood met en lien, d’une part, les sociétés, de l’autre les institutions publiques, les ONGs ou les paroisses, qui peuvent distribuer la nourriture directement aux personnes démunies. L’application a été créée par deux informaticiens de Cluj qui, après avoir cuisiné pour le projet « Un repas chaud », ont voulu s’impliquer davantage et d’une autre façon – toujours comme bénévoles. A présent, deux mois après son lancement, l’application ShareFood est disponible dans toutes les villes du pays et des comptes actifs y ont déjà été ouverts par des dizaines de donateurs et de bénéficiaires. (Aut. : Christine Leşcu ; Trad. : Dominique)

  • Les SDFs et leurs histoires

    Les SDFs et leurs histoires

    Ils sont perçus comme un groupe, bien qu’ils soient, en réalité, tout aussi individualisés que n’importe qui d’autre. Ils ont chacun leur histoire. Le sociologue Ciprian Voicilă en a choisi les plus significatives pour les présenter dans son livre : « Témoignages de la rue. 15 biographies sans domicile fixe ». Publié aux Maisons d’Edition « Martor » (Témoin) et réunissant des interviews détaillées avec 15 SDFs, ce livre est non seulement une enquête sociologique, mais aussi une invitation à l’empathie envers ses personnes. Pourtant, en tant que sociologue, l’auteur en a également tiré certaines conclusions théoriques. Ciprian Voicilă : « La première particularité que ces 15 SDFs interviewées partagent est le fait que le plus souvent leur état s’est « chronicisé », pour ainsi dire. Ils sont âgés de plus de 45 ou 50 ans, passés, pour la plupart dans la rue. Ils sont sans domicile fixe depuis 6 à 25 ans, durant lesquels beaucoup d’entre eux sont devenus dépendants de l’alcool, c’était inévitable. Autre élément commun des SDFs: ayant passé la quarantaine ou la cinquantaine, ils ont eu, dans le passé, des emplois recherchés, ils ont travaillé dans des usines et semblent être, de ce fait, des victimes collatérales de la désindustrialisation. Ils avaient été, par exemple, serruriers-mécaniciens ou fraiseurs-outilleurs, l’usine où ils travaillaient a été fermée et les autorités n’ont pas eu intérêt à entreprendre leur reconversion professionnelle, alors, peu à peu ils se sont retrouvés dans cet état déplorable. »

    Comme dans beaucoup d’autres domaines, là aussi les statistiques officielles sont vieilles et pas très révélatrices. Selon une étude réalisée en 2010 par le Samu social Roumanie, Bucarest comptait à ce moment-là quelque 5 mille SDFs. Le même service d’aide sociale a dressé une liste des causes menant des personnes à vivre dans la rue : le divorce ou le conflit avec la famille, le licenciement, l’incapacité à payer le loyer et les charges publiques, l’alcoolisme, les jeux de hasard. Nombre de SDFs adultes ont passé leur enfance dans des orphelinats, d’autres ont été victimes d’accidents suite auxquels ils n’ont plus été capables de gagner leur vie.

    Bien que certains d’entre eux réussissent à s’intégrer dans la société, beaucoup d’autres demeurent dans la rue. Ce sont les « chronicisés », comme les appelle Ciprian Voicilă : « Plus une personne vit longtemps dans la rue, plus ses chances de réinsertion socio-professionnelle diminuent. Imaginez à quoi cela ressemblerait de vivre des situations dangereuses, certes, mais de ne pas avoir de factures à payer, pas de chefs auxquels obéir et pouvoir se promener librement du matin au soir dans les rues de la capitale. Cette façon de vivre leur crée des difficultés quand ils réussissent à trouver un emploi, car ils se rapportent toujours à la période où ils n’étaient pas obligés de travailler et de rester chaque jour pendant plusieurs heures dans un espace fermé. »

    Pourtant, le Samu social compte également de nombreuses histoires heureuses, c’est-à-dire des scénarios de vie dans lesquels l’ancien SDF est réintégré dans la société. Par ailleurs, il est tout aussi vrai qu’un certain nombre d’entre eux reprennent le cycle. Pour une raison ou une autre – dépression cachée ou nostalgie de la période de liberté absolue, quand ils ne devaient obéir à personne – ils quittent l’emploi et renoncent à leur nouvelle vie. » C’est toujours par l’intermédiaire du Samu social que nous avons réussi à parler à des SDFs. M. Niculescu Călin Niculae est sexagénaire et il vit dans la rue depuis 13 ans. C’est arrivé après son divorce, suite auquel il a perdu son logement. Il nous raconte lui-même son histoire : « Je suis ingénieur métallurgiste et j’ai également suivi une formation post-universitaire en marketing-management. A chaque fois que je cherchais du travail, on me rejetait à cause de mon âge. »

    Bien qu’ayant réussi, tant bien que mal, à survivre dans la rue, une chose ennuie toujours M. Niculescu: « Les gens nous regardent avec haine, avec hostilité, car ils nous confondent avec les drogués et ils nous évitent – pas tous, c’est vrai. Ça c’est une bonne chose… Il faut faire la différence entre une personne comme moi et un jeune qui sort en état d’agitation de la bouche d’un égout, après avoir inspiré dans son sac en plastique les vapeurs hallucinogènes du produit de peinture qui lui sert de drogue. Car je dois dire que moi, je me considère encore comme une personne normale.

    Cristian, âgé de 24 ans, est arrivé à Bucarest quand il en avait 17. Son cas compte parmi les succès du Samu social. Il nous raconte son histoire : « Je suis venu à Bucarest parce que j’avais entendu dire qu’on y avait plus de chances et d’espoirs d’être embauché et d’évoluer, tant soit peu. Au début, cela n’a pas été facile, vu que j’étais seul et que je ne connaissais personne. Pendant une certaine période j’ai vécu dans la rue. C’était dur, je tâchais de m’abriter dans les escaliers des immeubles d’habitations, mais les propriétaires, craignant que je ne fasse des dégâts, me chassaient. Je ne dormais que quelques heures d’affilée.

    Grâce aux ONGs mais aussi à son désir de mener une vie décente, à présent Cristian a un emploi et un logement.SON : « Nombre de SDFs me disaient qu’il ne vaut pas la peine d’être bon aujourd’hui, qu’il vaut mieux voler aux riches. Moi, je leur disais qu’au contraire, il y a des gens riches qui voudraient vous aider, mais si on les vole, ils ne vous aideront pas, c’est logique. Ils me répondaient que j’étais naïf de vouloir être honnête. C’est par le Samu social que m’est arrivée la meilleure chose de ma vie. J’étais sans papiers, les SDFs me les avaient volés. Un ami m’a conseillé de m’adresser au Samu social. C’est par lui que j’ai appris l’existence de ce service. J’ai donc contacté le Samu social et j’ai pu avoir une carte d’identité. C’est toujours avec leur aide que j’ai obtenu mon emploi actuel, dans une ONG qui recycle du papier. Ça me plaît beaucoup. »

    Un bon début qui prouve que c’est possible. ( Trad. : Dominique)

  • La vie dans la rue en hiver

    La vie dans la rue en hiver

    Ils sont en première ligne face au froid, contraints de subir les rigueurs de l’hiver. Alors que le gel sévit de nouveau en Roumanie, les sans-abris deviennent encore plus vulnérables que d’habitude. Une réalité des plus cruelles face à laquelle des ONGs telles le Samusocial s’activent. Sabina Nicolae, directrice exécutive de l’association, témoigne: « Par ce temps, on prend soin de distribuer aux gens de la rue des sacs de couchage, des chaussures, des gants, des bonnets et de leur offrir une boisson chaude, que ça soit une tisane ou de la soupe. A part ça, on met à leur disposition du soutien spécialisé : psychologique, médical et social, tout au long de l’année, afin d’accroître leurs chances à la réinsertion professionnelle. Sinon, le Samusocial s’efforce à leur trouver un abri aussi bien en été qu’en hiver, quand la plupart de ceux passant la nuit dehors souffrent d’engelures très graves. Pour les aider à mieux traverser la saison froide, on leur donne aussi des suppléments de nourriture. Et puis, en hiver, ceux qui sont prêts à offrir un repas chaud aux mal logés sont nombreux.»

    Souvent sans papiers qu’ils ont perdus ou se sont fait voler, les gens de la rue s’en remettent aux assistants du Samu pour se voir délivrer de nouvelles cartes d’identité, premier pas vers une possible réinsertion sociale. A 24 ans, Cristian en a déjà passé 3 dans la rue. Originaire de la ville de Tulcea, il a gagné la capitale, Bucarest, à sa majorité, dans l’espoir d’une vie meilleure. Hélas! Sans parents ni amis prêts à lui donner un coup de main, le jeune homme s’est retrouvé très vite au bout de ses moyens et de ses forces: « Cela fait six ans que je vis à Bucarest et la moitié, je les ai passés dans la rue. L’hiver surtout, c’est l’enfer. J’arrête pas de penser à tous ceux qui passent leurs nuits dehors parce qu’ils n’ont pas d’alternative. Comment font-ils pour résister? Je sais très bien de quoi je parle, car moi aussi, j’ai fait l’expérience des nuits d’hiver passées en plein air. Les soirées, ça va encore. Mais après minuit, quand il se met à geler, c’est très dur. Pour la nourriture, ça allait encore. Je faisais des petits boulots et en échange, on me donnait à manger».

    Ce fut vers la fin 2015 et le début 2016 que le soleil s’est remis à briller timidement dans le ciel de Cristian. C’est grâce au Samu que le jeune homme, muni enfin d’une nouvelle carte d’identité après avoir perdu tous ses papiers dans la rue, trouve du travail : «Je travaille pour une association chargée de la protection de l’environnement et je m’occupe du recyclage du papier. J’aime bien cette façon à eux de faire la collecte du papier en vélo cargo. Au début, l’idée de pédaler toute la journée ne m’attirait pas trop, mais au bout de deux mois de travail, j’ai changé d’avis et je m’y plais. J’habite un petit appart fourni par une ONG à laquelle je verse un loyer modeste qui progressera au fur et à mesure que mes moyens augmenteront eux aussi. Il faut faire comprendre aux gens que le travail est essentiel pour mener une existence normale.»

    Malheureusement, toutes les histoires n’ont pas de fin heureuse. Catalin Niculaie Niculescu a 59 ans et les 13 dernières, il les a vécues dans la rue. C’est suite à son divorce qu’il a perdu sa maison et s’est retrouvé dans cette situation. Après une tentative échouée d’immigrer en Allemagne, il rentre en Roumanie les mains vides et souffrant d’une tuberculose. Pour cet ancien ingénieur métallurgiste, l’âge représente le principal obstacle à l’embauche. Comment a-t-il fait pour résister toutes ces années dans la rue? : «J’ai fait de mon mieux pour tenir bon. Jeune, j’ai fait de l’escalade et j’ai participé à toute sorte de stages de survie en pleine nature. J’ai passé mes nuits un peu partout: dans les parcs, dans une chapelle désaffectée, dans le train régional reliant la capitale à la localité de Videle. J’ai fais la manche à l’entrée des cimetières. Et puis, depuis novembre 2015, j’ai trouvé une place dans un centre d’accueil pour les mal logés. On m’y offre trois repas par jour, une pièce chauffée et de l’eau chaude. J’en suis content».

    Et puis cet hiver, surprise: Monsieur Niculescu s’est vu enfin offrir un petit boulot compatible avec sa taille massive et sa barbe grisâtre : « Je n’espérais pas une telle offre! A vrai dire, il y en a eu plusieurs, donc j’ai même fait mon choix! Cela m’a fait une belle expérience puisque j’ai fait le Père Noël pour Coca Cola. On m’a laissé garder le costume offert par le Samu. Moi, je n’ai pas de connexion à Internet, donc c’est toujours à eux de chercher du boulot pour moi».

    Malades, abattus, accablés par les conditions austères d’une vie très rude, les gens de la rue finissent souvent par déposer les armes, en proie à la solitude et au désespoir. Du coup, ils ont du mal à changer de vie, même quand le destin leur tend la main. Un mécanisme psychologique qui n’a rien de surprenant, nous explique Alina Mirea, assistante sociale au Samu: «La plupart des SDF sont des personnes traumatisées depuis leur jeune âge. Issus dans des familles abusives, ils ont mené une vie de privations avant de se retrouver dans la rue. Du coup, ils sont persuadés qu’ils ne pourront jamais échapper à leur condition. Il faut donc beaucoup de patience et de l’aide spécialisée pour les faire changer de perspective. Certes, on ne saurait pas changer complètement leur destin, mais on pourrait quand même améliorer un peu leur quotidien. Parfois, on arrive à leur offrir un abri, ne serait-ce que temporaire, pour les aider à voir la vie d’un œil différent et les ambitionner à se reconstruire. Mais, il y en a qui préfèrent vivre du jour au lendemain, contents de se restaurer ou de se laver. Ca dépend de chacun quel combat il veut mener».

    Il arrive souvent que les gens de la rue refusent de se voir installer dans des centres, préférant la rue à une place remboursée par du travail. Pourtant, les assistants sociaux ne baissent pas les bras et continuent d’encourager ces déshérités du sort jusqu’à ce qu’ils arrivent à franchir le cap.

  • Rétrospective des tentations roumaines 2016

    Rétrospective des tentations roumaines 2016

    Nous avons suivi, par exemple, des initiatives à but social et appris que l’ONG « Inima copiilor » « Le cœur des enfants », en coopération avec l’association des consultants en lactation de Roumanie ont décidé de créer une banque de lait maternel, nécessaire aux prématurés et nouveau-nés qui pour une raison ou une autre, ne peuvent profiter du lait de leur mère. Nous avons également fait une halte à l’inauguration de l’exposition de peinture « Qui sommes-nous? », accueillie par une galerie bucarestoise. C’est ici que nous avons découvert comment l’art peut transformer la vie des SDF. En effet, les auteurs des peintures étaient 11 adultes sans domicile fixe, bénéficiaires du programme « Des gens à travers l’art », organisé par l’Association Samusocial de Roumanie.

    Anca Florea, éducatrice spécialisée en arts plastiques et coordinatrice du projet, a raconté que le travail avec les SDF a constitué pour elle une expérience enrichissante : « L’idée du projet m’appartient. Je me suis proposé de travailler avec toute sorte de catégories de personnes, justement pour m’essayer dans différentes directions et sortir un peu du train-train quotidien. Et j’ai eu la surprise de trouver beaucoup de potentiel artistique chez les sans-abri. Parmi eux, certains avaient vraiment les prémisses de se développer dans cette direction. »

    Liviu Lucian Marcu est un des artistes exposants et il nous a parlé de ses peintures, issues de sa joie de vivre, comme leurs titres l’indiquent : Table bruyante, Chiffon gai. « Moi, j’ai été un ivrogne, j’ai aimé la vie, donc voilà, ça, ce serait contre Brâncuşi : moi, je suis Moldave, lui, il est d’Olténie ; lui, il a la Table du silence, moi, j’ai la Table bruyante. Cette table devait porter des verres renversés, des ivrognes, des magnétos à cassette, un ivrogne qui dort sur la table. Je n’ai pas pu peindre tout ça, parce que c’est difficile et c’était ma première peinture. Je vais l’élargir dans un proche avenir. Je l’espère. Je vais reprendre mes travaux et les faire comme il faut. »

    C’est également à l’intention des SDF qu’un bistro prépare des menus de déjeuner en attente. Il s’agit d’un bistro simple et lumineux qui s’est proposé dès l’ouverture d’avoir une composante sociale. D’ailleurs, le motto de l’un des chefs est affiché à l’entrée du resto : « Mange chez nous pour que nous ne mourions pas de faim ». Bref, les clients achètent des menus qui seront ensuite distribués à des personnes confrontées à différentes difficultés.

    Par ailleurs, c’est à l’intention des enfants qui ne possèdent peut-être pas de jouets qu’a été ouvert en mars 2013 un hôpital des jouets, où les poupées, les nounours, les robots ou les dinosaures abîmés sont nettoyés, réparés et remis à neuf. Ensuite ces objets se voient offrir en cadeau aux enfants pauvres ou aux orphelins des foyers de la capitale roumaine.

    Hormis le domaine social, nous avons également découvert des projets qui racontent des histoires vraies. Ce sont les histoires de la ville, comme ce fut le cas du projet initié par l’Association Sinaptica, « Banlieues au cœur de Bucarest », qui vise à identifier des itinéraires culturels urbains à même de mettre en valeur autant de zones centrales de la capitale, à haute valeur historique, culturelle et urbaine, mais très contrastées d’un point de vue social, économique et culturel. Nous avons également parlé du rôle que joue la lecture dans la formation des jeunes, dans le cadre du Festival de lecture pour enfants Narativ et de la première édition du festival international consacré à l’art de raconter une histoire, « Nous sommes nos propres histoires ». Ce sont autant de projets résultant d’initiatives intelligentes par le biais desquelles la Roumanie peut vraiment progresser.

    Nous avons également exploré l’espace des spectacles et découvert un projet artistique appelé « Contes de fées et de chevaux » qui nous invite à suivre des spectacles d’après des contes traditionnels roumains.

    Nous avons suivi aussi les traces des pianos voyageurs, un projet visant à offrir à une ville de Roumanie un piano de concert, censé être utilisé pendant plusieurs années, afin d’y encourager l’organisation d’autres événements culturels.

    Détails avec son initiateur, le pianiste Horia Mihail : « L’histoire est la suivante : il y a six ans, j’ai découvert, au sous-sol du bâtiment de la Radio de Bucarest, deux pianos qui dans les années ’50-’60 étaient sur la scène de sa Salle de concerts. Ces deux pianos avaient été relégués et oubliés là, pendant plusieurs dizaines d’années. J’ai proposé à la direction de rendre ces deux instruments de concert à la vie musicale, de les transporter à des endroits où il n’y avait pas de piano – car, malheureusement, l’infrastructure culturelle de la Roumanie n’est pas des meilleures. Eh bien, ce projet a été tout de suite accepté par la Radio publique et nous en sommes à sa sixième édition. Nous disposons de 4 pianos, qui m’accompagnent dans différentes régions du pays où il n’y a pas de tels instruments et je les utilise pour faire revivre des œuvres musicales de compositeurs célèbres : Liszt, Mozart, Beethoven, et puis 2016 c’est l’année Chopin. Et ces pianos restent pour une certaine période dans des salles de concerts où ils font la joie du public mélomane des villes respectives ».

    C’est tout pour cette rétrospective des initiatives de l’année 2016 qui ont fait l’objet de notre rubrique « La Roumanie chez elle », consacrée à tout ce qui est original en Roumanie. Restez fidèles à RRI pour de nouvelles histoires inédites dans « La Roumanie chez elle ». (Trad. Alex Diaconescu)

  • 07.01.2017

    07.01.2017

    Intempéries — Après d’abondantes chutes de neige et des tempêtes plutôt violentes, les prévisionnistes ont reconduit jusqu’à dimanche soir l’alerte jaune au blizzard, dans une vingtaine de départements roumains. Dans l’est, le sud-est ainsi que dans les Carpates méridionales et Orientales, le vent soufflera en rafales de jusqu’à 50-60 km/h et par endroits à 70-75 km/h. Dans la nuit de samedi à dimanche l’on attend de nouvelles chutes de neige. Dans le même temps, une vigilance jaune aux températures très basses a été institué jusqu’à lundi, les météorologues attendant des maximales de moins 16 degrés en journée et des minimales de moins 25 degrés dans la nuit. A Bucarest, à midi, il y avait moins 9 degrés.



    A cause des températures en berne, les lycées, les écoles, les maternelles, les garderies et certaines universités seront fermés les lundi et mardi prochains à Bucarest, dans Ilfov, la région de la capitale, ainsi que dans trois autres départements durement affectés par les intempéries. La neige abondante a coupé l’électricité dans de nombreuses localités et perturbé le trafic routier, ferroviaire et naval. Des routes nationales ont été fermées des dizaines de trains ont été annulés ou enregistrent des retards substantiels. Tous les ports roumains à la mer Noire sont fermés à cause du vent très fort. Toutefois, le trafic aérien se déroulait normalement, ce samedi, sur les deux aéroports internationaux de Bucarest, aucun vol n’étant annulé. Néanmoins des retards de jusqu’à 30 minutes sont à prévoir au décollage. Notons également que le Conseil d’administration de la Régie de transport public bucarestois a été destitué par la municipalité de la ville pour la manière défectueuse dont il a su gérer l’action de la compagnie dans ce contexte.



    Froid — Le froid et les intempéries se sont emparés de l’ensemble du continent européen, y compris du sud, peu habitué à des températures négatives tellement basses. La Bulgarie, la Hongrie, la République de Moldova, la France et l’Italie se confrontent à des situations particulièrement difficiles, par endroits. En Sicile, une homme sans abri, d’origine roumaine, a été retrouvé mort à cause du froid, dans un immeuble abandonné. D’ailleurs, les autorités de tous les pays européens ont pris des mesures pour aider et héberger les SDF.



    Revenus — Le gouvernement de Bucarest a commencé à mettre en œuvre le programme de gouvernance de la nouvelle coalition au pouvoir, formée par le Parti social-démocrate et l’Alliance des libéraux et des démocrates. Vendredi, il a décidé de la majoration du salaire minimum brut national garanti jusqu’à 1.450 lei par mois (320 euros), à partir du 1er février. Selon un communiqué du gouvernement, la mesure aura des effets positifs sur la croissance économique et sur la stimulation de l’emploi, la réduction du travail au noir, assurant la hausse du niveau de vie et la réduction des décalages sociaux. Les traitements des artistes et du personnel des institutions du spectacle ou musicales ont également été majorés de 50%. Le gouvernement a augmenté aussi la valeur du point de retraite.



    Les représentants de la Commission pour le dialogue social ont, pour le part, fait savoir que ces mesures sociales doivent être soutenues par des mesures économiques adéquates et durables. L’opposition parlementaire ainsi que le président roumain, Klaus Iohannis, ont demandé au gouvernement d’expliquer comment il entend maintenir le déficit budgétaire en dessous des 3% du PIB, convenus avec l’UE. Pour sa part, le gouverneur de la Banque centrale, Mugur Isarescu, a fait savoir qu’il attendait de voir le projet de budget pour l’année en cours avant d’annoncer les mesures que son institution entend prendre pour endiguer les déséquilibres qui pourraient apparaître.



    OTAN — Les Etats-Unis procèdent au renforcement de leurs capacités militaires en Europe de l’Est. Les premiers équipements, soit des chars sont arrivés en Allemagne, dans le port de Bremerhaven, d’où ils seront transférés en Roumanie, en Pologne et aux pays baltes, selon l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, cité par la presse roumaine. En juillet 2016, l’OTAN avait décidé d’accroître sa présence militaire en Europe Centrale et de l’Est en envoyant des milliers de militaires alliés en Pologne et dans les pays baltes. Une structure alliée multinationale devrait également être déployée en Roumanie aussi. Dans le même temps, l’OTAN a pris le contrôle sur le système défensif antimissile de Pologne et de Roumanie, qui comporte des éléments d’interception disposés à la base de Deveselu, dans le sud de la Roumanie. La Russie a maintes fois durement critiqué ce système, qu’elle estime une menace à l’adresse de sa sécurité, ce que l’OTAN dément.



    Fêtes — Les chrétiens orthodoxes, culte majoritaire en Roumanie, et catholiques de rite oriental fêtent ce samedi la Saint Jean Baptiste. Dans le christianisme, Jean le Baptiste est le prophète qui a annoncé la venue de Jésus de Nazareth, qu’il a baptisé, par la suite, sur les bords du Jourdain. Ce saint chrétien est également considéré par lislam comme un prophète descendant de Îmran, la famille des ancêtres de Moise et de Jésus, par sa branche maternelle. Jean, le personnage historique, était très respecté de ses contemporains et avait une grande influence sur les foules. C’était la raison pour laquelle le roi Hérode Antipas l’a arrêté de peur quil ne suscite une révolution. Il meurt en prison, décapité.



    Près de 2 millions de Roumains s’appellent Ion, Ioana ou leurs dérivés et fêtent ce samedi leurs prénoms. La Saint Jean marque également la fin des fêtes d’hiver en Roumanie, selon le calendrier grégorien. Des fêtes qui ne font pourtant que commencer pour les chrétiens de rite ancien, observant le calendrier julien qui comporte un décalage de 13 jours par rapport au calendrier grégorien — il s’agit des membres des communautés russe, ukrainienne, arménienne et serbe, pour lesquels c’est le premier jour de Noël.



    Tennis — En tennis, la Roumaine Raluca Olaru et l’Ukrainienne Olga Savtchuk disputent samedi la finale de double du tournoi de tennis de Shenzen, en Chine. Leurs adversaires seront Andrea Hlavackova (Rép. tchèque) / Shuai Peng (Chine). Le double roumano-ukrainien est arrivé en finale après l’abandon des principales favorites Raquel Atawo (Etats Unis) – Yifan Xu (Chine). Il s’agit de la deuxième finale que les deux joueuses disputent ensemble, après celle du tournoi de Tachkent, en Ouzbékistan, qu’elles avaient remportée en 2008.

  • Les réfugiés : nouveaux boucs-émissaires ?

    Les réfugiés : nouveaux boucs-émissaires ?

    Dans les faits, la frontière entre réfugiés et sans-abris est devenue ténue. On ne sait plus trop si le réfugiés est une personne quil faut aider ou si cest un danger quil faut éviter. Lexploitation politique de cette situation ne sest pas laissée attendre. En effet les rangs des réfugiés sont censés abriter des terroristes islamistes. Dans ces conditions, éloignées de la vérité, on peut se demander si les réfugiés ne sont pas le nouveaux boucs-émissaires de la France daujourdhui. Décryptage avec lanthropologue Wengjing Guo.



  • Réfugié à Paris

    Réfugié à Paris

    Le traitement politique de cette question est parfois l’objet d’une attention humanitaire, parfois sécuritaire. Mais que sait-on exactement des réfugiés dans une ville comme Paris ? Nous tenterons de combler cette lacune avec notre invitée l’anthropologue Wengjing Guo qui travaillent dans son quotidien avec ses personnes.



  • Ils sont SDF et artistes

    Ils sont SDF et artistes

    Dans lambiance somptueuse des Galeries Romană du centre ville bucarestois, un groupe de 11 adultes sans domicile fixe ont réuni leurs tableaux dans le cadre de la première exposition de peinture et dart graphique des SDF. Organisé sous légide de lassociation Samusocial de Roumanie, lévénement se propose doffrir aux sans-abris la possibilité de faire part de leurs expériences personnelles à travers lart. A la veille du vernissage, les tableaux ont été couverts de haillons que les visiteurs ont dû enlever pour découvrir les tableaux et implicitement lunivers personnel de tous ces désenchantés que souvent on juge sans les connaître.



    Anca Florea est éducatrice spécialisée en arts plastiques et coordinatrice du projet « Des gens à travers lart »: « Lidée du projet mappartient. Je me suis proposé de travailler avec toute sorte de catégories de personnes, justement pour messayer dans des directions différentes et sortir un peu du train-train quotidien. Et jai eu la surprise de trouver beaucoup de potentiel artistique chez les sans-abris. Il y en a eu parmi eux certains qui avaient vraiment les prémisses de se développer dans cette direction. Et je me suis dit, tiens, peut-être quil y en a plusieurs comme ça ! Cest à ce moment-là que lidée du projet mest venue à lesprit. Par la suite, jen ai parlé à Samusocial qui avait déjà un atelier occupationnel à lintention des gens de la rue. Et on a décidé dinclure le projet artistique à lagenda de latelier pour en faire un atelier plus ample dart, peinture et art graphique. Je me suis impliquée dans cette direction, car je voulais vraiment aider les sans-abris à développer leurs capacités dexpression et les habiletés artistiques. Jai été vraiment surprise de trouver parmi eux des personnes tellement ouvertes et prêtes à sadonner à la création ».



    Lexposition nous invite à mieux connaître ces personnes défavorisées, en privilégiant leurs capacités de création au détriment de leur situation de vie. Il suffit de regarder leurs travaux pour quune question simpose : qui sommes-nous et quelles sont les qualités que chacun dentre nous renferme en soi ? Suite à son expérience de travail avec les SDF inscrits par le Samusocial aux ateliers de création, Anca Florea conclut : ce projet met en lumière le besoin humain absolu de beauté.



    Que je vous raconte lhistoire dune personne nayant fréquenté mon atelier quune seule fois, dit Anca Florea : « Le matin, quand je suis arrivée au travail, lui il mattendait déjà devant la porte. On a fait connaissance et puis quelquun mavait dit quil avait passé toute la nuit dans la rue. Je lui ai donc demandé où il avait dormi et il ma dit quil navait pas dormi, juste marché. Comme il faisait très froid, le gel la empêché de dormir. Alors, il a marché toute la nuit pour ne pas mourir de froid et pourtant, le matin, il est venu à mon atelier. Il ne sen est pas plaint. En ce jour-là, je me rappelle avoir choisi pour mon atelier un thème technique et lui, il mavait dit : donnez-moi une feuille de papier pour vous faire quelque chose de beau ! Je fus impressionnée de voir son besoin de produire de la beauté après une nuit pleine de souffrances. Je pense que ce besoin, on la tous : compenser la tristesse par la beauté ! Cest ce que je me propose de faire par mes ateliers ».



    Nous avons demandé à Anca Florea comment elle a trouvé les élèves et comment elle leur a fait découvrir lart : « Je les ai trouvés sympas. Au début, ils ont manifesté une certaine retenue, parce que je nai plus eu de telles expériences, cétait pour la première fois que je travaillais avec des personnes sans domicile. Mais ils étaient également très réceptifs et très ouverts et lambiance dans latelier était très agréable. Cest dire que je me suis sentie à laise avec eux, nous avons plaisanté, ri, nous avons également travaillé et ce sont des personnes respectueuses avec lesquelles on peut sentendre et on peut travailler. Pour les guider, jai essayé de faire trouver sa voie et son propre style à chacun, et à trouver des sujets pour la peinture et le dessin en eux-mêmes. En fait, cest ce quelle présuppose, une œuvre dart, y mettre du sien. Et jai essayé de leur donner quelques indices de technique ; lorsque je travaille dans des ateliers de développement personnel, jessaie de faire les gens trouver leur propre voie et il me semble avoir réussi. Déjà, chacun a commencé à construire son propre style. Ils travaillent ensemble, mais chacun a son propre style et trouver ses moyens dexpression, cela me semble important. »



    Liviu Lucian Marcu est un des artistes exposants et il nous a parlé de ses peintures, issues de sa joie de vivre, comme leurs titres lindiquent : Table bruyante, Chiffon gai. « Moi, jai été un ivrogne, jai aimé la vie, donc voilà, ça, ce serait contre Brâncuşi : moi, je suis Moldave, lui, il est dOlténie ; lui, il a la Table du silence, moi, jai la Table bruyante. Cette table devait porter des verres renversés, des ivrognes, des magnétos à cassette, un ivrogne qui dort sur la table. Je nai pas pu peindre tout ça, parce que cest difficile et cétait ma première peinture. Je vais lélargir dans un proche avenir. Je lespère. Je vais reprendre mes travaux et les faire comme il faut. »



    Bogdan Florin Ionescu peint des visages: « Jai peint des gens, les copains, dans latelier de peinture. Je navais jamais peint avant, cela ma détendu, au début jai dit que cétait un jeu et il ma détendu, et puis, jai commencé à aimer cela. »



    Une vingtaine de gens sont passés à latelier, mais il y en a eu 4 constamment, pas les mêmes à chaque fois, et nous avons 11 exposants, selon lorganisatrice du projets « Des gens par lart ». Et cela parce que les horaires des cantines sociales sont différents, et les gens ne peuvent pas toujours arriver à latelier, mais quand ils sont là, ils peignent avec joie, assoiffés de beauté. (trad.: Ioana Stăncescu, Ligia Mihăiescu, Alex Diaconescu)

  • L’homme sans frontières

    L’homme sans frontières

    Français par son origine et cosmopolite par sa vocation, Patrick Ouriaghli s’est établi en Roumanie à la fin de l’année 2008 pour s’engager dans des actions caritatives. Il est le directeur de l’Association « Ateliers sans frontières » créée par son épouse, Raluca. Les personnes marginalisées, sans domicile fixe ou sans emploi, peuvent bénéficier d’une formation professionnelle, en travaillant dans de petites entreprises sociales développées comme projets de l’association. Pour Patrick Ouriaghli donc, la décision de vivre en Roumanie a été à la fois objective — découlant de son désir d’aider ces personnes — et subjective, car Bucarest était la ville de sa future épouse et où il allait fonder une famille. Aussi, son adaptation à la société roumaine fut-elle facile… (trad. Ligia Mihaiescu)


  • Le Petitjournal radio 15.12.2015

    Le Petitjournal radio 15.12.2015

    Bienvenue à ce nouveau regard croisé sur l’actualité avec RRI et Le Petit Journal de Bucarest. Cette semaine, nous avons avec nous Jonas Mercier, co-rédacteur en chef du PJB, la filiale roumaine de la plus importante publication en ligne destinée aux Français et aux francophones de l’étranger. Il nous parle de laction humanitaire de la Fondation Parada et du Samusocial en faveur des enfants des rues et des sans-abri de Bucarest, mais aussi des liens entre la nourriture et le réchauffement climatique.





    http://www.lepetitjournal.com/bucarest

  • Nouvelles chances pour les personnes défavorisées

    Nouvelles chances pour les personnes défavorisées

    Focalisés sur nos préoccupations quotidiennes, nous les croisons sans les remarquer ou, quand c’est le cas, l’impuissance se lit sur nos visages – si ce n’est le déplaisir. Il s’agit des SDFs qui errent dans les rues de la capitale et d’autres villes du pays. Bien souvent, leur histoire est celle d’un échec auquel chacun de nous peut être confronté et qui aurait pu être surmonté avec un peu d’aide de la part des autres. Pourtant, quelle sorte d’aide peut-on offrir à ces êtres? Un simple geste de charité passagère qui prolongerait leur statut de personnes assistées ou la possibilité de prendre leur vie en main, comme l’affirme Patrick Ouriaghli, directeur exécutif des « Ateliers sans frontières ».



    C’est le cas de Cătălin, militaire jusqu’en 1998 et qui a trouvé un emploi dans une société de sécurité privée. Suite à des problèmes professionnels et familiaux, il s’est retrouvé sans logement : « Il y a un an, j’habitais dans un abri situé dans le quartier Drumul Taberei avec un ami qui travaille avec moi. Je n’y habite plus, maintenant — c’était d’ailleurs la raison pour laquelle je suis venu aux « Ateliers » : trouver un logement convenable, assurer ma survie et ma reconversion professionnelle. »



    C’est toujours en quête d’un emploi stable et pour apprendre un autre métier qu’une autre personne en difficulté a rejoint les « Ateliers sans frontières ». Notre interlocuteur a travaillé comme électricien.



    Cătălin: « Je suis venu d’un centre communautaire, « La maison Ioana ». Avant, j’habitais un immeuble nationalisé qui a été rétrocédé. J’ai loué un logement, quelque part, pourtant je ne trouvais pas d’emploi ou bien, là où je travaillais, je ne touchais pas le salaire à temps. Je souhaite avoir un emploi stable, afin de pourvoir aux besoins de ma famille, de mes 4 enfants. Ma femme nettoie les escaliers de plusieurs immeubles d’habitations pour gagner un peu d’argent. Depuis 3 ans nous avons quitté « La maison Ioana ».



    Les personnes en difficulté embauchées par les « Ateliers sans frontières » reçoivent au début un salaire correspondant au SMIC, un repas chaud à midi et un abonnement leur permettant d’utiliser le transports publics. Là, ils remettent en état de vieux ordinateurs et participent également au recyclage des bannières publicitaires dont on fait des sacs chic. Ils acquièrent ainsi un savoir-faire qui leur sera utile pour se faire embaucher ailleurs et leur activité leur imprime un certain rythme de vie et de travail nécessaire à leur réintégration sociale. Pourtant, au-delà de ces gains palpables, selon Patrick Ouriaghli, regagner leur estime de soi est peut-être la chose la plus importante.



    Dans le nord du pays, à Beclean, petite localité du comté de Bistriţa-Năsăud, les autorités locales ont trouvé, à leur tour, une solution pour aider les 10 SDFs de la communauté: ils ont impliqué les églises de toutes les confessions de la ville — nous dit le maire Nicolae Moldovan : « Nous avons construit un centre communautaire d’assistance sociale comportant 6 pièces, bien grandes. Ils seront 2 ou 3 dans la même chambre. C’est la municipalité qui paiera l’eau, l’électricité et le gaz. Pour leur assurer le repas quotidien et une assistance morale ou spirituelle, nous avons conclu un partenariat avec toutes les églises de la ville, 12 au total. A tour de rôle, pendant une semaine, elles s’occupent de ces personnes de la façon dont elles l’entendent. Je leur ai recommandé de leur assurer un repas chaud à midi ou même 3 repas par jour, si possible. Nous avons également conclu un partenariat avec l’hôpital de Beclean, pour qu’ils puissent avoir accès aux soins. »



    A Beclean, tout le monde connaît les 10 SDFs, qui ont été, il n’y a pas si longtemps, des personnes intégrées dans la communauté, mais qui ont actuellement besoin d’aide pour regagner leur statut — au début avec le concours des autres, ensuite grâce à leurs propres efforts.



    Nicolae Moldovan : « Je pense que, petit à petit, nous réussirons à les réintégrer, quand ils constateront qu’ils bénéficient de notre aide. Jusqu’ici nous n’avions pas trouvé de solution pour eux et ils se sont sûrement sentis quelque peu abandonnés, mais quand ils verront que toute la communauté s’occupe d’eux, ils pourront être récupérés. »



    Le soutien et l’encouragement des autres ainsi que la reconquête de leur propre autonomie constitue, pour les SDFs, la clé d’un retour à la normalité — un retour souvent difficile, voire problématique. (Trad. : Dominique)