Tag: surréalisme

  • Le catalogue “Victor Brauner 1903- 1906”, en édition bilingue,  lancé en Roumanie

    Le catalogue “Victor Brauner 1903- 1906”, en édition bilingue, lancé en Roumanie

    L’univers
    littéraire et artistique franco-roumain est depuis le mois de décembre encore
    plus riche grâce à la publication, en édition bilingue, d’un ouvrage consacré à
    Victor Brauner, figure emblématique du surréalisme. Né en Roumanie, en 1903 et
    mort à Paris, en 1966, Brauner reste une des figures emblématiques des échanges
    culturels franco- roumains au XXème siècle. Conçu initialement pour accompagner
    une grande rétrospective Brauner, prévue sur Bucarest pendant la Saison France-
    Roumanie, le catalogue a heureusement vu le jour, malgré le fait que
    l’exposition n’a pas pu avoir lieu. Coordonné par Camille Morando, docteur en
    histoire de l’art, professeur de l’histoire de l’art à l’Ecole du Louvre et
    responsable de la documentation des œuvres pour les collections modernes au
    Musée national d’art moderne- Centre de création industrielle et Centre
    Pompidou, l’album n’aurait jamais vu le
    jour sans l’implication et l’enthousiasme de M. Christian Derveloy, collectionneur
    français, à la tête de l’imprimerie Arta Grafica. Lancé lors d’une soirée
    à l’Ambassade de France en Roumanie, en présence de S.E, Mme l’ambassadrice,
    Michèle Ramis, l’ouvrage Victor Brauner 1903- 1966 se propose de présenter le
    parcours de cet artiste malheureusement peu connu aussi bien en France, mais
    surtout dans sa Roumanie natale. Pour mieux apprendre aussi bien sur l’ouvrage,
    que sur Victor Brauner, on a réuni autour du micro Mme l’ambassadrice, Michèle
    Ramis, Mme Camille Morando, directrice
    de l’ouvrage et M. Christian Derveloy, actionnaire de Imprimeria Arta Grafica.
    Ensemble, on essayera dans les minutes suivantes, de feuilleter virtuellement
    le catalogue et de pénétrer, ne serait-ce qu’un tout petit peu, dans l’univers
    surréaliste de Victor Brauner.

  • « Gherasim Luca : Héros-limite », visite d’exposition

    « Gherasim Luca : Héros-limite », visite d’exposition

    Visite de l’exposition « Gherasim Luca : Héros-limite » avec la commissaire Mica Gherghescu.

    Découverte d’un artiste complet, poète, cubomane, graphomane, bégayeur.

    Une interview d’Elena Diaconu.




  • La première édition du Festival « Gellu Naum »

    La première édition du Festival « Gellu Naum »

    Le Musée national de la littérature roumaine de Bucarest, en collaboration avec la Fondation « Gellu Naum », a organisé cette année la première édition du Festival « Gellu Naum ». Deux jours durant, les poètes contemporains les plus importants, proches, d’une façon ou d’une autre, de Gellu Naum, se sont donné rendez-vous à Bucarest et à Comana (sud), où le poète s’était retiré, pour rendre hommage à ce dernier grand surréaliste européen. Par ces deux rencontres, les organisateurs se proposaient de réaliser un dialogue à travers l’espace et le temps, pour mieux mettre en valeur le patrimoine littéraire roumain et la culture écrite récente. Les poètes invités ont proposé des lectures de leurs poèmes et ils ont tâché de donner une réponse aussi personnelle que possible à la question : « Comment suis-je arrivé à connaître Gellu Naum ? », évoquant mémoires, souvenirs, croquis, idées liés au grand poète surréaliste Gellu Naum.

    L’hôtesse des événements a été l’écrivaine Simona Popescu, auteure des livres : « Sur le surréalisme avec Gellu Naum », et « Clava. Critifiction avec Gellu Naum », publiés à quelques années d’intervalle, le dernier s’étant enrichi de plusieurs essais. « Ayant vécu pendant des années auprès de Gellu Naum, ce sens de la dignité existentielle qui est le principe vital de la poésie s’est éclairci pour moi de plus en plus. Gellu Naum avait un besoin viscéral de pureté et c’est pourquoi il manifestait une intransigeance féroce tout d’abord envers lui-même et ensuite envers les autres, il essayait de ne pas se mêler à eux, à leurs erreurs. (…) Ses propres erreurs lui provoquaient une grande souffrance. (…) L’erreur, c’était, pour lui, s’éloigner du « centre » de l’existence poétique. Le plus petit éloignement de ce qu’il appelait « les principes » apportait avec lui la disharmonie, l’opacité, l’hostilité », affirme Simona Popescu.

    L’idée d’organiser un festival « Gellu Naum » lui est venue à la fin de 2015, année ayant marqué le centenaire de la naissance du poète, qui a vu lu jour le 1er août 1915. Surtout qu’à son avis, les écrits de Gellu Naum « créent de la solidarité ».

    Vu qu’une grande partie de la critique considère Gellu Naum comme le dernier grand surréaliste européen, nous avons demandé à Simona Popescu si, de nos jours, on peut encore parler de surréalisme : « Le surréalisme existe, il y a des poètes surréalistes qui écrivent de nos jours et il y a des groupes surréalistes très intéressants à travers le monde. J’aimerais faire venir aux prochaines éditions du festival le groupe surréaliste de Londres, le groupe suédois, les surréalistes de Prague. Il y a dans le monde des poètes qui se présentent comme des surréalistes. Ainsi, le surréalisme continue d’exister dans la littérature aussi. Autrement, au-delà de la littérature, le surréalisme est immortel – tout comme le romantisme et tous les courants littéraires. Nous sommes tous des surréalistes, à notre façon – ne serait-ce que lorsque nous rêvons. Quand nous rêvons, nous sommes tous des surréalistes et, que nous le voulions ou pas, nous sommes des romantiques, des postmodernistes et des classiques. Et de temps en temps, toutes ces choses-là reçoivent un nom. Le surréalisme a existé depuis toujours, mais il s’est vu attribuer un nom à peine dans les années ’30, lorsque les surréalistes français l’ont théorisé, empruntant ce terme à Apollinaire. Et voilà que, de nos jours encore, on parle de surréalisme et on en parlera jusqu’à la fin du monde. »

    « La poésie est une forme du mécontentement supérieur. Elle met en doute les principes, les systèmes, les hiérarchies, tout en refusant, en même temps, avec héroïsme, la vulgarité au visage de plus en plus humain, alors que les mécontents de ce monde recherchent ces « tempêtes terribles » où ils peuvent mesurer leurs forces » – disait Gellu Naum dans « Mon père fatigué ».

    Parmi les poètes invités au Festival comptait Nora Iuga, dont les écrits ont été considérés, dès le premier volume, comme apparentés au surréalisme. Nora Iuga : « Je suis absolument convaincue que les surréalistes naissent ainsi, ils naissent surréalistes. Moi, je ne pense pas qu’un poète puisse devenir surréaliste grâce à des cours d’écriture créative. En effet, c’est le poète Miron Radu Paraschivescu qui a écrit la préface mon premier volume et il y affirmait qu’il y avait une ressemblance entre moi et Gellu Naum. Depuis, de tels rapprochement n’ont presque plus été faits en Roumanie. Je n’ai pas fait partie du groupe très bien connu d’amis – littéraires ou pas – de Gellu Naum. J’ai connu Gellu Naum plus tard, car ses écrits ne circulaient pas pendant la période stalinienne. Je n’ai appris l’existence du mot « surréalisme » que très tard, vers le milieu des années 60. C’est à cette époque-là que j’ai lu le premier poème de Gellu Naum, intitulé Athanor. Je l’ai lu et j’ai ressenti une sorte d’électrochoc… de perplexité ; je n’ai pas compris grand-chose à ce poème, mais je l’ai adoré. C’est que je n’avais jamais lu rien de semblable et je ne savais pas que l’on pouvait penser ou écrire de cette façon, sans que l’on y comprenne quoi que ce soit, mais en ressentant une telle vibration de beauté et ce perpétuel inattendu. Ce fut, pour moi, le moment où j’ai pris conscience du fait que, souvent, je préfère l’inintelligible, c’est-à-dire ce qui ne ressemble à rien d’autre et reste incompréhensible, parce que c’est là que se cache le grand mystère. Et c’est le grand mystère qui domine nos vies. » (Trad. : Dominique)

  • Le poète Gherasim Luca

    Le poète Gherasim Luca

    Gherasim Luca (Salman Locker, de son vrai nom) a vu le jour à Bucarest, le 23 juillet 1913. Il fut un des théoriciens du mouvement surréaliste et compta parmi les fondateurs du groupe surréaliste roumain. Même si en Roumanie le mouvement surréaliste est apparu plus tard qu’en France, il a été illustré par des créations représentatives, dont celles publiées par Gherasim Luca dans les années ’30-’40. A cette époque-là, il faisait de la poésie, de la prose et du journalisme, s’exprimant tantôt en roumain, tantôt en français. En 1945, il signe, aux côtés d’un autre avant-gardiste, Dolfi Trost, le manifeste du surréalisme roumain, intitulé « Dialectique de la dialectique ». Ses volumes de vers « Le Vampire passif » et « L’Inventeur de l’amour » paraîtront toujours dans les années ’40. Comme tous les avant-gardistes de ces temps-là, Gherasim Luca avait des options politiques de gauche. Toutefois, n’ayant pu s’adapter aux « nouvelles réalités sociales et culturelles » apportées par le communisme, Gherasim Luca quitte le pays en 1952 et s’installe à Paris.

    L’historien littéraire Ion Pop nous a offert des détails sur son style poétique : « Ses débuts littéraires remontent aux années vécues en Roumanie. Les poésies écrites alors, dont certaines en français, allaient préfigurer les ouvrages réalisés plus tard en France. Cette première étape est celle de la dictée automatique, qu’il va pourtant limiter aux métamorphoses phonétiques. C’est ce que l’on a désigné par le terme de « bégaiement » mimé de l’auteur, une sorte d’hésitation devant le discours poétique, lequel devient difficile à articuler et incohérent par endroits. Le poème Passionnément, écrit en français, est un des plus représentatifs en ce sens. »

    Durant son exil, Gherasim Luca va s’essayer à l’art plastique aussi. En quête d’originalité, il inventera une technique surréaliste de collage appelée « la cubomanie ». En collaboration avec Jean Arp, Paul Celan ou Max Ernst, il réalisera, à Paris, un nombre impressionnant de collages, de dessins, d’objets ou de textes – installations. Au fil du temps, sa célébrité ne cesse de croître parmi les intellectuels d’Europe et non seulement. Invité dans les grandes métropoles du monde à lire des extraits de son œuvre, il recevra des éloges pour sa manière de réciter aussi. En 1994, à l’âge de 80 ans, il met fin à ses jours, se jetant dans la Seine du haut du pont Mirabeau.

    L’historien littéraire Ion Pop tente de trouver dans son art poétique des explications pour la mort de l’artiste : «Gherasim Luca fut un des poètes les plus dévoués à cet art et des plus engagés dans l’effort créateur. Il a même exercé et développé un certain imaginaire du suicide. Dans L’inventeur de l’amour et puis dans La mort morte”, on retrouve toute une série de tentatives de suicide manquées. C’est une sorte de théâtralisation des gestes et des attitudes qui caractérise la quasi totalité de ses écrits. Tout cela s’ouvrait sur un monde où la poétique communiquait directement avec le vécu, le plan existentiel, où l’artifice poétique et la réalité se rencontraient. Dans le cas de Gherasim Luca, ces simulacres de suicide se transformeront en la réalité brute de sa propre mort. Souhaitant fusionner avec son univers imaginaire, il s’est peut-être donné la mort dans un moment de désenchantement, de défaite, qui sait? Probablement qu’à ses 80 ans, il s’était rendu compte du fait que la condition du poète, après tout marginale, nonobstant les dernières reconnaissances, ne l’encourageait pas assez.»

    Après sa mort, la poésie et l’activité artistique de Gherasim Luca allaient susciter l’intérêt croissant des traducteurs, des éditeurs et du public du monde entier. (trad. Mariana Tudose)

  • Le peintre Victor Brauner

    Le peintre Victor Brauner

    Le peintre Victor Brauner est un des représentants les plus importants du courant surréaliste en Europe. Son style est emblématique tant par son originalité et la force du détail, que par le caractère prémonitoire de certains de ses ouvrages.

    Cătălin Bălescu, président de l’Université nationale d’Arts de Bucarest, nous parle de la place de l’artiste dans l’histoire universelle de l’art: Victor Brauner compte parmi les peintres européens les plus importants, son nom figurant déjà dans le Panthéon de la peinture universelle. C’est un honneur pour nous, car, d’une part, il est né en Roumanie, d’autre part il a suivi les cours de l’Ecole des Beaux-Arts de Bucarest. Il s’agit des années 1919-1921, période dans laquelle il a également fréquenté l’Académie libre de peinture de Horia Igiroşanu. Comme vous pouvez le constater vous-mêmes, la Roumanie a actuellement une composante originale de surréalisme à tous les niveaux, politique, culturel, artistique et spirituel. A mon avis, la peinture surréaliste, au sens classique du terme, réalisée par Victor Brauner, enrichit le surréalisme européen d’éléments originaux, spécifiques de l’art roumain.

    Le peintre Victor Brauner a vu le jour le 15 juin 1903 à Piatra Neamţ , ville du nord-est de la Roumanie. Emigré en France, en 1930, il allait être unanimement apprécié par les grands surréalistes de l’époque. Trois ans plus tard, en 1933, il ouvre sa première exposition personnelle à Paris.

    Cătălin Bălescu : Victor Brauner est un des artistes plasticiens les mieux représentés au Centre Pompidou de Paris, où toute une salle lui est dédiée. Il est donc plus visible dans le grand musée parisien que d’autres grands surréalistes, tel que Salvador Dali ou Joan Miro. Son parcours artistique est tout à fait non-conventionnel, comme celui de n’importe quel autre artiste d’avant-garde, d’ailleurs. A Paris, il fait la connaissance des grands surréalistes des années ’30, Constantin Brâncuşi, Alberto Giacometti, Barbu Fundoianu (alias Benjamin Fondane), Yves Tanguy, André Breton. Tous l’apprécient est le considèrent comme un artiste authentique dans le paysage avant-gardiste parisien de l’époque, où l’on retrouve des noms sonores de la culture européenne moderne.

    De retour à Bucarest, en 1935, Victor Brauner collabore avec le poète Ilarie Voronca et avec certains écrivains roumains moins connus du grand public, tel Saşa Pană.

    Cătălin Bălescu : Il a également une évolution inattendue d’un point de vue politique, car, même en l’absence d’une activité politique remarquable, il s’inscrit dans le Parti Communiste Roumain, au milieu des années 1930. En ces temps-là, bien des artistes d’avant-garde se sentaient attachés à la doctrine de ce parti de gauche, minoritaire. Pablo Picasso, par exemple, André Gide et beaucoup d’autres flirtaient avec la politique de gauche.

    Les critiques d’art ont également remarqué le caractère prémonitoire de certains ouvrages de Victor Brauner.

    Cătălin Bălescu : Un épisode célèbre témoignant de son don de prémonition est celui de l’autoportrait à l’œil crevé. Il est de notoriété le fait que sept ans après avoir peint cet autoportrait, lors d’une bagarre entre deux de ses amis, alors qu’il tentait de s’interposer, il reçut un éclat de verre dans un oeil et devint borgne. Un autre ouvrage révélateur de ce même point de vue est celui réalisé en 1965, un an avant sa mort, et intitulé « La fin et le début ». Ses peintures commencent alors à avoir de l’impact. Victor Brauner devient une personnalité connue au travers de son art, mais aussi de ses commentaires théoriques.

    Victor Brauner est enterré au cimetière de Montmartre, aux côtés d’autres figures de proue de la culture mondiale. (Trad. Mariana Tudose)