Tag: violoniste

  • George Enescu

    George Enescu

    « La perfection, qui est la passion de tant de gens, ne mintéresse pas. Ce qui compte, dans lart, cest de vibrer soi-même et de faire les autres vibrer ». Voilà le credo du premier compositeur roumain entré dans le patrimoine culturel mondial : George Enescu.



    La musicienne et musicologue Maria Balabaş nous explique ce qui a valu à Enescu cette place dans le patrimoine musical mondial : « Cest pour avoir su, par ses connaissances et son talent, faire entendre, à travers les formes créées par la musique académique occidentale, les sonorités propres à la musique roumaine. Cela sexplique aussi par le fait quà lépoque cette synthèse était unique et que George Enescu était également connu comme instrumentiste et chef dorchestre ».



    Né le 19 août 1881, dans le nord du pays, à Liveni-Vârnav – commune qui porte aujourdhui son nom – George Enescu, a été un excellent violoniste, pianiste et chef dorchestre. Pourtant, son rêve, dès son enfance, a été de devenir compositeur: « Cest curieux : je ne savais rien, je navais rien écouté – ou presque – il ny a eu personne auprès de moi pour minfluencer et pourtant, dès que jétais petit, jai eu cette idée fixe de devenir compositeur. Seulement compositeur. » – déclarait plus tard George Enescu au critique musical et journaliste radio Bernard Gavoty.



    Lartiste semble avoir eu sa première expérience musicale décisive à lâge de 3 ans, lorsquil a écouté un orchestre de ménétriers. A 4 ans, son père lui apprend les premières notions musicales, à 5 ans, il rencontre Eduard Caudella, compositeur et professeur au Conservatoire de Iaşi, qui allait guider ses premiers pas dans le monde de la musique. En 1888, il commence ses études au Conservatoire de Vienne, où il étudie, pendant 6 ans, avec des professeurs renommés de lépoque, dont Siegmund Bachrich et Josef Hellmesberger Junior. Ce dernier était professeur de violon et fils du directeur du Conservatoire de Vienne. Sur sa recommandation, George Enescu est envoyé par son père se perfectionner au Conservatoire de Paris. Il avait 14 ans.



    Deux moments importants de sa vie de musicien ont lieu durant cette période. Tout dabord, son premier récital réunissant des morceaux dont il était lauteur, alors quil avait 15 ans à peine, dans le cadre dun concert de musique de chambre accueillie par la Petite Salle Pleyel de Paris. Ce concert confirmait « lapparition dun créateur roumain exceptionnel dans le monde musical international » – pour citer le musicologue Viorel Cosma. Le second événement important allait se produire une année plus tard, en 1898, lorsque George Enescu fait ses débuts, en tant que compositeur, toujours à Paris, où il présente son « Poème roumain », interprété par lorchestre « LAssociation Artistique » sous la baguette dEdouard Colonne. Lœuvre a joui dun immense succès auprès du public et des critiques.



    Après la deuxième guerre mondiale, George Enescu allait quitter définitivement la Roumanie pour sétablir à Paris, où il séteint en 1955.



    En raison de la reconnaissance internationale et de la grande renommée dont il a joui, George Enescu a eu de nombreuses occasions de donner des cours à Paris et à Fontainebleau (en France), à Sienne (en Italie) et New York (aux Etats-Unis), à Brighton et Bryanstone (au Royaume Uni).



    Le monde a conservé le souvenir de George Enescu grâce aussi aux disciples qui ont compris sa pensée et sa vision de la musique. Parmi ses disciples ont compté : Yehudi Menuhin, Dinu Lipatti, Arthur Grumiaux, Christian Ferras et Ida Haendel.



    Quel est le trait essentiel de la musique de George Enescu? Maria Balabaş explique : « Dans la création de George Enescu, ce qui me paraît essentiel est la façon dont il a choisi de se rapporter au folklore roumain, car nous sommes tous sensibles aux musiques des différents peuples du monde. Il sagit de la façon dont Enescu a su – notamment dans ses œuvres de maturité – reprendre et adapter les éléments dorigine folklorique pour construire son propre langage musical. La sonate pour piano et violon N° 3, écrite dans un style proche de la musique traditionnelle en est un exemple assez éloquent. Cette sonate est la dernière œuvre de George Enescu. Je pense que cest quelque chose dunique dans la musique roumaine et que cest ce qui fait la valeur de George Enescu sur la plan international. Cest quà chaque fois que nous entendons une musique liée à une tradition musicale propre à une certaine zone du globe, notre sensibilité humaine est touchée et nous réagissons même sans le vouloir. » (Trad. : Dominique)

  • Vladimir Cosma

    Vladimir Cosma

    Issu d’un père pianiste et chef d’orchestre et d’une mère musicienne, le jeune Vladimir Cosma commence à étudier la musique dès un âge très tendre. A huit ans déjà, il se produit sur scène en compagnie de son père. Après des études au Conservatoire national de Bucarest, il va à Paris en 1963, pour y continuer à étudier au Conservatoire supérieur de musique de la capitale française. A partir de 1964, il commence à faire des tournées à travers le monde comme violoniste, avant de se consacrer de plus en plus à la composition. Il écrit différentes œuvres dont : Trois mouvements d’été pour orchestre symphonique, Oblique pour violoncelle et orchestre à cordes, des musiques de scène et de ballet.

    Son nom, on l’associe le plus souvent à la musique de film après qu’en 1968, Yves Robert lui confie sa première musique de film pour « Alexandre le bienheureux », en remplacement de Michel Legrand, trop occupé. Son succès allait être reconfirmé en 1972, quand Vladimir Cosma signe la musique du film « Le grand blond avec une chaussure noire ». Depuis, il a composé plus de trois cents partitions pour des films de long métrage et des séries télévisées. Sur l’ensemble de ses compositions, plusieurs sont devenues des tubes, tels « Reality » de « La Boom », ou encore « L’amour en héritage » de « Père Noël est une ordure ».

    A ses 80 ans, Vladimir Cosma s’est confié à notre collègue, Magdalena Tara, en avouant qu’il ne faut pas célébrer tous les âges : « Chaque fois que je ressens la chaleur humaine de mon pays natal, j’en suis très ému, même si c’est à l’occasion d’un âge que je n’aime pas forcément célébrer. Ce sont bien les années de jeunesse qu’on doit fêter, non pas les dernières années de vie, quand la célébration risque de devenir ridicule sauf s’il s’agit d’un âge particulier. Par exemple, mon père a vécu jusqu’à 102 ans et à partir de 90 ans, chaque année de plus était un record qu’il voulait marquer. Vous savez, on aurait dit qu’il s’était inscrit dans une course et qu’il était en train de remporter un trophée. Mais moi, je n’y suis pas pour l’instant. Pour moi, ce n’est qu’une nouvelle étape qui commence. »

    A l’occasion du même entretien, Magdalena Tara a demandé à Vladimir Cosma le cadeau qui lui ferait plaisir de recevoir pour son anniversaire : « Les cadeaux, ce n’est pas moi qui les choisis, mais le bon Dieu qui fait ses propres choix. Et Il m’a bien gâté, vue la quantité de cadeaux qu’Il m’a offert et pour lesquels je lui suis reconnaissant. Bien sûr que moi aussi, j’ai eu droit à des souffrances, à des maladies, à des difficultés, mais, à la fin, le résultat est positif et j’espère qu’il demeure ainsi. Je n’ai pas de souhait particulier. De temps en temps, j’aurais envie d’un verre de « bragă », cette boisson rafraîchissante acide-sucrée, à base de millet, maïs ou seigle. Ça me rappelle ma jeunesse. »

    Ces dernières années, les concerts symphoniques représentent une partie importante de l’activité de Vladimir Cosma. Il se produit sur des scènes du monde entier, de Genève à Budapest, de Saint-Pétersbourg à Moscou, en passant par Bucarest, Paris et ainsi de suite. Il s’est vu décorer de la Légion d’honneur, il est Commandeur des Arts et des Lettres et il détient l’ordre du Mérite culturel roumain. (Trad. Ioana Stancescu)

  • Clara Cernat

    Clara Cernat

    Clara Cernat respire la musique. Elle forme un couple avec le pianiste et compositeur français Thierry Huillet, à la vie comme à la scène. Ensemble, en cette période de confinement, ils se laissent inspirer par la musique roumaine et lancent des Rhapsodies dune grande sensibilité et dune grande virtuosité quils vous invitent à découvrir.







  • Vladimir Cosma, un Mozart du 7e art

    Vladimir Cosma, un Mozart du 7e art

    Quand on parle de Vladimir Cosma, il est difficile d’être bref. Ce violoniste, compositeur et chef d’orchestre, établi à Paris, est né le 13 avril 1940 à Bucarest, dans une famille de musiciens. Son père, Theodor Cosma, était pianiste et chef d’orchestre, sa mère, Carola, était elle aussi musicienne, son oncle, Edgar Cosma, était compositeur et chef d’orchestre. Une de ses grand-mères avait été pianiste et élève du célèbre Ferrucio Busoni. Un documentaire, récemment diffusé sur une chaîne de télévision française, présentait Vladimir Cosma en train de longer, sourire aux lèvres, la rue de la capitale roumaine où il avait passé son enfance et sa jeunesse. Il se souvenait non seulement des bêtises qu’il faisait à l’époque, secondé par des copains qui étudiaient eux aussi la musique, mais aussi des chansons qui retentissaient dans le quartier et des querelles qui éclataient entre des voisins d’un naturel un peu colérique.



    Après des premiers prix de violon et de composition au Conservatoire national de Bucarest, Vladimir Cosma arrive à Paris, en 1963, où il poursuit ses études au Conservatoire national supérieur de musique et travaille avec Nadia Boulanger. Qu’est-ce qui s’est passé, depuis ? Il suffit de jeter un coup d’œil à ses trophées, pour avoir la réponse: il a reçu deux « Césars de la meilleure musique de film » pour Diva (1982) et pour Le Bal (1984), deux « 7 d’or » de la meilleure musique télévisée, ainsi que divers prix et distinctions en France et à létranger. Il a également obtenu de nombreux Disques dor et de platine à travers le monde (France, Allemagne, Japon, Angleterre, Suisse, Belgique, Italie, Hollande, Scandinavie…). Il est chevalier dans l’Ordre national de la Légion d’honneur, commandeur des Arts et des Lettres et Grand Officier du Mérite culturel roumain.



    Les 26 et 27 janvier de cette année, l’Institut Culturel Roumain de Paris, en collaboration avec l’Ambassade roumaine à Paris et sous l’égide de la présidence roumaine du Conseil de l’UE, a organisé deux concerts avec la participation de l’illustre compositeur Vladimir Cosma. Doina Marian, directrice de l’Institut, nous en parle: “ C’est un événement que nous préparons depuis près d’un an, avec le concours de Vladimir Cosma et de sa société « Larghetto Music », avec laquelle nous avons conclu un partenariat. Le concert du 26 janvier a été important et symbolique, puisqu’il était dédié à la présidence roumaine du Conseil de l’UE. Il a duré trois heures, auxquelles s’est ajoutée une session d’autographes que Vladimir Cosma a accordés sur ses CDs. Le 27 janvier a été une journée tout aussi impressionnante. Le compositeur a tenu une « Rencontre-Master class » — chose inédite pour lui. Il a raconté des événements de sa vie liés à la création de la musique de certains films, dont il a joué quelques fragments, en guise d’illustration, avec le concours de l’orchestre.”



    Depuis 1968, Vladimir Cosma a composé plus de 300 partitions pour le cinéma ou la télévision. Il a écrit de la musique de jazz, des chansons pour des artistes tels Nana Mouskouri, Marie Laforêt ou Lara Fabian, ainsi que de la musique d’inspiration folklorique. Il a dédié des compositions à Gheorghe Zamfir. A présent, il collabore constamment avec un autre musicien roumain, Cezar Cazanoi — qui joue de la flûte, de la flûte de Pan, de la flûte champêtre et d’autres instruments de la même famille. Lors du concert du 26 janvier, Cezar Cazanoi est monté, lui aussi, sur scène, aux côtés d’autres musiciens très conus. Vladimir Cosma a été également attiré par la musique classique. Il a écrit un opéra, Marius et Fanny, sur un livret d’après l’œuvre de Marcel Pagnol, présenté pour la première fois à l’Opéra de Marseille, avec de grands noms à l’affiche : Angela Gheorghiu, Roberto Alagna et Jean-Philippe Lafont. Il y a ajouté la comédie musicale « Les aventures de Rabbi Jacob ». La première du spectacle a eu lieu au Palais des Congrès de Paris, en 2008.



    Retour aux échos des concerts-événements parisiens des 26 et 27 janvier 2019. Au micro, Doina Marian, directrice de l’Institut culturel roumain de Paris: Les arrangements musicaux ont été présentés sur la toile de fonds d’extraits des films français dont Vladimir Cosma a écrit la musique. Vladimir Cosma est un mythe. En France, des générations entières l’ont pris pour modèle. C’est impressionnant. Par une étrange et heureuse coïncidence, le second événement que nous avons organisé a eu lieu le 27 janvier, qui est la date de naissance de Mozart. Et Vladimir Cosma est, en fait, un Mozart du 7e art. ” ( Trad. : Dominique)

  • Clara Cernat

    Clara Cernat

    Clara Cernat est un être passionné. Elle aime les voyages, les gens, son mari, le compositeur et pianiste français Thierry Huillet. Mais la musique est sa raison de vivre et le violon – son point d’appui. Belle et brillante, Clara Cernat conquiert avec son talent les publics les plus exigeants, à travers le monde. Elle adore partager son art et sa passion des plus belles pièces musicales écrites pour violon et pour alto, à travers de concerts et de récitals, mais aussi par le biais d’interviews comme celle proposée dans cette édition de « Gens d’aujourd’hui ».

  • Georges Boulanger

    Georges Boulanger

    Célèbre en Europe, en Amérique du Nord et du Sud, le violoniste, compositeur et chef d’orchestre Georges Boulanger, de son vrai nom Gheorghe Pantazi, est né en Roumanie et il est connu ne serait-ce que pour sa chanson « Avant de mourir ». Composée par Georges Boulanger sous ce titre en 1926, elle est connue aussi plus tard, avec les paroles de Jimmy Kennedy, comme « My Prayer » – « Ma prière ». La liste des artistes qui l’ont chantée au fil du temps est longue et elle ne cesse de s’agrandir. Mentionnons, entre autres, Roy Orbison, Brenda Lee, The Platters, Tom Jones ou Adriano Celentano. En 1956, la version de The Platters de « My Prayer » a été, pendant 4 semaines, numéro 1 du classement Billboard Hot 100. Elle fait également partie de la bande originale de plusieurs films, dont October Sky (Ciel d’octobre – 1999), Ocean’s Twelve (2004) ou The Curious Case of Benjamín Button – L’Etrange histoire de Benjamin Button – 2008).

    Le musicologue Alex Vasiliu nous raconte les premiers pas de Georges Boulanger dans le monde de la musique: « Il est né le 18 avril 1893, à Tulcea, dans le sud-est de la Roumanie, dans une vieille famille de ménétriers. Son père s’appelait Vasile Pantazi, mais on l’avait surnommé Boulanger, car il ressemblait beaucoup au général français Georges Boulanger. Tous les membres de sa famille étaient instrumentistes. Ils n’avaient pas d’études musicales, mais ils jouaient très bien du violon, de la contrebasse ou de la guitare. Georges Boulanger apprit, lui, à jouer du violon. A 12 ans, il fut admis au Conservatoire de Bucarest. Quelques années plus tard, le célèbre pédagogue et violoniste allemand Leopold Auer l’a entendu jouer et, charmé par ses qualités artistiques, l’a accepté comme élève à Dresde et lui a offert une bourse. A la fin se des études avec Leopold Auer, son professeur allemand a été tellement satisfait de la façon de jouer de Georges Boulanger qu’il lui a fait cadeau d’un violon. »

    C’est toujours grâce à Leopold Auer que Georges Boulanger est embauché comme violoniste au café le plus connu de Saint Pétersbourg – le « Café Chantant » – fréquenté par l’aristocratie russe. En 1917, Georges Boulanger revient en Roumanie, où il travaille dans l’armée. En 1923-1924, il part pour Berlin, où il est très apprécié, notamment par les exilés russes, qui viennent l’écouter au Restaurant Fӧrster.

    Alex Vasiliu renoue le fil de l’histoire : « Il a eu un très grand succès partout en Europe. Il a beaucoup joué en Allemagne, où il failli tomber en disgrâce auprès des autorités nazies, qui le soupçonnaient d’être d’origine juive. Il a pourtant réussi à prouver, documents à l’appui, que sa famille était chrétienne-orthodoxe de Roumanie. Ensuite, il quitte l’Allemagne et s’établit au Brésil, où il connaît le succès jouant à l’Hôtel Copacabana Palace de Rio de Janeiro. Il participe à de nombreuses émissions de radio – grâce auxquelles il se fait connaître sur le continent sud-américain – et réalise de nombreux enregistrements. »

    Le violoniste et compositeur Georges Boulanger passe les dernières années de sa vie en Argentine. Son tremplin y fut la Radio Belgrano.

    Le musicologue Alex Vasiliu poursuit: « C’est par la radio qu’il a touché les cœurs d’un grand nombre de gens non seulement en Europe, mais aussi aux Etats-Unis. Ses enregistrements sont conservés et, de même que, de nos jours, nous écoutons encore Grigoraş Dinicu, le Roumain qui a joui d’un si grand succès à l’étranger, nous devrions écouter Georges Boulanger, qui, plus que Grigoraş Dinicu, a réussi à faire connaître dans le monde la musique des ménétriers de Roumanie. Sa musique, on pourrait l’appeler « légère » ou de variétés. Agréable à écouter, elle n’est pas simple et facile. Elle ne ressemble pas du tout à la musique diffusée actuellement par tant de radios et de télévisions commerciales. C’est une musique nostalgique, lyrique, qui s’adresse aux âmes sensibles, mais qu’il faut aussi savoir comprendre et apprécier. C’est d’ailleurs là la grande qualité de la musique de Georges Boulanger. Une musique européenne qui prend sa source dans les traditions musicales tziganes. »

    Le violoniste et compositeur d’origine roumaine Georges Boulanger s’est éteint en 1958 à Olivos, en Argentine. Ses chansons, elles, vivent encore. (Trad. : Dominique)

  • Sherban Lupu

    Sherban Lupu

    Professeur émérite de l’Université d’Illinois, Docteur Honoris Causa de l’Académie de Musique de Cluj et de l’Université de Iaşi, Sherban Lupu est un violoniste roumain très connu né en 1952 à Braşov et qui, bien qu’établi depuis longtemps à l’étranger, estime que sa musique prend sa source dans son pays natal – comme il l’affirmait en 2001 dans une interview.

    Le musicien, qui se voyait décerner en 2004 l’Ordre national «Service fidèle», s’est fait connaître des mélomanes notamment pour l’intégrale des œuvres pour violon d’Ysaye, Bartók, Enescu, Ernst et Wieniawski.

    Dans une interview pour Roumanie Musique, Sherban Lupu racontait ses premiers pas dans le monde de la musique, guidés par George Manoliu: « En effet, je l’ai rencontré à l’âge de 12 ans et il a été mon professeur jusqu’au moment où j’ai quitté la Roumanie. Il m’a appris beaucoup de choses sur l’école française, dont il était le produit. Et c’est surtout lui qui a mis dans mes doigts et dans mon archet, pour ainsi dire, la musique de George Enescu. La précision avec laquelle il était capable d’expliquer les couleurs et la nature des sons du grand compositeur ne s’est jamais effacée de ma mémoire. Ses éclaircissements m’ont aidé non seulement à étudier et à jouer à mon tour cette musique, mais aussi à l’expliquer à mes étudiants. »

    Alors qu’il était encore étudiant au Conservatoire de Bucarest, il a donné de nombreux concerts en Roumanie et en Europe de l’Est. A la fin de ses études de Bucarest, il est parti pour Londres, afin de se perfectionner avec Yfrah Neaman à la Guildhall School of Music. Là, il a assisté à des classes de maître données par des violonistes célèbres : Yehudi Menuhin, Henryk Szering, Nathan Milstein, Norbert Brainin et Sandor Vegh.

    Sherban Lupu est monté comme soliste sur toutes les grandes scènes d’Europe et des Etats Unis : The Kennedy Center, Gstaad Festival, Aldeburgh Festival, Royal Festival Hall, Queen Elisabeth Hall, Wigmore Hall, St. John’s Smith Square, Berlin Philharmonic Hall et Carnegie Hall. Il a également joué des œuvres de Brahms et de Tchaïkovski en direct, à la BBC, en compagnie de l’Orchestre symphonique de la BBC.

    Dans la même interview, Şerban Lupu parlait de la force vivifiante de la musique des ménétriers : « Il ne faut pas oublier qu’un grand progrès de la technique du violon s’est produit au milieu du 19e siècle en Europe de l’Est – en Hongrie, Pologne, Russie, Roumanie et République tchèque. Ce progrès était dû à l’existence dans ces pays – à l’époque et de nos jours encore – d’un art des ménétriers qui avait une tradition extraordinaire. Presque tous les grands violonistes imitaient les ménétriers, qui étaient des virtuoses. A mon avis, c’est ce qui a déterminé l’apparition fulgurante d’un nouveau bond en avant après Paganini. En outre, les compositeurs de cette partie de l’Europe se sont beaucoup inspirés du folklore – et je parle surtout des contemporains et même des prédécesseurs de George Enescu. Je suis persuadé que ce sont ces ménétriers qui ont été la locomotive, le ferment qui a déterminé ce nouveau progrès. »

    Très apprécié comme professeur, Sherban Lupu donne des classes de maître au Royaume Uni, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Italie, en Pologne, en République tchèque et en Roumanie, encourageant les jeunes violonistes à introduire aussi dans leur répertoire des pièces de compositeurs contemporains, pour ne pas donner la sensation que la musique d’aujourd’hui n’existe même pas – comme il l’affirmait dans une interview. (Trad . Dominique)

  • Sergiu Comissiona

    Sergiu Comissiona

    Au fil du temps, la Roumanie a donné au monde musical d’excellents chefs d’orchestre. Au moins deux personnalités d’envergure internationale sont à mentionner actuellement : Sergiu Comissiona et Lawrence Foster. Commençons par Sergiu Comissiona, avec sa carrière extraordinaire qui l’a porté d’Haïfa, en Israël, à Göteborg, en Suède et depuis Baltimore et New York, aux Etats-Unis, à Vancouver, au Canada.

    Sergiu Comissiona est né en 1928, à Bucarest, dans une famille juive. Il a étudié la direction d’orchestre notamment avec Constantin Silvestri et il a débuté de manière inattendue à 17 ans seulement, à l’Opéra d’Etat de Bucarest, dans « Faust » de Charles Gounod. En 1955 il allait devenir le chef d’orchestre principal de l’Opéra roumain. En 1959, en raison de la politique menée par le régime communiste, il finit par émigrer avec sa famille en Israël, où il est nommé directeur musical de l’Orchestre symphonique d’Haïfa.

    Le musicologue Valentina Sandu Dediu explique : «Ce qui est très intéressant, c’est que, bien qu’ayant quitté la Roumanie en 1959, Sergiu Comissiona, est resté très attaché à ce pays, il a continué à diriger des oeuvres de compositeurs roumains : George Enescu, avant tout, bien sûr, mais aussi Anatol Vieru, Aurel Stroe et bien d’autres encore. Depuis 1990, après la chute du communisme, il est revenu assez souvent en Roumanie, notamment dans le cadre du Festival international de musique « George Enescu ». Il a même été membre du jury du Concours Enescu, organisé en marge du Festival, il parlait impeccablement le roumain. Il avait donc gardé les liens avec le pays où il était né et avec sa musique. »

    Haïfa a été le premier repère de sa carrière internationale, mais d’autres allaient s’y ajouter très vite. Valentina Sandu Dediu : «Cela ne s’est pas nécessairement fait par étapes. Il commence à voyager au Royaume Uni, pour des spectacles à Convent Garden. Il dirige également l’Orchestre philharmonique de Londres. Au début des années ’60, il se rend également pour des concerts aux Etats Unis et en 1966 il devenait le directeur musical de l’orchestre de Göteborg. C’est en 1969 qu’a commencé sa très longue collaboration avec l’Orchestre symphonique de Baltimore et il a été, parallèlement, le directeur musical de l’Orchestre de Houston. Ce qui est intéressant, c’est que là, il a succédé à Lawrence Foster, lui aussi d’origine roumaine. Il a travaillé avec l’Orchestre de Vancouver. Dans les années ’80 il a été le directeur musical de l’Opéra de New York. On le retrouve aussi à Hilversum, aux Pays-Bas, à Helsinki, en Finlande, à Madrid, en Espagne, pour ne mentionner que les villes où il a été chef d’orchestre principal ou a eu une fonction stable pendant de longues années. Autrement, il est monté sur toutes les grandes scènes du monde. »

    Il est difficile de résumer une si longue et riche carrière en très peu de mots. Quelles seraient les particularités du chef d’orchestre Sergiu Comissiona, selon le musicologue Valentina Sandu Dediu ?

    Valentina Sandu Dediu : « Il avait une approche du discours musical plutôt intuitive et instinctive qu’intellectuelle. Sa générosité émotionnelle se dévoilait dans les grandes œuvres du romantisme. Il était très attentif aux nuances et la sonorité de l’orchestre était transparente et légère. C’est ce qu’affirmait un critique de Baltimore qui l’a vu diriger là-bas pendant des dizaines d’années. Le même critique affirmait que les gestes de Sergiu Comissiona et toute sa personne était de vieille mode, dans le bon sens du terme, nous conduisant vers l’époque d’or des monstres sacrés de la baguette.» ( Trad. : Dominique)