Tag: troubles

  • La santé mentale – une priorité pour la société actuelle

    La santé mentale – une priorité pour la société actuelle

    Réunis au sein du hub des Global Shapers de Bucarest, parrainé par le Forum économique mondial, plusieurs jeunes enthousiastes s’activent dernièrement pour relever les défis de notre monde. Appuyés par la Société des Etudiants en Médecine de la capitale roumaine, ils ont lancé une série de conversations sur le sujet controversé de la santé mentale. Un premier rendez-vous a déjà eu lieu à l’Université de médecine et de pharmacie « Carol Davila » de Bucarest. La conseillère présidentielle Diana Loreta Păun, du Département Santé publique, passe en revue les principaux problèmes auxquels se confrontent les psychiatres roumains:« Il y a tout d’abord des difficultés liées à la gestion des ressources humaines, un aspect qui caractérise tout le système sanitaire de Roumanie. Les jeunes s’en vont pour terminer leurs études ailleurs. A la pénurie de personnels médicaux s’ajoutent des problèmes financiers et d’infrastructure. On doit avouer que la prise en charge des patients souffrant de troubles psychiatriques est assez limitée. Une fois le diagnostic fixé, on se concentre sur le traitement médicamenteux. Or, pour une prise en charge correcte, il faudrait s’occuper aussi de la réinsertion sociale du malade, qui devrait bénéficier d’une thérapie comportementale et sociale, ce qui n’existe pas chez nous. »



    Les longues décennies de régime communiste ont influencé elles aussi le regard que la Roumanie a posé sur les personnes souffrant de troubles mentaux. Malheureusement, le mauvais héritage communiste perdure de nos jours encore, ce qui explique les problèmes de vision dont souffre la psychiatrie roumaine. De retour au micro, Diana Loreta Paun: « On souffre toujours d’une bonne partie des tares du communisme. Je pense que la discrimination et la stigmatisation des malades mentaux viennent de ces années-là. Après, il y a aussi le stress qui nous accompagne au quotidien et, souvent, on a du mal à faire avec. Du coup, on développe des troubles psychiatriques, on plonge dans la dépression ou, plus grave encore, on risque le suicide. Ce sont autant d’aspects à prendre en considération pour une approche correcte. Si on les ignore, les conséquences ne tarderont pas à faire irruption. Les patients ont du mal à demander de l’aide, ils évitent de se rendre chez le psychologue ou le psychiatre, du coup, ils ne sont pas diagnostiqués et donc, ils ne bénéficient d’aucune prise en charge. »



    Avant que le régime communiste ne la place dans un cône d’ombre dans les années 1970, la psychiatrie roumaine avait connu une période fleurissante au début des années 1940, quand les experts de Roumanie se ralliaient aux tendances occidentales. Julien-Ferencz Kiss, psychologue et auteur du livre « L’Histoire de la psychanalyse en Roumanie »: « Avant 1940, la Roumanie s’enorgueillissait d’une riche tradition psychologique. Il suffit de penser au congrès international de psychologie qui aurait dû avoir lieu à Bucarest, si la guerre n’avait pas commencé. N’empêche. C’était pour la première fois qu’un pays en dehors du bloc occidental était choisi pour accueillir un tel événement. Attention, il était question de psychologie, non pas de psychanalyse. Car, ce domaine n’a pas eu d’écho en Roumanie. D’ailleurs, après 1948, le pays rejette aussi la psychologie, qui ne trouve plus sa place dans les universités. En 1977, les facultés de psychologie ferment leurs portes et le métier de psychologue n’existe plus. »



    La sociologue Leyla Safta-Zecheria, de l’Université d’Ouest de Timişoara, s’est penchée sur le sort des institutions à profil psychologique à travers les différentes époques de l’histoire roumaine. A ses dires, la situation précaire et la perception souvent erronée du système médical psychiatrique ne semblent pas s’améliorer. « Malgré les idées progressistes d’Obreja et de Parhon, de faire construire de nouvelles infrastructures psychiatriques améliorées après la Deuxième Guerre Mondiale, on apprend de la bouche du Pr Parhon qu’au centre psychiatrique de Socola, près de Iaşi, les conditions d’hygiène sont précaires et que les patients ne mangent pas à leur faim. De tels problèmes persistent, malgré les efforts des autorités, y compris communistes, d’y trouver une solution. Dans les années 1940-1950, les communistes mettent en place des foyers d’accueil médicalisé destinés aux malades mentaux, avant de doter les hôpitaux généraux d’une section de psychiatrie et de faire construire des laboratoires de santé mentale dans les années 1970. En 1990, des rapports font état de plusieurs établissements où l’on enfermait les patients souffrant de troubles psychologiques, qui, du coup, étaient privés de liberté et de services de base. De telles pratiques existent parfois, de nos jours encore. »



    Les statistiques internationales sur la santé mentale font état d’une recrudescence sans précédent des cas de troubles mentaux. Partout dans le monde, la situation est inquiétante. Dans ce contexte, la Roumanie devrait renouer au plus vite possible avec une tradition médicale qu’elle s’est vu forcer d’abandonner. Ştefan Bandol, à la tête de l’Association ARIPI (Ailes), au service des personnes soufrant de troubles psychiatriques, explique pourquoi un tel domaine est si important: « Partout dans le monde, les patients souffrants de maladies mentales sont discriminés et stigmatisés. En 1990, l’OMS estimait que 25% de la population de la planète aurait besoin de consulter un psy au moins une fois dans la vie. Or, ce pourcentage a grimpé à 33% dans les années 2000 et à 50%, dans les années 2010. Si on pense que chacun d’entre nous a, dans sa famille, au travail ou parmi ses copains quelqu’un qui accuse des troubles de nature psychologique ou psychiatrique, on pourrait conclure que toute la population de la Terre en est touchée, plus ou moins directement. »



    « L’Histoire des troubles mentaux en Roumanie » s’inscrit dans le projet mené dernièrement par le hub Global Shapers, de Bucarest, sur plusieurs thèmes importants en rapport avec la santé mentale. L’événement sera suivi par deux autres conférences: « The Reality of Mental Health » (« La réalité de la santé mentale ») et « Digital Revolution Meets Mental Health » (« La révolution du numérique à la rencontre de la santé mentale »), prévues le 5 et respectivement le 9 mars. (Trad. : Ioana Stăncescu)


  • L’intégration en milieu scolaire des élèves aux besoins éducatifs spéciaux

    L’intégration en milieu scolaire des élèves aux besoins éducatifs spéciaux

    Tout comme dans d’autres pays du monde, en Roumanie aussi nous assistons ces derniers temps à une augmentation du nombre d’enfants touchés par des troubles psychiques et du développement, tels l’autisme ou le déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH). C’est un constat plutôt empirique, les statistiques officielles n’étant ni assez révélatrices, ni très récentes.

    7.179 personnes touchées par l’autisme étaient enregistrées en Roumanie en 2012, selon les chiffres fournis par le ministère de la Santé, mais, de l’avis des spécialistes, leur nombre serait beaucoup plus grand. A partir des statistiques de l’OMS, l’association « Sauvez les Enfants » estimait, en septembre 2015, que sur les 3,8 millions d’enfants roumains, plus de 760.000 mille étaient confrontés à un problème de santé mentale, 13% étant touchés par des troubles d’anxiété, 5% par le trouble du déficit d’attention avec hyperactivité, 0,2% par l’autisme et par des troubles envahissants du développement.

    Or, l’intégration en milieu scolaire de ces enfants n’est pas toujours facile. La loi de l’éducation prévoit la scolarisation et l’octroi d’un soutien aux enfants aux besoins éducatifs spéciaux. Une législation secondaire définit les types de services de soutien à accorder. En bénéficient les enfants qui, suite à une évaluation, ont obtenu un certificat délivré par un centre d’orientation et d’assistance pédagogique.

    En vertu de ce certificat, les enfants aux besoins éducatifs spéciaux peuvent s’inscrire à n’importe quelle école publique où ils devraient recevoir une assistance psychologique et un enseignant qui les aide à s’intégrer dans le milieu scolaire et à assimiler les connaissances dispensées. Comme d’habitude, la situation semble beaucoup meilleure sur le papier. Robert Florea, coordinateur du Centre d’orientation et d’assistance pédagogique, de Bucarest explique : « Malheureusement, du moins à Bucarest, on ne dispose pas d’un nombre suffisant de professeurs pour fournir cette assistance. Alors, les enseignants spécialisés peuvent s’occuper une heure ou deux par semaine, tout au plus, de ces enfants. 4 à 6 heures par mois accordés à un tel enfant ne suffisent pas. Les formes de soutien et la démarche éducative dont bénéficient ces enfants doivent certainement être améliorées. »

    Malheureusement, les problèmes administratifs et le manque de personnel ne sont pas les plus grands défis à relever pour soutenir ces enfants. Le milieu scolaire, où un enfant touché par l’autisme ou le trouble du déficit d’attention avec hyperactivité doit s’intégrer, pose des problèmes encore plus difficiles à résoudre. Il s’agit notamment de l’attitude des autres élèves et de leurs parents. Maria Teodorescu est enseignante accompagnatrice dans une école secondaire de la capitale : « Une meilleure préparation psychopédagogique est nécessaire pour approcher ces enfants. Les parents des autres élèves devraient également se montrer plus compréhensifs. Une meilleure collaboration serait également salutaire entre les professeurs chargés de soutenir ces enfants, les professeurs accompagnateurs, les autres enseignants et les parents. Pour que ces enfants soient acceptés, il faut organiser des activités qui fassent comprendre aux élèves normaux ce qu’est la tolérance, car la plupart ignorent ce que cela veut dire. »

    Cultiver la tolérance est nécessaire, mais cela ne suffit pas. Les élèves d’une classe qui accueille un enfant touché par un tel trouble, ainsi que leurs parents, doivent savoir en quoi consiste, en fait, ce trouble. Mère d’un enfant touché par le trouble du déficit d’attention avec hyperactivité, Anemarie Necşulescu nous fait part de son expérience : « En fait, les enfants touchés par ce trouble du comportement ont besoin d’attention. Il leur est difficile de se concentrer pendant une plus longue période de temps et ils finissent par perturber les cours: ils parlent alors que personne ne leur a adressé la parole, ils sont impatients et ne peuvent pas se tenir tranquilles, ils dérangent leurs collègues. Un instituteur qui doit gérer une classe d’une trentaine d’élèves ne peut pas faire face à une telle situation. L’intégration de ces enfants dans leur milieu scolaire doit être considérée aussi du point de vue des parents des enfants normaux, qui ne connaissent rien sur ces troubles, et c’est de cette ignorance que naissent la peur, le jugement et le rejet. Là où l’entente mutuelle fait défaut, la situation peut devenir extrêmement tendue, surtout lorsque, marginalisé et frustré, l’enfant touché par un trouble du développement devient violent.

    Cet automne, les parents de la plupart des élèves d’un collège de Ploieşti ont exigé le départ d’un élève touché par le TDAH qui, à leur avis, avait un comportement violent. Anemarie Necşulescu connaît ce genre de réaction : « L’institutrice de notre enfant n’était pas formée pour gérer le tempérament et le problème médical de notre enfant. Nous ignorions que notre fils était touché par le trouble du déficit d’attention avec hyperactivité. Nous étions souvent convoqués à l’école où on nous reprochait son comportement. Il n’était pas violent, mais il perturbait les cours. Et l’institutrice nous faisait ces reproches dans le couloir, devant les autres parents. A force de le répéter, elle a déterminé certains d’entre eux à réagir. Ils nous ont demandé de prendre notre « handicapé » et de nous en aller. Nous avons accepté que notre fils soit évalué par un conseiller scolaire. Nous avons déposé le dossier et l’enfant a été examiné, car nous souhaitions une solution à ce problème. Nous avons transféré notre enfant à une autre école, où nous avons bénéficié du soutien de la direction, car nous avons souhaité qu’il profite du droit à l’éducation stipulé par la Constitution du pays. Nous avons trouvé un thérapeute, que nous avons payé de notre propre poche, pour s’occuper de notre enfant à la maison. Nous sommes tombés d’accord avec sa nouvelle institutrice qu’au moment où elle voit la frustration de l’enfant augmenter, qu’elle lui donne une petite tâche à accomplir: essuyer le tableau noir, vider la poubelle ou aller au secrétariat chercher quelque chose. Cela allait l’aider à décompresser, à se calmer et à retourner en classe. »

    Suite à une médiation entre la direction du collège et les parents, la crise de Ploieşti a été désamorcée et l’enfant turbulent a pu retourner à l’école. De la même façon, suite à un appel à la compréhension et à la tolérance, l’enfant d’Anemarie Necşulescu a pu être intégré en milieu scolaire. (Trad.: Dominique)