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  • “La fin de l’homme rouge” de Svetlana Alexievitch

    “La fin de l’homme rouge” de Svetlana Alexievitch

    « Prix Médicis de l’essai, cette radioscopie de la Russie profonde, son auteur la livre sans commentaires, dans sa terrible nudité. Elle aide à comprendre sur quoi surfe Poutine, entre Église orthodoxe et oligarques, entre nostalgie impériale et résignation populaire. » C’est dans ces termes que « La libre Belgique » parle de « La fin de l’homme rouge » de Svetlana Alexievitch. Biélorusse née soviétique, elle reçu en 2015 le Prix Nobel de la littérature, pour « son œuvre polyphonique, mémorial de la souffrance et du courage à notre époque » en devenant la première femme de langue russe à recevoir la distinction. Dans les minutes suivantes, je rejoindrai par téléphone Mathieu Fabre, libraire à Kyralina, qui a décidé de faire de « La fin de l’homme rouge » son coup de cœur de cette semaine. Restez avec nous, sur RRI.

  • La pandémie à travers des histoires et des images

    La pandémie à travers des histoires et des images

    La vie est, somme toute, un enchaînement
    d’histoires. Plutôt agréables ou plutôt éprouvantes, plutôt riches de sens ou
    plutôt banales, les histoires ressemblent aux êtres humains et, comme eux,
    elles sont toutes différentes les unes des autres. Il n’est donc pas étonnant
    que, confrontés à l’isolement, les gens de tous les coins du monde ont cherché
    à savoir quelles histoires partageaient leurs semblables.








    A Oradea, Cristina Liana Puşcaş, docteur en histoire
    et chercheuse au « Musée de la cité », s’est proposé de réaliser une
    documentation sur cette période, car son expérience lui disait que des années
    plus tard on aurait besoin d’informations, d’images et de témoignages sur la
    pandémie de 2020. Liana Puşcaş a donc entrepris une recherche scientifique
    interdisciplinaire : « Vivre au temps de la pandémie ».








    Liana Puşcaş : « Cela a supposé un questionnaire, comportant 25 questions que j’ai
    lancé dans l’espace public. Je m’intéressais notamment à la manière dont les
    habitants de la ville d’Oradea et de la contrée de Bihor, ainsi que les
    Roumains vivant à l’étranger avaient perçu cet incident de l’histoire. J’ai
    lancé le questionnaire le 22 avril 2020 et il semble avoir suscité un grand
    intérêt. J’ai reçu jusqu’à présent 321 réponses. Evidemment, pour
    différentes raisons, les questionnaires complétés ne seront pas tous validés, mais
    je pense que 200 d’entre eux le seront certainement. Seul petit bémol pour ce projet
    : le questionnaire a dû être complété en ligne, ce qui a exclu d’emblée les
    personnes n’ayant pas accès à Internet. Les répondants sont plutôt des
    personnes avec une éducation universitaire et qui sont connectées Internet. »






    Les réponses sont arrivées des départements de
    Bihor, Satu Mare, Sălaj, Cluj, Timiş, Arad et de la capitale, Bucarest, mais
    aussi de Vienne, Hambourg et New York.








    Cristina Liana Puşcaş mentionne quelques questions
    et les réponses reçues : « Première
    question : à quel projet avez-vous dû renoncer au moment du confinement ?
    Nombre de personnes affirment avoir été obligées à renoncer aux vacances, à la
    rénovation de leur maison, à un emploi, aux spectacles de théâtre ou à se
    rendre à l’église. Les personnes qui sont restées chez elles et ont travaillé à
    distance, respectant de strictement le confinement, ont le plus souffert de
    l’isolement. Le confinement semble ne pas avoir provoqué la même frustration
    chez ceux qui ont continué d’aller au travail ».









    Une autre question visait les difficultés des gens à
    s’adapter aux nouvelles conditions, imposées par le confinement. Cristina
    Puşcaş : « Les personnes qui ont
    répondu au questionnaire semblent s’être adaptées le plus difficilement au
    manque de socialisation, à l’absence des membres de leur famille élargie, de
    leurs amis et mêmes de leurs collègues de travail. Le confinement a été
    éprouvant notamment pour certaines femmes qui devaient être à la fois
    mères, employées travaillant à distance, épouses, institutrices, soignantes,
    médecins, psychologues à plein temps, masseuses, coiffeuses, pédagogues,
    professeurs d’allemand et d’anglais etc. Les répondants ont affirmé s’être
    adaptés très difficilement aux nouveaux rituels : désinfecter, compléter
    les attestations de déplacement, renoncer à leurs promenades, à leur liberté de
    mouvement. »








    La plupart des personnes ont affirmé que leur vie de
    couple n’avait pas été affectée, bien que, dans certaines réponses, elles aient
    glissé un petit sourire : « Je n’aime pas devoir servir 3 repas par
    jour », « Je ne comprends pas pourquoi ma femme essaie de m’imposer un
    programme », « Il est évident que nous avons des rythmes biologiques
    différents ».








    Passer du temps dans l’isolement incite les gens à
    se tourner vers leur monde intérieur. C’est pourquoi, Cristina Liana Puşcaş a
    ajouté la question : « Quelles
    petites joies avez-vous découvertes durant ces journées de confinement ? »
    Certains ont su mettre à profit cette période, en découvrant le soleil, la
    saveur d’un café qu’on prend le temps de siroter, le pain fait maison, le
    plaisir de cuisiner, le jardinage, la famille. »








    « Une image vaut mille mots » – dit un
    proverbe chinois. C’est pourquoi, Cristina Liana Puşcaş a développé
    parallèlement le projet : « Photos prises pendant la pandémie ».
    Qu’est-ce qu’elle a pu constater en regardant les photos reçues ?


    Cristina Liana Puşcaş : « Elles sont toutes prises à l’intérieur de la maison ou depuis
    une fenêtre par laquelle on voit la cour. Une dame m’a envoyé une photo d’elle
    après s’être rasé le crâne. Un monsieur de Satu Mare m’a envoyé l’image d’une
    femme agenouillée sur les marches d’une église. La quasi-totalité des photos
    représentent pourtant la vie à l’intérieur de la maison et très peu à
    l’extérieur. »









    Ces projets sont encore en déroulement. L’optimisme
    nous incite, certes, à rêver des jours meilleurs, mais le réalisme nous pousse
    à évaluer ce qui compte vraiment pour nous. Et, selon Cristina Liana Puşcaş,
    les gens semblent s’être rendu compte de l’importance de la nature et de la
    présence des êtres chers. (Trad. : Dominique)