Tag: sensibilisation

  • Campagne antidrogue en Roumanie

    Campagne antidrogue en Roumanie

    Acceptez vos sentiments, surmontez vos peurs et canalisez votre énergie de manière constructive ! Il existe tant d’alternatives saines pour rester énergique et ʺcoolʺ, mais avec la tête sur les épaules et les pieds sur terre, connecté en permanence à vos objectifs et à la réalité ! Telle est, en résumé, le message de l’Agence nationale antidrogue, qui a lancé sa campagne de sensibilisation – ʺGroundʺ – dans plusieurs lycées de Bucarest, dans le but de proposer aux jeunes des moyens sûrs de gérer leurs émotions, propres à l’adolescence. Le message de la campagne est puissant : vous n’avez pas besoin d’artifices ou de compromis pour devenir un modèle pour la génération à laquelle vous appartenez ou pour déployer votre potentiel. L’essentiel est d’accepter ses imperfections, d’honorer ses principes et, lorsqu’on se perd en chemin, de demander de l’aide.

     

    Un site internet et plusieurs réseaux sociaux pour délivrer un message puissant

     

    Ce message est transmis directement aux jeunes, par le biais de réunions et d’ateliers dans leurs écoles, mais aussi par le lancement d’un journal destiné à la génération Ground, le site internet et les réseaux sociaux consacrés à la campagne. Selon Ramona Dabija, directrice de l’Agence nationale antidrogue, outre les risques liés à la consommation de drogues, les jeunes se voient rappeler les nombreuses possibilités saines qui s’offrent à eux. Et pour ceux qui ont déjà cédé à la tentation de consommer des substances interdites, on leur rappelle que s’ils se sentent dépassés ou en danger, ils peuvent obtenir des conseils gratuits et confidentiels.

     

    Des témoignages de personnalités roumaines aux parcours exceptionnels

     

    Pour donner plus de poids à la campagne ʺGroundʺ, les lycéens ont pu interagir et apprendre de l’expérience d’athlètes roumains à la carrière exceptionnelle, modèles de discipline, d’ambition et de mode de vie sain. Parmi les stars qui ont participé à la campagne, on retrouve Larisa Iordache, 16 fois médaillée d’or aux championnats d’Europe de gymnastique, Ana Maria Brânză, multiple championne olympique, trois fois championne du monde et sept fois championne d’Europe d’escrime, Ancuța Bodnar, médaillée d’or olympique à Tokyo 2020 et Paris 2024 en aviron, les footballeurs Florin Gardoș et Ionel Dănciulescu ou encore le basketteur Virgil Stănescu. Et le nageur David Popovici, champion de l’année et idole de sa génération, a choisi de s’impliquer à travers une interview publiée dans le journal ʺGroundʺ ou sur le site de la campagne. Il est impossible de mesurer l’ampleur réelle de la consommation de drogues en Roumanie. Mais si les statistiques ne peuvent refléter fidèlement la réalité du terrain, une chose est sûre : la situation s’est aggravée ces dernières années, ce qui a incité les experts et les responsables politiques à tirer la sonnette d’alarme et à tenter de trouver des solutions pour contrer le phénomène. Un référendum local sera également organisé à Bucarest le 24 novembre, parallèlement au premier tour des élections présidentielles. L’une des trois questions posées aux citoyens de Bucarest portera sur l’implication des mairies dans la prévention de la consommation de drogues dans les écoles et les lycées.

  • De nouvelles solutions pour de vieux problèmes : le théâtre contre le harcèlement et la discrimination à l’école

    De nouvelles solutions pour de vieux problèmes : le théâtre contre le harcèlement et la discrimination à l’école

    Une étude réalisée au début de l’année par l’association Salvati copii, Sauvez les enfants en français, révèle qu’un élève roumain sur deux a été victime au cours de sa scolarité de menaces, humiliations, ou violences physiques et 82% d’entre eux ont été témoins de ce type de situation. Selon un rapport récent de l’OMS, la Roumanie se trouve en troisième position en Europe en ce qui concerne le harcèlement. La loi roumaine définit le harcèlement comme l’action ou série d’actions physiques, verbales, relationnelles et/ou cybernétiques, dans un contexte social difficile à éviter, provoquées de manière intentionnelle, qui implique un déséquilibre de pouvoir et ont pour conséquence d’atteindre à la dignité de la personne ou de créer une atmosphère d’intimidation, hostile, dégradante, humiliante ou offensante dans un but de discrimination et d’exclusion sociale. Dans les faits, les personnes d’ethnie Rom sont toujours confrontées à un phénomène de ségrégation dans les écoles bien que le Parlement roumain ait adopté depuis longtemps déjà une loi interdisant cette ségrégation.

     

    Dans ce contexte peu reluisant, deux personnes ont choisi de mettre leurs compétences et leur expérience au service de la résolution de ces problèmes en usant de méthodes peu conventionnelles. C’est le cas de l’association Acting Works en tournée actuellement dans des communautés vulnérables du sud de la Roumanie avec le spectacle « Vi me som rom/Și eu sunt rom”, (Moi aussi je suis rom), une pièce de théâtre qui parle de la réalité vécue aujourd’hui par les personnes roms en Roumanie en mettant en scène trois histoires de vie réelles. Andrei Serban, acteur et fondateur de l’association, fait du théâtre social depuis 17 ans. C’est son expérience de personne rom invisible, c’est-à-dire qui n’est pas identifié comme rom par les non roms, qui l’a incité à monter cette pièce et à partir en tournée dans les écoles.

     

     

    « Je suis resté « dans le placard » pendant 20 ans, j’avais peur d’être discriminé. Et à partir du moment où j’ai assumé que j’étais rom, j’ai eu envie de faire un spectacle. J’entends beaucoup de propos racistes parce que les gens ne se rendent pas compte que je suis rom moi-même. Donc ce spectacle est aussi né d’une frustration, mais aussi pour donner des instruments aux personnes confrontées au racisme et à celles qui sont témoins de situations racistes, afin qu’elles sachent comme agir ou réagir. »

     

    Mădălina Brândușa, actrice et membre d’Acting Works, explique que l’association a choisi de se rendre dans les communautés rurales vulnérables pour sensibiliser justement des personnes qui n’ont pas accès au théâtre ou aux productions culturelles en général. Parmi les adolescents qui ont vu la pièce, nombre d’entre eux vivaient leur première expérience théâtrale. Andrei Serban raconte comment la pièce a été reçue.

     

     

    « Nous avons construit ce spectacle avec beaucoup d’humour parce que nous ne voulions pas rajouter de la pression là où il y en a déjà beaucoup et nous avons utilisé le langage des jeunes. Après le spectacle, lors des échanges avec le public, nous constatons que de nombreux adolescents se sont reconnus dans les personnages. Beaucoup de jeunes roms ont assumé leur identité pour la première fois, ce qui nous rend très heureux car c’était aussi un des objectifs de la pièce. »

     

     

    Les deux acteurs reconnaissent avoir un peu le trac avant chaque représentation, le spectacle contenant une forme de critique envers les enseignants et personnels des écoles. Mais ils sont déjà rodés, ce n’est ni la première fois ni le premier type d’activité qu’ils mettent en place dans des écoles et lycées. Au cours des dernières années, ils ont créé, en collaboration avec des élèves, des courts-métrages sur le thème du harcèlement à l’école, l’un d’entre eux a été visionné plus d’un million de fois. Mădălina Brândușa raconte que pour réaliser ce film, l’équipe a réalisé pendant trois mois plusieurs séries d’atelier, en milieu rural ainsi qu’en zone urbaine, par lesquels les jeunes pouvaient expliquer les réalités des problèmes auxquels ils sont confrontés au quotidien. Que pourraient mettre en place les écoles et les autorités publiques pour lutter contre le harcèlement ? Mădălina Brândușa nous apporte des éléments de réponse.

     

    « Nous avons pris conscience en fréquentant les écoles qu’il y avait un besoin urgent de mettre en place, sur le temps scolaire, une heure d’éducation anti-harcèlement par semaine, des ateliers de théâtre aussi pour travailler sur ces problématiques de relations saines et de l’éducation sexuelle adaptée à chaque groupe d’âge. On n’enseigne pas la même chose en primaire et dans le secondaire. Mais il faut absolument que ce soit quelque chose de constant, proposer des interventions une ou deux fois par an n’a quasiment pas d’effet. »

     

     

    Andrei Serban a constaté avec mécontentement que le chemin reste long en participant récemment à une conférence réunissant des enseignants, des fonctionnaires du ministère de l’Education, des représentants de la police, des assistantes sociales, des avocats et des conseillères d’éducation.

     

    « De mon point de vue, il faut modifier un peu l’approche. A l’heure actuelle, nous avons une approche punitive. J’ai été désagréablement surpris de constater qu’on parlait en termes de victimes et d’agresseurs, mais si ce qu’on veut c’est rectifier le comportement des jeunes, on ne peut pas les regarder comme des agresseurs. Nous devons prendre en compte leur âge mais aussi le fait que bien souvent il y a de nombreux problèmes derrière ces comportements, des problèmes en général systémiques, générés par un accès inégal aux ressources. Il y a des gens qui n’ont pas accès à la thérapie, notamment des parents. Il faut intervenir dans les familles, il faut pouvoir proposer une aide psychologique gratuite. Beaucoup de famille sont marquées par des violences, dans les milieux précaires mais pas uniquement, et c’est à ce niveau-là qu’il faut intervenir. »

     

    Les victimes de harcèlement mais aussi les jeunes qui harcèlent sont soumis à des problèmes émotionnels et sociaux, dépression, faible estime de soi, mauvais résultats scolaires, anxiété etc. Ce sont des problèmes qui peuvent demeurer sur le long terme et marquer fondamentalement la vie des personnes. Une étude récente révèle que les personnes ayant été harcelée pendant leur enfance ont 4,3 fois plus de risque de présenter des troubles anxieux à l’âge adulte que les personnes non harcelées. Quant aux personnes qui ont été à la fois harcelées et harceleuses pendant l’enfance, elles ont un risque 14,5 fois plus élevé que les autres de développer un trouble panique à l’âge adulte.  Andrei Serban pointe le peu de poids accordé aux relations sociales dans notre façon de penser l’école.

     

     

    « Je trouve que l’école est un milieu très compétitif dans lequel les élèves ne font pas d’activités leur permettant de travailler ensemble, de faire quelque chose ensemble, pour leur permettre de se connaitre et de se lier d’amitié. Nous ce que nous avons fait pour les ateliers de théâtre, c’est que nous avons mélanger les élèves de différentes classes, de différents niveaux, des victimes, des agresseurs, des personnes harcelées et des harceleurs. Au cours des trois mois qu’ont duré les ateliers, ils ont pu se rapprocher, ils ont constaté que le jeu d’acteur nécessite de pouvoir se reposer sur les autres, sur la ou le camarade d’à côté et donc ils se sont liés d’amitié. Je pense qu’on manque de ce genre d’activités dans les écoles. »

     

     

    Comme souvent des solutions existent et n’attendent plus qu’un peu de volonté politique pour pouvoir être mises en place et modifier peu à peu les mentalités collectives. (Trad : Clémence Lheureux)