Tag: Transylvanie

  • Le Cluj touristique

    Le Cluj touristique

    Cluj-Napoca, le chef-lieu du comté, est l’un des centres universitaires les plus importants de Roumanie et a été Capitale européenne de la jeunesse en 2015. Cette ville très spéciale est le point de départ pour visiter les sites les plus attrayants du département. Karin Elisabeth Hann, du Centre d’information et de promotion touristique de la municipalité de Cluj-Napoca, affirme que la ville a une offre très généreuse en termes de tourisme. Cela est dû en grande partie au charme particulier que lui confère son histoire de près de deux millénaires. Ainsi, l’ancien centre-ville peut être le point de départ idéal pour tout visiteur. Karin Elisabeth Hann : « Le touriste peut choisir différents itinéraires : le Cluj gothique, le Cluj baroque ou l’Itinéraire des places historiques, celui des édifices religieux et des palais. Cluj-Napoca est à coup sûr l’une des villes les plus accessibles et envoûtantes d’Europe, et qui figure dans de nombreux classements européens et mondiaux en termes de qualité de la vie, de politiques urbaines et de jeunesse. Pour tout vacancier, notre ville dispose à peu près de tous les ingrédients nécessaires pour être attrayante. La ville médiévale s’est développée à l’intérieur de l’enceinte fortifiée avec des tours et des bastions, comme d’autres villes anciennes de Transylvanie. Cluj-Napoca est ensuite devenue une ville habitée en grande partie par les Magyars et les Roumains, et après la Première Guerre mondiale, la ville est devenue une partie du Royaume de Roumanie. »



    Nous continuons notre voyage avec Raisa Loşonţi, du Centre national d’information touristique et de promotion du comté de Cluj : « La place principale à visiter à pied, c’est la Piaţa Unirii, et sa première attraction, c’est l’église catholique Saint-Michel. C’est un édifice gothique important avec une tour impressionnante haute de 80 mètres. L’ensemble monumental Mathias Corvin est à retrouver sur la même place ; il a au premier plan Matei Corvin, roi de Hongrie, né à Cluj, dans une maison sise à moins de 500 mètres du groupe statuaire. Et c’est toujours sur la même place que vous trouverez le Musée d’art, accueilli par un important palais baroque, qui abrite d’importantes collections ; vous pourrez y suivre l’évolution de l’art en Transylvanie et au niveau national. La visite devrait continuer par le Musée d’ethnographie de la Transylvanie, avec une grande collection de costumes traditionnels. La section en plein air de ce musée est appelée le Parc ethnographique. Là, le visiteur trouvera de nombreuses maisons traditionnelles en bois, mais aussi des églises. »



    La plupart des bâtiments de Cluj-Napoca sont rénovés grâce à un programme lancé il y a quelques années. De nombreuses modernisations ont été réalisées à l’aide de fonds européens. Par exemple, la première rue intelligente en Roumanie y a été inaugurée en 2020. Elle dispose d’un système d’irrigation avec des capteurs, et une voie piétonne moderne, avec la priorisation des moyens de transport sans moteur. Les habitants ont quatre places à leur disposition pour charger des véhicules, des vélos ou des trottinettes électriques, et des prises USB pour recharger des dispositifs mobiles. Le Wi-Fi est gratuit. En plus, le système d’éclairage public est intelligent. Karin Elisabeth Hann, du Centre d’information touristique et de promotion de Cluj-Napoca, nous invite à poursuivre notre voyage. « Le visiteur qui vient à Cluj peut trouver une offre complète de tourisme dans la nature, de tourisme d’aventure et de niche. Une tendance internationale à se réapproprier les valeurs traditionnelles est également constatée. Il y a la Contrée du Papillon bleu, qui est une marque de microrégion et rassemble 12 communes de la Vallée de la rivière Someşul Mic. Cette marque met en avant le patrimoine naturel et anthropique, mais aussi les gens de l’endroit. Il y a quelques festivals locaux tels que celui du magiun de prune, sorte de confiture de prunes préparée par une technique traditionnelle, au feu de bois, sans sucre. Il y a un Festival de la lavande, mais aussi des pique-niques dans les ménages traditionnels, des repas traditionnels ou aristocratiques, des colonies de danse et bien plus encore. Je mentionnerais ensuite Ţara Călatei (la Contrée de Călata), une région à prédominance magyare, comprenant la partie occidentale du comté de Cluj et une partie de la partie sud du département de Sălaj. Elle est très connue pour les ornements des costumes traditionnels, mais aussi pour les maisons traditionnelles. Enfin, je recommanderais la visite des forteresses érigées à Ţara Călatei : celles de Bologa, d’Aghireşu, de Liteni, Cetatea Fetei ou encore la cité de Gilău. Il y a aussi quelques musées saxons locaux qui sont uniques dans cette partie du pays. Je mentionnerais le Musée du buffle, dans la commune de Baciu, le Musée archaïque, du village de Vlaha ou encore le moulin à eau de Bologa. »



    D’autres itinéraires touristiques comprendraient le Cluj œcuménique, les touristes pouvant choisir la route des églises fortifiées ou celle des églises en bois. Et si vous aimez les sports d’hiver, vous trouverez des pistes de ski dans les Monts Apuseni. Raisa Loşonţi, du Centre national d’information touristique et de promotion du département de Cluj, nous présente deux autres destinations très prisées par les visiteurs. « La Mine de sel de Turda est un véritable musée de l’extraction du sel en Transylvanie, et c’est à la fois une base moderne de soins pour les maladies respiratoires. Vous y trouverez de nombreuses possibilités de loisirs, y compris pour les enfants : bowling, roue panoramique entre autres. Une fois descendus jusqu’à un lac souterrain dans la Mine Terezia, vous pouvez faire une petite promenade en barque. A proximité se trouvent les Gorges de la Turda, une attraction naturelle qui offre un spectacle rocheux sur environ 2 km, avec une hauteur verticale d’environ 200 mètres. Les amateurs d’adrénaline peuvent y faire de l’escalade, et il existe un itinéraire de via ferrata. Les Gorges Turenilor, une autre destination appréciée par les touristes, sont elles aussi à proximité ; en fait, elles sont parallèles aux Gorges de la Turda. »



    Karin Elisabeth Hann, du Centre d’information touristique et de promotion de Cluj-Napoca, vous invite à consulter le site visitcluj.ro, traduit en plusieurs langues. En plus, si vous allez au Centre d’information touristique, vous bénéficierez gratuitement d’accès à Internet et de la base de données des structures d’hébergement et des organisateurs d’événements. Vous recevrez aussi des plans, des dépliants et des brochures en anglais, français, allemand, italien, espagnol, hongrois, hébreu, polonais, chinois, japonais, turc et coréen. Bonne visite ! (Trad. : Ligia)


  • Les collines de la Transylvanie

    Les collines de la Transylvanie

    Il existe, en Roumanie, de nombreuses destinations idéales pour l’écotourisme. La région appelée « Les collines de la Transylvanie », située au sud de cette province historique du pays, est très attractive de ce point de vue. A vélo, à pied ou à cheval, vous aurez l’occasion d’explorer une région où la nature offre un véritable spectacle, où les châteaux et les villages aux églises fortifiées ont de merveilleuses histoires à raconter. Il existe également de nombreux centres de gastronomie locale, où le visiteur est convié à goûter aux plats cuisinés à l’ancienne.

    Cristina Iliescu, manager de la destination « Les Collines de la Transylvanie », détaille son offre spéciale de vacances. « L’endroit le plus connu de notre destination écotouristique, c’est la région des villages saxons, réputés pour leurs églises fortifiées. Certains visiteurs associent notre destination à l’aire protégée qui abrite des milliers d’espèces d’oiseaux, d’autres au nom du prince Charles de Galles, qui possède des propriétés dans cette contrée. Nous l’appelons la zone des villages et des petites villes situés au cœur de la Roumanie, plus précisément dans les vallées des rivières Târnava Mare, Hârtibaciu et sur la rive droite de l’Olt, entre Sighişoara, Mediaş, Sibiu, Făgăraş, Rupea, Sighişoara. Nous promouvons intensément le côté écotourisme et avons fait les démarches nécessaires auprès du ministère de tutelle pour obtenir la certification en ce sens. Cela signifie un tourisme culturel et éco-responsable, respectueux de la nature et des communautés locales, du lien qui existe entre les deux. De ce point de vue, je crois que nous pouvons donner l’exemple. Dans le paysage mosaïque de la région, l’homme et la nature ont vécu en étroite communion au long de tant de siècles d’histoire. »

    Voyons maintenant quelles sont les activités que l’on peut faire dans ce pays de conte de fées ? Cristina Iliescu explique : « Pour ce qui est des activités principales, sachez qu’en plus des sentiers de randonnée et des itinéraires à parcourir à vélo ou à cheval, nous recommandons vivement l’observation de la nature, des oiseaux, vu qu’il s’agit de l’aire protégée la plus étendue du pays. Les sentiers totalisent 600 km, peut-être même plus depuis la finalisation des travaux pour le tronçon Terra Saxonum des itinéraires de randonnée aménagés et balisés connus sous le nom de Via Transilvanica. Ces trajets touristiques sont accessibles à pied, à vélo ou à cheval. Les autres types de tourisme que l’on peut pratiquer sont le tourisme culturel, le tourisme rural, l’agritourisme. Le tourisme gastronomique commence lui aussi à se développer. C’est ici qu’est né le concept de « brunch » en Roumanie. Le Transylvanian Brunch combine la dégustation de produits locaux et la visite des lieux que les touristes sont venus découvrir. »

    Dans une région si riche en histoire, en traditions et en légendes, on ne saurait oublier de mentionner les artisans qui ont hâte de montrer aux touristes les objets sortis de leurs mains, précise Cristina Iliescu, manager de la destination touristique « Les Collines de la Transylvanie » : « Le village de Mălâncrav est un très bon exemple en ce sens. Et puis, dans le village de Viscri, certains vieux métiers sont toujours pratiqués comme celui de forgeron, de verrier ou de briquetier. On peut y visiter par exemple l’atelier où le verre est fait à la main, comme autrefois. La plupart des maîtres artisans de l’endroit sont tisseurs ou vanniers. Certains métiers traditionnels disparaissent lentement. Heureusement qu’il y a des gens qui les revitalisent. Un de ces métiers anciens qui se meurent, c’est le feutrage. C’est à Copșa Mare que l’on peut toujours rencontrer un maître feutrier. Il existe également des métiers plus récents, comme la sculpture sur cire. »

    La destination « Les Collines de la Transylvanie » propose aussi un riche calendrier d’événements. Pendant cette période, en raison de l’obligation de respecter la distanciation sociale, on a été contraints d’annuler la plupart des événements. Certains d’entre eux ont pourtant été organisés, précise Cristina Iliescu, qui explique : « C’est grâce au fait que notre région est très étendue, ce qui, par ces temps de pandémie, représente un avantage. Avec un nombre restreint de participants, on peut toujours organiser de nombreux événements dans les villages. On peut, par exemple, se promener dans les villages de Meșendorf ou de Hoghilag pour sentir les tubéreuses ou pour assister à un concert de musique classique. Les concerts Sonoro, qui ont eu lieu cette année, seront certainement organisés l’année prochaine aussi. Un autre exemple serait le Festival Icon Arts. Nous organisons une école d’été pour les étudiants des académies de musique, à la fin de laquelle est prévue une semaine entière de concerts dans des endroits inédits, tels une église fortifiée ou la cour d’un gîte rural. Des événements comme ceux-ci permettent de préserver la distanciation sociale, car ils se déroulent à l’extérieur. Malheureusement, certains événements d’envergure n’ont pas pu se tenir cette année, mais nous espérons que la situation sera tout autre l’été prochain. Nous avons aussi la semaine Haferland, qui met en valeur la culture saxonne de Transylvanie. Il ne faut pas oublier de mentionner les compétitions cyclistes et les pièces de théâtre montées dans des granges. C’est dire que la gamme d’événements est très large. »

    Les retours sont généralement positifs, affirme notre interlocutrice : « Nous proposons des questionnaires aux touristes pour établir des statistiques. Ceux qui nous rendent visite pour la première fois se disent extrêmement surpris, car ils s’attendaient à une destination presque exotique. Ils sont fascinés non seulement par le paysage, mais aussi par la gastronomie, le calme et notamment la sécurité. Ce dernier aspect, ils l’apprécient d’autant plus que des histoires circulent en Europe occidentale sur la sécurité en Roumanie. Je n’ai pas rencontré de visiteurs qui ne se soient pas déclarés ravis des expériences vécues lors du séjour dans notre destination touristique. »

    Dans les années à venir, de nombreuses expériences uniques viendront s’ajouter à cette offre touristique, précise Cristina Iliescu, manager de la destination « Les Collines de la Transylvanie » : « Nous avons toujours en vue de nouveaux projets. Il y en a un, actuellement, que nous apprécions fortement. Intitulé Edu Labs, ce projet est mené par la Fondation New Horizons et vise à attirer les jeunes vers des micro-spécialisations dans le domaine du tourisme, dont celui de guides spécialisés. Nous sommes très contents d’avoir réussi à y intéresser les jeunes, même avec l’aide des partenaires, ainsi que la communauté locale qui mérite bien une promotion accrue. Vous pouvez nous rejoindre sur le site colinele-transilvaniei.ro et sur les réseaux sociaux. »

    Une raison de plus de choisir la destination « Les Collines de la Transylvanie », c’est que le comté de Sibiu a déclaré 2021 « Année de la randonnée ». (Trad. Mariana Tudose)

  • 100 ans depuis la signature du Traité de Trianon

    100 ans depuis la signature du Traité de Trianon

    Le Traité dessinait sur la carte de l’Europe de nouveaux Etats, telles la Yougoslavie, la Tchécoslovaquie, ou encore la Hongrie, partie de l’ancienne Autriche-Hongrie défaite, alors que d’autres Etats, telle la Roumanie, voyaient leur territoire s’agrandir. Suite au Traité de Trianon, le royaume de Roumanie intégrait en son sein le Banat, la Bucovine, le Crisana, le Maramures et encore la Transylvanie, jusqu’alors provinces de l’empire d’Autriche-Hongrie, mais où les Roumains étaient majoritaires. Au mois de mars 1918, la Bessarabie, province roumaine de Russie, avait rejoint le royaume de Roumanie par la volonté nationale, en suivant le principe de l’autodétermination. Le Traité de Trianon établissait aussi les frontières de la nouvelle Hongrie avec ses voisins, soit l’Autriche, la Tchécoslovaquie, puis aussi avec la future Yougoslavie et la Roumanie.

    La Première guerre mondiale s’était achevée au mois de novembre 1918, lorsque l’Allemagne avait capitulé devant les forces franco-anglo-américaines. Mais la population magyare et ses élites n’étaient pas résignées devant le sort qui leur était préparé. Des révoltes, fomentées selon le modèle bolchévique, embrasèrent le pays. La république soviétique hongroise, qui prit le dessus à Budapest, déclencha ainsi la guerre contre la Tchécoslovaquie et la Roumanie, pour récupérer les territoires perdus suite aux conditions imposées par les Alliés. Les victoires remportées par les armées tchécoslovaque et roumaine ont cependant vite fait de mettre un terme à la Hongrie soviétique, et ont mené à l’occupation de Budapest par l’armée roumaine. Au début de 1920, les conditions étaient remplies pour que le traité de paix avec cette dernière soit, enfin, signé. L’historien Ioan Scurtu nous raconte l’atmosphère délétère qui régnait au début de l’année 1920 dans la moitié est de l’ancien empire d’Autriche-Hongrie : « Le Traité de Trianon est le résultat d’âpres disputes avec la délégation hongroise à la Conférence de paix, qui bataillait ferme pour maintenir l’intégrité territoriale de la Hongrie historique, contestant les revendications des Roumains, des Slovaques, des Croates et des Slovènes, rattachés par la suite à des Etats nouvellement constitués. Il fut finalement signé lorsque la délégation hongroise, dirigée par Albert Apponyi, s’est rendu à l’évidence devant le principe de l’autodétermination nationale, promu par les autres délégations. Le président de la Conférence, le premier-ministre français Alexandre Millerand considérait que les peuples avaient exprimé leur volonté à l’automne 1918, en décidant de prendre leurs destinées en main. Cela fait que les arguments avancés par la délégation hongroise, qui soutenait la thèse du maintien des frontières de la Hongrie millénaire et faisait sortir l’épouvantail des catastrophes à venir dans l’éventualité de son démembrement, n’ont pas été suivis. »

    La Roumanie eut gain de cause à Trianon, non seulement parce qu’elle faisait partie du camp des vainqueurs, mais aussi et surtout parce qu’elle avança des arguments de poids à l’occasion. Ioan Scurtu : « L’argument de poids a été la décision prise par l’Assemblée nationale d’Alba Iulia, une assemblée largement représentative, avec ses 1228 délégués élus, originaires de toutes les circonscriptions de Transylvanie, et qui sont venus en ayant pour mandat impératif de voter l’union de la Transylvanie avec la Roumanie. Mais il y a eu encore la convention du mois d’août 1916, suite à laquelle la Roumanie est entrée en guerre du côté de l’Entente. Cette convention traçait en détail les frontières de la future Roumanie en cas de victoire des Alliés, en ce y compris ses frontières avec la Hongrie. Enfin, notons aussi l’importance de la contribution de l’armée roumaine pendant la guerre. En effet, l’entrée en guerre de la Roumanie à l’été 1916 a fait baisser la pression allemande sur le front français, car il fallait qu’une partie des troupes allemandes et autrichiennes aillent faire face aux Roumains ; Et puis il y a eu aussi ces batailles héroïques de Mărăști, Mărășești, Oituz, à l’été 1917, et qui ont fait subir d’importantes pertes aux Puissances centrales, facilitant ainsi la victoire finale, de 1918, de l’Entente. »

    Parlant de l’union de 1918, scellée par le Traité de Trianon, le grand historien Nicolae Iorga écrivait : « Notre hommage doit s’adresser à tous les Roumains, depuis le plus haut gradé militaire et politique et jusqu’au dernier paysan qui a pris l’habit militaire ».

    Et s’il est parfaitement vrai que la victoire a été le résultat de l’effort de la nation, il est tout aussi vrai que la Roumanie pouvait s’enorgueillir d’avoir eu à sa tête des personnalités d’exception. Ses souverains d’abord, le roi Ferdinand 1er et la reine Marie, ouvrent avec honneurs la liste, suivis de près par les hommes politiques, tel l’ancien président de Conseil Ion I. C. Brătianu, Iuliu Maniu, Vasile Goldiș, Ștefan Cicio-Pop, George Pop de Băsești, Ion Inculeț, Pantelimon Halipa, Ion Nistor, et encore par des militaires, tels le sous-lieutenant Ecaterina Teodoroiu, le capitaine Grigore Ignat, les généraux Constantin Prezan, Alexandru Averescu, Eremia Grigorescu, et par bien d’autres. Mais la Roumanie avait chèrement payé le triomphe magnifique remporté à l’issue de la guerre. Ioan Scurtu :« Le royaume de Roumanie a payé d’abord le prix du sang. Près de 800 mille Roumains y ont laissé leurs vies : Dans les combats, à cause des pandémies, des maladies, sacrifiés sur l’autel de la patrie pendant ces deux années de guerre. Des pertes matérielles et spirituelles ensuite. Les occupants allemands, autrichiens, bulgares et turcs ont mis à sac les régions qu’ils avaient occupées. Puis, n’oublions pas l’affaire du trésor, que le gouvernement roumain, pendant son exile de Iasi, avait décidé de mettre à l’abri en Russie. Deux convois, le premier parti au mois de décembre 1916, le second au mois de juillet 1917, ont acheminé le trésor de la Roumanie dans une Russie embrasée par la révolution bolchévique. Plus de cent ans après, ce trésor, déposé de bonne foi entre les mains et dans la responsabilité de l’Etat russe n’a toujours pas été recouvert, alors que la partie russe convenait dans l’accord signé à l’occasion qu’elle en assumait la responsabilité ».

    Il y a cent ans, le Traité de Trianon scellait le rapport de forces en vigueur et la volonté de la majorité des gens d’alors. Une page d’histoire venait de se tourner, une autre commençait. (Trad. Ionut Jugureanu)

  • Viscri

    Viscri

    Fouler la terre de cet endroit du département de Brasov, un endroit devenu mythique grâce à cette réputation récemment gagnée, offre au visiteur la chance d’un retour aux sources. Village aux maisons anciennes, souvent centenaires, peintes aux couleurs claires, avec leurs volets en bois, village traversé par des charrettes tirées par des chevaux le long des routes poussiéreuses, Viscri est résolument décidé à conserver le rythme de l’ancien temps et, avec, un certain savoir-vivre. Mihai Grigore, établi à Viscri voici dix ans, a ouvert une maison d’hôtes, et il est devenu depuis un fervent promoteur de la région :



    « Viscri est un village saxon de Transylvanie dans ce qu’il a de plus typique. De par cela, il ressemble à beaucoup d’autres villages transylvains. Ce qui le distingue néanmoins, c’est le haut degré de conservation de l’habitat. L’ensemble du village de Viscri est ainsi inscrit au patrimoine de l’UNESCO, car vous ne trouverez pas des maisons aux structures ou aux façades modifiées. Pour rénover sa maison l’on fait sans exception appel aux matériaux traditionnels et ce souci de conservation du patrimoine fait que Viscri garde la même allure qu’il y a cent ans. Les visiteurs étrangers notamment, sont forcément éblouis par cet état de conservation, par l’unité de son style architectural. Nous avons l’une des plus belles et des plus anciennes églises fortifiées de Transylvanie, entourée par un mur d’enceinte impressionnant et classée monument historique ».



    L’église a en effet été fortifiée autour de l’an 1500. Le mur d’enceinte, qui s’élève à plus de 7 mètres, a été érigé au début du 16e siècle. Au 17e siècle des maisons s’érigent en contrefort, et le mur d’enceinte se dote de tours de défense conservées jusqu’à nos jours, et d’un chemin de ronde. Les longues périodes pacifiques d’après 1743 ont fait que le chemin de ronde a été démoli, sa place étant reprise par des entrepôts destinés à entreposer les céréales des villageois. L’intérieur de l’église garde encore son plafond d’origine de 1743, et son mobilier austère. Mais Viscri n’est pas seulement un musée en plein air, une enfilade de maisons saxonnes bien conservées avec, en point d’orgue, son église fortifiée, il est aussi le berceau d’une cuisine locale typique et savoureuse. Mihai Grigore :



    « Viscri est, en effet, un village saxon typique, avec sa tradition architecturale et religieuse. Mais aux côtés des Saxons qui l’avaient fondé, d’autres communautés y ont vécu et ont laissé leur trace. Il s’agit des Roms, des Roumains, des Magyars. Et sachez qu’à Viscri l’on mange bien, très bien même. L’on utilise des produits locaux, et la plupart des maisons d’hôtes ont leur propre potager bio. Qui plus est, en règle générale, la plupart des activités proposées aux touristes prennent place à l’extérieur, dans la nature. Cela est d’autant plus important cette année, vu les restrictions imposées par la pandémie avec le nouveau coronavirus. Ainsi, nous arrivons à assurer notre protection et celle de nos touristes, sans pour autant faire de rabais pour ce qui est de la variété des activités proposées. Le festival de musique de chambre, intitulé Sonoro Musikland, qui a lieu chaque année à Viscri, vient juste de s’achever. Les concerts ont certes abandonné l’intérieur des églises fortifiées, où ils étaient habituellement accueillis, au profit de la cour des mêmes églises. Et, en dépit du grand nombre d’amateurs de musique, la sécurité sanitaire a ainsi pu être assurée sans problèmes. En revanche, d’autres événements déroulés à grand renfort de public, tels ceux qui avaient lieu au long des pistes de VTT, ont été annulés cette année. Ces événements risquaient d’amener plus de mille participants d’un coup, et cela aurait représenté un risque dans le contexte actuel. Il s’agit néanmoins d’activités qui peuvent s’organiser de manière individuelle. Un tel trajet destiné aux VTT s’étend ainsi sur plus de cent kilomètres, et parcourt l’ensemble des villages saxons de Transylvanie. Il s’agit d’un trajet merveilleux, mais qui peut être parcouru de façon individuelle, pas besoin d’organiser des événements spécifiques pour ce faire. En conclusion, nous avons maintenu une partie des événements habituels, et d’autres ont été ajournés pour l’année prochaine ».



    Et les touristes semblent être au rendez-vous. Mihai Grigore précise :



    « Certains sont devenus des habitués, ils reviennent ainsi chaque année. Des Norvégiens, par exemple. D’autres groupes de touristes passionnés par l’ornithologie viennent tous les ans pour suivre la vie des oiseaux. Les Britanniques, eux, s’avèrent être des passionnés du VTT. Les Allemands, forcément, ils viennent retrouver parfois leurs origines saxonnes, cet héritage culturel qui est le leur. Les Français, c’est surtout des voyages en famille. Car Viscri constitue en effet une destination idéale pour les familles avec des enfants et des ados. C’est un espace de liberté, dont ils en profitent à loisir, une liberté qui se fait rare ailleurs. Enfin, notez que certains grands animaux peuvent être rencontrés en liberté dans cette région, dont des cerfs, par exemple, et les ados sont enchantés. Nous avons des touristes de toute l’Europe. »



    Quel que soit votre profil et vos envies de découverte, prenez votre temps pour vivre au rythme de ce village ancestral, blotti à l’ombre de son église fortifiée. Le temps de légende n’est jamais loin du village de Viscri.


    (Trad. Ionut Jugureanu)

  • Via Transilvanica, un chemin de randonnée exceptionnel

    Via Transilvanica, un chemin de randonnée exceptionnel


    Fin juillet, les derniers tronçons du chemin de randonnée Via
    Transilvanica, qui traverse les départements de Mureș et Harghita, au centre de
    la Roumanie, ont été mis en service. Ces 285 km de chemin viennent compléter
    les 400 km déjà exploitables, explique Alin Ușeriu, président de l’association
    Tășuleasa Social, pour qui la Roumanie représente une destination sûre, située
    à proximité de grandes capitales européennes et, surtout, un endroit
    magnifique.

    Alin Ușeriu : « La Transylvanie fait partie
    intégrante de la Roumanie et cela vaut la peine de la découvrir en utilisant Via
    Transilvanica. Les richesses naturelles et historiques ou encore le
    foisonnement ethnique tellement caractéristique de la Transylvanie se laissent
    découvrir au long de ce chemin exceptionnel. Le sentier, qui commence à Putna,
    en Bucovine, s’achève au Danube, dans la ville de Drobeta-Turnu Severin, après
    avoir parcouru sept régions historiques d’une beauté fascinante. La Bucovine
    demeure une région caractérisée encore par ses paysages naturels, demeurés largement
    à l’état sauvage, mais également par son patrimoine religieux. La route nous
    emmène ensuite en Ținutul de Sus, le Pays d’en haut en français, où les
    traditions ancestrales ont encore cours. Le chemin suit d’abord la vallée du
    Somes, ensuite celle de la Bistriţa, se frayant un chemin à travers des territoires quasi
    vierges. Visiter ensuite le Pays sicule, c’est vivre au rythme d’une région
    habitée par une ethnie, les Sicules, qui a fortement marqué l’histoire et la
    culture transylvaines. Une région qui peut se targuer d’une culture gastronomique
    traditionnelle inédite et tellement riche. La Transylvanie en tant que telle
    est de fait le musée en plein air le plus vaste d’Europe. Plus de 200 forts,
    églises fortifiées et châteaux essaiment son territoire. Certes, les Saxons
    transylvains ont quasiment disparu de nos jours, mais l’héritage historique et
    architectural qu’ils nous ont légué demeure impressionnant, partie importante du
    patrimoine de l’humanité. La route nous fait ensuite découvrir une autre région
    riche en histoire, berceau de la nation roumaine, en suivant la vallée de la
    rivière Cerna, en Terra Dacica et en Terra Romana, où l’on se laisse bercer par
    la beauté des paysages vallonnés et par la gentillesse des habitants. Enfin,
    une fois franchie la vallée de la Cerna, le Danube dans toute sa majesté apparaît
    devant nos yeux ébahis ».



    Via Transilvanica c’est aujourd’hui 680 kilomètres d’invitation irrépressible à prendre le large et à découvrir, à pied ou en vélo, des coins sauvages et la trace de cultures anciennes. Alin Ușeriu, président de l’association Tășuleasa Social : « Le dernier tronçon, de 100 km,
    qui traverse le plateau de Mehedinţi, est quasiment finalisé. Suivront
    bientôt les départements de Sibiu, Hunedoara, Alba et Caraș-Severin. Le projet se
    poursuit, avec l’aide et le soutien de tous ceux qui l’ont rendu possible dès
    le départ. Vos auditeurs doivent apprendre l’existence de ce chemin longue
    distance conçu un peu à l’instar du Chemin de Saint Jacques de Compostelle,
    même si son but n’est pas religieux. Cela ressemble à ce qu’est le Chemin de
    Saint-Jacques-de-Compostelle pour l’Europe et le Pacific Trail pour l’Amérique.
    Un chemin sûr, qui offre une expérience spirituelle et culturelle au voyageur, qui
    fait découvrir un ensemble d’attractions touristiques, autrefois inatteignables
    d’un coup. Une route accessible en vélo, une route qui sera aussi ouverte à
    coup sûr au cheval. Mais une route qui vaut surtout la peine d’être parcourue à
    pied. »



    Pour franchir les 15-20 km par jour, il vaut néanmoins mieux avoir une
    certaine condition physique préalable. Alin Ușeriu : « Sur le site viatransilvanica.com
    vous trouverez un guide explicatif, qui détaille chaque étape, en ce y compris
    les préparatifs nécessaires avant d’envisager de partir à l’aventure. Certes,
    au long de cette voie, vous trouverez toutes les facilités nécessaires au
    randonneur. N’imaginez pas qu’il faudrait prendre avec vous des victuailles
    pour une cinquantaine de jours, comme c’est le cas pour parcourir le Pacific
    Trail. L’on trouve à chaque pas un endroit pour se restaurer ou une auberge
    pour y passer la nuit. Par ailleurs, dans le contexte actuel, où la
    distanciation physique est de rigueur, Via Transilvanica constitue une
    destination rêvée pour les randonneurs avertis mais, en fait, pour tous les
    amoureux de découvertes, d’inédit, d’expériences inoubliables. »



    Une appli intitulée Via Transilvanica est également disponible au téléchargement. (Trad. Ionuţ Jugureanu)

  • Des histoires au cœur de la Transylvanie

    Des histoires au cœur de la Transylvanie

    C’est de cette manière que notre histoire
    d’aujourd’hui pourrait commencer. Nous voilà arrivés, chers amis, en
    Transylvanie, au cœur de la région qui s’étale entre les cités de Sibiu, Făgăraş
    et Sighişoara, la deuxième aire protégée la plus vaste de Roumanie. « Ici,
    on vient pour visiter et on y reste pour toujours », ce sont les mots par
    lesquels débute un film documentaire parlant justement de cet endroit magique,
    du photographe mentionné et des vacanciers qui choisissent d’en faire leur chez
    soi. Pour plus de détails sur cette production, passons le micro au réalisateur
    Mihai Moiceanu, photographe et vidéographe : « Mon film raconte l’aventure d’un couple
    d’Allemands, salariés d’une multinationale, que j’avais rencontrés 15 ans
    auparavant, quand je les ai accompagnés pendant un séjour en Roumanie. Et
    puisqu’ils étaient passionnés de photographie, je leur ai proposé plusieurs
    tours photographiques privés. Et comme ils sont tombés sous le charme de la
    Transylvanie, ils ont fini par y acheter une ancienne propriété en ruines, sur
    les lieux de laquelle ils ont fait construire une très belle pension, où ils
    mènent, depuis, leur vie de tous les jours. »





    Issu d’une campagne de promotion, déroulée l’année
    dernière, en partenariat avec l’Association de Tourisme écologique Roumanie et
    avec la Fondation pour le partenariat, le documentaire de Mihai Moiceanu s’est
    proposé de promouvoir le tourisme vert en Roumanie, en faisant découvrir au
    public la région dite des Collines de Transylvanie. Pourquoi cet
    endroit précis ? Le réalisateur, Mihai Moiceanu, raconte : « L’un des atouts de la Transylvanie est
    justement cette vie rurale qui s’y déroule depuis des centaines d’années. Il y
    a ensuite de nombreux monuments peu connus, mais spectaculaires du point de vue
    de la construction et de la position géographique. On ne saurait oublier les
    communautés rurales très intéressantes qui continuent à préserver leurs
    traditions et qui attendent les touristes pour des vacances actives. Cela veut
    dire qu’à part les objectifs touristiques connus, les vacanciers se verront
    offrir la possibilité de découvrir la véritable vie à la campagne, avec son
    rythme particulier, ses coutumes ou encore ses plats à base d’ingrédients issus
    d’une agriculture biologique.»





    Considérée l’une des régions les plus pittoresques d’Europe centrale et
    orientale, la Transylvanie, dont le nom signifie, en latin, « au-delà des
    forêts », s’enorgueillit d’un riche patrimoine culturel et naturel à découvrir
    en toute saison. Outre les belles églises fortifiées, notons aussi l’existence
    de plusieurs édifices religieux en pierre datant du début du XXème siècle et
    dont les fresques sont attribuées à la famille de maçons Zugravu, connus pour
    leur style moralisateur d’interprétation des scènes bibliques. Le réalisateur Mihai Moiceanu nous parle aussi des protagonistes de son
    documentaire: « Cela fait plusieurs
    années que j’organise des tours photographiques à travers la Roumanie, à
    l’intention aussi bien des photographes amateurs que des professionnels.
    Ensemble, on part à la découverte de différents endroits, communautés ou
    traditions. La plupart de ceux qui m’ont accompagné une fois, ont choisi de
    répéter l’expérience, ce qui fait qu’on a fini par devenir amis. Mon film a été
    commandé pour ainsi dire par ceux de l’Association de tourisme écologique de
    Roumanie qui voulait faire la promotion des régions de tourisme vert de chez
    nous. Et comme les collines de Transylvanie figurent parmi les destinations de
    tourisme respectueux de la nature, je leur ai proposé de réaliser un
    documentaire qui raconte l’histoire de cette famille allemande. Une approche
    qui a cartonné auprès du public. »





    Le film « Les Collines de Transylvanie » attire le public
    plutôt par la simplicité et la beauté des images que par le sensationnel. Mihai
    Moiceanu renchérit: « La plupart des touristes qui
    visitent la Roumanie ne sont pas forcément émerveillés par des paysages
    formidables, comme cela aurait été le cas si on parlait des Alpes, mais par
    cette communion entre l’homme et la nature. Par la façon dont la nature se mêle
    aux traditions et au quotidien. C’est un des aspects qui fait la différence. Un
    autre élément renvoie à la préservation des coutumes et de la vie simple,
    proche de la terre. Trouver une civilisation qui se conduit selon des règles
    d’il y a 50 ou 70 ans, c’est ça qui impressionne les touristes. »





    Disons à la fin que tout en vous invitant à chercher à voir le documentaire
    de Mihai Moiceanu, on vous invite aussi à vous rendre un jour en Transylvanie pour voir de vos propres yeux les merveilles dont on vient de parler. (Trad. Ioana Stăncescu)

  • Le régiment des gardes-frontières de Năsăud

    Le régiment des gardes-frontières de Năsăud

    Le musée des gardes-frontières de Năsăud est un musée d’histoire locale qui garde les témoignages du fait que ces lieux ont été habités depuis la nuit des temps. Tombes, armes, céramique, couteaux et autres objets fabriqués par l’homme racontent une histoire vieille des plusieurs millénaires. De même, bracelets, boucles d’oreilles, fibules, harnais, pièces de monnaie, inscriptions sur pierre et autres objets attestent de la présence des civilisations celtique, dacique et romaine dans cette zone. Les vestiges du Moyen-Age n’y manquent pas non plus : armes, bijoux, documents écrits, vêtements, portraits, et la liste continue.

    Dans l’histoire de l’Autriche-Hongrie, la zone de Năsăud se fait remarquer pendant le règne de Marie-Thérèse, entre 1740 et 1780. Et pour cause. Le 12 avril 1762, l’impératrice signait l’acte qui jetait les bases du Régiment n° 2 d’infanterie des gardes-frontières valaques de Năsăud. L’unité était formée de Roumains qui bénéficiaient des mêmes privilèges que les régiments de Sicules de la même zone. Appelés aussi « milice nationale aux frontières » (miliția națională grănicerească), ces régiments avaient une double mission : protéger les frontières de l’empire et participer aux guerres en tant que troupes de combat. Les Roumains y agissaient sous le slogan « virtus romana rediviva », c’est-à-dire « la vertu romaine ressuscitée ».

    Pour plus de détails sur ce musée très intéressant de Năsăud, nous nous sommes adressés au muséographe Dan Prahase : « Le nom du musée vient du régiment roumain de gardes-frontières n° 2, créé en 1762, à l’époque de Marie-Thérèse. Le musée est sis dans l’ancienne caserne, un bâtiment de l’époque des Habsbourg, qui date d’environ 1770, érigé en brique et pierre et capable de résister aux bombardements. Sa fondation souterraine a plus de 2 m. Les Habsbourg ont construit un bâtiment si solide justement par crainte de bombardements. »

    Le 21 juin 1763, les gardes-frontières roumains prêtaient leur premier serment à l’impératrice Marie-Thérèse. En 1778, ils étaient envoyés lutter dans la guerre austro-prussienne. Une décennie plus tard, en 1788, ils luttaient contre les Turcs, en Bucovine. Puis, en 1793, ils ont été mobilisés contre les armées révolutionnaires françaises. Suivirent les campagnes d’Allemagne et d’Italie. En 1805, le même régiment roumain était envoyé lutter contre les armées de Napoléon. Il a également participé aux campagnes contre Napoléon Ier de 1809, 1812 et 1815. Enfin, en 1846, un bataillon du régiment de Năsăud a pris part à la répression de la révolte paysanne polonaise de Galicie.

    Le régiment roumain a eu une activité assez intense, comme vous pouvez le constater. Qui plus est, un des héros des guerres antinapoléoniennes est enterré sur le territoire actuel de la Roumanie, au département de Bihor (ouest).

    Le muséographe Dan Prahase précise : « Après Waterloo, en 1815, les Français continuent la lutte. Entre les 14 et 17 juillet 1815, les soldats de Năsăud et leurs camarades autrichiens voient Lyon capituler. Qui est le vainqueur impérial autrichien à Lyon ? C’est le général Frimont, de Lorraine. Il luttait du côté des Habsbourg. Il est enterré dans le village de Palota, au département de Bihor. Il a contribué à la construction de l’église du village. Il est mort en Autriche, mais il a été enterré au Bihor. »

    Pendant la Révolution de 1848, le régiment roumain des gardes-frontières de Năsăud reste fidèle à la couronne autrichienne et lutte contre les révolutionnaires hongrois dirigés par Lajos Kossuth, qui militaient pour la création d’un Etat hongrois indépendant. Après la Révolution, tous les régiments de gardes-frontières de l’armée autrichienne ont été supprimés pendant le règne de l’empereur Franz-Joseph. Ce fut en fait une réforme. Le régiment roumain a été transféré de Năsăud à Alba Iulia, soit de l’est à l’ouest (de la Transylvanie). Toutefois, le district de Năsăud a gardé son autonomie. Parmi les soldats remarquables de ce régiment, mentionnons Leonida Pop, qui a fait une carrière brillante dans la hiérarchie militaire autrichienne. En 1883, il devient conseiller de l’empereur François-Joseph, puis il est nommé chef de la chancellerie militaire de l’empereur.

    Pendant la Première Guerre mondiale, les soldats de Năsăud se retrouvent, malheureusement, dans le camp opposé aux Roumains de Roumanie, vu que la Transylvanie faisait partie de l’empire d’Autriche-Hongrie à ce moment-là.

    Notre invité, le muséographe Dan Prahase, explique leur dilemme : « J’aimerais qu’il soit possible de se mettre à la place de ces gens pour comprendre ce qu’ils pensaient. Des romans et des récits écrits par le célèbre auteur roumain Liviu Rebreanu en parlent. Les Roumains qui refusaient de lutter du côté de l’Autriche-Hongrie étaient exécutés. Alors, les soldats roumains ont tenté de faire un compromis : remplir leur devoir face à l’empereur, mais en même temps essayer de ne pas lutter contre les Roumains. Les soldats de Valachie et de Moldavie se sont confrontés au même problème émotionnel. »

    Après la première conflagration mondiale, le 1er décembre 1918, la Transylvanie a rejoint le Royaume de Roumanie, formé quelques décennies auparavant par l’union des Principautés de Valachie et de Moldavie. A ce moment-là, la frontière transylvaine a disparu et le régiment des gardes-frontière a cessé d’exister. Toutefois, l’esprit militaire de ces gens est resté depuis comme un repère de l’identité locale. (Trad. Valentina Beleavski)

  • Les bisons des Carpates

    Les bisons des Carpates

    Le bison dEurope est un mammifère ruminant de la famille des Bovidés. Autrefois présent dans presque toute lEurope, il est devenu aujourdhui une espèce en péril, surtout à cause de la chasse excessive, du braconnage et de la réduction progressive de son habitat. A lOuest de lEurope, le bison avait disparu dès le 11e siècle, alors quà lEst, il réussit à survivre jusquaprès 1927. En Moldavie, le dernier bison est tué en 1762, alors quen Transylvanie il survivra jusquen 1790. En Pologne, les bisons, propriété du roi, arriveront heureusement à survivre, et constituent aujourdhui la plus importante population de bisons en liberté dEurope. La Roumanie fait des efforts pour réintroduire le bison dEurope dans différents habitats des Monts Carpates, dans les départements de Neamț, Caraș Severin et Hunedoara. A la fin de lannée dernière, un nouveau projet, qui vise lintroduction du bison dEurope dans les Monts Fagaras, a été lancé par la Fondation Conservation Carpathia.



    La réintroduction du bison dans la région va faciliter la reconstruction des habitats dégradés et la reconstitution de la faune sauvage, selon Adrian Aldea, responsable du programme au sein de la Fondation Conservation Carpathia : « Il sagit dun projet plus ample que nous, à la Fondation Conservation Carpathia, essayons de mener, afin de créer la région dhabitat sauvage la plus étendue dEurope. Cela présuppose la réintroduction du castor et du bison dEurope, là où ces espèces ont disparu. Le bison nest plus présent en Roumanie, à lexception des régions où il avait dores et déjà été réintroduit.



    Le bison est un mammifère magnifique, majestueux, qui a un rôle essentiel dans le maintien de la chaîne trophique, mais la survie de cette espèce est en danger. Le projet prévoit la création des trois zones où le bison sera réintroduit, à hauteur dune trentaine dexemplaires dans chaque zone. Une fois passée la période de quarantaine et dacclimatation, les exemplaires seront libérés dans la nature. Nous avons déjà ramené onze exemplaires, qui se trouvent pour linstant en période de quarantaine. Une fois libérés, les bisons seront suivis grâce aux colliers dotés démetteurs GPS. On comprendra ainsi leur comportement, les zones quils privilégient. Les bisons proviennent des centres de reproduction qui existent en Roumanie et en Europe, leur sélection étant réalisée en fonction du profil génétique.



    A présent, nous avons 4 exemplaires originaires dAllemagne et 7 de Pologne. » La partie est des Carpates méridionales abrite lun des sanctuaires sauvages les plus étendus dEurope. Formé des trois aires naturelles protégées (le Parc national Retezat, le Parc national Domogled – Valea Cernei et le site Natura 2000 des Monts Țarcu), il se trouve au centre dun projet, piloté depuis 2014 par Rewilding Europe et WWF, censé réintroduire le bison dans cet aréal. Aujourdhui, des dizaines dexemplaires vivent à létat sauvage dans leurs deux zones de prédilection du site : les Monts Țarcu et Poiana Ruscă.



    Lintroduction du bison a donné aux autorités loccasion dencourager le développement durable de la région. Matei Miculescu, garde-chasse aux Monts Tarcului, est formel : « Aujourdhui, nous comptons 50 exemplaires de bison en liberté. Le bison saccommode bien sur ce territoire qui mesure plus de cent kilomètres carrés. La preuve : lon compte 6 nouveau-nés en 2019. Mais pour la région, le projet représente un formidable atout pour le développement de lécotourisme. Et pour cela, nous proposons des formules touristiques attrayantes, censées attirer les amoureux de la nature, ceux qui veulent voir des bisons en liberté, qui veulent dormir à la belle étoile, faire du camping en été dans cette région magnifique. Les touristes se font accompagner par des guides. Nous avons noué des collaborations avec une plate-forme hollandaise, European Safari Company. Mais nous avons créé aussi nos propres sites en ligne, tel le site măgurazimbrilor.com, où tout le monde peut voir ce qui se passe ici. Dès cette année, nous proposerons un séjour de 48 heures de randonnées accompagnées en nature, pour observer la vie des bisons à létat sauvage. Mais il ny a pas que les bisons, car nous avons la chance de bénéficier dune faune extrêmement bien fournie dans la région. »



    Depuis la réintroduction des bisons, les gens de la région se sont organisés dans une association, intitulée Măgura Zimbrilor Armeniş, censée mieux régir lécotourisme naissant dans les parages. Matei Miculescu : « Lassociation a plusieurs projets sur la table. Un projet censé développer linfrastructure, avec laide de la mairie de la commune dArmeniş. Puis un autre, pour bâtir des maisons dhôtes, respectueuses de lenvironnement. Nous réfléchissons maintenant à lancer également une cuisine communautaire, censée valoriser les produits de la région, les fruits et les légumes cultivés par les agriculteurs du coin, les fruits secs, la confiture maison quils produisent, ou encore la fameuse zacusca, ce ragoût paysan de légumes à tartiner. »



    Enfin, le Parc naturel de Vânători Neamţ est le seul endroit en Europe où lon retrouve à lheure actuelle aussi bien des bisons en captivité que des bisons à létat sauvage. Un détour par la région changera pour un moment et à coup sûr vos habitudes.

    (Trad. Ionut Jugureanu)

  • Le château de Bran

    Le château de Bran

    Arrêtons-nous aujourd’hui dans la belle province vallonnée de Transylvanie, pour regarder de plus près le célèbre château de Bran, l’un des objectifs les plus convoités par les touristes, qu’ils soient roumains ou étrangers. Covid-19 oblige, le château ne s’est rouvert au public que le 5 juin dernier, le temps que les mesures de sécurité sanitaire soient mises en place. Bogdana Balmuș, responsable du bureau de presse du château, nous parle des dernières attractions introduites au bénéfice des visiteurs, depuis que le château a changé de statut, entrant dans le giron de ses anciens propriétaires, et fermant de la sorte la longue parenthèse communiste.

    En effet, depuis 2009, l’archiduc Dominic de Habsbourg et les archiduchesses Maria-Magdalena Holzhausen et Elisabeth Sandhofer, soit les enfants de la princesse Ileana de Roumanie, ont recouvert la nue-propriété du château de Bran et du domaine attenant, nationalisés en 1948 par le régime communiste. Depuis lors, le château a fait peau neuve.

    Débutons notre parcours dans ses jardins, guidés par Bogdana Balmuș : « Le parc est plutôt grand et bien entretenu. Les touristes peuvent se prélasser sur les pelouses pendant la belle saison, et même y organiser leur pique-nique. Le restaurant du château, sis dans les jardins, peut d’ailleurs fournir le nécessaire. En longeant l’allée qui traverse le parc du château, l’on arrive devant l’entrée principale. La première salle, celle des gardes, conserve ses traits austères, à caractère militaire. Deux orifices qui transpercent les murs laissaient passer les cordes qui actionnaient l’échelle mobile, permettant autrefois l’accès à l’intérieur de la vieille forteresse médiévale. Le château de Bran a été érigé en 1377. Mais le système de l’échelle mobile était déjà en fonction avant l’apparition de l’actuelle tour, qui n’a été bâtie qu’en 1622, lorsque l’on avait également fait construire l’escalier d’accès, en pierre sculptée. Une fois franchi le petit passage qui suit, l’on se retrouve dans le vestibule qui donne sur la cour intérieure du château, où un banc invite déjà au repos les visiteurs exténués. »

    De là, on arrive au salon de la princesse Ileana, sœur cadette du roi Carol II et tante du roi Michel 1er, le dernier roi de Roumanie. A l’époque médiévale, cette pièce faisait la jonction entre l’entrée du château et la prison.

    Bogdana Balmuș : « Après 1920, lorsque la reine Marie prit possession du château, offert à la souveraine par le Conseil municipal de la ville de Brasov en hommage au rôle joué par la reine dans le processus d’union de la Transylvanie avec le royaume de Roumanie, cette pièce est devenue le salon royal du château. Plus tard, sa fille, la princesse Ileana, héritière du château, aménagea la salle de façon à y donner des bals, des réceptions, des réunions de famille. Enfin, nous entrons dans la cour intérieure, sur laquelle donnent les autres chambres du rez-de-chaussée. Voici, par exemple, les cuisines royales. »

    Mais parcourir l’ensemble du château est une affaire d’une journée entière, précise Bogdana Balmuș, la responsable du bureau de presse du musée du château : « Des aménagements inédits attendent le visiteur. Au premier étage, par exemple, lorsque nous avons démarré les travaux de réfection de la salle de Conseil, nous y avons découvert un escalier dérobé, taillé dans la roche. Passage étroit, aux allures d’une catacombe, il relie le premier étage au troisième. C’est là que le visiteur découvrira le salon de musique de la reine Marie, où le bien connu compositeur et violoniste George Enesco jouait souvent ses aires, et où la reine Marie invitait encore à se produire la célèbre pianiste Cella Delavrancea. Au 4e étage du château, l’on a aménagé une salle totalement inédite, où 7 personnages du folklore transylvain, 7 sortes d’ogres, présents dans la mythologie populaire de la région, ont élu domicile. Une autre exposition inédite présente au public des instruments de torture médiévaux. Itinérante au départ, elle est devenue une exposition permanente du château de Bran. Cependant, pour pouvoir la visiter, il faut avoir au moins 16 ans. N’oublions pas non plus le « Tunnel du temps », installation interactive, unique en son genre dans le paysage muséal européen. C’est là que vous risquez d’avoir à faire à des personnages du quotidien tout comme à des personnages historiques, ceux qui ont marqué l’histoire, longue de 640 ans, du château de Bran. »

    Espérant avoir réussi à susciter vos envies de découvertes médiévales transylvaines, sachez encore que l’eau de vie de la région de Bran bénéficie d’une très bonne réputation, jamais démentie jusqu’à présent. (Trad Ionuţ Jugureanu)

  • Vacances en Transylvanie

    Vacances en Transylvanie

    Impossible de faire le tour de toutes les attractions touristiques de cette contrée en l’espace de quelques semaines. Voilà pourquoi les visiteurs y reviennent, prêts à se lancer dans une nouvelle aventure, histoire de découvrir d’autres endroits et légendes.Nous allons nous pencher sur quelques-uns des lieux qui méritent le détour.Arrêtons-nous tout d’abord à Alma Vii. Dans ce vieux village, blotti entre les collines et dont la première mention documentaire remonte à l’an 1209, on peut admirer aujourd’hui encore l’église datant du 15e siècle. Un chemin de campagne mène à l’enceinte fortifiée, érigée au début du siècle.

    Les quatre tours de la cité d’Alma Vii ont été restaurées grâce à un projet cofinancé par la Norvège, le Lichtenstein et l’Islande, affirme Mihaela Turk, manager de projet à la Fondation Mihai Eminescu Trust :
    « Chaque tour illustre un thème, d’où leurs appellations respectives : la Tour de l’horloge ou de la Porte, la Tour du Lard, la Tour de la Glace et celle des Blés. Nous avons tenté de rendre aux tours leur utilité ancienne par le biais des objets exposés. Grâce à leurs espaces généreux, les tours peuvent accueillir aussi des événements. Parmi eux, des conférences rassemblant une cinquantaine de participants ou des expositions temporaires. »

    Quiconque veut remonter le temps et découvrir la simplicité de la vie d’antan en Transylvanie devra se loger dans un gîte rural. En naviguant sur le site Internet « experiencetransylvania.ro », vous allez retrouver toutes les chambres d’hôtes, que ce soit des chambres chez l’habitant ou celles mises à disposition par la fondation mentionnée. Mihaela Turk nous a offert des détails supplémentaires là-dessus : « Nous n’avons pas voulu que ce soient des chambres standard, c’est-à-dire avec télévision, Internet et d’autres facilités. Nos chambres sont très simples et équipées d’anciens meubles reconditionnés. Le plancher en bois est habillé de jolis tapis multicolores tissés avec des tissus recyclés. Les murs de ces chambres sont blanchis à la chaux. Autant dire que nous privilégions les matériaux traditionnels, à savoir le bois, la pierre, le sable et la chaux. »

    Notre prochaine halte c’est la ville de Cluj-Napoca. Véritable Silicon Valley, puisqu’elle attire les meilleurs programmeurs de Roumanie, Cluj-Napoca doit aussi sa réputation aux événements culturels d’envergure internationale qu’elle accueille, dont Untold, Electric Castle ou le Festival international du Film. C’est toujours à Cluj-Napoca que l’on a republié le plus ancien livre de cuisine roumain, datant de la fin du 15e siècle. Vous serez surpris par la multitude d’églises du centre-ville de Cluj et aussi par leur diversité: on y trouve dans la même rue des églises réformées, catholiques, unitariennes et gréco-catholiques.

    Marius Oprea, notre guide du Bureau d’information touristique de Cluj, nous donne plus de détails sur le centre historique de la ville : « On y trouve plusieurs monuments historiques, comme l’Eglise catholique Saint Michel, le Monument de Mathias Corvin, le Palais Bánffy, qui abrite le Musée d’art, la Cathédrale métropolitaine, le Théâtre national Lucian Blaga et, bien évidemment, la Place du Musée. Tous ces objectifs sont en plein centre-ville, il est donc très aisé de se déplacer à pied pour les visiter. D’autres attractions importantes sont à retrouver à proximité du centre, comme la Colline de la Cité, d’où un splendide panorama s’ouvre sur toute la ville, le Jardin botanique, un des lieux les plus populaires à Cluj, et le Parc ethnographique Romulus Vuia, le plus ancien de ce type de Roumanie. Cluj a toujours été et reste une ville très ouverte, qui peut être visitée à tout moment de l’année.»

    Marius Oprea nous invite à visiter aussi les attractions du département de Cluj : « La plupart des touristes qui viennent à Cluj-Napoca visitent aussi la Mine de sel de Turda, qui se trouve à seulement trente minutes de la ville. Cette mine est unique en Roumanie et peut-être même dans cette partie de l’Europe. Elle compte plusieurs étages. Restaurée grâce à des fonds européens, elle ressemble aujourd’hui à une ville souterraine. Elle offre plusieurs facilités de balnéothérapie et de loisirs. Il existe même un lac avec des bateaux. »

    C’est toujours en Transylvanie que l’on peut visiter la cité médiévale de Sighisoara Elle est inscrite depuis 1999 au patrimoine mondial de l’UNESCO comme l’une des rares cités européennes du Moyen Age encore habitée de nos jours. Le principal monument de la cité de Sighișoara est la Tour de l’horloge, qui accueille, depuis 1899, le Musée d’histoire de la ville. Nicolae Teșcula, directeur de ce musée, nous en parle : « Construite au 14 e siècle, la Tour de l’horloge, a abrité, jusqu’à la réforme religieuse, la mairie de la ville. Une girouette en forme de coq installée en haut de la toiture annonce la météo. A l’instar d’autres Tours horloge d’Europe médiévale, celle de Sighisoara propose, elle aussi, des figurines symboliques telles la Justice, le Bourreau, la Paix, qui modifient leur position en fonction de l’heure qui bat. Sept figurines sculptées en bois de tilleul représentent les jours de la semaine. L’installation sur laquelle sont fixées les sept statuettes tourne toutes les 24 heures, à minuit. L’actuel mécanisme d’horloge date de 1906, mais le premier à été attesté à Sighisoara dès le 17e siècle. »

    Et c’est tout pour ce voyage radiophonique dans la province historique de Transylvanie. (Trad Mariana Tudose)

  • Un projet qui agite les esprits

    Un projet qui agite les esprits

    Le Sénat de la Roumanie, en tant qu’assemblée décisionnelle, a rejeté mercredi, à une ample majorité, le projet de loi controversé relatif au Statut d’autonomie du Pays sicule, qui prévoyait que cette contrée devienne région autonome à personnalité morale. La proposition de loi était passée par adoption tacite à la Chambre des députés, soit une procédure sans débats, sous la forme posée par ses initiateurs — deux députés de l’Union démocrate magyare de Roumanie (UDMR). Le soi-disant Pays sicule constitue la région du centre de la Roumanie, habitée par des citoyens roumains ethniques magyars pour la plupart, soit les départements de Covasna, Harghita et une partie de celui de Mureş. Le projet présentait les limites du territoire voué à devenir le Pays sicule, prévu avec sa propre organisation administrative, ses propres institutions, avec l’usage du hongrois comme langue officielle, et aussi des symboles de la nation hongroise. L’adoption tacite du projet, qui a produit des réactions politiques dures et de l’émoi dans la société, est une procédure législative par laquelle, à la Chambre des députés, lorsqu’elle est la première chambre saisie, si les élus ne se prononcent pas sur une proposition de loi dans un certain délai, elle est réputée adoptée et avancée au Sénat, qui tranche. Or le président Klaus Iohannis a accusé le Parti social-démocrate (PSD) — le plus important de l’opposition — à avoir aidé l’UDMR à faire passer cet acte règlementaire à la Chambre des députés. Klaus Iohannis :



    « Alors que nous autres — moi, le gouvernement, les autres autorités — nous lutons contre la pandémie de coronavirus, alors que nous luttons pour les vies des Roumains, le PSD lutte dans les bureaux secrets du parlement pour donner la Transylvanie aux Magyars ! Jó napot, Ciolacu. (Cela veut dire bonjour en hongrois.) Qu’est-ce que le leader de Budapest, Viktor Orban, a-t-il bien pu vous promettre en échange de cet accord ? »



    Le président de la Chambre des députés et leader par intérim du PSD, Marcel Ciolacu, a nié les accusations :



    « Personne n’a vendu la Transylvanie et personne ne la vendra jamais ! La Transylvanie a été, elle est et fera partie de la Roumanie. Je demande aux services du renseignement de dire publiquement s’ils ont envoyé au président Iohannis une information sur les accusations à mon égard et à l’égard du PSD, parce qu’il n’est pas possible de mener la lutte électorale à un tel niveau. »



    Dans un communiqué de presse après le rejet du projet par le Sénat, le président de la Roumanie met en garde que promouvoir de telles propositions de loi fait du mal premièrement à la communauté magyare et crée des tensions artificielles à l’intérieur de la société. Plusieurs sénateurs ont souligné le caractère inconstitutionnel de cette initiative, affirmant qu’elle n’aurait eu aucune chance de passer à la Cour constitutionnelle.



    L’UDMR a fait exception, elle considère que les revendications de la minorité magyare sont « absolument justifiées » et a déploré le fait que de vrais débats sur cette question aient été refusés au Sénat. En Hongrie voisine, le ministre des Affaires étrangères, Szijjártó Péter, a demandé au président de la Roumanie de « faire preuve de davantage de respect pour les Magyars ». En réplique, le chef de la diplomatie roumaine, Bogdan Aurescu, considère les affirmations de Budapest « provocatrices et inappropriées » et met en garde sur le fait que le responsable hongrois détourne, de manière absolument regrettable, le sens des propos du chef de l’Etat roumain.


    (Trad. : Ligia)

  • La fête de Pâques chez les catholiques de Roumanie

    La fête de Pâques chez les catholiques de Roumanie

    Madame, Monsieur, comme vous l’avez déjà remarqué, le jour des Pâques catholiques et protestantes ne coïncide presque jamais avec celui des Pâques orthodoxes. Même si les deux Eglises se rapportent à la pleine lune qui suit à l’équinoxe de printemps pour calculer le jour de Pâques, il résulte le plus souvent un décalage d’une semaine entre les deux fêtes. Bien sûr, il ne s’agit pas de la lune proprement dite, mais d’une lune ecclésiastique.

    Pour mieux comprendre ces aspects, nous nous sommes adressés à Sabina Ispas, directrice de l’Institut d’ethnographie et de folklore « Constantin Brăiloiu » de Bucarest qui affirme que: « Après de longues discussions, les conciles œcuméniques ont décidé que la fête de Pâques soit une fête mobile dont le jour tombe en fonction des phases de la Lune. De cette manière, on reprend le système de calcul à l’ancienne, propre à la fête de la Pâque juive de l’époque historique quand tous ces événements ont vraiment eu lieu. Il en résulte que les dimanches de Pâques et des Rameaux sont des fêtes mobiles. »

    A la veille de Pâques, à minuit, les fidèles catholiques de Roumanie se rendent à l’église pour fêter la Résurrection de Jésus Christ. A la fin de la messe, ils se voient offrir du pain arrosé de vin qu’ils ramènent chez eux pour partager avec les proches. Cette coutume qui date depuis le XVIIème siècle, de l’époque de la création de l’Eglise réformée de Transylvanie a été reprise par la suite aussi bien par les orthodoxes que par les uniates de la région. Une fois rentrés à la maison, les fidèles catholiques se réunissent autour de la table. Mais, comme dans le cas des autres chrétiens, le repas principal a lieu le dimanche de Pâques.

    Cette fête s’accompagne souvent de traditions insolites, telles l’arrosage d’eau ou de parfum. Delia Şuiogan, ethnologue à l’Université du Nord de Baia Mare, explique :« Le rituel de l’arrosage, les catholiques de Transylvanie l’ont repris de l’espace germanique. Puisque les différentes couches culturelles agissent toujours sur l’évolution d’une civilisation, il en résulte de belles rencontres. Tous les chrétiens catholiques des communautés traditionnelles respectent cette tradition. Le jour et le lendemain de Pâques, les gens s’arrosaient d’eau, en signe de purification. C’était un rituel issu de la période préchrétienne qui trouve son origine dans un rituel imposé par Ostara, la déesse de la fertilité et de la renaissance. La tradition veut que pendant ces deux jours de fête, les gens s’arrosent d’eau réciproquement, en signe de purification et de fertilité. De nos jours, l’eau a été remplacée par le parfum, symbole de renaissance spirituelle, puisque, dit-on, l’odeur de parfum a le don d’annuler la laideur du monde, en réinstaurant l’ordre et en rééquilibrant les énergies cosmiques. »

    Pâques, la fête chrétienne de la Résurrection du Seigneur, apporte au premier plan des éléments de grande profondeur spirituelle. Dans la tradition populaire, rien de ce qui se passe en ces jours importants n’est le fruit du hasard. La signification des œufs colorés en rouge, mais aussi celle des autres plats du repas de fête – dont ceux à base d’agneau ou encore le cozonac, cette brioche traditionnelle – rappellent l’esprit de sacrifice. L’ethnologue Delia Şuiogan précise :« Une autre tradition catholique, c’est le symbole du lapin de Pâques. D’habitude, à cette époque, toutes les vitrines sont pleines de lapins et d’œufs en chocolat que le lapin apporte. De nouveau, nous nous subordonnons à la même déesse, Ostara, par la filière germanique. Une légende dit qu’au cours de sa promenade dans les champs, cette déesse rencontre un oiseau avec les ailes brisées. Impressionnée par cette image, la déesse souhaite aider l’oiseau pour qu’il ne meure pas. Une voix divine lui dit que si elle réussit à le transformer en un animal qui n’a pas besoin de voler, l’oiseau survivra. La déesse transforme alors l’oiseau en lapin. Ce qui est intéressant, c’est que ce lapin-là maintient toutefois sa fonction de pondre des œufs. Ainsi, une fois par an, l’oiseau devenu lapine offre à la déesse des œufs peints, en signe de la renaissance sous une autre forme, qui lui a rendu le droit à la vie. On dit que depuis lors, les œufs sont peints et qu’il faut les chercher dans l’herbe, sur les traces de la lapine. Peindre les œufs entre sous l’incidence du cadeau comme récompense de la bonté. Il s’agit donc, là encore, de la signification de la renaissance. »

    En Transylvanie, le Samedi saint, les jeunes hommes des communautés catholiques ornent les sapins avec des rubans colorés, et après la tombée de la nuit, ils les introduisent dans les cours des jeunes filles à marier, les liant à la clôture. A leur tour, les jeunes filles attendent ce moment derrière les fenêtres, et elles apprennent ainsi combien de prétendants elles ont cette année-là. Joyeuses Pâques ! (Trad. Ligia Mihaiescu, Ioana Stancescu)

  • Les colines de la Transylvanie

    Les colines de la Transylvanie

    La
    Transylvanie est connue notamment pour ses paysages à couper le souffle, pour
    ses cités médiévales soigneusement préservées et pour ses traditions
    ancestrales. Et il y a plusieurs manières de découvrir cette région historique
    roumaine. Une d’entre elles, c’est la gastronomie. Vous pouvez participer à des
    ateliers visant à redécouvrir les goûts et les traditions rurales. Vous
    pouvez également faire des randonnées de photographie. Tout cela s’appelle
    tourisme alternatif, ciblé sur la nature et les traditions.

    Mihai Moiceanu,
    photographe professionnel et producteur de films documentaires touristiques,
    est le promoteur d’un tel type de tourisme. Une des campagnes qu’il a organisées
    l’année dernière s’est déroulée sous l’égide de l’Association de tourisme
    écologique de Roumanie. Ecoutons Mihai Moiceanu : « Ce
    partenariat a visé à promouvoir les destinations de tourisme écologique de
    Roumanie. Un des grands atouts de la Transylvanie, c’est le fait qu’il existe
    encore une vie rurale, avec des traditions vieilles de plusieurs centaines
    d’années. Il y a des monuments intéressants, moins connus, mais de très grande valeur
    et spectaculaires du point de vue de la construction et de l’emplacement. Il
    existe des communautés rurales très intéressantes au sein desquelles les
    traditions ont été préservées et au milieu desquelles les touristes peuvent avoir
    des vacances actives. Outre la visite de certains sites touristiques, les
    vacanciers peuvent voir comment se déroule la vie à la campagne, quel est son
    rythme, quelles sont les préoccupations des gens et comment ils vivent, ils
    peuvent goûter des plats traditionnels très savoureux, très sains et en plus
    bio. »



    Le
    film réalisé par Mihai Moiceanu raconte l’histoire d’une famille allemande,
    dont les membres ont tous travaillé dans des multinationales et qui ont visité
    la Roumanie il y a une quinzaine d’années. « Vu qu’ils étaient tous des
    photographes passionnés, je leur ai servi de guide à travers la Roumanie. Au
    cours de leurs tournées photographiques ils ont découvert tout le pays, du
    delta du Danube au Maramures, mais la région qu’ils ont considérée la plus
    proche de leur culture a été la Transylvanie, puisque c’est une région dont les
    habitants parlent aussi l’allemand. Il s’agit des Saxons qui se sont établis
    dans cette partie de la Roumanie il y a 800 ans. Ce fut dans cette région
    qu’ils se sont sentis proches de la civilisation locale, du paysage, des
    traditions anciennes, dont une partie appartiennent aux Saxons. Ils ont acheté
    une ancienne propriété, ils ont construit un gîte rural très beau et s’y sont
    installés définitivement. La Transylvanie peut exercer une telle attraction,
    elle peut pousser les gens à quitter leur travail et leur style de vie d’avant
    en faveur d’une vie paisible, mais de qualité. »



    Les
    touristes qui choisissent de se rendre en Roumanie sont moins attirés par les
    paysages d’une grandeur exceptionnelle, comme c’est le cas des Alpes par
    exemple, mais par la communion de l’homme avec la nature, affirme Mihai
    Moiceanu, photographe professionnel et producteur de films. En Transylvanie, la
    nature se combine harmonieusement au quotidien de ses habitants, étroitement
    lié aux ressources de la terre. Les traditions ancestrales sont un autre
    élément qui fascine les touristes. Ils sont impressionnés surtout par le fait
    qu’ils peuvent découvrir une civilisation disparue d’Europe occidentale il y a
    50, voire 70 ans.

    Mais comment se déroule une tournée photographique ?
    Mihai Moiceanu :« Le programme commence par le
    transfert du touriste de l’aéroport. Le transport, l’hébergement, les repas et
    les visites sont compris. En fonction de sa durée, d’au moins une semaine, une
    telle tournée peut coûter entre 1000 et 2000 euros. Les personnes qui ne sont
    pas des photographes professionnels sont également acceptées. Il s’agit de
    personnes qui souhaitent découvrir les lieux autrement, puisque la photographie
    rend possible un contact différent et un accès différent dans l’espace intime
    des gens – beaucoup plus ouverts à tout genre de communication. Ce sont des
    gens qui souhaitent découvrir les différents endroits d’une manière plus lente,
    et pas à la va-vite comme c’est le cas du tourisme de masse. Ils veulent en
    fait expérimenter la vie à la campagne, avec sa lenteur spécifique. Afin de
    prendre de belles photos il faut du temps, pour s’habituer aux endroits, pour
    empathiser, et les endroits s’affichent d’une manière différente pour le
    photographe touriste. »



    Voici
    donc une alternative au tourisme classique. Un style de tourisme plus ciblé,
    plus respectueux de l’environnement et des communautés locales. (Trad. Alex
    Diaconescu)



  • La ville de Brasov

    La ville de Brasov

    Une semaine passée à Brasov satisfera n’importe quel touriste, quelles que soient ses attentes. Tourisme culturel, séance de shopping, activités sportives en montagne, cuisine traditonnelle ou internationale, vous l’aurez compris, quelle que soit la saison, il y en a pour tous les goûts !

    La forteresse de Brasov, érigée entre le XIVe et le XVIIe siècle, était considérée comme l’une des plus puissantes de Transylvannie et conserve aujourd’hui encore de nombreux vestiges qui font le bonheur des touristes. Vous pouvez y visiter la citadelle et les bastions de l’ancienne fortification, la célèbre Eglise Noire, la Maison du Conseil qui acceuille aujourd’hui le Musée d’Histoire de la ville, les Tours Noire et Blanche, le Bastion Graft (un pont fortifié qui traverse le ruisseau du même nom), la Porte Catherine et la Porte Şchei ainsi que de nombreux musées. Mihaela Damian du Centre d’information touristique explique :Je recommande vivement la visite de L’Eglise Noire sur la Place du Conseil, l’un des édifices les plus célèbres de Brasov. C’est le plus grand monument sacré de Roumanie et le plus grand lieu de culte datant de l’époque médiévale en Europe. Elle renferme une impressionnante collection de tapis orientaux ainsi que le plus grand orgue mécanique de Roumanie. Je vous invite aussi à vous rendre au musée de la Première Ecole Roumaine ou à visiter le Bastion des Tisserands, de vous promener sur les sentiers aux pieds du Mont Tampa ou le long des fortifications de derrière les murs où se situent les Tours Noire et Blanche.

    Strada Sforii (La rue de le ficelle) constitue aussi une attraction originale et unique de la ville de Brasov. Elle est réputée pour être la ruelle la plus étroite de la ville avec son 1,3 mètre de largeur. La légende raconte qu’elle serait même la plus étroite d’Europe et qu’à sa construction au 15ème siècle elle servait de voie d’accès pour les pompiers. De là, comme dans le reste de la ville, il est possible d’admirer le Mont Tâmpa. Ce dernier fait partie de Postavaru, un massif montagneux qui a progressivement été encerclé par la ville. Atteignant les 960 mètres d’altitude, il s’agit aujourd’hui d’une réserve naturelle protégée.

    Le sommet du Mont Tâmpa offre une vue imprenable sur l’ensemble de la ville et par temps clair on peut même admirer toute la vallée. Juste à côté se trouve la station de ski de Poiana Brașov. Mihaela Damian :C’est une station très prisée des touristes aussi bien en hiver, pour le ski, qu’en été pour les randonnées. Certains hotels sont même équipés de piscines intérieures pour ceux qui ont envie d’autre chose. Nous invitons les touristes à venir aussi bien visiter la ville que la station Poiana Brasov. Ils trouveront ici toutes sortes d’activitées pour profiter de leurs vacances, de la sortie culturelle à la randonnée en montagne en passant par le ski.

    En avril, le premier dimanche après la Pâque orthodoxe, a lieu la parade des juni (des jeunes hommes). C’est l’une des festivités les plus attendues de l’année. Les habitants de Şchei Brasovului (un quartier de la banlieue de Brasov) défilent à cheval dans la ville vêtus de leurs costumes traditionnels. C’est un spectacle incroyable pour les touristes présents à cette époque de l’année. C’est aussi l’occasion pour eux de découvrir les traditions roumaines et les superbes costumes traditionnels roumains.

  • Iuliu Hossu ou la résistance de l’Eglise uniate face au communisme

    Iuliu Hossu ou la résistance de l’Eglise uniate face au communisme

    La volonté d’unir la Transylvanie avec la Roumanie avait été actée à l’occasion de la Grande assemblée nationale organisée le 1er décembre 1918 dans la ville d’Alba Iulia. Cette grande assemblée nationale avait réuni des représentants de toutes les villes et des villages de Transylvanie, pour débattre et décider du sort de la province en ces temps troubles, où l’Empire d’Autriche-Hongrie était en pleine déliquescence. Parmi les représentants de toutes les couches sociales présents à Alba Iulia, l’on comptait l’évêque de l’Eglise uniate de Transylvanie, Iuliu Hossu.



    Né le 30 janvier 1885 dans le département de Cluj, lui-même fils de prêtre uniate, Iuliu Hossu étudie la théologie au lycée catholique de rite latin de Târgu Mureș (centre), puis dans celui situé dans la ville de Blaj (centre). En 1904, on retrouve sa trace à Rome, où il suit des études universitaires au Collège Fide. Il décrochera son doctorat en philosophie en 1906, puis en théologie en 1910. La même année, il est ordonné prêtre. Entre 1910 et 1918, Iuliu Hossu travaille à l’Evêché de Lugoj, en tant que bibliothécaire, vicaire, puis comme secrétaire de l’évêque Vasile Hossu, son oncle paternel. Au début de la Grande Guerre, il rejoindra, en qualité d’aumônier militaire, les rangs de l’armée austro-hongroise. En 1918, à la mort de son oncle, il sera nommé évêque de l’Eglise uniate de Gherla (centre).


    1918 est une année charnière dans l’histoire des Roumains. Le 1er décembre 1918, Iuliu Hossu sera chargé par l’Assemblée, réunie pour l’occasion, de lire, avec l’évêque orthodoxe Miron Cristea de Transylvanie, la Proclamation d’Alba Iulia. Cet acte exprimait la volonté d’union des représentants des Roumains de Transylvanie avec le Royaume de Roumanie. Les deux évêques, Iuliu Hossu et Miron Cristea, accompagnés par deux des représentants politiques transylvains, Alexandru Vaida-Voievod et Vasile Goldiș, ont porté la Déclaration d’union jusqu’à Bucarest, pour la remettre au roi Ferdinand Ier.


    Les archives d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine ont pu préserver un document audio d’une grande valeur historique, qui témoigne du formidable élan patriotique qui animait l’Assemblée nationale d’Alba Iulia en ce jour mémorable du 1er décembre 1918. Mais le document audio garde également enregistrée la voix de l’évêque de l’Eglise catholique d’Orient, Iuliu Hossu, lorsqu’il résume les aspirations politiques, économiques, sociales et civiques des Roumains. L’enregistrement a été réalisé en clandestinité, en 1969, un an avant la mort du grand homme d’église: « Mes frères ! L’heure est arrivée ! C’est l’heure que Dieu le tout puissant a choisi pour nous rendre justice. Aujourd’hui, par notre volonté commune, nous fondons, à jamais et pour toujours, la Grande Roumanie, unique et indivisible. L’assemblée nationale de tous les Roumains qui vivent en Transylvanie, au Banat et dans le Pays hongrois, rassemblés ici, à Alba Iulia, ce 1er décembre 1918, décrète l’union de toutes les provinces qu’ils habitent avec la Roumanie. L’assemblée nationale proclame par-dessus tout le droit inaliénable de la nation roumaine sur l’entièreté du territoire de la province historique du Banat, cette région bordée par les rivières Mureş, Tisa et par le Danube. L’Assemblée nationale réserve aux régions citées le statut d’autonomie provisoire, et ce jusqu’à ce que l’Assemblée constituante, issue du vote universel, se réunisse et décide de leur sort définitif. Quant aux principes fondamentaux qui devront régir le fonctionnement de l’Etat roumain après l’Union, l’Assemblée nationale proclame l’entière liberté nationale des peuples qui habitent les provinces qui se rattacheront à la Roumanie. Chaque peuple pourra s’instruire, s’administrer et avoir accès à la justice en sa propre langue, et grâce aux membres issus de son sein. Chaque peuple aura le droit d’occuper au sein des parlement et gouvernement roumains une place directement proportionnelle au poids de sa population. Le respect de la liberté d’opinion, d’expression, de culte et de réunion sera garanti à tous. La Roumanie devra adopter le suffrage universel, égal et secret, masculin et féminin, pour tous les citoyens de 21 ans et plus, aussi bien aux élections locales qu’aux élections provinciales et législatives. La Roumanie devra adopter et mettre en œuvre une réforme agraire radicale, sans exemption possible, quel que soit le type de propriété, la grande propriété agraire étant notamment visée. A l’issue de la réforme agraire, les familles d’agriculteurs devraient pouvoir disposer des superficies censées leur assurer la subsistance, et qu’elles puissent travailler de manière autonome. La réforme agraire vise, à la fois, le progrès social de la classe paysanne, et l’accroissement de la productivité agricole. Les mêmes droits sociaux seront assurés aux travailleurs dans l’industrie que ceux qui sont en vigueur dans les Etats industrialisés d’Occident. »



    Dans la Grande Roumanie, l’évêque Iuliu Hossu va occuper une place de sénateur de droit, d’où il défendra les acquis obtenus à Alba Iulia contre les courants politiques centrifuges et révisionnistes naissants. En 1940, lors de l’annexion par la Hongrie de la partie nord de la Transylvanie, il demeurera à Cluj, ville dorénavant soumise à l’autorité du gouvernement de Budapest, afin de donner courage à ses ouailles en ces temps troubles. Après la fin de la guerre, la région se retrouvera à nouveau rattachée à la Roumanie, mais le régime pro soviétique, imposé par Moscou à Bucarest, sonnera le glas de la démocratie et de la liberté religieuse en Roumanie. L’Eglise uniate, cette église qui a accompagné depuis des siècles les revendications nationales des Roumains de Transylvanie, sera supprimée en 1948, par la volonté du régime communiste de Bucarest. Iuliu Hossu, à l’instar de l’ensemble des évêques uniates, refuse de passer à l’orthodoxie, dont la hiérarchie était soumise aux communistes. A compter de 1948, il est d’abord assigné à résidence surveillée par le régime au monastère de Caldarusani, près de Bucarest, puis arrêté et envoyé en 1950 à la prison de Sighet. Libéré en 1956, il vivra en résidence surveillée, au monastère de Caldarusani, jusqu’à sa mort, en 1970. En 1969, un an avant sa mort, il sera élevé à la dignité de cardinal in pectore par le Pape Paul VI, lors du consistoire du 28 avril 1969. Sa création ne fut rendue publique que trois ans après sa mort, lors du consistoire du 5 mars 1973. Il est le premier cardinal roumain. Lors de sa visite en Roumanie du mois de mai 1999, le Pape Jean-Paul II sest recueilli sur sa tombe. Enfin, Iuliu Hossu et les 6 autres évêques martyrs de l’Eglise uniate de Roumanie ont été proclamés bienheureux au cours dune Divine Liturgie, célébrée sur le Champ de la Liberté à Blaj par le Pape François, le 2 juin 2019, au cours de son voyage apostolique en Roumanie. (Trad. Ionut Jugureanu)