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  • La révolution de 1989 et la renaissance de la démocratie roumaine

    La révolution de 1989 et la renaissance de la démocratie roumaine

    La révolution du mois de décembre 1989 restera sans doute le
    moment le plus marquant de la seconde moitié du XXe siècle roumain. Inscrite
    dans le mouvement plus ample du délitement des régimes communistes d’Europe
    centrale et orientale, la révolte, partie de Timisoara, gagnera rapidement
    Bucarest, avant d’embraser tout le pays. Les énergies sociales libérées à cette
    époque transformeront radicalement la Roumanie et l’Europe dans son ensemble.






    Le régime
    communiste, instauré dans toute l’Europe de l’Est à la fin de la 2e
    Guerre mondiale à la faveur de l’occupation de la région par l’Armée rouge, a fait
    main basse sur la Roumanie en à peu près 3 ans. D’ailleurs, avant la fin de
    l’année 1948, l’Albanie, la Bulgarie, la Tchécoslovaquie, la Yougoslavie, la
    Pologne et la Roumanie se trouvaient embarquées sur le même bateau, dirigées
    par des gouvernements communistes, sous contrôle soviétique. Les historiens
    s’accordent pour conclure que la seconde Guerre mondiale a représenté une
    chance inespérée pour l’URSS, devenue alors une superpuissance, et cela en
    dépit des politiques économiques désastreuses qu’elle avait menées à partir de
    1918. En l’absence de cette guerre, il est probable que l’URSS aurait été
    forcée de réformer son système dès la mort de Staline, en 1953. Mais l’histoire
    contrefactuelle demeure une action risquée, sujette à caution. Ce qu’il en reste
    c’est le souvenir d’un régime totalitaire et répressif, qui a jeté aux
    oubliettes les droits et les libertés fondamentales. Néanmoins, pour beaucoup,
    le régime du totalitarisme communiste n’était que la suite logique des régimes
    totalitaires fascistes qui avaient dominé l’Europe durant la guerre. Ainsi, la
    fin de la conflagration n’a pas pour autant signifié la fin de la tyrannie et
    de l’oppression pour près de la moitié du continent.






    Pour ce qui est de la Roumanie, le régime de Nicolae
    Ceaușescu, hissé à la tête de l’Etat en 1965, avait mené à bout les capacités
    de résistance des 22 millions de Roumains que le pays comptait en 1989. A la
    crise de régime qui caractérisait le système communiste finissant s’étaient rajoutées
    les lubies d’un dictateur pas comme les autres. En effet, Nicolae Ceausescu
    s’étaient fait fort de rembourser la dette qu’il avait contractée dans les
    années 70 pour industrialiser le pays. Entre temps, deux crises pétrolières
    étaient passées par là, et la dégradation du niveau de vie des Roumains s’était
    accélérée à la fin des années 80. Et c’est bien dans ce climat délétère
    qu’allaient exploser la révolte populaire contre le régime de Nicolae Ceausescu
    en particulier, contre le régime communiste au sens large. Dès le 16 décembre
    1989 l’on voit des habitants de Timișoara descendre dans la rue, pour
    manifester leur solidarité à M. Tökes, un pasteur réformé appartenant à la
    minorité hongroise de Transylvanie, que le régime s’entêtait de faire muter de
    son poste et de déloger de sa ville. Progressivement, les manifestants sont
    devenus plus nombreux, et leurs revendications ont commencé à ratisser large.
    Face à cette situation, les forces de répression n’ont rien trouvé de mieux que
    d’ouvrir le feu sur la foule, faisant plusieurs centaines de victimes.
    Ensanglantée, Timisoara est coupée du reste du pays, mais les manifestants
    occupent la ville.






    Le 21 décembre, c’est à Bucarest que les choses se gâtent
    pour de bon pour le régime. Nicolae Ceaușescu organise alors une grande
    assemblée populaire devant le siège du Comité central du parti communiste,
    initiative particulièrement mal inspirée, qui se voulait une démonstration de
    force du régime. Le rassemblement tourne court, lorsque les manifestants
    enrégimentés, venus acclamer le leader suprême, commencent à le conspuer. La foule
    rompt les rangs et se disperse en catastrophe. Certains s’organisent cependant
    et dressent des barricades au centre de la capitale. A l’instar de Timisoara
    quelques jours auparavant, les troupes interviennent en force, et la violence
    de la répression arrive à son apogée dans la nuit du 21 au 22 décembre. Le
    matin du 22 décembre, les ouvriers des grandes plateformes industrielles de la
    capitale s’organisent et répliquent, en donnant l’assaut au siège du Comité
    central du parti communiste. L’armée déployée en nombre dans le centre-ville et
    autour du Comité central fraternise avec la foule, pendant que Nicolae
    Ceausescu, son épouse, elle aussi cacique du régime, et quelques proches se
    sauvent en catastrophe, à bord d’un hélicoptère qui prend son envol depuis le
    toit du bâtiment. En quelques heures, le dictateur déchu sera capturé, jugé
    ensuite, avec sa femme, à la faveur d’un simulacre de procès, expédié à la sauvette.
    Ils seront, tous les deux, exécutés le 25 décembre 1989, dans une base
    militaire de la ville de Targoviste, une ancienne capitale de la Valachie
    historique. La révolution l’emporte, au prix de près de 1.200 vies.






    Petru Creția, philosophe, essayiste, traducteur
    et éditeur de Platon en langue roumaine, rédigera un manifeste émouvant, qui
    sera diffusé sur les ondes de Radio Free Europe la veille de la chute du
    dernier dictateur communiste de Roumanie. Les lignes écrites à l’occasion par
    Petru Creția illustrent à merveille le summum de la tragédie que le XXe siècle
    était parvenu à atteindre. La voix émue du philosophe, conservée dans les
    archives du Centre d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine, est à la
    fois grave et prémonitoire.






    Petru Creția : « L’on
    approche la fin du siècle et, avec lui, la fin inévitable de notre malheur
    collectif. Ce malheur qui s’était drapé de tant de noms menteurs, qu’il suffit
    de lire à rebours pour approcher la vérité. Les longs, les trop longs règnes
    sanglants, qui ont jeté un doute jusqu’au cœur de l’humanité enfouie aux tréfonds
    de l’homme, nous ont profondément meurtri. La crise de l’humanité, incarnée par
    le nazisme, le communisme, le maoïsme, touche aujourd’hui à sa fin, en dépit de
    ses derniers soubresauts. Et les héritiers de ces monstres, leurs épigones,
    qu’ils soient asiatiques, africains, sud-américains, voire européens, ne
    sauront renverser la vapeur. Ils se ressemblent à s’y méprendre, alors qu’ils
    ne sont que des caricatures pitoyables, des pantins misérables, qui grèvent le
    destin des nations. Mais aujourd’hui, leur heure a sonné. Ces autocrates
    pénibles, ces dieux imaginés sont tombés en désuétude. Leurs noms seront à
    jamais damnés, liés qu’ils sont aux innombrables hécatombes, aux morts, aux
    torturés, aux affamés, que leur règne de malheur est parvenu à produire. »







    L’année 1989 sonna le glas du siècle
    finissant, un siècle noir, à plus forte raison qu’il s’était voulu brillant,
    comme nul autre auparavant. Le mal lui a cependant survécu. Et si le passé ne
    saura nous prémunir des malheurs à venir, l’on espère néanmoins, qu’à l’instar
    du vaccin, il aura la force de nous immuniser de ces pandémies idéologiques
    mortifères. (Trad. Ionut
    Jugureanu)

  • 32 ans depuis la chute de Ceaușescu

    32 ans depuis la chute de Ceaușescu

    La révolte anticommuniste roumaine
    a éclaté le 16 décembre 1989 à Timisoara (ouest) pour se répandre sur
    l’ensemble du pays dans les jours qui ont suivi. Le tout a culminé le 22
    décembre par la fuite du dictateur Nicolae Ceausescu et de son épouse, Elena, en
    hélicoptère, depuis le toit du siège du Comité central du Parti Communiste de
    l’époque, pris d’assaut par les protestataires. Le couple dictatorial a été
    vite attrapé et exécuté le jour de Noël même, après un très court procès. Plus
    d’un millier de personnes ont perdu la vie fin décembre ’89 et plus de 3000 ont
    été blessés.






    32 ans plus tard, la célèbre
    phrase « Qui nous a tiré dessus les 21 et 22 ? » reste sans réponse. L’enquête
    des procureurs n’a pas été finalisée à ce jour les coupables pour ces pertes
    humaines n’ont pas encore été identifiés. Pour des raisons inconnues, le nombre
    des personnes blessées par balle n’avait pas cessé de croître après le 22
    décembre, lorsque le couple dictatorial n’était plus au pouvoir. On n’a pas
    identifié toutes les forces militaires, ni civiles ayant participé à la répression
    des manifestants, et on n’a pas récupéré non plus la munition utilisée ces jours-là.
    Bien que le Service de renseignements intérieurs ait rédigé un ample document portant
    sur les événements de décembre ’89, celui-ci ne figure pas dans le dossier de l’enquête
    des procureurs. Qui plus est, les procureurs n’ont pas demandé des documents
    extrêmement importants se trouvant dans les archives du ministère de la
    Défense. D’ailleurs, la Roumanie a été condamnée à plusieurs reprises à la Cour
    européenne des droits de l’homme pour avoir tergiversé le dossier de la
    Révolution.






    C’est à peine en l’an 2000 que
    les juges ont émis les premières condamnations définitives. A ce moment-là, les
    généraux Mihai Chițac et Victor Stănculescu ont écopé chacun d’une peine de 15
    ans de prison ferme, mais ils ont été libérés après le recours. Ils ont été envoyés
    en prison de nouveau en 2008. Mihai Chițac est décédé en 2010 à domicile, alors
    que Victor Stănculescu a été libéré en 2014 et s’est éteint deux ans plus tard
    dans un hospice de luxe.






    Le mois
    dernier, la Haute cour de cassation et de Justice de Roumanie a décidé de renvoyer
    au Parquet militaire le dossier de la révolution dans lequel l’ancien président
    Ion Iliescu, l’ancien vice premier ministre Gelu Voican Voiculescu et
    le général Iosif Rus, ancien chef de l’Aviation militaire, sont accusés de crimes
    contre l’humanité.






    Selon le
    réquisitoire, sur toile de fond de la détérioration des relations entre la
    Roumanie et l’URSS, après le moment « Prague 1968 » et vu le profond
    mécontentement général au sein de la société, un groupe dissident s’est formé
    et développé, ayant pour objectif le renversement du dictateur de l’époque,
    Nicolae Ceausescu. Toutefois, son intention était de garder la Roumanie dans la
    sphère d’influence de l’URSS.






    Les
    procureurs militaires affirment encore que le groupe formé autour d’Ion Iliescu
    a agi de manière habile et efficace, réussissant à s’emparer du pouvoir
    politique et militaire en décembre 1989. Toute une psychose portant sur l’existence
    de soi-disant « terroristes » a été créée et amplifiée ces jours-là. L’ensemble
    de la force militaire de la Roumanie a été mise à la disposition du Conseil du
    Front du Salut National, organe provisoire du pouvoir d’Etat, devenu par la
    suite un parti politique dirigé par Ion Iliescu, ancien membre des élites
    communistes. En 1990, Ion Iliescu était élu président de la Roumanie. Il a détenu
    par la suite deux autres mandats, d’abord entre 1992 et 1996, puis entre 2000
    et 2004. Au fil du temps, le Front du Salut National, constitué durant la
    révolution, est devenu Parti de la Démocratie Sociale de Roumanie (PDSR), puis
    il a changé de nom pour devenir le Parti Social-Démocrate. Actuellement, le PSD
    fait partie de la coalition gouvernementale en Roumanie. (Trad. Valentina
    Beleavski)

  • 17.12.2021

    17.12.2021

    Révolution – Aujourd’hui c’est une journée de deuil en Roumanie, à la mémoire des héros martyrs de la Révolution roumaine. Il s’agit plus précisément de ceux qui ont risqué leur vie et payé le prix suprême il y à 32 ans à Timisoara, dans l’ouest du pays, où a éclaté la révolution anticommuniste roumaine. Les événements consacrés à la Révolution de 1989 se poursuivent par des messes, des cérémonies de dépôt de couronnes de fleurs et par des expositions. Ce fut le 17 décembre 1989 que les forces de répression du régime communiste ont tiré des munitions de guerre contre les habitants de la ville de Timisoara. Une soixantaine de personnes ont été tuées durant la nuit alors que plusieurs centaines ont été blessées. Le 17 décembre 1989 est la journée la plus sombre de l’histoire contemporaine de la ville de Timisoara.

    Gouvernement – Le premier ministre roumain Nicolae Ciuca a présenté aujourd’hui au début de la réunion gouvernementale, les principales mesures économiques que l’exécutif de Bucarest prépare pour l’année prochaine. Parmi elles, un déficit budgétaire de 6,2%, un taux de la TVA plus réduit dans le cas des factures de chauffage de certains consommateurs, mais aussi un budget important pour les investissements et l’appui du milieu des affaires. Après la majoration des pensions de retraite et des allocations familiales mercredi, le gouvernement souhaite adopter aujourd’hui des décrets d’urgence censés aider à l’élaboration du budget de l’année prochaine et soutenir les majorations opérées. Un décret d’urgence devra geler la majorité des salaires dans le secteur public et des indemnités des cadres de direction de l’Etat. Le gouvernement souhaite aussi de réduire à 5% la TVA appliquée à l’énergie thermique pendant les mois d’hiver afin de combattre la flambée des prix. Un autre décret d’urgence vise les mécanismes d’utilisation des fonds européens, autres que ceux du Plan national de relance et de résilience. Il s’agit d’une cinquantaine de milliards d’euros du cadre financier 2021 – 2027.

    Bruxelles
    Réunis à Bruxelles dans le cadre d’un sommet d’hiver, les leaders des Etats
    de l’Union ont soutenu la stimulation de la vaccination contre la Covid 19 sur
    la toile de fond des inquiétudes provoquées par le nouveau variant Omicron du
    coronavirus. Les participants à la réunion, dont le président roumain Klaus
    Iohannis, a visé aussi la croissance des prix de l’énergie, mais aussi les
    tensions entre la Russie et l’Ukraine. Selon l’administration résidentielle de
    Bucarest, la réunion du Conseil européen a été suivie par un Sommet de l’UE en
    format élargi. A cette occasion, les leaders européens ont adopté une
    déclaration réitérant l’engagement de l’UE pour assurer une réponse forte,
    rapide et coordonnée pour redresser l’économie après la pandémie.

    Coronavirus en Roumanie – La Roumanie a rapporté vendredi 743 nouveaux cas d’infection au coronavirus. 60 décès des suites de l’infection ont été rapportés, dont 20 antérieurs à cette période. 600 malades sont actuellement en réanimation. Par ailleurs, l’intérêt pour la vaccination est à la baisse en Roumanie, a remarqué aussi le coordinateur de la campagne de vaccination, Valeriu Gheorghita. Il a affirmé que d’une semaine à l’autre les autorités constatent une baisse de 15 à 25% du nombre de personnes qui choisissent de se faire vacciner à la première dose. Le médecin Valeriu Gheorghita a également annoncé qu’à partir du mois prochain la Roumanie pourrait recevoir des doses de vaccin Pfizer destinées aux enfants et l’immunisation du groupe d’âge des 5 à 11 ans pourrait commencer durant la seconde moitié du mois de janvier.

    Emplois – La majorité des salariés roumains, soit 61%, espère que 2022 serait une année meilleure pour ce qui est de leur emploi, alors que 69% affirme que 2021 a été plus difficile que la première année pandémique du point de vue des défis personnels et professionnels, selon un sondage réalisé par une plateforme de recrutement enligne. Selon, Bestjobs, six Roumains sur 10 envisagent de changer d’emploi pour obtenir un salaire plus grand ou s’attendent à être promus dans le cadre de leur emploi actuel. Généralement 26% des employés roumains affirment que 2021 a été une année meilleure, mais les améliorations ont été visible notamment sur le plan personnel (25%) et sur le lieu de travail seulement 17% des Roumains ont constaté des progrès. Seuls 15% des Roumains affirment avoir progressé sur les deux plans par rapport à 2020. Le sondage Bestjobs a été réalisé du 20 novembre au 10 décembre, sur un échantillon de 1 041utilisateurs. Bestjobs est une des plus importantes plateformes de recrutement de Roumanie.

    Frégate – La frégate française multi missions Auvergne, de classe FREMM, se trouve dans le port roumain de Constanta, dans le sud-est du pays, où elle restera jusqu’à lundi. Le programme de cette escale prévoit des exercices de plongée pour les scaphandres militaires roumains et français. La frégate est munie d’équipements de dernière génération pour mener des opérations de lutte anti-sous-marine, antiaérienne est antinavire. Le bâtiment de guerre peut transporter des missiles et frapper des points situés à une certaine distance de la côte. Après le départ de l’Auvergne du port de Constanta, le 20 décembre, des exercices communs roumano-français sont prévus en mer Noire.

    Météo
    Temps assez morose en Roumanie, notamment sur le relief, où les
    précipitations sont au rendez-vous, avec des chutes de neige aussi. Ciel
    couvert, avec peu de précipitations sur le reste du territoire. Les maxima de
    la journée vont de 0 à 9 degrés avec pas plus de 5 degrés aujourd’hui à
    Bucarest.

  • Il y a 32 ans la révolution éclatait à Timisoara

    Il y a 32 ans la révolution éclatait à Timisoara

    32 années nous séparent de la Révolution anticommuniste roumaine de décembre 1989. Un moment de référence pour la Roumanie. Ce fut la révolte la plus ensanglantée de l’ensemble de l’ancien bloc communiste et les coupables des crimes commis ces jours-là n’ont pas été identifiés à ce jour. Le procès de la révolution reste un des plus grands retards de la justice roumaine. C’est à dans l’ouest du pays que l’étincelle de la révolution s’allumait le 16 décembre 89, Timisoara devenant la première ville roumaine libérée du communisme.

    Plusieurs événements commémoratifs y ont été organisés ces jours-ci, à la mémoire des personnes qui ont perdu la vie au nom de la liberté. Y a participé entre autres l’ancien ambassadeur des Etats-Unis à Bucarest, Adrian Zuckerman, qui a fait part de sa gratitude pour le sacrifice des héros et de son respect pour les valeurs de la démocratie et de la liberté. Toujours pour marquer les 32 ans écoulés depuis le début de la révolution anticommuniste, le premier ministre Nicolae Ciucă a transmis un message invitant à la solidarité.

    Et pour cause. Timisoara a payé un prix cher pour sa liberté : la vie des gens descendus dans les rues pour scander « Liberté ! » et « A bas Ceausescu ! » et sur lesquels les forces de l’ordre ont tiré dessus. Les premières manifestations contre le régime communiste ont eu lieu donc à Timisoara, le 16 décembre 89, puis partout dans le pays. Le 21 décembre Bucarest était dans la rue aussi et les événements ont culminé le 22 décembre par la fuite du dictateur Nicolae Ceausescu et de son épouse, Elena. Ils ont été vite attrapés et exécutés le jour de Noël même, après un court procès. Un millier de Roumains ont perdu la vie dans la Révolution anticommuniste de décembre 89 et au moins 3000 ont été blessés.

    La Roumanie est d’ailleurs le seul pays de l’ancien bloc communiste où le changement de régime s’est fait par la violence et dont les dictateurs ont été fusillés. 32 ans plus tard, l’enquête des procureurs n’est toujours pas terminée et les coupables pour les tirs sur les manifestants n’ont pas encore été identifiés.

    Le mois dernier, la Haute cour de cassation et de justice de Roumanie a décidé de renvoyer au Parquet militaire le dossier de la Révolution, dans lequel l’ancien président Ion Iliescu, l’ancien vice-premier ministre Gelu Voican Voiculescu et le général Iosif Rus, ancien chef de l’Aviation militaire, sont accusés de crimes contre l’Humanité. Selon le réquisitoire, sur toile de fond de la détérioration des relations entre la Roumanie et l’URSS, après le moment « Prague 1968 » et vu le profond mécontentement général au sein de la société, un groupe dissident s’est formé et développé, ayant pour objectif le renversement du dictateur de l’époque, Nicolae Ceausescu. Toutefois, son intention était de garder la Roumanie dans la sphère d’influence de l’URSS.

    Les procureurs militaires affirment encore que le groupe formé autour d’Ion Iliescu a agi de manière habile et efficace, réussissant à s’emparer du pouvoir politique et militaire en décembre 1989. Ainsi, l’ensemble de la force militaire de la Roumanie était-elle mise à la disposition du Conseil du Front du Salut National, organe provisoire du pouvoir d’Etat, devenu par la suite un parti politique dirigé par Ion Iliescu, ancien membre des élites communistes. En 1990, Ion Iliescu était élu président de la Roumanie. Il a détenu par la suite deux autres mandats, d’abord entre 1992 et 1996, puis entre 2000 et 2004. Au fil du temps, le Front du Salut National, constitué durant la révolution, est devenu Parti de la Démocratie Sociale de Roumanie (PDSR), puis il a changé de nom pour devenir Parti Social-Démocrate. Actuellement, le PSD fait partie de la coalition gouvernementale en Roumanie. (Trad. Valentina Beleavski)

  • 15.11.2021 (mise à jour)

    15.11.2021 (mise à jour)

    Covid – Le dernier bilan de l’épidémie de coronavirus, annoncé lundi par les
    autorités roumaines, indique une diminution du nombre de personnes atteintes de
    Covid-19 – plus de 2 100 cas. 195
    décès ont également été rapportés, dont 16 antérieurs à la période de référence.
    Toutefois, plus de 15.000 personnes sont hospitalisées des suites d’une
    contamination au coronavirus, dont 1720 dans des unités de soins intensifs. À
    Bucarest, le taux d’incidence est à la baisse par rapport aux jours précédents
    et se chiffre à moins de 6 pour mille habitants en l’espace de 14 jours.
    D’autre part, après le pic du 27 octobre dernier, lorsque plus de 110 000
    personnes ont reçu la première dose ou la dose unique, le rythme de vaccination
    n’a cessé de baisser. Jusqu’à présent,
    6,8 millions de personnes sont complètement immunisées.


























    Réunion – Le chef de la diplomatie roumaine, Bogdan Aurescu, a participé
    lundi, à Bruxelles, à la réunion des ministres des Affaires étrangères des
    États membres de l’Union européenne. Les pourparlers ont porté notamment sur
    les Balkans de l’Ouest et la région du Sahel, tout comme sur la situation en
    Biélorussie, à Chypre, en Ethiopie, au Soudan ou encore sur les relations avec
    les pays de l’Amérique latine. En ce qui concerne la région des Balkans
    occidentaux, Bogdan Aurescu a mis en lumière la nécessité d’une approche
    stratégique de la part de l’UE dans l’actuel contexte régional. Et lui de
    réitérer le fort appui accordé à l’ouverture cette année, des négociations pour
    l’adhésion européenne de la Macédoine du Nord et de l’Albanie. En ce qui
    concerne la situation à Minsk, le chef de la diplomatie à Bucarest a exprimé la
    solidarité de la Roumanie avec la Pologne, la Lituanie et la Lettonie, États
    confrontés à l’augmentation du nombre de migrants à la frontière avec la
    Biélorussie. Et lui de soutenir l’adoption le plus vite possible de sanctions
    supplémentaires contre le régime de Minsk. Lors d’un petit déjeuner de travail
    informel avec le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba, le
    ministre roumain a réitéré le soutien de Bucarest à l’intégrité territoriale de
    son voisin.




















    Révolte – La Roumanie a marqué lundi le 34e anniversaire de la révolte
    anticommuniste des travailleurs de l’entreprise de camions « Steagul Roşu » de Brasov, considérée comme la
    première grande manifestation contre le régime dirigé par Nicolae Ceauşescu. Les
    Sénateurs ont observé un moment de silence à la mémoire des victimes de
    l’époque. Dans la nuit du 14 au 15 novembre 1987, les gens sont descendus dans
    les rues, mécontents du niveau de vie, et ont marché jusqu’au siège du Comité
    départemental de l’ancien Parti communiste roumain. En cours de route, ils ont
    été rejoints par d’autres habitants de la ville, qui ont scandé, pour la
    première fois en Roumanie, « A bas la dictature ! » et « A bas
    Ceauşescu! » Le régime de Ceauşescu a été évincé à la suite de la
    révolution anticommuniste de décembre 1989, qui a commencé à Timişoara (ouest).

    Holocauste – Le plénum du Sénat roumain a adopté lundi en qualité de forum
    décisionnel un projet de loi sur l’introduction dans le programme scolaire à l’intention
    des lycéens, de l’apprentissage de l’Histoire des Juifs et de l’Holocauste. Par
    ailleurs, la Roumanie mettra en place son premier Musée national consacré à l’Histoire
    juive et à l’Holocauste. L’initiateur du projet, le député Silviu Vexler, a
    affirmé que ce projet bénéficiera du soutien de l’Institut Elie Wiesel.



    Météo – En
    Roumanie, les météorologues prévoient mardi, du beau temps partout dans le
    pays, à l’exception du sud et du sud-est où des pluies éparses sont attendues.
    Les températures iront mardi du 4 à 13 degrés. 9 degrés à midi, à Bucarest.















  • Hommage au chef bien-aimé

    Hommage au chef bien-aimé

    Ce besoin est éprouvé par certaines personnalités assoiffées de pouvoir et de ses apparences trompeuses. Il n’en est pas moins que ce culte de la personnalité fut porté au sommet de l’ignominie par les régimes fascistes et communistes. La période du communisme roumain, surtout la partie comprise entre les années 1965 et 1989, ne fit pas exception. Le président Nicolae Ceausescu fut, en effet, l’objet d’un culte outrancier, qui semblait violer les dernières frontières du bon sens. Ce n’était au fond que l’expression de l’indicible violence du régime. Les louanges excessives s’étendaient à longueur des pages de journaux, s’étalaient à travers les spectacles pharaoniques et les défilés monstrueux montés dans les stades ou qui arpentaient les grands boulevards lors de grandes messes du régime, et n’arrêtaient pas d’infester les émissions de radio ou de télévisions. Le culte de la personnalité du leader communiste s’exprimait encore à travers les cadeaux que toutes les organisations politiques, quel que fût leur niveau de pouvoir, les instituts culturels ou scientifiques, se devaient d’offrir en hommage au pharaon contemporain. Au fil des années, ces milliers de cadeaux reçus par le couple présidentiel d’alors se sont amassés en tas, formant des collections inédites, d’une variété et d’une richesse époustouflante. Les tableaux et les sculptures qui rendaient hommage à la génialité du fameux couple, qui dirigeait alors le destin de la Roumanie, forment déjà une collection impressionnante. Il était inconcevable qu’un artiste plasticien de l’époque, surtout s’il bénéficiait d’une certaine notoriété, ne rende hommage, à travers ses œuvres, au couple honni.



    Aussi, le Musée national d’art contemporain a récemment publié, seulement en petit format, un album de 440 pages, où Cornel Ilie a repris une partie des œuvres d’art offerts, souvent par les auteurs mêmes, au couple dictatorial roumain. Intitulé, à bon escient, « Un portrait pour nos Camarades », un clin d’œil au sobriquet dont Monsieur tout-le-monde avait affublé Nicolae Ceauşescu, surnommé en catimini « le Camarade », l’album actuel fait suite à la parution, en 2018, de l’album intitulé « Un portrait pour notre Camarade », du même Cornel Ilie. Ce premier album avait repris des œuvres offerts en cadeau uniquement au camarade Ceauşescu, et entreposées depuis dans les collections du Musée national d’histoire de la Roumanie. Călina Bârzu, muséographe au Musée national d’art contemporain, et commissaire de l’exposition rassemblant ces objets d’art d’un genre pas comme les autres, avait organisé l’exposition des cadeaux présidentiels en parallèle avec une autre, dédiée à l’automobile et aux objets quotidiens de la même époque, soit de la dernière période du demi-siècle communiste de Roumanie. La mise face-à-face de ces deux collections n’est forcément pas innocente. Leur franchir le seuil c’est aussi vouloir comprendre le quotidien, la vie de tous les jours de deux générations de Roumains, celles qui ont vécu entre 1945 et 1989. Ecoutons la commissaire d’exposition Călina Bârzu :



    « L’exposition a été montée conformément au catalogue 2019, celui qui avait voulu marquer les 30 années écoulées depuis la Révolution de 1989. Nous avions réalisé une sélection de ce que l’on appelle les œuvres artistiques offerts en hommage au couple Elena et Nicolae Ceausescu. Vous allez pouvoir y admirer des œuvres d’artistes célèbres, tout comme des artefacts confectionnés par des artisans anonymes, dans de petites coopératives, et qui se sont néanmoins retrouvés dans les collections du musée. Le vernissage de l’exposition a eu lieu au mois de décembre 2019. Depuis lors, nous avons fait rouler plusieurs collections dans cette même exposition. Enfin, grâce à la collaboration avec l’association Retromobil Roumanie, nous avons pu mettre en lumière ces objets, que l’on peut appeler de consommation ou de culte, c’est selon, des objets en lien avec l’industrie automobile de l’époque. Cela peut aller du permis de conduire, des cartes routières, des revues auto, des carnets de bord, jusqu’au frigo que l’on pouvait faire installer dans son coffre, voire au poste télé que l’on pouvait relier à la batterie de son véhicule motorisé. Même les plaques d’immatriculation racontent une histoire, car il y avait une sorte de code, de hiérarchie des numéros inscrits sur ces plaques minéralogiques, selon l’appartenance à la nomenklatura, selon le rang du propriétaire au sein de la nomenklatura, ou non. Il y a ensuite des objets qui faisait partie du voyage. Enfin, nous exposons également une collection de photos, où sont repris les modèles prisés de l’époque. »



    Bien que présenté en petit format, le catalogue des cadeaux reçus en guise d’hommage par le couple dictatorial de la part de ses sujets surprend à merveille la force du message de propagande que les auteurs de ces œuvres ont à dessein voulu transmettre. Les œuvres de Sabin Bălaşa, né en 1932 et l’un des peintres les mieux cotés dans son époque, sont présentes dans l’album, notamment son tableau, intitulé « L’époque Ceaușescu », réalisé en 1988. La peinture, huile sur toile, illustre 4 mineurs peints sur fond bleu foncé, et dont le regard est rivé droit devant. Călina Bârzu :



    « Notre collection comprend des cartes de vœux que les institutions et les entreprises publiques adressaient à diverses occasions au couple présidentiel, des vœux qui accompagnaient les cadeaux offerts. Vous remarquerez aussi cette belle maquette d’avion, offerte par l’usine d’avions de Bacau, symbole de son travail. Certains objets de cette collection proviennent des collections du musée du parti communiste, d’autres du Musée d’art de la Roumanie. Ces œuvres devaient mettre en avant le rôle indispensable de Nicolae Ceausescu, le dirigeant du parti. C’est toujours autour de lui que s’organise la scène illustrée dans le tableau. Il fallait que l’artiste marie ces deux desiderata : faire valoir, d’une part, les bons résultats obtenus par le collectif qui commandait l’œuvre, le collectif d’une entreprise par exemple, puis, d’autre part, mettre en exergue le rôle singulier du « génie des Carpates », du commandant suprême. Car c’est lui qui avait rendu ces exploits possibles, c’est à lui que l’on devait tous les exploits techniques, technologiques, économiques. C’est lui seul qui devait apparaître comme le personnage clé, celui qui avait apporté le bien-être et le progrès de la nation. Et il faut souligner que tous ces objets se trouvent dans un état excellent de conservation ».



    On quitte l’exposition abritée par le Musée d’Art contemporain avec un sentiment mélangé, entre nostalgie et amertume. Une chose est sûre : l’art sous la dictature, aussi riche que possible dans ses expressions, demeure un art en cage, un art enchaîné.


    (Trad. Ionut Jugureanu)



  • Le jeu d’échecs dans la Roumanie des années 1960 – 1970

    Le jeu d’échecs dans la Roumanie des années 1960 – 1970

    Ses exploits, obtenus dans les compétitions internationales de l’époque,
    restent là, pour preuve. Le jeu d’échecs semble entrer dans les mœurs de
    l’aristocratie roumaine autour de l’an 1700. Au XIX-èmesiècle, la
    bourgeoisie l’adopte à son tour, et les premières publications dédiées au jeu
    d’échecs ainsi que les premiers clubs font leur apparition vers la fin du
    siècle.








    Après la Grande
    Guerre, lors de l’olympiade d’échecs de Budapest de 1926, l’équipe roumaine monte
    sur la 3e marche du podium. Elle renouvèlera avec le succès en 1978,
    lors de l’olympiade de Buenos Aires, lorsqu’elle occupe une méritante 6e
    place, ensuite lors de celle de Salonique, en 1984, quand elle finit à la 5e
    place. Mais l’exploit qui restera dans toutes les mémoires est une réussite
    individuelle, celle de Florin Gheorghiu, qui mettra, pour un temps, genou à
    terre ni plus ni moins que Bobby Fischer, peut-être le plus grand joueur
    d’échecs de tous les temps. Fischer et Gheorghiu vont par ailleurs se lier
    d’une grande amitié. Ils se rencontrent pour la première fois en 1962, à
    l’olympiade de Varna, en Bulgarie, lorsque le futur champion américain n’avait
    que 19 ans, et son homologue roumain 18. Sans croiser le fer à l’occasion,
    Gheorghiu dira plus tard combien il avait été ébloui par la force du jeu de
    l’Américain.






    Le Grand maître international Florin
    Gheorghiu raconte au micro de Radio Roumanie ses premières confrontations
    directes avec la légende mondiale du jeu d’échecs. Première rencontre, en 1966,
    à Cuba : « C’est à La Havane qu’a eu lieu notre première rencontre. Et
    à mon grand étonnement, j’avais réussi à remporter la partie. On était là, sous
    les yeux de Fidel Castro et de son gouvernement, et ce fut le moment qui
    marquera le début de notre amitié. Bobby avait sans doute apprécié la manière
    dont j’avais commenté notre rencontre en fin de partie. Mais lui aussi, il a
    été irréprochable, il avait la classe d’un grand champion. D’ailleurs, son
    exploit à La Havane est hors propos. Lorsqu’on avait débuté notre partie, il avait
    déjà ramassé 14 points des 15 possibles. Il avait fait deux nulles, avec Boris Spasski, futur champion mondial, et avec Wolfgang
    Uhlmann. Mais il avait eu l’avantage dans les deux parties, il aurait pu les
    remporter. Puis, il a perdu devant moi, pour gagner ensuite le dernier match.
    Il a terminé avec 15 points sur 17 possibles. »






    Bobby Fischer relèvera deux années plus
    tard le défi que lui avait lancé Florin Gheorghiu. Ecoutons le témoignage du
    champion roumain : « Nous avons encore joué à trois reprises. Cela
    aurait été formidable si l’on avait pu en organiser davantage. La deuxième
    rencontre a eu lieu au tournoi de Vinkovci,
    en Croatie, deux années plus tard. Bobby
    l’avait remporté haut la main, avec 2 points d’avance sur ses plus proches poursuivants.
    Il semblait aussi complètement changé. Il était joyeux, espiègle, communicatif,
    appréciant la musique, à l’opposé de son image d’avant. Nous avons joué notre
    partie pendant 18 heures, avec 3 arrêts. Cela a été une partie formidable.
    J’avais réussi à l’annuler. Bobby n’était donc pas parvenu à prendre sa
    revanche. Alors, il m’a proposé d’organiser un match à deux, fait de dix
    parties, n’importe où, même à Bucarest. J’en étais enthousiaste. Cela aurait
    été l’événement du siècle pour les échecs roumains. J’avais fait part de son
    désir à la fédération roumaine et au ministère des sports, qui ont finalement
    décliné la proposition de Bobby Fischer, prétextant le manque de fonds, même si
    Bobby avait passé à la trappe beaucoup de ses exigences habituelles pour ce
    match amical. Certes, je n’aurais pas disputé le titre mondial à l’occasion,
    mais il voulait prouver que le résultat de La Havane n’était qu’un accident
    pour lui. Or, pour moi aussi, cela aurait été la chance de pouvoir me mesurer
    de seul à seul avec le plus grand joueur d’échecs de tous les temps ».






    Fischer allait prendre toutefois sa
    revanche lors de leur troisième rencontre, deux années plus tard : « Ma
    troisième rencontre avec Bobby Fischer a eu lieu à l’occasion du super tournoi
    organisé par le plus grand journal d’Amérique du Sud, la gazette Clarin. Il a
    eu lieu à Buenos Aires, en 1970. Bobby était malheureusement arrivé en retard,
    et les organisateurs avaient manqué de peu de le disqualifier. Il avait
    d’ailleurs perdu ses deux premières sur tapis vert, et deux grands maîtres internationaux
    ont malheureusement accepté de gagner de la sorte, contre Bobby Fischer. Puis,
    pour sa première vraie partie, il s’est retrouvé devant moi. Si j’avais accepté
    que le jeu se décide de la même manière, Fischer aurait été éliminé du tournoi.
    Pour ma part, j’avais choisi de relever le défi et il est resté dans la course.
    Il est arrivé en retard, mais a joué une partie formidable contre moi, tout
    comme ont été ses autres parties de ce tournoi, et il avait ainsi réussi à
    égaliser notre score. »






    La quatrième et dernière rencontre entre
    les deux joueurs a eu lieu la même année, 1970, se finalisant par un match nul.
    Florin Gheorghiu : « Notre quatrième rencontre a eu lieu à
    l’Olympiade de Siegen, en 1970. L’évolution
    de cette partie a été dramatique. Lorsqu’on l’avait interrompue, durant la
    nuit, j’ai analysé le rapport des forces sur l’échiquier et je me suis rendu bien
    compte que Bobby avait toutes ses chances de la remporter, et que la moindre
    erreur de ma part m’aurait été fatale. J’avais alors trouvé, malgré tout et à
    la surprise générale, la parade. J’avais sacrifié un cheval contre deux pions.
    Or, il est bien connu qu’il est déconseillé de sacrifier une pièce en fin de
    partie. Je l’avais fait pourtant. J’avais ainsi réussi à l’annuler. Et cela
    avait été notre dernière rencontre. »






    Grâce aux exploits du grand maître
    international Florin Gheorghiu, les échecs roumains peuvent s’enorgueillir
    d’avoir pu, à un moment donné, partager le niveau de jeu de Bobby Fischer, ce
    grand champion américain qui allait remporter à Reykjavik, en 1972, le match du
    siècle contre le grand maître soviétique Boris Spasski. Florin Gheorghiu avait
    pris part à 14 olympiades internationales, dont 4 dont il est sorti invaincu. Dans
    les années 70, lorsque Bobby Fischer recevait le sacre, Florin Gheorghiu était
    un des dix meilleurs joueurs d’échecs au monde. (Trad. Ionuţ Jugureanu)

  • Les femmes du goulag roumain

    Les femmes du goulag roumain

    Bien que la femme ait toujours été bien présente dans la grande Histoire, sa trace fut souvent ignorée par l’historiographie. Les femmes ont pourtant vécu, à l’instar des hommes, les mêmes tragédies au 20e siècle, souffrant le même calvaire que leurs comparses masculins dans les prisons communistes. L’une des figures féminines les plus impressionnantes est sans doute celle de l’enseignante Iuliana Preduț, membre de la famille de Toma Arnăuțoiu, leader des partisans anticommunistes qui ont activé dans les monts Făgăraș pendant plus d’une décennie, dès la fin des années 1940. En 1958, l’enseignante Iuliana Preduț, accusée d’avoir soutenu la résistance anticommuniste et les groupes de partisans retranchés dans les montagnes, sera arrêtée dans l’école même, où elle enseignait, et embastillée, avec toute sa famille. Enceinte de 6 mois au moment de son arrestation, elle sera incarcérée dans la très redoutée prison de Văcărești, où elle accouchera d’une fille, prénommée Libertatea Justina, soit, Liberté Justice en français.

    C’est en 2001 que le Centre d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine a eu le privilège d’enregistrer une interview avec l’héroïne d’autrefois. Ecoutons-la : « Ils m’avaient mise dans la cellule n° 116 et puis, pour me rendre la vie misérable, ils m’avaient carrément enfermée dans une toilette à la turque, vous savez, des celles qui ont des trous dans le sol. Il y avait six trous creusés dans le sol, et en-dessous le grand trou, déjà tellement rempli qu’il débordait. L’odeur fétide de l’endroit, puis le voyage tellement pénible que j’avais dû faire lorsque l’on m’avait transférée du poste de la Sécuritaté de Piteşti vers le fameux pénitentiaire de Văcăreşti, tout cela m’avait énormément affaibli. J’avais faim, j’avais mal partout, mais j’avais surtout faim. C’était atroce, je pensais que j’allais m’évanouir. À la fin, je me suis laissé choir dans l’urine qui recouvrait le sol. Je n’en pouvais plus. »

    Iuliana Preduț lutte contre la peur, l’effroi, contre le sort, contre la machine infernale de la répression communiste. Seule dans sa cellule, prête à mettre au monde sa petite fille :« Finalement, j’étais parvenue à m’étendre sur un lit. Mais je sentais le regard des gardes de l’autre côté de la porte, à travers le judas. Cela étant, j’avais rassemblé quelque peu mes forces et jeté un coup d’œil autour de moi. C’était atroce. Il y avait des lits superposés jusqu’au plafond, et tout était sens dessus dessous. Sur le plancher, il y avait des traces de sang encore rouge, puis des morceaux de coton, des restes et même des excréments. Je naviguais en plein cauchemar. J’avais peur, d’autant que j’entendais de drôles de bruits en provenance du hall. Il y avait comme une sorte de râle d’homme, entrecoupé par un bêlement de mouton, et puis comme des cris de grand fauve. J’étais transie. Le bébé se débattait dans mon ventre, c’était comme s’il voulait s’échapper de ce cauchemar. J’ai lâché prise, j’avais commencé à pleurer, et je ne pouvais plus m’arrêter ».

    Mais, au fin fond du désespoir, Iuliana Preduț entrevoit la lumière de l’espoir :« La peur me torturait tant, que j’avais commencé à prier le Seigneur, lui demandant de mettre fin à mes jours. Je savais que c’était un pêché, parce que je portais en moi une autre vie qui avait le droit de vivre, mais je n’en pouvais plus. Et puis, d’un coin obscur de la pièce surgit d’un coup un rayon de lumière, un rayon éblouissant, qui m’aveugla et, au-dessus, la Vierge, endeuillée, qui me dit : « N’aie pas peur. Pourquoi avoir peur ? Je suis avec toi. » Elle a disparu ensuite, tout comme elle était venue. Mais j’avais été tout de suite gagnée par une paix intérieure profonde, comme par une sorte de béatitude. Le bébé a cessé à son tour de bouger, mes larmes ont séché comme par enchantement, et même le regard que je portais sur cette cellule terrifiante avait changé. Je n’en voyais plus qu’une cellule de prison banale, où l’espoir devait vaincre la peur et la souffrance. Et avec mes forces retrouvées, j’avais commencé à ranger cette pièce, j’avais ramassé les restes, les couvertures ensanglantées, les fèces qui empestaient par terre, j’avais porté tout ça vers un bout de la pièce, pour essayer de m’aménager un petit coin tant soit peu correct. »

    L’extase mystique aidera Iuliana Preduț à sortir de l’ornière. Un homme, qui avait conservé son humanité, l’aidera : « J’aurais voulu me laver les mains, mais il n’y avait pas d’eau. Je n’osais pas toquer à la porte. Je connaissais les règles, je savais que je risquais d’essuyer un refus, voire pire. Mais voilà que le judas s’ouvre doucement, et qu’un gardien y pousse à travers un bol d’eau. Comme s’il m’invitait à boire. Puis il referme doucement le judas, sans bruits. Je me lave mes mains, ensuite me suis rassise au bord du lit. J’entends la voix du même homme. Il m’appelle, il demande le bol. Je le lui tends, et il y verse du lait. Je n’en avais plus vu depuis qu’ils m’avaient arrêtée. Et il me demande ce que j’avais vu. Il m’avait observée à travers le judas, il avait vu l’effroi, la panique qui m’avait gagnée au départ, puis il avait remarqué que j’avais d’un coup cessé de m’affoler. Je lui ai raconté ma vision, la Sainte Vierge. Et ses yeux se remplirent de compassion. J’avais vu ça à travers le judas, j’avais pu déceler cela. Et je lui ai alors demandé l’origine de ces bruits affreux qui n’avaient jamais cessé. Il m’avoua qu’on se trouvait dans une aile de la prison qui faisait office de mouroir ».

    Iuliana Preduț a survécu à la prison, et même au régime communiste. Elle a survécu pour pourvoir témoigner et donner la mesure de la barbarie dont les hommes ont été capables au 20e siècle. (Trad. Ionuţ Jugureanu)

  • Les archives du rock roumain

    Les archives du rock roumain

    Art et parfois manifeste politique, le rock roumain apparaît vers la fin des années 60. Comme à l’époque l’accès à la musique d’Europe Occidentale était limité, les musiciens roumains ont adapté et récréé, dans un style local, musique, partitions, instruments et mode du courant rock. La volonté de préserver l’histoire de ce phénomène a récemment donné naissance au Musée du rock roumain. Un projet en ligne, pour le moment, mais qui serait amené à évoluer.

    Cosmin Năsui, historien d’art et commissaire d’exposition, nous parle de la genèse du projet : « Avant de décider de constituer ce musée, il y a eu une longue étape de documentation réalisée par notre collègue, le musicologue Doru Ionescu. Lui, il est réalisateur d’émissions sur le rock pour la télévision publique, il a aussi publié des livres sur des musiciens roumains partis vivre à l’étranger. Le Musée du rock est donc son idée. Doru Ionescu a commencé par documenter maints aspects de ce phénomène musical pour ses émissions et ses livres. Avec le temps, ces éléments de patrimoine immatériel et matériel demandaient à être placés dans un contexte muséal, pour donner une vue d’ensemble du phénomène. »

    Cosmin Năsui, aujourd’hui notre guide, nous fait visiter le Musée du rock: « Mettre quelque chose dans un musée, ce n’est pas l’ossifier, au contraire. Pour ce projet, nous avons considéré l’évolution de la musique rock en Roumanie – de la fin des années 60 et jusqu’après la révolution anticommuniste de 1989. Il y a, par exemple, tout un débat sur les guitares électriques en Roumanie. Le rock, c’est la guitare électrique, comme le folk, c’est la guitare sèche. Or on ne pouvait pas fabriquer une guitare électrique durant l’époque communiste en Roumanie. On ne pouvait pas les importer non plus, alors on les bricolait de toutes pièces, à partir de photos, en suivant les dessins techniques d’instruments publiés dans les magazines étrangers que l’on se procurait. Pour revenir, le projet a démarré avec l’initiative de Doru Ionescu et il a grandi peu à peu. Nous avons élargi la recherche à d’autres directions et commencé à utiliser les instruments de la muséographie, les fiches spécifiques et les fiches d’inventaire, entre autres. Le défi était de se servir de ces outils pour un domaine qui est par définition éphémère et plutôt proche du support audio ou vidéo. Mais voilà qu’il y a aussi un patrimoine matériel associé au rock, des instruments de musique aux tenues vestimentaires, la correspondance de ces artistes mythiques, les partitions, les brouillons de textes enfin. Tout cela montre le processus de création de l’intérieur. Il y a même toute une infrastructure culturelle de l’époque communiste, les clubs, souvent destinés aux étudiants, voire les clubs emblématiques de Bucarest, Club A ou Preoteasa. Cela montre la caractéristique première du rock roumain, né du mouvement de la jeunesse et des étudiants. »

    Cosmin Năsui, historien d’art et commissaire d’exposition, un des fondateurs du site postmodernism.ro, qui accueille pour le moment le Musée du rock, poursuit :« Avant d’aller vers une forme physique du musée, nous voulions constituer des archives et dresser les inventaires de façon précise. Pour ce faire, nous avons emprunté des objets de collections privées, nous les avons scannés, répertoriés, photographiés. Une partie de ces objets sont scannés en 3D, donc on peut les tourner sur notre plateforme en ligne, on peut zoomer dessus etc. Une partie de ces objets sont encore utilisés, en concert ou en studio, d’autres ne sont plus fonctionnels et d’autres sont perdus, car beaucoup de rockers roumains ont émigré et les ont pris avec eux. »

    La collection du Musée du rock de Roumanie comprend aussi des cartes postales et des lettres échangées entre les artistes, mais aussi des albums accessibles aux non-voyants. Cosmin Năsui : « Un musée ne doit pas seulement regarder vers l’âge de pierre, le Moyen-Âge ou la Roumanie moderne. Nous croyons qu’il est tout aussi nécessaire d’étudier le passé récent. Une partie de ces groupes de musique ont disparu, une partie de ces scènes musicales aussi. Ces choses sont fragiles, on peut en perdre la trace facilement. On peut noter l’histoire orale liée à ces musiciens légendaires. Après la disparition des artistes et de leurs instruments, je crois qu’il serait assez difficile pour quelqu’un d’entreprendre une chose pareille – récupérer, redécouvrir ce que l’on n’entend pas dans la musique. Musique qui reste, naturellement, en première position. »

    Le projet continue. L’étape suivante serait de regarder du côté des spécificités régionales des scènes rock et de la portée de cette musique dans différentes villes estudiantines. Ensuite, des sortes de capsules-musées pourraient voir le jour, qui mettraient en avant une partie de la collection du Musée du rock. Elles voyageraient à travers le pays, en lien avec des concerts ou des festivals, comme une sorte de laisser-passer en coulisses offert aux passionnés de musique. Des coulisses historiques, évidemment. (Trad. Elena Diaconu)

  • Le centenaire du Parti communiste roumain

    Le centenaire du Parti communiste roumain

    Pendant plus de 4 décennies, entre 1945 et 1989, les Roumains, petits et grands, fêtaient le 8 mai l’anniversaire de leur Parti communiste, ce parti qui gouvernait d’une main de fer la Roumanie depuis le 6 mars 1945 et l’arrivée au pouvoir du premier gouvernement communiste, sous la pression soviétique.

    Selon la
    propagande officielle, le Parti était apparu sur la scène de l’histoire pour
    mettre en œuvre les plus nobles idéaux d’équité et de justice sociale jamais
    connus dans l’histoire de l’humanité, et amener le bonheur à tout un chacun. La
    réalité du régime était pourtant bien loin de ces grands desseins, clamés à qui
    voulait l’entendre. L’économie exsangue et la répression omniprésente étaient
    là, pour témoigner de l’état de faillite d’un régime qui avaient mis en œuvre
    ses politiques basées sur la nationalisation des moyens de production, sur la
    suppression des droits individuels et des libertés politiques, sur
    l’embastillement des opposants et des innocents. Fin 1989, les régimes
    communistes des États d’Europe
    centrale et orientale s’écroulaient avec fracas, comme des châteaux de cartes,
    laissant derrière eux des sociétés traumatisées, qui essayaient tant bien que
    mal de retrouver un semblant de normalité.








    D’ailleurs, l’apparition en 1919 de l’Internationale
    communiste, dirigée par Moscou, n’est pas sans incidence dans la naissance du
    Parti communiste roumain. En effet,
    c’est le 11 mai 1921 que le Parti socialiste roumain votait son intégration à la
    3-ème Internationale. Ce moment sera par la suite considéré par
    l’historiographie communiste comme le premier congrès du Parti communiste
    roumain, même si jusqu’au deuxième congrès, qui n’a eu lieu qu’en 1922, le
    parti garde la titulature de Parti socialiste-communiste. Ce n’est donc qu’à
    partir de son congrès de 1922 que le parti décide d’endosser la titulature de
    parti communiste, devenant du coup une section de la 3e
    Internationale communiste. Aussi, très tôt l’on voit ce parti assumer une
    politique pro-soviétique et résolument antinationale, ce qui ne tardera pas à
    faire réagir les autorités roumaines, qui le mettront hors-la-loi dès 1924.








    L’historien Ioan Scurtu, spécialiste
    reconnu de la première moitié du 20e siècle roumain, explique le
    rôle de la Grande Guerre dans l’apparition du Parti communiste local : « La
    guerre avait vu dégringoler la situation sociale et économique de la population
    roumaine en général et celle des ouvriers en particulier. En Europe et ailleurs,
    l’on assiste en contrepartie à l’essor des mouvements socialistes radicaux,
    dont certains se muent en mouvements communistes. La Roumanie fait forcément
    face au même phénomène. La mouvance communiste, dont les ressorts initiaux étaient
    constitués par la volonté d’améliorer les conditions de vie et de travail de la
    classe ouvrière, allait vite affirmer sa volonté de conquérir le pouvoir
    politique par tous les moyens envisageables, et d’instaurer ce qu’elle appelait
    la « dictature du prolétariat ». Certes, l’objectif final de tout
    parti politique demeure la conquête du pouvoir. Mais à la différence des partis
    socialistes et sociaux-démocrates, qui envisageaient d’atteindre cet objectif par
    les urnes, les partis communistes prônaient le déclenchement de la révolution
    prolétaire, la seule, selon eux, en mesure d’amener à l’instauration de la
    dictature du prolétariat, la nationalisation des principaux moyens de
    production, soit de déclencher un bouleversement total de l’ordre social.»






    C’est dans ce contexte que l’on voit, au
    début du mois d’octobre 1920, une délégation du Parti socialiste de Roumanie,
    dirigée par son secrétaire général, Gheorghe Cristescu, se déplacer à Moscou,
    pour négocier l’affiliation du parti à l’Internationale communiste. Le 9 décembre,
    les délégués signent l’affiliation, sans conditions, du parti au Komintern.
    Pourtant, les dirigeants de la 3e Internationale,Alexnadre Zinoviev et Nikolaï Boukharine, avaient du
    mal à accepter l’intégration dans leur organisation d’un parti dont des adhérents
    avaient voté, le 1er décembre 1918, l’union de la Transylvanie avec
    le royaume de Roumanie.






    Cela ne tardera pas de provoquer la
    première grande scission du mouvement progressiste roumain, précise Ioan Scurtu :
    « Alexandre Zinoviev et Nikolaï Boukharine avaient d’emblée exigé
    l’exclusion pure et simple, de la délégation roumaine, de Ioan Flueraș, membre
    marquant du mouvement socialiste roumain et participant à la Grande Assemblée
    nationale d’Alba Iulia. L’on constate donc que les communistes soviétiques
    étaient, déjà en 1920, bien décidés d’éliminer tous les gauchistes soi-disant « tièdes »,
    et qui ne suivaient pas au mot les dogmes prônées par le Komintern. La réunion
    du Parti socialiste de Roumanie, déroulée entre le 30 janvier et le 3 février
    1921, lors de laquelle la délégation dépêchée à Moscou avait présenté son
    rapport au parti, ne tardera pas à voter l’exclusion des soi-disant
    déviationnistes de droite et nationalistes, qui auraient pactisé, selon leurs
    détracteurs, avec le régime bourgeois. Dès cet instant, le Parti socialiste de
    Roumanie tombe dans l’escarcelle de Moscou, sa direction se voyant confisquer
    par les communistes radicaux. Dès lors, le vote demandé au congrès pour voir le
    parti rejoindre l’Internationale communiste était déjà acquis. »







    Pendant l’entre-deux guerres, le Parti communiste
    roumain, dans l’illégalité, est demeuré insignifiant sur l’échiquier politique
    national.








    Quant aux raisons de son impotence, Ioan
    Scurtu affirme : « Le problème de fond, et qui avait grandement
    affecté la capacité de ce parti de récolter l’adhésion de son public, c’est
    qu’il avait embrassé sans réserve la politique internationaliste prônée par le Komintern,
    menant à terme à dépecer la Roumanie nouvellement constituée, avec tant de
    sacrifices, à l’issue de la Grande Guerre. Les documents du parti énuméraient les
    provinces historiques concernées : la Bessarabie, la Bucovine, la
    Transylvanie. Sous la pression des communistes bulgares, qui détenaient un rôle
    important dans la direction de la 3e Internationale, il a même été
    question de la province de Dobroudja. Il s’agissait tout simplement de
    démembrer l’Etat roumain. Or l’union des provinces historiquement roumanophones
    avait justifié aux yeux des anciens combattants et d’une grande partie de la
    population roumaine les sacrifices auxquels ils avaient consenti durant la
    guerre. Alors, un parti qui prônait la fin de l’idéal national et le retour aux
    frontières d’avant 1918, ne pouvait éviter d’être regardé avec méfiance par la plus
    grande partie de son électorat potentiel. »









    Mais la fin de la Deuxième guerre
    mondiale a vu l’arrivée au pouvoir de ce parti insignifiant, porté par le désir
    de l’URSS d’imposer sa volonté dans la région, sinon dans le monde. Néanmoins,
    les États-Unis et la Grande-Bretagne n’étaient pas
    innocents dans l’affaire, ayant endossé à leur tour, même si en catimini, l’accession
    au pouvoir du Parti communiste roumain.








    Ioan Scurtu : « Le rôle des émissaires soviétiques dans la
    prise du pouvoir par les communistes en Roumanie ne fait aucun doute. Mais
    l’instauration du régime communiste dans le pays, tout comme dans les autres
    pays de ce que deviendra le Bloc de l’Est, a été réalisé avec l’accord exprès
    du président américain et du premier-ministre britannique. Ils avaient adossé
    la requête de Staline, qui exigeait que l’URSS ne se retrouve plus entourée d’États hostiles au
    régime soviétique. Or, pour Staline, seul un État vassale ne
    lui était pas hostile, alors qu’un État occupé par ses troupes pouvait même devenir
    un État ami. »






    Et c’est ainsi que, ironie de
    l’histoire, le fou du roi avait pris la place du maître, soumettant dorénavant
    le pays à ses quatre volontés. (Trad. Ionuţ Jugureanu)

  • La politique extérieure de la Roumanie dans les années 60/70

    La politique extérieure de la Roumanie dans les années 60/70

    Dans les années 1960-1970, la Roumanie cherchait à se définir une place bien à soi dans la politique internationale, et tout cela dans le contexte délicat de la guerre froide. Tombée dans l’escarcelle soviétique, à l’instar de toute l’Europe de l’Est, dès 1945, la Roumanie a d’emblée souffert d’importants bouleversements tant sur le plan intérieur que sur le plan de sa politique extérieure, l’abandon de ses anciens alliés occidentaux étant la première exigence de Moscou à l’égard du gouvernement roumain. Dès 1948, lorsque le régime communiste s’instaure de plein pied, et jusqu’au début des années 1960, la politique isolationniste et l’adversité affichée envers le monde occidental ont fait office de politique étrangère pour l’État communiste roumain. Toutefois, après 1953 et la mort de Staline, après la condamnation des crimes staliniens par son successeur, Nikita Kroutchev, après surtout la révolution hongroise de 1956, qui avait secoué le bloc communiste, les lignes de politique étrangère se mettent à bouger au sein de ce dernier. L’Union Soviétique commence de plus en plus à faire profil bas et à diminuer la pression exercée sur les dirigeants communistes qu’elle avait amenés au pouvoir dans les États occupés dans l’Est de l’Europe et devenus autant d’États satellites après 1945.

    C’est dans ce contexte international que la Roumanie cherche donc à se trouver une place et une identité dans le concert des nations de l’époque. Le ministère roumain des affaires étrangères ressentait à son tour le besoin d’un leadership ouvert aux réformes et aux nouveaux équilibres internationaux. Et il ne tardera pas à le trouver en la personne de Corneliu Mănescu, anciennement ambassadeur en poste à Budapest. Rappelé à Bucarest par le secrétaire général du parti communiste de l’époque, Gheorghe Gheorgiu-Dej en personne, Mănescu se voit nommé à la tête de la diplomatie roumaine, en 1961. À son arrivée, la Roumanie n’avait noué des relations diplomatiques qu’avec une trentaine de capitales de par le monde. Corneliu Mănescu porte d’abord son attention vers l’ONU, dont la Roumanie faisait partie depuis 1955, et où il comptait trouver des appuis pour la nouvelle ligne d’ouverture de la politique étrangère du pays. Il en trouvera mieux, il trouvera des amis à l’ONU, d’abord et par-dessus tout en la personne du troisième secrétaire général de l’organisation, le Birman U Thant.

    En 1994, à 78 ans, Corneliu Mănescu avait donné une interview au Centre d’Histoire orale de la Radiodiffusion roumaine, au cours de laquelle il remémore le moment : « U Thant a été un véritable ami de la Roumanie. Il nous avait épaulés pour que l’on devienne un membre de poids de l’organisation. Il nous a aidés à fonder à Bucarest le Centre Démographique de l’ONU-Roumanie (le CEDOR), où l’enseignement est donné en français. Il a fait de son mieux pour nous aider à développer nos relations internationales. C’est lui encore que j’avais appelé en premier, en 1968, lorsque la menace d’une invasion soviétique devenait évidente. U Thant s’était alors engagé à initier une conférence internationale extraordinaire pour nous soutenir, le cas échéant. Cet homme mérite notre respect et toute notre reconnaissance. » Corneliu Mănescu était ainsi parvenu à recoller les morceaux, à renouer les relations avec les États occidentaux. Avec la France, en premier : « En 1961, lorsque j’avais pris les rênes du ministère, nos relations diplomatiques se limitaient presqu’exclusivement aux États membres du Pacte de Varsovie. Après 1945, nous étions presque en état de guerre avec nos anciens alliés, avec les États aux côtés desquels nous avions combattu contre l’Allemagne nazie. Des relations gelées, moribondes. Mais dès 1961, la politique étrangère de la Roumanie prend un véritable tournant. Tout d’abord avec la France. En cette année-là, les relations entre la Roumanie et la France étaient au point mort, ou presque. Mais dès la première année de mon mandat, j’avais rencontré mon homologue français, le ministre des Affaires étrangères, Monsieur Couve de Murville, à New York, et il m’avait adressé l’invitation de lui rendre visite à Paris. J’avais accepté sur place. C’était inhabituel, surtout selon la coutume communiste, de prendre de telles décisions sur un coup de tête, sans avoir consulté la hiérarchie du parti. Mais j’avais ensuite obtenu l’accord de Bucarest pour mener à terme cette initiative diplomatique. »

    L’autre État occidental qui incarna l’intérêt des diplomates de Bucarest a été l’Italie. Corneliu Mănescu : « La position roumaine à l’égard des institutions internationales était impardonnable. Nous les repoussions, nous refusions leur aide et leur appui. Je me rappelle encore comme si c’était hier l’échange que j’avais eu à Bucarest avec le président de Conseil italien, Amintore Fanfani, lorsque je lui avais fait part de la nécessité, pour nous, d’être soutenus par les pays industrialisés, par l’Italie en l’occurrence. Il m’avait répliqué, je le cite de mémoire : « C’est maintenant que vous me demandez cela ? Nous vous attendions depuis longtemps, et vous n’êtes pas venus. Nous avons offert notre aide, notre coopération, à tous ceux qui nous l’avaient sollicitée, la Yougoslavie par exemple. » Ce furent ses propos presque mot pour mot. »

    C’est en 1967 qu’un grand pas en avant allait être franchi par Bucarest, qui établissait avec fracas des relations diplomatiques avec la République fédérale d’Allemagne :« J’avais accordé à l’époque une interview au journal Christian Science Monitor, à un nommé Rossi, qui travaillait à New York pour ce journal. Il m’avait questionné au sujet de notre attitude par rapport à la RFA, si nous désirions nouer des relations économiques, diplomatiques, si nous envisagions d’établir des relations formalisées, dotées d’un caractère pérenne. Et il m’avait entre autres posé cette question, si je pensais que l’Allemagne d’alors était un pays fasciste. J’avais démenti formellement. Or, cette interview avait provoqué une véritable tempête dans les capitales du Pacte de Varsovie. Mes homologues étaient révoltés par mon attitude. J’avais été attaqué de toutes parts. Le fer de lance a été la RDA, qui avait protesté de manière véhémente. Ils me reprochaient tous mon attitude pacifiste, amicale, à l’égard de la République fédérale. Mais, bon, peu importe, les choses devaient être clarifiées. Il fallait le faire. »

    Corneliu Mănescu a été le ministre qui avait amorcé le changement d’orientation de la politique étrangère du gouvernement de Bucarest. Certes, pour ce faire, il avait bénéficié de l’appui politique nécessaire au sommet du parti communiste roumain. Le 19 septembre 1967, il sera élu président de la 22e session de l’Assemblée générale des Nations Unies. Une consécration, car c’était pour la première fois qu’un représentant d’un État socialiste était élevé à une telle dignité. L’image externe de la Roumanie s’améliorait considérablement, ce qui ne tardera pas d’avoir des conséquences extrêmement bénéfiques pour la Roumanie de la décennie suivante. (Trad. Ionuţ Jugureanu)

  • Le Musée de la collectivisation

    Le Musée de la collectivisation

    En 1951, dans les prisons du pays et les camps de travaux forcés du canal Danube – Mer Noire se trouvaient 80.000 paysans qui s’étaient opposés à la collectivisation. 800.000 agriculteurs au total ont été emprisonnés pour ne pas avoir voulu renoncer au statut de propriétaires de leurs terres. Au bout de 13 ans de collectivisation forcée, durant lesquels la propagande communiste s’est accompagnée d’actes de chantage et de terreur, le parti communiste annonçait la réalisation « avec succès » de la collectivisation de l’agriculture roumaine. Une session extraordinaire de la Grande Assemblée Nationale fut consacrée à cet événement. Elle s’est tenue du 27 au 30 avril 1962, en présence de 11.000 paysans invités. Les leaders communistes de l’époque ont affirmé à cette occasion que « le socialisme avait triomphé définitivement dans les villes et les villages de la République Populaire Roumaine ».

    En souvenir de cette époque, à Tămășeni, dans le comté de Neamț, viennent d’être ouvertes les premières salles d’un Musée de la collectivisation. Il accueille des objets utilisés d’habitude dans les maisons et les fermes paysannes des années 1950, que les visiteurs peuvent toucher, pour expérimenter les réalités de cette époque. L’initiateur du projet, Iulian Bulai, explique: Nous inaugurons les 3 premières salles du Musée de la collectivisation, le premier de ce genre du pays. Nous nous sommes toujours posé des questions, essayant de comprendre le pourquoi de ce chaos qui règne dans l’agriculture roumaine, le pourquoi de ce manque d’attention pour l’espace public, beaucoup plus grand en Roumanie que dans d’autres pays, le pourquoi de ce décalage entre les milieux rural et urbain en Roumanie, beaucoup plus grand qu’en Occident. Je me suis moi aussi interrogé à ce sujet et l’une des réponses est la collectivisation. La collectivisation, en tant que phénomène socio-politique, a eu un impact irréversible sur l’espace rural roumain : l’absence de la propriété privée, sa confiscation, ont mené à ce que nous voyons de nos jours dans les campagnes: un sous-développement extrême par rapport au milieu urbain et un espace qui ne trouve pas son équivalent dans le milieu rural occidental. Eh bien, j’ai tâché de réponde à ces questions, en cherchant des repères dans l’histoire de ma famille, touchée, elle aussi, de plein fouet, par la collectivisation. Et je me suis rendu compte que pour mieux comprendre le milieu rural de Roumanie et la collectivisation en tant que phénomène, nous devons mieux connaître ce peuple, nous poser des questions, trouver des réponses, imaginer les drames que des millions de Roumains ont vécus dans les années ’50, pendant la collectivisation et, ensuite, mettre sur pied un musée qui reflète les réalités socio-anthropologiques du milieu rural actuel.

    Iulian Bulai a destiné à cette fin la maison de ses grands-parents, qu’il a transformée en musée. Qu’est-ce qu’on peut y voir, en ce moment ? Il s’agit de deux maisons et d’une annexe. C’est une petite ferme typiquement moldave ayant appartenu, un siècle durant, à notre famille. Cette petite ferme est tombée elle aussi victime de la collectivisation. Il s’agit donc de la famille de mes arrière-grands-parents et de mes grands-parents qui ont vécu la collectivisation et qui se sont vu confisquer, dans les années ’50, leurs terres, leurs outillages, leurs moulins, le pont au-dessus de la rivière Siret. Et cette maison a été le témoin d’une histoire qui est celle de millions de Roumains, celle de la collectivisation, de cette entrée abusive du régime communiste dans l’espace privé : une partie de cette maison a été confisquée et un magasin de la collectivisation y a été ouvert dans les années ’50. C’est à peine en 1992, après la chute du communisme, que la famille a pu la récupérer. Elle est un symbole de l’histoire de nombreux Roumains.

    Le musée de la collectivisation est-il un musée des objets ? Iulian Bulai: Ce musée est consacré dans une moindre mesure aux objets. Des objets, il y en aura, bien sûr : ceux que mon grand-père a amassé et qui nous montrent où nous sommes restés, nous, en tant que société agraire, à savoir presque au même point que dans les années ’50, soit il y a 70 ans. Le musée est censé raconter une histoire et exposer une vision scientifique du phénomène. Bien sûr, chaque objet a aussi sa propre histoire. Les outillages agricoles qui étaient là au moment où la maison est entrée en ma possession trouveront leur place dans les 17 ou 18 espaces d’exposition du musée.

    Iulian Bulai s’est lancé dans cette démarche avec l’espoir d’un changement auquel il croit : C’est uniquement en réussissant à affronter notre passé avec sincérité, à en avoir une image claire que nous pourrons mieux nous comprendre en tant que peuple, en tant que nation, en tant que pays contemporain et que nous pourrons dépasser certains événements tristes de notre histoire. Des événements qui, n’ayant pas été explorés jusqu’ici de manière positive, n’ont pas pu nous aider à nous guérir des blessures de la période communiste. Et, alors qu’actuellement nombre d’espaces culturels ferment leurs portes, nous ouvrons, nous, un musée. Je pense que c’est là un bon point de départ pour une attitude générale que nous pouvons partager durant ces temps difficiles.

    Un musée qui va grandir non seulement par l’augmentation des espaces à visiter, mais aussi par les événements qu’il va accueillir au moment où les gens pourront se rencontrer de nouveau.

  • Il y a 31 ans, les Roumains se réveillaient enfin

    Il y a 31 ans, les Roumains se réveillaient enfin

    Le 16 décembre 1989, des milliers de Roumains privés de droits et las des pénuries et des souffrances ont eu le courage de descendre dans les rues de la ville de Timisoara, afin de revendiquer leur droit à la Liberté et à la Justice et de renverser une dictature communiste en place depuis plus de quatre décennies.

    Timisoara devenait le 17 décembre la première ville libérée du communisme, avec le prix d’une répression ensanglantée des manifestants contre lesquels les forces de l’ordre ont ouvert le feu. Ils ont tiré des balles réelles. La révolte de Timisoara s’est répandue ensuite à travers le pays, pour accaparer à compter du 21 décembre la Capitale, Bucarest, et d’autres grandes villes. Les protestations qui ont mené à la chute du régime communiste ont culminé par le procès et l’exécution du couple dictatorial Nicolae et Elena Ceausescu, ont achevé en quelque sorte une transformation plus ample qui s’était déjà produite dans l’Europe de l’est.

    La Roumanie commémore chaque année ceux qui ont perdu la vie au nom de leurs idéaux. Cette année, à Bucarest, les manifestations se sont déroulées dans des conditions spéciales afin de respecter les restrictions de la pandémie. La Révolution a été commémorée discrètement ce décembre. Sur la place de la Révolution de la Capitale, les quelques Roumains présents ont évoqué le sacrifice des héros de décembre 1989 et revécu ces moments charniers de l’histoire du pays. « J’ai eu aussi d’autres idéaux, je pensais à un autre avenir, mais nous constatons du jour au lendemain que l’on arrive à tout oublier et que tout est éphémère. Ceux qui ont été ensuite au pouvoir n’on jamais pensé aux idéaux de 1989. Outre la liberté, nous avons demandé aussi des changements dans l’éducation et la santé. » « Je dois l’avouer, si j’entrais maintenant dans le siège du Comité central du PCR, je serais émue jusqu’aux larmes, pace que je crois avoir été la première personne à utiliser le téléphone de Ceausescu. J’ai appelé mes enfants », a avoué une autre participante aux événements de 1989.

    Dans un message transmis mardi, à l’occasion de la Journée de la Victoire de la Révolution roumaine et de la liberté, le président Klaus Iohannis a affirmé qu’il y a 31 ans, les Roumains ont posé les fondements de la Roumanie démocratique d’aujourd’hui transformant la révolte, le chagrin et la terreur, accumulées pendant plusieurs décennies de tyrannie, en une véritable force motrice de la révolution anticommuniste. « Par le sacrifice de décembre 1989, les Roumains ont mis fin à un régime illégitime et criminel et le courage et la détermination de nos concitoyens nous a redonné la liberté et la dignité », a rappelé le chef de l’Etat. Il a souligné qu’au nom de la liberté et de la démocratie les Roumains ont payé durant ces heures de douleur et de révolte le prix le plus élevé – 45 ans de crimes et de cruautés envers les Roumains, des années qui ont coupé le lien normal avec la famille des démocraties européennes. Par ailleurs, Klaus Iohannis a souligné que la Justice devrait faire son devoir dans le cas des personnes coupables de la répression ensanglantée de décembre 1989, montrant que la douleur de ceux ayant perdu des proches a été doublée tout le long de ces années par l’incapacité de l’Etat de leur rendre Justice. « La Justice doit faire son devoir ! Tout délai transformera cette honteuse dette en un grave attentat à l’adresse de notre démocratie », a affirmé le chef de l’Etat.

  • 20.12.2020

    20.12.2020

    Révolution
    1989
    – Les cérémonies à la mémoire des héros de la
    révolution anticommuniste de décembre 1989 se poursuivent en Roumanie, dans un
    format restreint cette année en raison de la pandémie de Covid-19. Aujourd’hui
    à Timişoara
    (ouest), les sirènes de la ville ont retenti pendant trois minutes pour marquer
    la Journée de la victoire. Il y a tout juste 31 ans, le 20 décembre 1989, Timişoara a été proclamée la première
    ville libérée du communisme en Roumanie. La révolte contre le régime communiste
    avait éclatée à Timişoara le 16 décembre 1989. Un jour plus tard, le 17 décembre, le
    dictateur Nicolae Ceauşescu ordonnait que des balles réelles soient utilisées
    contre les gens qui contestaient le régime dans les rues de la ville. Près d’une
    centaine de personnes sont mortes et environ 350 autres ont été alors blessées.
    Le 19 décembre 1989, afin d’effacer les traces du massacre, les autorités
    communistes mettaient en place l’opération dite « La Rose » pendant laquelle
    les cadavres des personnes assassinées avaient été sortis de la morgue de Timişoara et transportés
    à Bucarest pour être incinérés. La contestation s’est étendue, le 21 décembre,
    à Bucarest et à d’autres villes de Roumanie pour culminer, le 22 décembre, avec
    la fuite en hélicoptère du dictateur Ceauşescu du Comité central du Parti
    communiste, pris d’assaut par des centaines de milliers de protestataires. En
    Roumanie, Timişoara est célébrée comme le lieu de départ de la révolution
    anticommuniste de 1989, une des plus sanglantes de l’Europe du Sud-Est.




    Politique – Les deux chambres du Parlement nouvellement élu de la Roumanie se réuniront
    demain en sessions séparées d’ouverture de la législature 2020-2024. Les 466
    députés et sénateurs roumains accompliront les formalités leur permettant
    d’assumer leurs mandats et de constituer le Parlement. Parallèlement, les
    représentants de la future coalition majoritaire de centre droit continuent leurs
    négociations pour arriver à un programme commun de gouvernance. Le Parti
    national libéral (PNL), l’Union sauvez la Roumanie-PLUS (USR-PLUS) et l’Union
    démocrate magyare de Roumanie (UDMR) ont annoncé qu’ils arriveront au bout de leurs
    discussions au plus tard ce dimanche. Hier, les trois partis se sont mis d’accord
    pour proposer Florin Cîţu, l’actuel ministre libéral des Finances, comme premier
    ministre, d’attribuer aux libéraux la présidence de la Chambre des députés et à
    l’Alliance USR-PLUS celle du Sénat. Dans le futur cabinet, neuf ministères
    reviennent au PNL, six à l’USR-PLUS et trois
    à l’UDMR. Ces deux derniers partis se verront également attribuer deux postes
    de vice-premier ministre. De l’autre côté de la barricade, les
    sociaux-démocrates, qui ont remporté le plus grand nombre de suffrages au
    scrutin législatif du 6 décembre, insistent sur le fait que, dans le contexte
    de la pandémie, la solution correcte serait de former un gouvernement d’union
    nationale. A sa tête serait nommé le médecin Alexandru Rafila, qui a accédé au
    nouveau Parlement sur les listes du PSD. Le leader social-démocrate, Marcel
    Ciolacu, a déclaré que son parti ne voterait jamais en faveur du gouvernement
    de centre droit qui est en train d’être décidé. Un tel exécutif, soutien Marcel
    Ciolacu, ne ferait que maintenir la Roumanie dans un état de crise.




    Coronavirus – Les autorités roumaines font les derniers préparatifs avant l’arrivée
    dans le pays des premières doses vaccins anti-Covid. L’Institut national de
    recherche et de développement médical et militaire Cantacuzino de Bucarest
    devrait devenir le centre national de stockage du vaccin. Les espaces destinés
    à cela sont déjà aménagés et équipés de congélateurs à ultra basse température.
    Environ 1,5 millions de doses pourront être conservées sur place, alors que les
    six centre régionaux de stockage pourront emmagasiner jusqu’à 200.000 doses.
    Les premières doses de vaccin anti-Covid devrait arriver en Roumanie le 26
    décembre. En nombre de 10.000, elles sont destinées à la vaccination du
    personnel médical de dix hôpitaux de maladies infectieuses du pays.






    3.350 nouvelles infections au virus Sars-CoV-2
    ont été rapportées dimanche en Roumanie, sur un total de 12.200 tests pratiqués
    au niveau national. 98 malades sont décédés des suites de la maladie et 1.267
    personnes sont actuellement hospitalisées dans les unités de soins intensifs. Pour
    ce qui est du bilan total depuis le début de la pandémie, le pays a recensé
    près de 14.400 décès et plus de 591.000 personnes contaminées au nouveau
    coronavirus, dont près de 499.000 ont guéri.

    Auto – Plus de 7.300 voitures écologiques neuves ont été vendues en
    Roumanie depuis le début de l’année, soit une croissance de plus de 20% par
    rapport à la même période de l’année précédente, annonce l’Association des
    producteurs et des importateurs de voitures. Les voitures hybrides occupent
    plus de 60% de ce marché en Roumanie, avec 4.438 voitures neuves vendues entre
    janvier et novembre 2020. Mais c’est du côté des voitures 100% électriques et
    plug-in que les ventes ont enregistré un vrai bond. Avec 2.111 unités vendues,
    le marché de voitures 100% électriques connait une hausse de près de 60% par
    rapport à 2019, alors que les voitures plug-in, vendues à 796 unités depuis le
    début de l’année, enregistrent une hausse de près de 130% rapporté à l’année
    précédente. Pour ce qui est des marques, Toyota est le leader incontestable du
    marché hybride en Roumanie – 3.806 unités vendues depuis janvier 2020, suivi,
    loin derrière, par Lexus avec 172 unités vendues et Hyundai, 159 unités. En
    regardant du côté des voitures 100% électriques, Renault est en tête du
    classement, avec 562 unités vendues, suivie par Volkswagen et Skoda, avec 375, et
    respectivement 346 unités. Le marché de voitures électriques et hybrides neuves
    avoisine les 6,7% du marché auto global en Roumanie, alors qu’en 2019 il était
    à 4,1% seulement.




    Gymnastique – L’équipe de Roumanie de gymnastique artistique féminine espère décrocher
    d’autres médailles aujourd’hui lors des finales par appareil des Championnats d’Europe
    qui se déroulent à Mersin, en Turquie. Larisa Iordache est en finale dans les
    compétitions de saut de cheval, de barres asymétriques, de poutre et de sol. Ioana
    Stănciulescu s’est, elle, qualifiée pour la finale de saut de cheval. Silviana
    Sfiringu se battra pour une médaille à la poutre et Irina Antonia Duţă pour une
    au sol. Hier, l’équipe roumaine a remporté la médaille d’argent par équipes. La
    médaille d’or a été remportée par la sélection ukrainienne, tandis que le
    bronze est revenu à la Hongrie.






    Météo – Le ciel reste plutôt couvert en Roumanie, avec des températures qui
    approchent les moyennes saisonnières. Des pluies éparses et de la bruine feront
    leur apparition dans les régions à l’extérieur de l’arc des Carpates. Le vent sera
    faible à modéré, avec quelques intensifications dans le sud-ouest du pays. Les
    températures maximales vont de 0 à 7 degrés, avec 4° à midi à Bucarest.

  • La semaine du 14  au 20 décembre

    La semaine du 14 au 20 décembre

    La prolongation de l’état d’alerte sanitaire

    La Roumanie a décidé de prolonger de 30 jours l’état d’alerte sanitaire. La décision est entrée en vigueur le lundi, 14 décembre, après une recrudescence du nombre de malades hospitalisés en soins intensifs. Cela fait plusieurs semaines que la capitale, Bucarest, est en tête des villes affichant un taux d’incidence inquiétant. Pourtant, selon les autorités, un confinement des Bucarestois n’est pas pris en compte, explique le préfet de Bucarest, Traian Berbeceanu. A l’heure où l’on parle, on ne considère pas nécessaire la mise en place de restrictions supplémentaires, car on se dit que cela ne sert à rien d’adopter des mesures sur le papier, si on ne veille pas à ce que la population les mette en place. On pense que si tout le monde respectait les restrictions en vigueur, la propagation de la pandémie serait endiguée. , a-t-il précisé.

    Dans le département d’Ilfov, à proximité de Bucarest, fortement frappé par le coronavirus, le confinement est en place dans la plupart des localités, une mesure qui commence à porter des fruits puisque les autorités annoncent une légère baisse du taux de contamination. Sur l’ensemble des 42 départements de Roumanie, un tiers est en rouge, la moitié en jaune, avec un taux d’incidence allant de 1,5 à 3 cas pour mille habitants, et le reste en vert grâce à un taux de contamination en dessous de 1,5. A l’instar de la plupart des pays du monde, la Roumanie attend elle aussi le vaccin anti-Covid, qui devrait arriver partout en Europe fin décembre, selon la Commission européenne. La campagne de mise en place de centres de vaccination est en plein déroulement et les premiers à en bénéficier seront les membres du personnel médical. Aux dires des autorités, le virus ne pourra pas être vaincu si les populations refusent de se faire vacciner. En Roumanie, la campagne de vaccination débutera le plus probablement au printemps prochain et sera non-obligatoire et gratuite.

    Les partis parlementaires négocient la formation d’un nouveau gouvernement

    Lors d’une première série de consultations avec les partis et les formations politiques représentées au Parlement, le chef de l’Etat roumain, Klaus Iohannis, a annoncé son intention de convoquer le Parlement le 21 décembre afin de désigner le candidat aux fonctions de premier ministre. Selon le résultat final du récent scrutin législatif annoncé par le Bureau électoral central, le futur Législatif réunira des représentants du Parti social-démocrate, du Parti national libéral, de l’Union Sauvez la Roumanie PLUS, de l’Alliance pour l’unité des Roumains, de l’Union démocrate magyare de Roumanie et des minorités nationales autres que celle hongroise. Le résultat des législatives rend difficile la désignation d’un premier ministre et la formation d’un nouvel Exécutif. Après avoir remporté le scrutin, le PSD continue à plaider en faveur d’un gouvernement d’union nationale ayant à sa tête le Pr Alexandru Rafila, et réunissant toutes les forces politiques parlementaires. En revanche, le PNL, l’USR PLUS et l’UDMR, arrivés en deuxième, troisième et respectivement cinquième position dans les options de l’électorat roumain, ont mené cette semaine des négociations intenses pour former une majorité parlementaire et un gouvernement.

    La Cour Constitutionnelle de Roumanie et les pensions spéciales

    La Cour Constitutionnelle de Roumanie a invalidé la loi prévoyant un impôt de 85% appliqué aux pensions du régime spécial dépassant le montant de 1400 euros. Quatre fois reportée, la décision a été adoptée à l’unanimité. Accordées dans un premier temps aux magistrats et aux militaires, ces retraites spéciales ont fini par être versées à d’autres catégories aussi, telles les parlementaires, les diplomates ou le personnel aéronautique. A la différence de la plupart des retraites du régime public, qui sont en moyenne de 300 euros, les pensions dites spéciales ne reposent pas uniquement sur le principe de contributivité, puisqu’elles sont financées aussi bien par le budget de la Sécurité sociale que par celui de l’Etat. C’est la raison pour laquelle le Parlement a adopté en juin dernier un acte normatif qui, sans annuler les retraites spéciales, les frappait d’impôt. Une décision contestée sur le coup par l’Avocat du peuple et par la Haute Cour de Cassation et de Justice selon lesquels une telle loi contrevenait au principe d’équité fiscale. Les parlementaires de l’USR ont décidé de protester contre cette démarche en démissionnant pour ne pas figurer parmi les bénéficiaires potentiels d’une telle pension. Un geste fait également par plusieurs parlementaires sociaux-démocrates.

    Timișoara – 31 ans

    Journée de deuil, ce jeudi, à Timişoara, importante ville de l’ouest de la Roumanie, où, voilà 31 ans, les premiers révolutionnaires anticommunistes roumains perdaient la vie au nom de la liberté. Ce fut à ce moment-là que jaillissait l’étincelle qui allait mener, quelques jours plus tard, à la chute du régime communiste de Nicolae Ceauşescu. A noter que la Roumanie a connu la révolte anticommuniste la plus sanglante d’Europe du sud-est. En raison de la pandémie, les événements commémoratifs prévus à Timişoara n’ont pas eu l’envergure des années précédentes, mais ils ont réuni quand même des révolutionnaires, les familles des martyres, des autorités locales et centrales. Dans un message transmis à cette occasion, le premier ministre par intérim, le général Nicolae Ciuca, a insisté sur le besoin que la Roumanie éclaircisse les événements de décembre 1989. Pour certains salariés du ministère de l’Intérieur ce serait un devoir moral de demander pardon aux familles meurtries pour les erreurs et les abus commis à l’époque, a ajouté le premier ministre par intérim. Le 17 décembre 1989, à Timisoara, les forces de répression avaient ouvert le feu sur les manifestants qui scandaient dans les rues de la ville « Liberté ! » et « A bas Ceausescu ! ». Une centaine de personnes sont mortes et quelque 350 ont été blessées dans la révolution de Timişoara. (trad. Ioana Stancescu)