Quand on les croise dans la cour de chez eux, ils sont souvent bien éméchés, tout échange avec eux peut très vite virer au règlement de compte, une violence latente qui peut exploser à tout moment et éclabousser le premier passant…
Quand on les croise dans la cour de chez eux, ils sont souvent bien éméchés, tout échange avec eux peut très vite virer au règlement de compte, une violence latente qui peut exploser à tout moment et éclabousser le premier passant…
Je monte dans un taxi pour me rendre dans le centre de Bucarest. Comme la plupart du temps, je tombe sur un chauffeur bougon, qui fait le moins deffort possible pour converser avec moi, se contentant de hocher la tête et denclencher son compteur. Il me demande dun ton gouailleur à la Gabin« Italien toi ? ». Je lui répond que non, que je suis français… Le voilà lancé à plein gaz, on ne peut plus larrêter, un vrai gamin surexcité…
Le vieil homme est absorbé par le paysage qui passe en continu dans la lucarne, alors que le jeune homme, lui, regarde dans la lucarne de son ordinateur avec une expression plus tendue que celle de son aîné. La seule vraie différence est que le vieil homme subit ce qu’il entend, ce qu’il voit défiler, pendant que le jeune homme peut choisir ce qu’il veut voir ou entendre.
Un père en larmes est un monde qui s’écroule, un bloc de roc qui se brise sous le poids de la chute. Je ne recommande cette expérience à personne. Pourtant, pas plus tard que l’autre jour, en prenant mon bus, ce sont des larmes que je devine, sous les traits crispés d’un paysan qui fume en continu pour tirer sur les dernières bouffées d’oxygène en famille.
Égoïstement, j’ai toujours fermé les yeux sur ses problèmes. Peut-être que sa disponibilité me rassurai. Sa capacité d’observer le monde, plutôt que d’en être un acteur me réjouissait. Lorsque je lui racontais mes problèmes au travail, mes emportements, lui, avait toujours la bonne distance et le calme apaisant de celui qui va à contre courant du mouvement ambiant…
Sa grand-mère ne laissait rien se perdre, trop pauvre
pour se permettre de jeter et peut-être également trop attachée à ses objets,
les rares choses qu’elle possédait et qui, comme elle, ont vieilli et ont fini
par devenir hors d’usage.
Chaque matin jemprunte le tramway qui doit me relier au poumon de Bucarest, une ville bouillonnante de liberté, où lon mange à lheure désirée, où notre temps de travail sorganise à la sauce maison.
Il parcourt chaque jour 4 kms de route pour aller chez des propriétaires bucarestois venus s’installer à la campagne. Mitica entretient leurs potagers, taille leur pelouse, arrose leurs plantes. Parfois, sous le coup de l’inspiration, il rajoute des petites fleurs, ici et là, malgré les indications précises des maîtresses de maison. Son jardin à lui n’a pourtant rien à envier à ceux de ses employeurs, c’est une véritable explosion de couleurs. On y trouve des pétunias blanches ou roses, des géraniums rouges, des rosiers, des marguerites, des tulipes, le tout jalousement gardé par de petits nains de tailles et de couleurs différentes.
Lentrée est encerclée par des barreaux, lhomme prend quelques mesures de sécurité, je le comprends ! Je pousse la porte qui résiste, je lenfonce presque. A lintérieur, une odeur de renfermé me pète aux sinus, de quoi décourager la majorité des visiteurs, mais pas moi. Je navais pas tort, des chapeaux de toutes les coupes et de toutes les formes trônent sur chaque étagère. Il y a des feutres, des Stetson en poils de mouton, des borsalinos, des bérets douvriers, de chapeaux de paysans. Pour un amoureux du chapeau comme moi, cest la caverne dAli baba !
On peine à imaginer qu’au fin fond de la Roumanie, cet homme a travaillé autrefois avec les ingénieurs du monde entier sur un des projets les plus ambitieux du siècle : le soleil artificiel. A l’heure où les jeunes, de plus en plus nombreux, quittent leur pays pour aller travailler ailleurs, lui fait de la résistance à sa manière. Il reste solidement accroché à ses bouts de terre, naïf pour certains, plein d’espoir pour ceux qui le connaissent vraiment…
Il est jeune, il a toujours la pêche et la banane, mais surtout il a une plume de romancier qui a mis des couleurs inattendues sur la Roumanie. « Hors-piste en Roumanie » c’est un « récit du promeneur » à travers le pays, dans des endroits beau, pittoresques, inattendus, cachés ou improbables, tous reliés par les sens, les ressentis de l’homme qui les découvre. Ce roman cartonne en ce moment en France et dans les milieux francophones de Roumanie. En prolongement, de ce livre, son auteur, Grégory Rateau, a accepté de se joindre à l’équipe de RRI en français pour une série de portraits d’hommes et de femmes, d’ici et d’ailleurs, mais toujours avec la Roumanie en toile de fond. Grégory Rateau est le nouveau chroniqueur de RRI et c’est un plaisir de laccueillir parmi nous…
Il est jeune, de nationalité française, ayant une formation de réalisateur de films documentaires, scénariste, professeur de direction d’acteur et de scénario. Grégory Rateau — c’est son nom — a l’habitude de la vie dans les grandes métropoles occidentales, et c’est justement cette habitude qui, un beau jour, ne répond plus à ses rêves. Il décide alors de partir à la recherche d’une vie plus authentique et d’une vérité plus profonde. Cette quête et une histoire d’amour l’emmènent en Roumanie dont il tombe presque tout de suite sous le charme. Au point où elle lui sert d’inspiration pour un livre — « Hors-piste en Roumanie. Récit du promeneur », publiée chez l’éditeur français L’Harmattan.