C’est une revue de presse sans couleur électorale, en ce vendredi, dernier jour de campagne du second tour de scrutin présidentiel en Roumanie, avec, au sommaire, des sujets de société, culturels et sportifs.
C’est une revue de presse sans couleur électorale, en ce vendredi, dernier jour de campagne du second tour de scrutin présidentiel en Roumanie, avec, au sommaire, des sujets de société, culturels et sportifs.
Diplomatie – Le chef de la diplomatie roumaine, Titus Corlăţean et son homologue tchèque, Lubomir Zaoralek, ont signé lundi à Bucarest un accord portant sur les sépultures de guerre. Par ce document, les deux pays s’engagent à préserver les tombes des héros de l’autre pays. Les discussions entre les deux ministres ont également porté sur les relations bilatérales, sur de sujets de l’agenda international, avec un accent particulier mis sur les évolutions au Moyen Orient, sans pour autant oublier les évolutions de sécurité dans le bassin de la Mer Noire. Dans ce contexte, Titus Corlăţean a réaffirmé le soutien de la Roumanie pour la poursuite du parcours européen des pays qui ont signé l’accord d’association politique et économique avec l’UE, notamment la République de Moldova, l’Ukraine et la Géorgie. La visite officielle en Roumanie du ministre tchèque des affaires étrangères a lieu dans le contexte du 20 anniversaire de la signature du Traité d’amitié et de coopération entre les deux pays.
Première voiture — Le gouvernement de Bucarest vient de lancer le programme “La première voiture”, afin de permettre aux jeunes de se procurer une nouvelle automobile. Pour pouvoir en bénéficier plusieurs critères sont requis, comme par exemple avoir moins de 35 ans et ne pas posséder d’autre voiture. L’avance minimum est de 5 à 10% de la valeur totale du crédit qui s’étale sur une période maximum de 7 ans. En plus l’intérêt se situera en dessous du niveau actuel de 10-12%. Les automobiles achetées par le biais de ce programme ne doivent pas dépasser les 12.400 euros. Le programme “La première voiture” entrera en vigueur le 1er novembre.
Dépenses — En Roumanie, deux tiers des dépenses d’une famille sont destinées à la nourriture, au transport et aux factures — eau, électricité, téléphonie et gaz. Selon les données publiées lundi par l’Institut national de la statistique, une famille roumaine alloue moins de 5% de ses revenus aux soins de santé, alors que les sommes destinées à l’éducation et à la récréation sont encore plus réduites. En même temps, environ 10% de l’argent d’un foyer est dépensé pour acheter des cigarettes et de l’alcool et pour de sorties au restaurant. Selon l’Institut national de la statistique une famille roumaine utilise en moyenne un peu plus de 5% de ses dépenses mensuelle pour se procurer des vêtements et des chaussures.
La nomination de leurodéputée sociale-démocrate roumaine, Corina Cretu, aux fonctions de commissaire européenne chargée de la Politique régionale, dans léquipe de Jean-Claude Junker, est largement commentée par les principaux quotidiens roumains. Ils sinterrogent également sur ce que pourrait apporter à la Roumanie la visite en Chine du chef du gouvernement de Bucarest, mais, surtout, si lEurope de lEst ne devrait pas se préparer à la guerre face au projet de la “Nouvelle Russie”, annoncé par Moscou.
Les derniers mois de mandat en tant que secrétaire général de l’OTAN s’avèrent aussi les plus tendus pour le Danois Anders Fogh Rasmussen. D’ici le 1er octobre, lorsque le Norvégien Jens Stoltenberg prendra la relève, Anders Fogh Rasmussen doit gérer le dossier ukrainien, autrement dit la crise géopolitique la plus grave en Europe depuis la guerre froide. Par conséquent, loin d’être de simples gestes protocolaires, les visites d’adieu qu’il fait actuellement dans les capitales des Etats membres de l’Alliance, sont plutôt une occasion de tester la cohésion et la cohérence des alliés.
A Bucarest, à l’issue des pourparlers avec les responsables roumains, Anders Fogh Rasmussen s’est exprimé dans un entretien à Radio Roumanie : « Nous devons nous adapter à ce nouveau et, je dirais, sophistiqué type de guerre. Au lieu d’une agression militaire proprement-dite, nous assistons à des mouvements plus discrets, censés déstabiliser la situation dans certains pays. On l’a vu très clairement en Ukraine, d’abord en Crimée, annexée de manière illégale par la Russie, et on le voit à l’heure actuelle dans l’est de l’Ukraine aussi. Sans aucun doute, la Russie est responsable pour la déstabilisation de l’est de l’Ukraine. De même, nous remarquons les tentatives de la Russie d’acheter de l’influence auprès des médias, par exemple, pour influencer l’opinion publique et les processus politiques. Il ne faut pas être naïfs, il faut s’adapter à cette situation».
Après avoir affirmé son appui ferme à l’unité et à la souveraineté de l’Ukraine voisine, la Roumanie est devenue, ces dernières semaines, la cible de la rhétorique virulente de plusieurs hauts responsables de l’administration de Moscou. Bien qu’ils soient exagérés, les soucis visant une éventuelle expansion à l’ouest du conflit avec l’Ukraine agitent les esprits au sein de l’opinion publique roumaine.
Pour sa part, Anders Fogh Rasmussen a voulu infirmer les scénarios catastrophiques promus de manière naïve ou intéressée par différentes voix de l’espace public roumain : «Je vous assure que tous les alliés sont profondément engagés dans le respect de l’Article 5 et la politique de défense commune. En témoignent les pas que nous avons déjà faits pour renforcer la défense commune par plusieurs opérations aériennes de la police au-dessus des Pays Baltes. Les avions AWACS font des missions de surveillance au-dessus de la Pologne et de la Roumanie, vous pouvez également constater le renforcement de la présence navale allié dans la Mer Noire et dans la Mer Baltique et plusieurs exercices militaires terrestre qui ont été effectués. Par conséquent, nous avons déjà prouvé que l’Alliance était unie pour ce qui est de l’Article 5 et de la défense commune».
La simple existence de l’OTAN et de l’Article 5 ont un effet si fort de découragement, que les potentiels agresseurs ne penseraient même pas à attaquer un Etat membre, a ajouté pour Radio Roumanie le secrétaire général de l’OTAN. (Trad. Valentina Beleavski)
Les articles sur le pont du premier mai – car en Roumanie cette fête a plus ou moins perdu sa symbolique ouvrière – ne remplissent plus les premières pages des principaux journaux roumains, comme on aurait pu sattendre. Un seul mot à lire dans tous les principaux quotidiens bucarestois – la “guerre”.
Aujourd’hui, c’est du temps et des temps que parlent les journaux roumains, dans leur variante électronique – la guerre commerciale entre la Russie et l’Occident, les indicateurs macroéconomiques de la Roumanie, les perspectives du pays vues par les Roumains…
La Croix rouge a fait officiellement son apparition en Roumanie en 1876, en tant qu’organisation humanitaire, étant accueillie par l’Hôpital Colţea de Bucarest, qui fut son premier siège. La Croix rouge roumaine a reçu le baptême du feu dès sa création: une ambulance dotée des équipements nécessaires et accompagnée d’un médecin et de plusieurs infirmières quittait le pays pour soigner les blessés de la guerre russo-turque. La guerre russo-roumano-turque de 1877-1878 était la guerre d’indépendance de la Roumanie et à l’époque, la Croix rouge avait déjà beaucoup d’expérience. La reine Marie, épouse du roi Ferdinand Ier, a compté parmi les grandes personnalité actives au sein de la Croix rouge roumaine. L’image de la reine, portant l’uniforme d’infirmière et passant d’un hôpital de campagne à un autre pendant la première guerre mondiale, a fait le tour du monde.
Nous avons choisi quelques témoignages provenant de personnes actives au sein de la Croix rouge roumaine et conservés dans les archives du Centre d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine. Nous écoutons, pour commencer, Ani Cicio-Pop Birtolan, fille de Ştefan Cicio-Pop, un des leaders politiques des Roumains de Transylvanie. Elle se rappelle la fin de la première guerre mondiale et l’effervescence de la période ayant précédé la constitution de la Grande Roumanie : « Pendant la guerre, j’étais déjà adolescente. Je travaillais pour la Croix rouge et je soignais les soldats sans discrimination. Je travaillais dans un hôpital où nous donnions à manger à la cuillère aux soldats qui n’avaient plus de bras ou de jambes. Nous faisions de notre mieux pour adoucir leur sort. Et nous avons pris l’initiative d’aller, avec d’autres dames roumaines de la Croix rouge, assurer une permanence à la gare et offrir du thé chaud et des petits pains cuits préparés à la maison. Nous préparions la pâte et ma sœur de 14 ans s’était chargée de les mettre au four — ce qu’elle faisait jour et nuit, elle ne dormait presque pas. Une femme, qui était pour nous une sorte de servante, l’y aidait. Et puis, je me suis dit que nous devions sortir un manifeste. Je regrette n’avoir gardé aucun exemplaire de ce manifeste que j’ai composé avec un extraordinaire enthousiasme juvénile, je ne me rappelle même plus comment. Tout ce que je me souviens, c’est que nous nous sommes précipités au piano et nous avons commencé à jouer et chanter « Réveille-toi Roumain ! » et « Aux armes ! ». Ce fut une sorte de folie juvénile. »
Le journaliste Mircea Carp a été officier et proche des Américains qui travaillaient pour la Croix rouge. Avant de quitter illégalement la Roumanie et travailler pour Radio Free Europe et la Voix de l’Amérique, il avait été arrêté par les nouvelles autorités communistes, étant accusé d’entretenir des relations avec des Américains : « Entre mars 1947 et la date de mon arrestation, je me suis trouvé à la tête de plusieurs équipes qui distribuaient, à Iaşi et à Vaslui, ce que l’on appelait « le don américain ». C’est de ce côté-là que les enquêteurs voulaient pousser l’enquête, pour savoir si j’avais transmis des messages secrets de la part des autorités américaines aux différents membres de la Croix rouge roumaine de Vaslui et surtout de Iaşi. J’ai réussi à me faufiler en disant la vérité à moitié, sans donner d’informations : j’ai reconnu avoir porté, à deux reprises, des enveloppes fermées. J’ai affirmé, à chaque fois, que, puisqu’il s’agissait d’un officier, je ne pouvais pas ouvrir l’enveloppe pour voir ce qu’il y avait dedans. Les enquêteurs insistaient, affirmant qu’ils savaient que les enveloppes contenaient des ordres militaires pour la Croix rouge de Iaşi et de Vaslui, ce qui était, évidemment, une énormité, car, à ce moment-là, les Américains ne faisaient pas de choses de ce genre. Surtout qu’il s’agissait d’une mission d’assistance à la population des régions touchées par la sécheresse. Aussi, ai-je reconnu avoir porté des enveloppes, mais j’ai ajouté qu’elles avaient été ouvertes sous mes yeux, à Iaşi et à Vaslui, et qu’elles contenaient des renseignements sur la façon dont l’assistance américaine devait être distribuée. Il ne s’agissait ni d’espionnage, ni de sabotage ou de je ne sais quoi d’autre. »
Alexandru Smochină a été détenu politique et, arrivé au camp de Magadan, dans l’Extrême Orient, on lui a dit qu’il pouvait envoyer des lettres en Roumanie par l’intermédiaire de la Croix rouge : « Je suis allé dans la salle à manger — car c’est là que nous avions été convoqués. Il n’y avait là que des étrangers : des Coréens, des Japonais, des Allemands, des Bulgares, des Serbes, des Hongrois, des Finlandais, des Roumains, des habitants des pays baltes, des citoyens soviétiques, des Grecs, des Perses d’Asie, enfin un grand nombre de nationalités. Après un certain temps, je me suis assis aux côtés de Lascu, un Roumain de Bucarest. Ensuite, quelqu’un est venu pour nous dire, de façon laconique, que nous avions le droit d’écrire à nos familles, restées au pays. Et on nous donnait, à cette fin, des cartes postales émises par la Croix rouge et le Croissant rouge. L’officiel nous a conseillé d’écrire à nos parents, car, disait-il, une mère reste une mère — et il avait raison. Celui qui a une femme, après quelques années n’est plus sûr de l’avoir toujours. Il nous a donc distribué à chacun une carte postale et nous a dit que nous avions le droit d’écrire tous les mois. Nous pouvions leur demander automatiquement une carte postale par mois, pour l’écrire. Il nous a dit que nous avions également le droit de recevoir des colis et même de l’argent, en précisant ce que nous ne pouvions pas recevoir — des armes et tout ça. Cela nous a beaucoup réjouis et nous avons tous écrit nos cartes postales, là, dans la salle à manger. Ensuite il les a ramassées. Pourtant, puisque je suis passé d’un camp à l’autre, je n’ai jamais reçu de réponse de ma femme et de ma fille. »
La Croix rouge roumaine a été une expression de la solidarité humanitaire, au-delà de la haine entre les gens et entre les nations. Et elle a souvent accompli sa mission fondamentale: celle d’apporter un peu de consolation, un rayon de lumière et d’espoir pendant ces années troubles et difficiles. (trad. : Dominique)
Occupée par les armées des Puissances centrales et avec une image ternie dans les yeux de ses alliés pour avoir conclu une paix séparée en mars 1918, la Roumanie s’efforçait, à l’automne 1918, de sortir du mieux qu’elle le pouvait d’une situation désespérée. Le changement du rapport de forces entre les Puissances centrales et l’Entente à l’automne 1918 a fait qu’à la fin de la guerre la Roumanie se trouve dans le camp des vainqueurs. La récompense fut l’apparition de la Grande Roumanie par l’union de la Bessarabie, de la Bucovine et de la Transylvanie avec l’ancien Royaume de Roumanie. Cela n’a pas été facile, pourtant. Jusqu’en 1920, l’élite politique et la société dans son ensemble ont dû dépasser les obstacles à la reconnaissance internationale du nouvel Etat.
L’historien Ioan Scurtu sur la Roumanie entre l’extase et l’agonie dans les années de guerre 1916-1918. «Théoriquement, la Roumanie aurait dû être prête parce qu’elle est entrée en guerre en 1916, soit deux années après le commencement de la grande conflagration mondiale. Normalement, elle aurait dû en profiter pour armer ses contingents, préparer son arsenal de guerre et constituer ses réserves. Malheureusement, elle n’a rien fait de tout cela. Une fois éteint l’enthousiasme du départ à la guerre quand les soldats sont partis sur le front en chantant, les armes ornées de fleurs et acclamés par la foule comme s’ils allaient faire la fête, le désastre s’est installé lors de la bataille de Turtucaia. C’est à ce moment-là que les responsables roumains ont compris l’ampleur de la situation. En novembre, les troupes se sont retirées de Transylvanie pour qu’en décembre, la capitale soit placée sous l’occupation en forçant le gouvernement à se retirer à Iasi. En plus, une épidémie de choléra éclatée dans la région s’est soldée par des milliers et des milliers de victimes. Et comme si tout cela ne suffisait pas, un accident ferroviaire s’est produit près de Iasi quand un train a déraillé en provoquant la mort de plus d’un millier de personnes ».
Mais, en 1917, l’armée roumaine enregistre enfin ses premiers moments de gloire, à Marasesti, Marasti et Oituz où elle arrive à bloquer l’avancée des troupes allemandes et austro-hongroises. Pourtant, suite à la révolution bolchevique, la Roumanie dépose les armes et se voit placer sous l’occupation russe. Même si son trésor fut à jamais perdu en Russie, même si elle a fait la paix avec ses adversaires et même si elle s’est vu forcer de tenir tête aux révolutions bolcheviques de Russie et de Hongrie, la Roumanie a pourtant réussi à surmonter toutes ses grandes difficultés.
Tout cela, grâce à une élite politique visionnaire, selon Ioan Scurtu. « Evidemment que ce fut un succès, et tous ces obstacles ont été surmontés grâce à une classe politique roumaine de valeur. Je me réfère avant tout à I.C. Bratianu, le président du PNL, qui a participé aux événements et qui a joué un rôle important dans la Grande Union. Les habitants de Bessarabie ainsi que ceux de Bucovine et de Transylvanie ont envoyé à Iasi leurs émissaires. Lesquels se sont entretenus, avant la proclamation de l’Union, avec le roi Ferdinand, avec Ion C. Bratianu et d’autres hommes politiques sur les voies à suivre en vue de la mobilisation pour l’Union. I.C. Bratianu a dirigé la délégation roumaine à la Conférence de paix de Paris. C’est là qu’il a rencontré les grands noms politiques de l’époque, à commencer par le président américain Wilson jusqu’au premier ministre britannique. Ce fut finalement une victoire vu que les documents de l’union de Chisinau, Cernauti et Alba Iulia ont été ratifiés par les traités de paix de 1919 — 1920.»
Ce sont les deux monarques de la Roumanie, Ferdinand Ier et Marie, qui ont mobilisé les énergies de la nation. Ioan Scurtu. « Le roi Ferdinand était Allemand et il avait été officier dans l’armée allemande. Lorsque le Conseil de la Couronne s’est déclaré en faveur de l’entrée de la Roumanie en guerre contre son pays, en fait, contre sa famille, en disant « oui », le roi a fait un sacrifice personnel et un acte d’une grande importance pour la Roumanie. La Conseil de la Couronne une fois achevé, l’homme politique Petre P. Carp fit remarquer au roi qu’il avait oublié sa nationalité allemande, en vertu de laquelle il n’aurait pas dû prendre une telle décision. Ferdiand lui répondit qu’il savait très bien qu’il était Allemand : « Si les intérêts de mon pays avaient concordé avec ceux de la Roumanie, c’est avec grande joie que j’aurais fait autrement. » – lui dit le roi. »
Pourtant, il se considérait aussi Roumain, roi des Roumains, et a agi dans l’intérêt du pays à la tête duquel il se trouvait. Le sacrifice de la nation était aussi celui du couple royal, et les caractères forts, on les reconnaît dans les moments de difficulté maximale. L’historien Ioan Scurtu : « La reine Marie a été dès le début l’adepte de l’entrée de la Roumanie dans la Guerre aux côtés de l’Entente. Elle était Britannique et elle a joué un rôle important dans la démarche visant à convaincre Ferdinand de faire ce sacrifice personnel, dans l’intérêt du peuple roumain. Pendant la guerre, le roi et la reine sont restés en permanence aux côtés des Roumains, de l’armée, des principaux leaders politiques. Au moment où il fut question de quitter la ville roumaine de Iasi pour trouver refuge à Odessa, face à une possible occupation allemande de toute la Moldavie, le roi Ferdinand a refusé de partir. I.C Bratianu a fait de même. Ce geste a mobilisé la conscience publique, y compris certains hommes politiques qui s’étaient empressés à quitter le pays pour gagner l’Ukraine, dans des villes loin de la ligne du front ».
La Grande Roumanie a été l’objectif de la génération au début du 20e siècle. Un objectif qui a été atteint par tous ceux qui y ont cru, en suivant certains modèles et principes, en dépassant des émotions et des hésitations, par une volonté puissante…(trad. : Ligia Mihaiescu, Dominique)
Rapport – La Commission parlementaire spéciale – Rosia Montana- doit présenter son rapport ce lundi et donner son vote final sur le projet gouvernemental visant l’exploitation aurifère des Monts Apuseni, au centre de la Roumanie. Les libéraux membres de la coalition de centre-gauche au pouvoir, aux côtés du Parti Social Démocrate et du Parti Conservateur, rejettent le document sous sa forme actuelle et se prononcent pour l’élaboration d’une nouvelle loi qui réglemente en général l’activité minière de Roumanie. Les sociaux-démocrates, eux, privilégient la modification de l’actuel projet de loi. Des protestations contre le projet de Rosia Montana ont eu lieu pour le 11e dimanche de suite à Bucarest et dans d’autres villes du pays. Les protestataires dénoncent la méthode d’exploitation par cyanuration, en raison de son possible impact sur l’environnement.
Réunion – Le chef de la diplomatie roumaine, Titus Corlatean, participe ces lundi et mardi à New Delhi, en Inde, à la 11e réunion ministérielle Asie-Europe Meeting- ASEM. A l’agenda des discussions figurent entre autres les opportunités et les défis économiques en Europe et en Asie, la lutte contre le terrorisme, la sécurité cybernétique, alimentaire, énergétique et des ressources d’eau. L’occasion aussi pour les ministres des Affaires étrangères de faire le point sur l’adhésion à l’ASEM de nouveaux pays, dont notamment la Croatie, qui est devenue membre de l’UE, au 1er juillet 2013. ASEM représente un processus informel de dialogue lancé en 1996, qui regroupe les Etats membres de l’UE, la Norvège, la Suisse et 20 pays asiatiques.
Commémoration – Il y a 95 ans, la première Guerre mondiale prenait fin officiellement. C’est le 11 novembre 1918 qu’est entré en vigueur l’armistice signé en forêt de Compiègne entre les Alliés et l’Allemagne. Des moments de recueillement sont observés aujourd’hui dans plusieurs pays en la mémoire des victimes. Des cérémonies ont également été organisées à Bucarest par les Ambassades de France et d’Allemagne.
En 1941, après l’échec de toute tentative de faire la paix en Europe, la Roumanie rejoint les troupes allemandes en guerre contre l’Union soviétique. Le 22 juin 1941, l’armée roumaine traverse le Prut aux côtés des Allemands pour libérer la Bessarabie annexée par les Soviétiques une année auparavant. Entre temps, les pays vainqueurs de la Première Guerre Mondiale se trouvaient dans une situation désespérée. Une bonne partie de la France était sous occupation allemande, tandis que l’Angleterre s’efforçait de tenir tête aux attaques de la Wehrmacht, l’armée allemande du IIIe Reich.
Entre temps, la Roumanie, sanctionnée par Hitler pour sa politique francophile et anglophile et soumise au nouvel ordre allemand instauré en Europe, se voit forcer à contribuer massivement aux efforts de guerre.
L’offensive de l’armée roumaine contre celle soviétique a commencé sur un front allant de la Mer Noire jusqu’aux Carpates de la Bucovine. Au bout d’une faible résistance russe de trois semaines seulement, les troupes roumaines arrivent à libérer la Bessarabie et le Nord de la Bucovine. Dans un télégramme adressé le 27 juillet au maréchal Antonescu, Hitler le félicite pour la libération des territoires roumains et lui demande de franchir le Dniestr et de s’emparer de la Transnistrie. Les contingents roumains et allemands poursuivent ensemble leur offensive antisoviétique et avancent par le sud de l’Ukraine pour atteindre finalement Stalingrad.
Dans une interview accordée en 1993 au Centre d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine, le sous-lieutenant Ahile Sari se rappelait des épisodes atroces dont il avait été témoin lors de son passage par le sud de l’Union soviétique: « Ce fut pour la première fois de ma vie que j’ai eu l’occasion de voir un train bondé de déportés soviétiques. Ce n’étaient pas des prisonniers, mais des familles déportées, probablement en route vers l’Allemagne. Ce ne fut qu’à ce moment là que j’ai réalisé la situation dramatique que traversaient toutes ces figures déshumanisées, affamées qui couraient après nous, la gamelle vide, en espérant recevoir quelque chose à manger. Ce fut tellement triste de voir tout le contingent d’officiers et de soldats se précipiter sur les barbelés pour donner à manger à ces malheureux, tandis que les chiens aboyaient près des wagons».
Lors de la bataille de Stalingrad, l’armée roumaine subit des pertes importantes. La contre-offensive russe, connue sous le nom d’opération Uranus, visait justement le flanc nord allemand particulièrement vulnérable, puisqu’il était défendu par les unités hongroises et roumaines faiblement équipés et au moral bas. Appuyés par des blindés, les Soviétiques déclenchent l’offensive le 19 novembre. Mais les troupes roumaines s’y attendaient et elles ont commencé à demander des renforts. Sans résultat.
Le sous-lieutenant Ahile Sari remémore un des épisodes intervenus à la veille de l’attaque de l’armée soviétique: « A un moment donné, un prisonnier russe emmené dans notre caserne nous a communiqué de rester en alerte et de prendre des mesures de sécurité car l’armée russe s’apprêtait à déclencher une grande offensive. Attention, on est très bien armé, nous disait le Russe, nous avons beaucoup de blindés. Nous en avons informé nos supérieurs, mais ils ont fait la sourde oreille. Ils avaient du mal à croire qu’au bout d’un ou de deux mois de combats en plein hiver, les Russes auraient toujours la force de passer à l’attaque. Tout cela se passait le 17 novembre. Le 19 novembre 1942, à quatre heures du matin, la grande contre-offensive russe s’est déclenchée sur le Don et à Stalingrad ».
Plus de 300.000 soldats roumains ont perdu la vie lors de la bataille livrée à la boucle du Don. Dans une interview accordée en 1998, le notaire Mircea Munteanu remémore sa participation à la guerre. Il fut blessé et il s’est vu obliger de se retirer pour recevoir des soins médicaux dans des conditions extrêmes.
Pourtant, son témoignage ne fait que renforcer l’idée qu’à la guerre, même blessé et théoriquement mis hors danger, le soldat continue à subir des souffrances parfois atroces: « L’attaque a commencé le 29 novembre, sur la rive du fleuve Don. Une balle m’a transpercé la clavicule et l’omoplate gauches. Blessé, je me suis retiré sur un char allemand. En route, j’ai croisé deux majors qui m’ont demandé de descendre du char et de les rejoindre. Je leur ai dit que le commandant de notre peloton avait été tué à la baïonnette par les Russes. Ils ont pansé mes blessures. Et puis nous sommes arrivés à une ferme, en fait un kolkhoze, appelé Frunza, la Feuille. J’y a rencontré un sergent qui m’a offert du pain et une boîte de conserve. Il m’a conseillé de me rendre au village voisin, où il y avait des chariots du Régiment 16 d’infanterie. J’y suis allé, mais j’avais très mal à l’épaule, car j’avais fait le chemin à cheval en traversant un champ enneigé. La neige n’était pas trop épaisse, mais il faisait affreusement froid et je saignais, car le bandage avait décollé. Je ne pouvais plus monter à cheval, parce que j’avais les bottes gelées. Faute de boussole, je m’orientais d’après la lune. Je ne voyais rien. Et tout d’un coup, j’ai aperçu un village. J’ai entendu la sommation, en roumain, d’une sentinelle. Je lui ai demandé où trouver un aide-soignant pour me faire panser. On m’a dit qu’il y avait un vétérinaire. Je me suis remis à marcher aux côtés d’autres blessés. Nous avons parcouru une trentaine de km derrière la ligne de front. Là, il y avait un bain pour les soldats et un hôpital. Les Allemands ont jeté à l’étuve nos uniformes tachés de sang. Finalement, nous avons embarqué dans les wagons d’un train de bétail qui nous a emmenés en Pologne.»
Considérée par les historiens militaires comme la plus sanglante de l’histoire, la bataille de Stalingrad a marqué un tournant dans la guerre menée sur le front de l’Est. Ce jugement, c’est nous qui le faisons maintenant, car, à l’époque, les gens espéraient toujours dans un autre dénouement de l’histoire. (trad : Ioana Stăncescu, Mariana Tudose)
Quand ils prononcent le mot « politique », la plupart des Roumains deviennent suspicieux. Pour eux, la politique telle quelle se présente aujourdhui est synonyme de corruption, darrogance, darrivisme, quelques-uns des pires traits de caractère de nous autres humains. Seulement, voilà, les exceptions sont là pour confirmer la règle ; cest le cas de Iuliu Maniu qui vient infirmer la majorité de nos préjugés.
Iuliu Maniu est né en 1873 dans le nord-ouest du territoire actuel de la Roumanie, dun père avocat et dune mère qui était la fille dun prêtre uniate (grécà-catholique). Il suit lexemple de son père et choisit une carrière davocat, soutenant sa thèse de doctorat en 1896, à lUniversité de Vienne, capitale de lempire austro-hongrois. Le jeune Maniu entre en politique et adhère au Parti national roumain de Transylvanie, à lépoque sous la domination de lAutriche-Hongrie.
En 1906, il est élu député au parlement de Budapest ; en 1915, il est mobilisé dans larmée austro-hongroise qui combat sur le front italien et en 1918, à la fin de la Grande guerre, Iuliu Maniu et plusieurs autres leaders des Roumains de Transylvanie décident de lunion de cette province historique avec le Royaume de Roumanie. En 1926, Maniu et Ion Mihalache fondent le Parti national paysan, un des partis politiques les plus importants de lentre-deux-guerres en Roumanie.
Entre 1918 et 1945, Iuliu Maniu occupe trois fois le fauteuil de premier ministre. Démocrate convaincu, il refuse de collaborer avec la dictature fasciste et surtout avec celle communiste. Jeté en prison en 1947, lorsquil avait déjà 75 ans, Iuliu Maniu meurt le 5 février 1953, à cause des mauvais traitements appliqués aux détenus dans la geôle de Sighet.
Incorruptible, charismatique, tenace, Maniu a vraiment été lhomme dont les Roumains avaient besoin pour traverser les moments difficiles de leur histoire de la première moitié du 20e siècle. Tous ceux qui lont connu se souviennent de lui comme dun modèle à suivre en politique et dans la vie courante. Parmi les innombrables témoignages, nous en avons choisi deux, archivés au Centre dhistoire orale de la Radio publique roumaine. En 2000, Ioana Berindei, fille de Ioan Hudiţă, un des ténors du Parti national paysan, se souvenait de celui quelle appelait « Monsieur Iuliu Maniu » comme dune personne exceptionnellement généreuse et modeste : « Maniu était dune modestie rare ! Cétait quelquun de très gentil, avec une voix très douce. Je me souviens quun jour il est venu déjeuner chez nous et ma sœur et moi lavons accueilli ; “bonjour, mes chères demoiselles”, nous a-t-il saluées. Moi, jai remarqué une tache sur le col de sa veste et je lui ai demandé de me permettre de la nettoyer. “Aïe, quelle honte !”, sest-il exclamé. Alors je lui dis que cela peut arriver et quil me laisse enlever la tache pour pas quil lemporte aussi ailleurs. M. Maniu était très malade à lépoque, il se laissait pratiquement choir sur la chaise. Ses genoux lui faisaient mal et il avait des difficultés à marcher, mais je ne lai jamais vu nerveux ou irrité par quoi que ce soit. Il était dun calme reposant. En tant quhomme politique, il était intransigeant. Cest ce que mon père aimait chez lui, dailleurs. Il ne cédait jamais ! Les mauvaises langues disaient qu’il avait du mal à se décider. Mais ce sont des méchancetés faciles, tous les hommes politiques ont des ennemis, personne nest parfait ni ne peut vivre sans avoir des opposants. Mais pour M. Maniu, je vous dis que je ne lui ai pas trouvé de failles, et je ne dis pas ça parce que mon père laimait bien, ni parce que moi je lai connu. Il sest opposé de toutes ses forces au roi Carol II. Maniu a été déçu par le roi dont il a vu toutes les erreurs. »
Sergiu Macarie, militant de la jeunesse nationale paysanne, racontait en 2000 que lentrée des Soviétiques en Roumanie à la fin de la seconde guerre mondiale a été un signal dalarme pour la société roumaine qui sest mobilisée contre ces ennemis. Malgré son âge et sa maladie, Iuliu Maniu na pas hésité à sy impliquer activement : « Il ne passait pas deux-trois jours sans un accrochage avec les bandes communistes. Il y avait des réunions plus importantes et on savait tout de suite que ceux-là allaient venir. Nous nous rassemblions tous sur la Place du Palais et acclamions le roi, et puis le roi sortait au balcon et nos ovations faisaient résonner la grande place.Et à chaque fois, des véhicules transportant des ouvriers armés de matraques faisaient leur apparition. Le 15 mai 1947, par exemple, cétait lanniversaire des 98 ans depuis le discours d’affirmation nationale de Simion Bărnuţiu, au Champ de la Liberté de Blaj, en Transylvanie, et Maniu sest joint à nous. A la fin, on a vu de ces véhicules. On a peiné pour évacuer le président du parti de là. »
Iuliu Maniu a été un symbole de la démocratie. Entre 1944 et 1947, le poids de son nom a attiré les espoirs des Roumains et la considération des Occidentaux qui lont tenu pour leur plus important partenaire de dialogue. Son intransigeance lui a coûté la vie, mais son sacrifice la transformé en un repère de la politique roumaine du 20e siècle. (trad. : Ileana Taroi)