Tag: littérature

  • L’écrivain Norman Manea, invité au Festival International de Littérature et Traduction de Iaşi

    L’écrivain Norman Manea, invité au Festival International de Littérature et Traduction de Iaşi

    L’écrivain Norman Manea a été un des invités de marque du Festival international de littérature et traduction (FILIT) déroulé à Iaşi en octobre dernier. D’origine juive et vivant aux USA depuis 1986, l’auteur de livres célèbres tels « Le retour du hooligan », « L’enveloppe noire », « Les clowns : le dictateur et l’artiste », « Le bonheur obligatoire », ou « La tanière », a connu dès son jeune âge la déportation et l’exil. « J’ai eu un parcours existentiel compliqué. Mon premier exil, je l’ai vécu quand j’avais 5 ans ; en 1945, je me considérais comme un vieillard de 9 ans », se raconte Norman Manea, qui compte parmi ses meilleurs amis l’écrivain Philip Roth et le poète américain Edward Hirsch, qui était d’ailleurs son invité personnel à Iaşi.



    La modératrice de la soirée du FILIT a été Carmen Muşat, rédactrice en chef de l’hebdomadaire bucarestois ‘Observator cultural’. Elle a ouvert le débat en s’appuyant sur une affirmation d’Edward Kanterian, un professeur à l’Université d’Oxford avec lequel Norman Manea a dialogué pendant 11 années ; leur échange a été publié dans la série d’auteur dédiée à l’écrivain par les éditions Polirom. Pour Edward Kanterian, Norman Manea est l’auteur roumain qui a provoqué trois polémiques essentielles dans la culture roumaine.



    Carmen Muşat en fait le compte-rendu : « En 1982, dans une interview à la revue Familia, Norman Manea a fait des affirmations qui ont dérangé les responsables de l’époque mais aussi certains de ses confrères écrivains, car il avait osé parler du nationalisme et de son approche par les écrivains obéissants des ces temps-là. Ensuite, en 1992, il a publié dans l’hebdomadaire d’opinion Revista 22, dirigé à l’époque par Gabriela Adameşteanu, un essai où il se permettait d’aborder l’engagement légionnaire, d’extrême droite, de Mircea Eliade, violant ainsi un tabou de notre culture et posant la question de l’implication de l’intellectuel dans une idéologie malheureuse. Et puis, troisièmement, en 1997, lors de la parution du Journal de Mihail, Norman Manea a parlé des incompatibilités, du fait que, en citant Sebastian, il n’existe pas d’incompatibilités dans la culture roumaine. Norman Manea a toujours été fasciné par les nuances, mais n’a jamais évité de trancher dans le cas de sujets que nous passons d’habitude sous silence. »



    Prenant comme point de départ les remarques de Norman Manea, Carmen Muşat a posé la question suivante: pourquoi notre rapport à la mémoire se crispe-t-il quand nous le mettons devant le miroir de la vérité ? Norman Manea : « Je ne suis ni polémiste ni provocateur – en tout cas, je ne me vois pas ainsi. Je nai fait quexpliquer mon opinion personnelle, mon point de vue sur la place de la littérature dans lhistoire dune nation. Jai parlé des périodes plus difficiles de lhistoire roumaine, mais, en règle générale, je refuse demployer des termes collectifs, généraux sur les Roumains, les Juifs etc. Moi, je me concentre sur lindividu, sur ce quil peut et doit faire, sur les différences radicales de personnalité entre nous. Pour ce qui est de la mémoire, jai constaté que les cas dautoanalyse et danalyse critique des erreurs sont plutôt rares dans lhistoire des Roumains. Et cela est la conséquence d’un certain hédonisme – les Roumains, dont je fais partie, sont un peuple hédoniste, à mon avis. Un des arguments à l’appui de cette affirmation, c’est justement ce dicton populaire comme quoi nous navons pas donné des saints au monde, nous avons donné des poètes. Lhédoniste profite à fond des joies de la vie, il sintéresse plutôt à lart quau sacré. Cela implique aussi une certaine capacité dadaptation à limmédiat, ce qui peut engendrer un certain oubli du passé ».



    Dans ces conditions, quel pourrait être le rôle de lintellectuel au sein de la société contemporaine, post-totalitaire à certains endroits de la Terre, une société se trouvant constamment sous la menace de toute sorte de crises? Voilà une autre question-défi lancée par la journaliste Carmen Muşat à lécrivain Norman Manea, lors du débat organisé dans le cadre du Festival international de littérature et de traductions – FILIT de Iasi. Et voici la réponse de lhomme de lettres: « Jévite de proposer ou dimposer des rôles à qui que ce soit. Il y a des intellectuels qui se sont renfermés dans leur existence de penseurs, dautres qui se perdent dans la masse et cela pour mieux lutter pour un idéal. Autant de choix personnels. Je veux croire – et je serais heureux sil en était ainsi – que lintellectuel joue un rôle positif dans le débat national. Sa position et sa mission saffaiblissent de plus en plus au sein de la société moderne, une société pratique, plutôt mercantile, où largent fait la loi. Les intellectuels de premier rang, ceux qui ont joué le rôle de formateurs sociaux, sont maintenant en retrait et je ne pense pas quils savancent au premier plan. »



    Notons, enfin, que le Festival international de littérature et de traductions de Iasi a été organisé sous légide de la Mission de la Commission européenne en Roumanie. Il a réuni quelque 300 professionnels du livre roumains et étrangers, issus de toutes les branches de ce domaine, depuis les écrivains et les traducteurs jusquaux critiques, éditeurs, distributeurs et libraires. (trad.: Ileana Taroi, Andrei Popov)

  • Le Festival international de littérature de Bucarest

    Le Festival international de littérature de Bucarest

    La soirée littéraire des prosateurs roumains a été un véritable coup de cœur du Festival International de Littérature déroulé à Bucarest au mois de décembre. A cette occasion, plusieurs magiciens de la plume tels Toni Marques, président du plus important festival de littérature du Brésil, Marius Daniel Popescu, un chauffeur de bus établi à Lausanne depuis 1990 et dont le roman de début a été couronné du prix « Robert Walser » pour la littérature, le poète, romancier et traducteur moldave Emilian Galaicu-Paun et les romanciers roumains Marius Chivu et Petre Barbu se sont donné rendez-vous pour un entretien sur des thèmes littéraires parrainé par le journaliste Matei Martin.



    Une des questions, posées à cette occasion, a généré une série de réponses intéressantes que nous vous présenterons dans les minutes suivantes. Voici la question : « quelle est votre opinion sur les lectures publiques et le dialogue avec l’assistance ? ». Tout de suite, leurs réponses précédées d’une note biographique.



    Toni Marques est né en 1964 à Rio de Janeiro où il habite actuellement. Il travaille pour la chaîne de télévision Globo depuis 2007 et il a été correspondant de presse à New York pour le journal O Globo. Depuis 2012, Toni Marques participe à l’organisation de la FLUPP, le premier et seul festival international de littérature organisé dans les favelas des grandes villes brésiliennes. Son palmarès littéraire comporte jusqu’à présent quatre recueils de prose : «Partout où des choses arrivent, il y a aussi des gens. Et les gens s’intéressent toujours à ce que les autres ont à dire. Puisque j’aime bien écrire et lire, je crois en une forme d’envoûtement provoqué par les mots, les sons et la musique des textes. Le véritable réseau de communication repose sur des histoires, il se construit à partir des histoires. Les écrivains ne font qu’utiliser différentes techniques pour les raconter. Oui, c’est ça. Tout gravite autour de l’histoire ».



    Emilian Galaicu-Paun est né dans le village de Unchitesti, département de Soroca dans une famille d’intellectuels de la République de Moldova. Après une maîtrise de lettres à l’Université de Chisinau, il obtient son doctorat à l’Institut de Littérature « Maxim Gorki » de Moscou. Il est rédacteur en chef des Maisons d’Edition Cartier de Chisinau et rédacteur de la publication Vatra de Targu Mures.


    Il a publié de nombreux recueils de poèmes dont un, paru en 1994, est considéré comme l’un des dix volumes de poésie les plus importants de la dernière décennie du siècle passé. Il a également signé le volume de prose « Gestes. La trilogie du rien », publié en 1996: « Cela fait plus de dix ans que chaque lundi, sur les ondes de Radio Free Europe, je présente au public un livre dans le cadre d’une émission intitulée « Un livre à emporter ». Eh bien, pour faire cette émission, je dois lire deux – trois bouquins par semaine pour en choisir le meilleur. Je vous dis tout ça pour comprendre que mes propres livres s’inspirent des ceux qui se trouvent dans ma bibliothèque. »



    Petre Barbu est un écrivain et journaliste qui a fait ses débuts littéraires en 1993 avec le recueil de nouvelles Le T-shirt orange sans aucun numéro de concours”. S’y ajoutent les romans Dieu bénit l’Amérique” (1995), Le dernier soubresaut du sous-marin légionnaire” (1998), Indifférence” (2005), le volume intitulé Théâtre” paru en 2003 et celui de nouvelles Jusqu’au bout de la ligne” sorti en 2012 aux Maisons d’Edition Cartea Romaneasca. Petre Barbu s’est vu attribuer en 2003 le prix de la meilleure pièce roumaine pour son texte Notre père qui est à l’hypermarché”, tandis que quatre de ses nouvelles ont servi au metteur en scène Attila Vizauer pour en faire des pièces radiophoniques diffusées par Radio Roumanie. Son roman le plus récent La grande fête” est paru en 2014. Pour Petre Barbu, l’écriture est une crise qui se consomme en quelques centaines de pages. Il a du mal à parler de son écriture et pour cause, il préfère laisser ses textes parler à sa place et se vendre tous seuls.



    Marius Chivu est écrivain, traducteur et critique littéraire. Il a débuté en 2012 avec un volume de poésie, « La Ventolière en plastique », récompensé de deux prix littéraires (celui de l’Union des écrivains et celui de la revue Observator cultural – Observateur culturel). Il a également écrit un recueil d’interviews «Ce que l’auteur a voulu dire », publié en 2013, et un journal de voyage « Trois semaines dans l’Himalaya », sorti en 2012. Marius Chivu a aussi édité une anthologie de la prose courte des années 2000, publiée en 2013. Il a lancé et coordonné en 2008le projet humanitaire « Le livre des grands-parents ». Depuis 2005, il écrit pour les revues Dilema veche et ELLE.


    En 2014, Marius Chivu a publié aux Editions Polirom le volume de prose courte « Fin de saison »: « J’ai toujours regardé l’écriture comme un processus en deux temps : après s’être retiré, isolé dans sa chambre, on en sort pour rencontrer des gens intéressés par ce que l’on a écrit et, éventuellement, on leur lit des passages. Lire pour eux est aussi agréable qu’écrire. Tony Marques le disait aussi: l’écriture renvoie à cet acte originel des gens qui se réunissaient autour du feu, chantaient et racontaient des histoires pour chasser la peur ou le froid ou faire rire les autres. J’aime donc ce contact direct avec mes lecteurs. »



    Marius Daniel Popescu a été membre d’un groupe d’écrivains de Brasov, ville du centre de la Roumanie, qui incluait aussi Alexandru Muşina, Andrei Bodiu, Marius Oprea, Caius Dobrescu et Simona Popescu. En 1990 il tombe amoureux d’une Suissesse venue visiter la Roumanie, et il décide de la suivre en Suisse. Marius Daniel Popescu sinstalle à Lausanne où il gagne sa vie en travaillant comme chauffeur de bus. Cinq ans plus tard il fait sortir son premier ouvrage de poèmes en langue française, intitulé « 4 x 4, poèmes tout-terrains » et publié aux éditions Antipodes, à Lausanne. Il fut suivi en 2004 par Arrêts déplacés, chez le même éditeur, qui obtint le Prix Rilke 2006. .


    Après avoir collaboré au journal Le Passe-Muraille, il crée en 2004 Le Persil, un journal littéraire ouvert aux jeunes talents et écrivains confirmés de la Suisse romande. C’est durant cette même période que Marius Daniel Popescu visite une prison suisse pour parler aux détenus de la littérature. Le début en prose avec le roman La Symphonie du loup lui vaut aussi la première récompense littéraire, le Prix Robert Walser en 2008.



    Ecoutons Marius Daniel Popescu : « L’écrivain n’est pas plus solitaire que d’autres personnes, comme par exemple ceux qui ferrent les chevaux, ceux qui construisent des violons ou font des chaussures, les astronautes et les ingénieurs, dont la solitude n’est ni plus courte ni d’une qualité inférieure à celle de l’écrivain ». (trad.: Ioana Stancescu, Alex Diaconescu)

  • L’écrivain Mircea Cărtărescu, invité au Festival international de littérature et de traduction de Ia

    L’écrivain Mircea Cărtărescu, invité au Festival international de littérature et de traduction de Ia

    “La littérature est une sorte de lance d’Achille: elle blesse et guérit à la fois”, affirmait Mircea Cărtărescu dans son dialogue avec l’écrivain et journaliste Cezar-Paul Bădescu, lors du Festival international de littérature et de traduction, accueilli par la ville roumaine de Iaşi en octobre dernier. Les belles lettres facilitent la rencontre avec soi-même et cette rencontre est la plus terrible des choses qui puissent vous arriver.”



    Sur la scène du Théâtre national de Iasi, Cezar – Paul Bădescu, a incité son interlocuteur, l’auteur de la “Nostalgie”, du Levant”, de la trilogie” Orbitor”, nominé ces dernières années au Prix Nobel de littérature, à parler de la période où il avait dirigé le Cénacle littéraire de la Faculté des Lettres. A cette même époque, il avait sorti, avec l’aide de ses étudiants, plusieurs volumes collectifs, dont Tableau de famille”. Dans quel but?



    Mircea Cărtărescu: Il y a eu deux raisons à cela. La première et la plus simple, c’est que ma génération, qui avait reçu un don important, a jugé bon d’en faire de même. Ce don nous est venu des critiques littéraires Nicolae Manolescu, Ovid Crohmălniceanu, Eugen Simion, Mircea Martin, Ion Pop et de bien d’autres personnalités qui ont marqué de leur empreinte notre vie. Nous leur devons tout. Nous avons trouvé naturel de transmettre, à notre tour, tout ce qu’ils nous avaient appris, au plan théorique, moral ou éthique. La seconde raison pour laquelle je me suis investi dans le cénacle littéraire de la Faculté des Lettres c’est que je me sentais comme étant un des vôtres. Les six ou sept ans que j’ai dirigé ce cénacle ont été la plus belle période de ma vie. Le fait de m’avoir accepté parmi vous, même si j’étais de 15 ans votre aîné, a été pour moi une grande joie. J’aimais bien travailler à nos livres. Si je dis nos livres c’est parce c’était moi qui préfaçais ces anthologies.”



    ”La littérature a été tout pour moi, mais je ne saurais dire si moi je n’ai été que littérature”. Voilà la réponse de Mircea Cărtărescu à la question de savoir ce que la littérature lui offre : C’est comme si l’on me demandait ce que l’air signifie pour moi. J’ai maintes fois réfléchi à ce qu’écrivait Kafka dans une des lettres envoyées à son éternelle fiancée Felice Bauer: « en définitive, je ne suis rien dautre que littérature. Je me suis demandé ce que veut dire le fait qu’un homme se mue en littérature et par quelle alchimie son corps et son cerveau deviennent littérature. C’est ce qui est arrivé à Kafka, surtout vers la fin de sa vie. Avant de mourir, il n’était plus un homme parmi les hommes, mais un personnage de ses livres. Il n’était rien d’autre que littérature. Bien sûr, peu d’entre nous sont capables d’atteindre des horizons aussi lointains, car cela suppose d’énormes sacrifices. C’est détruire sa vie pour se l’approprier autrement. Nichita Stănescu affirmait à un moment donné: nous souhaiterions tous écrire comme Eminescu, mais qui voudrait vraiment vivre sa vie? En voilà une bonne question. Qui voudrait vivre la vie de ceux qui ne sont rien d’autre que littérature? Faire ce choix c’est devenir, d’une façon ou d’une autre, un martyr.”



    Mircea Cărtărescu ne saurait imaginer sa propre vie sans littérature. « Pour moi, écrire c’est vivre. Un point, c’est tout. » – affirme Mircea Cărtărescu, le plus important écrivain roumain contemporain, selon la plupart des critiques et des lecteurs : «Je ne sais pas si ce que j’écris, c’est de la thérapie. Je ne puis m’en rendre compte. Il y a en moi tant d’anomalies, tant de blessures intérieures, tant de choses bizarres ou mises de travers, que toute la littérature du monde ne pourrait me guérir. Pour moi, la littérature est quand même une façon de secréter une carapace, une croûte. Et je considère la littérature comme un organe de mon corps, tout comme le crâne est un organe de mon corps. C’est donc ça, la littérature, pour moi : un organe de mon corps, plutôt qu’un processus de psychanalyse, de sublimation. J’ai toujours senti que la littérature faisait partie de moi-même. »



    Invité au Festival international de littérature et de traduction de Iaşi, Mircea Cărtărescu s’est également rapporté à cet événement: « C’est une rencontre de haut niveau, un événement important non seulement pour la vie culturelle roumaine, car, si j’ai bien compris, c’est un des plus grands festivals, sinon le plus grand, organisé en Europe Orientale. C’est une grande réussite. » déclarait Mircea Cărtărescu. (trad. Mariana Tudose, Dominique)

  • Herta Müller, invitée du Festival international de littérature et traduction (FILIT) de Iaşi

    Herta Müller, invitée du Festival international de littérature et traduction (FILIT) de Iaşi

    Sur la scène du Théâtre National de la ville, l’écrivaine d’origine roumaine, Prix Nobel de littérature en 2009, a été accompagnée par l’écrivain et journaliste Ion Vianu et par le traducteur Ernest Wichner, directeur de Literaturhaus (La Maison de la Littérature) de Berlin, qui a d’ailleurs été le modérateur de la rencontre. Depuis sa rencontre avec Gabriel Liiceanu (accueillie par l’Athénée Roumain de Bucarest en 2010, Herta Müller n’a plus parlé devant le public roumain. Aussi, le débat organisé dans le cadre du Festival international de littérature et traduction de Iaşi a-t-il été une véritable surprise.



    Il y a 4 ans, l’écrivaine s’est longuement attardée sur la politique et la dissidence, critiquant la plupart des intellectuels roumains pour leur passivité face au communisme. Cette fois-ci, elle a beaucoup parlé littérature et lu des fragments de ses plus récents livres parus en roumain.



    Entrée dans le collimateur de la police politique du régime communiste, Herta Müller a commencé à être persécutée après son refus de collaborer avec la Securitate et en raison des relations d’amitié qu’elle entretenait avec les membres de la société Aktionsgruppe Banat (le Groupe d’action du Banat).



    Elle fait ses débuts littéraires en 1982, avec le recueil de récits « Niederungen » (« Bas-fonds ») – sévèrement censuré, paru aux maisons d’édition Kriterion. Ce livre allait être édité dans son intégralité deux ans plus tard, en Allemagne de l’Ouest. A partir de 1985, les œuvres de Herta Müller furent interdites en Roumanie. Suite aux pressions toujours plus fortes exercées sur elle par la Securitate, en 1987 elle quittait le pays pour s’établir en Allemagne et depuis, elle vit à Berlin.



    La soirée Herta Müller à Iaşi a débuté par la lecture d’un fragment du livre « Aujourd’hui je préfère ne pas me rencontrer » de l’écrivaine récemment paru aux Maisons d’édition Humanitas. Ce roman peut se résumer en quelques mots : dans la folie totalitaire, une jeune fille ne veut pas renoncer au bonheur. Un roman caractérisé par une grande force expressive, où la force brute des mots se mue en poésie et en beauté. C’est un des livres les plus importants de l’écrivaine allemande née en Roumanie.



    Ce roman de Herta Müller est une exploration magistrale et émouvante de la manière dont la dictature arrive à dominer l’âme humaine. De l’avis des critiques, « Aujourd’hui je préfère ne pas me rencontrer » et deux autres de ses romans — « LHomme est un grand faisan sur terre » et « Animal du cœur » constituent une trilogie, en vertu de leurs thèmes similaires.



    Herta Müller : « Les critiques disent toujours qu’il s’agit d’une trilogie. Or, ce n’est pas tout à fait ça. Il sont trois, c’est vrai, mais je n’ai rien prévu d’avance. C’est plutôt un hasard, après avoir terminé un livre, j’en ai entamé un autre. Mes interrogations, mes dilemmes intérieurs n’étaient peut-être pas épuisés, ces problèmes me hantaient toujours. Moi, quand j’ai quitté la Roumanie, j’étais dévastée, je ne pouvais penser à autre chose — surtout pendant les premières années après mon départ, quand je savais que le régime de Ceauşescu était toujours au pouvoir. Je connaissais plusieurs dizaines de personnes que j’aimais bien et je savais qu’à tout moment il pouvait leur arriver des choses comme celles que j’avais vécues moi-même. Et ces gens-là n’avaient pas, eux, les moyens d’y échapper. Tous ces problèmes me encore touchaient au vif et je n’aurais jamais eu l’idée d’écrire sur autre chose. »



    « Nous ne choisissons pas nos sujets, ce sont les sujets qui nous choisissent. » – a précisé Ion Vianu, invité de la soirée Herta Müller. L’écrivaine a poursuivi ses explications, en se rapportant justement à cet autre participant aux débats: «Il y a cette catégorie d’écrivains à laquelle, à mon avis, appartient Ion Vianu. Des écrivains qui ont vécu des événements à un impact trop grand pour qu’ils s’en sortent sains et saufs. On a mentionné le cas d’Alexandre Soljenitsyne, très révélateur de ce point de vue. Il y a des gens qui ont connu la guerre, les camps, le goulag et je pense que la moitié des livres de la bibliothèque du monde est consacrée à de telles expériences. Ce sont des livres écrits par des gens qui n’ont pas choisi leurs sujets. Les sujets ont été si durs, si âpres, que les écrivains ont été presque forcés de s’en occuper. C’est le sujet qui s’est occupé de moi, et non vice-versa. »



    Participant aux débats, Ion Vianu, s’est rapporté à l’œuvre de Herta Müller : «Ce qui me fascine, dans les écrits de Herta Müller, ce sont l’extraordinaire ampleur et la complexité des sentiments. Ils ont un côté très acide, très ironique, un autre côté triste et funèbre, mais aussi quelque chose de gracieux. Ils ont également une touche de tendresse et de couleur. Et le tout baigne dans une sorte d’humour. C’est que la littérature de Herta Müller n’est pas exclusivement grave, elle est aussi amusante. Et c’est cette complexité qui fait de Herta Müller une grande écrivaine, une de mes écrivaines préférées de la littérature mondiale actuelle.» (trad. Dominique)


  • L’odeur des mots

    L’odeur des mots

    Cet automne, c’est pour la première fois que la Roumanie connaît un tel pèlerinage de Prix Goncourt. Après Frédéric Verger, que nous avons accueilli la semaine dernière dans RRI Spécial, Bucarest se prépare pour la rencontre, ce soir, avec Jean-Baptiste Del Amo, prix Goncourt du premier roman, en 2009.


    Le maître incontestable de l’écriture olfactive se trouve dans la capitale roumaine pour rencontrer le public local, mais aussi pour relancer en quelque sorte la version roumaine d’ « Une éducation libertine », le roman qui l’a confortablement installé dans l’élite littéraire continentale. Ce livre, paru chez Gallimard en 2008, repris en 2013 par les éditions roumaines Vellant, a valu à Jean-Baptiste Del Amo le Goncourt du premier roman en 2009, mais aussi les prix François Mauriac de l’Académie française, Fénéon des Universités de Paris et Laurent-Bonelli Virgin-Lire.


    Pour vous situer un tout petit peu, « Une éducation libertine » raconte grosso modo le devenir d’un jeune homme très simple qui débarque dans ce Paris de fin d’ancien régime, qui verra ses entrailles exploser lors de la très proche révolution française; un jeune homme qui apprendra à se servir de son corps, de tout ce qu’il a de plus obscur en lui, pour grimper dans la hiérarchie sociale et exorciser de la sorte l’amour ou plutôt l’obsession qu’il porte dans ses propres tripes pour un Casanova local, un homme d’une perversité approchant celle du marquis de Sade. Une histoire indissociable de son décor, composé presque exclusivement d’odeurs, de relents, de fumets, de pestilences, qui déroulent devant le lecteur à la fois un véritable film en plusieurs dimensions et le pouvoir de l’écrivain sur les mots qu’il utilise. Eclairage avec Jean-Baptiste Del Amo.


  • Le Goncourt des étudiants roumains

    En format traditionnel, sur papier, ou adapté aux repères informatisés de l’époque actuelle, lieu où la fiction et la réalité personnelle et sociale se croisent et se superposent, le livre demeure un élément essentiel de notre existence. C’est ce qui explique, en partie, le nombre de prix littéraires qui jalonnent, chaque année, la production des maisons d’édition, notamment en France, dont nous connaissons tous le Prix Goncourt. Moins nombreux sont ceux au courant du prix Goncourt des étudiants, attribués à des parutions de l’Hexagone par des jeunes étudiants de cinq autres pays, dont la Roumanie. Mme Denisa Comanescu, directrice des éditions Humanitas Fiction et présidente d’honneur du jury national roumain 2014 et deux des présidents des jurys universitaires : Laura Dumitrescu, de l’Université de Bucarest, et Roxana Noja, de l’Université de l’Ouest Timisoara sont au micro dIleana Taroi.


  • Un nouveau Nobel pour le Banat

    Un nouveau Nobel pour le Banat

    Herta Muller et Stefan Hell. Une romancière et un chimiste. Deux générations, deux professions – et sans doute deux sensibilités différentes. Ils ont pourtant 3 choses en commun: la langue allemande de leur pays daccueil, l’Allemagne, leur pays dorigine, à savoir la région de Banat du sud-ouest de la Roumanie et un prix Nobel qui récompense leur travail.



    Cette semaine, Stefan Hell, aux côtés de deux autres savants, a reçu le Nobel de Chimie “pour le développement de la microscopie à fluorescence à très haute résolution”, a indiqué le jury dans son communiqué. Les trois chercheurs ont amélioré la puissance du microscope, lui permettant de voir lextrêmement petit en temps réel. Leur travail pionnier a fait entrer la microscopie optique dans la dimension nanométrique”, a encore souligné le jury. A présent, la nanoscopie est largement utilisée, offrant les instruments nécessaires aux progrès de la médecine dans la lutte contre le cancer et dautres maladies considérées comme incurables.



    Dans une interview accordée à la radiodiffusion roumaine, Stefan Hell avouait être fier de ses origines roumaines. Sa famille avait quitté la Roumanie lorsquil avait 15 ans, pour sétablir en Allemagne de lOuest. Stefan Hell:


    SON :”En 1978, nous avons émigré de Roumanie, du Banat. Je ny suis plus rentré pendant 34 ans. Il y a 2 ou 3 ans, ma famille et moi, nous sommes revenus au Banat. Ce fut une belle expérience. C’était très émouvant de revoir les villes dArad et de Sântana, où jai passé mon enfance. Les gens ne me comprendraient pas sils ne savaient pas que je provenais de Roumanie”, a conclu Stefan Hell.



    Pour Stefan Hell, le Nobel récompense un grand nombre dannées de recherche en Allemagne, dabord à lUniversité de Heidelberg, puis à lInstitut de Chimie et Biophysique “Max Planck” de Göttingen, dont il est l’actuel directeur. Il affirme que léducation reçue en Roumanie a été des meilleures, grâce à des enseignants exceptionnels, qui ont su éveiller son intérêt et sa passion pour la science.



    Pour sa part, la romancière Hertha Mueller a eu une relation beacoup plus compliquée avec la Roumanie. En fait, ce n’est pas un conflit avec le pays, mais avec le régime communiste de lépoque, qui a transformé sa vie en un calvaire jusquen 1987, lannée de son émigration en Allemagne. Née en 1953, à Niţchidorf, ville de la même région de Banat, doù provient Stefan Hell, la jeune écrivaine interdite Hertha Mueller est devenue victime des persécutions de la Securitate avec laquelle elle refusait de collaborer. En 1987 elle sétablit à Berlin – Ouest. Elle écrit plus dune vingtaine de livres, la plupart traduits en roumain et parus en Roumanie. “Face à la peur de la mort, ma réaction fut une soif de vie. Une soif de mots. Seul le tourbillon des mots parvenait à formuler mon état”, racontait en 2009 Herta Muller, lors de la traditionnelle lecture précédant la cérémonie officielle de remise du prix Nobel. Un prix qui la récompensait, pour avoir «avec la densité de la poésie et la franchise de la prose, dépeint lunivers des déshérités», et sublimé le trauma de son expérience de lépoque communiste. Un univers marqué par les interrogatoires, les humiliations, les calomnies, la marginalisation et la peur de la mort.



    Cest peut – être pourquoi cette femme écrivain refuse de se revendiquer un pays ou une langue, préférant appartenir exclusivement à elle-même. Herta Muller reconnaît néanmoins avoir une grande sensibilité pour la langue roumaine, dont les métaphores sont plus sensuelles à son avis et vont droit au but. (aut Stefan Stoica, trad. Valentina Beleavski)

  • Le Festival International de Littérature  et de traduction de Iaşi

    Le Festival International de Littérature et de traduction de Iaşi

    Après la première édition, en 2013, du Festival International de Littérature et de traduction de Iaşi (FILIT), le quotidien espagnol El Pais parlait de cet événement culturel comme du festival littéraire le plus important d’Europe de l’Est“, tandis que le journal allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung écrivait qu“un événement d’une telle envergure européenne n’avait jamais existé auparavant en Roumanie“.



    La deuxième édition du Festival international de littérature et de traduction de Iaşi réunit du 1er au 5 octobre plus de 300 professionnels du livre, du pays comme de l’étranger, écrivains, traducteurs, éditeurs, organisateurs de festivals, critiques littéraires, libraires, distributeurs de livres, managers et journalistes culturels.



    Tout au long du festival, le public rencontrera Herta Müller, Prix Nobel de littérature, David Lodge, un des prosateurs les plus appréciés au monde et considéré comme un écrivain classique mais vivant de la littérature anglaise et mondiale, Norman Manea et Mircea Cărtărescu, dont la presse internationale affirme chaque année qu’ils ont de grandes chances de décrocher le Nobel. En octobre 2009, Herta Müller, poète et écrivain allemande d’origine roumaine, devenait la douzième femme lauréate du prix Nobel de littérature, pour avoir « avec la densité de la poésie et la franchise de la prose, dépeint l’univers des déshérités ».



    Un des auteurs étrangers les plus populaires en Roumanie, David Lodge, réputé romancier, dramaturge et scénariste britannique, est choyé tant par les critiques littéraires que par le grand public. Sa présence au Festival international de littérature et de traduction de Iaşi est d’autant plus importante qu’elles ont été rares ses apparitions publiques aux festivals de ces dernières années. En plus, c’est sa première visite en Roumanie.



    Invité au micro de RRI, Dan Lungu, écrivain roumain et manager du FILIT, nous a parlé de quelques-uns des défis lancés par l’édition 2014 de ce festival : ”Le plus grand défi est celui que le festival fait peau neuve. Nous avons donc pensé à de nouveaux genres d’événements et à des invités sur mesure. Par exemple, Guillermo Arriaga, scénariste très connu et auteur de romans, à qui nous dédions toute une soirée. C’est un nouveau genre d’invités, car à l’édition antérieure du festival nous n’avons pas convié de scénaristes. A notre avis, c’est une bonne idée que d’ouvrir le festival à d’autres types de littérature. Autre nouveauté de la présente édition: prolonger le festival au-delà des cinq journées prévues. Aussi avons-nous mis en place des résidences de traducteurs, parce que le festival s’adresse à eux aussi. Bien sûr que les traducteurs sont présents pendant toute la durée du festival. Ils ont ainsi l’occasion de faire la connaissance des écrivains et de s’entretenir avec eux. Le plus important c’est qu’ils aient une période de détente et qu’ils bénéficient d’un petit financement leur permettant de mener à bien leurs projets de traduction. Voilà pourquoi nous avons organisé cette année six résidences pour les traducteurs ”.



    Déroulé sous le patronage de la Représentation de la Commission Européenne en Roumanie, le Festival international de littérature et de traduction de Iasi attend le public au Théâtre National de la ville pour assister à des soirées de lecture, des rencontres avec les écrivains préférés, des concerts et des tables rondes. Organisé dans le cadre du Festival, le Salon du livre, BOOKFEST, se donne pour objectif de promouvoir les offres des meilleures maisons d’édition de Roumanie.



    Pour plus de détails, passons le micro à Dan Lungu, manager du FILIT : « Parmi les grandes nouveautés de l’actuelle édition, je mentionnerais la présence, aux côtés des auteurs étrangers, de dix traducteurs roumains venus à Iasi avec le concours de l’Union des écrivains de Roumanie et de l’Institut culturel roumain. Nous aurons donc un tableau complet de tout un univers littéraire qui jouira de la présence des écrivains, traducteurs, journalistes, managers, agents littéraires. Et il ne faut surtout pas oublier le public. En 2013, on a recensé plus de 30.000 visiteurs ».



    Cette année, le Festival international de littérature et de traduction de Iasi comporte, en première, une section consacrée à la poésie. Plus de détails sur « La Maison de la Poésie » et « la Nuit blanche de la poésie », avec Corina Bernic, coordinatrice de la section : « On se réjouit de voir que le festival rassemble un public de plus en plus nombreux. Lors de la précédente édition, on a lancé un projet pilote pour tester la capacité du public à résister à un marathon de poésie, une nuit blanche en vers passée en présence d’une trentaine de poètes roumains et étrangers. Avec pour modérateur l’écrivain Claudiu Komartin, le projet a réuni l’année dernière plus de 500 personnes, un chiffre qui a dépassé nos attentes et qui nous a encouragés à continuer. Comme vous voyez, le public de Iasi est épris de poésie et de prose aussi. Cette année, nous envisageons d’élargir un peu le projet. A part une deuxième Nuit Blanche de la Poésie, dont les modérateurs seront Silvia Dancu et moi-même, le public sera invité à une série de lectures des poètes roumains ».



    Une vingtaine de poètes de Roumanie se donneront rendez-vous avec le public à la Maison Dosoftei de Iasi, fameuse pour avoir accueilli au XVIIème siècle la première imprimerie de Moldavie. Les amateurs de littérature en vers auront ainsi l’occasion de connaître et entendre les voix les plus importantes de la poésie roumaine contemporaine. (Mariana Tudose, Ioana Stancescu)

  • Le point sur les échanges littéraires franco-roumains

    Le point sur les échanges littéraires franco-roumains

    La littérature, le livre et lécrit – des sujets tout à fait incontournables à cette fin de semaine en Roumanie, puisque la ville de Iasi (est) accueille la deuxième édition du Festival international de littérature et traduction. Un événement devenu, dès sa première édition, “le plus important festival spécialisé en Europe de lest”, comme lécrivait le très sérieux quotidien espagnol El Pais. A part un panel de figures de proue de la littérature européenne qui ont fait le déplacement à Iasi, FILIT est aussi une importante plate-forme de réflexion pour toutes les professions du secteur, un rendez-vous avec une forte dimension francophone de surcroît. Justement où en est-on dans les échanges littéraires franco-roumains ? Le point avec Chloé Becqueriaux, chargée de mission pour le livre et lécrit à lInstitut français de Roumanie.


  • Littérature et politique entre 1965 et 1974

    Littérature et politique entre 1965 et 1974

    La littérature a été un des arts favoris des communistes. Grâce à la force persuasive du texte littéraire, aux portraits simplistes des personnages et à l’exaltation des sentiments les plus instinctuels de l’homme, le régime communiste a remporté des succès plus importants que ne l’admettent les historiens littéraires. Dans les années 1950, le courant dominant a été de celui du réalisme socialiste, d’inspiration soviétique. A compter de 1965, le régime du jeune leader communiste Nicolae Ceauşescu allait proposer le renouveau de la Roumanie en délaissant apparemment l’idéologie. Cela revient à dire que les belles lettres étaient, en théorie, affranchies de l’emprise du réalisme socialiste. Le régime s’est ainsi attiré la collaboration de certains intellectuels convaincus que l’heure du changement avait bel et bien sonné. Malheureusement, dans les années 1980, ils allaient se détromper en constatant que le régime de Nicolae Ceauşescu n’avait été en fait qu’un autre visage du stalinisme.



    L’historien Cristian Vasile de l’Institut Nicolae Iorga de Bucarest détaille la situation de deux intellectuels qui se sont pliés au nouveau canon littéraire entre 1965 et 1974. Il s’agit du traducteur et historien littéraire Alexandru Balaci (1916 – 2002) et de l’écrivain Alexandru Ivasiuc (1933 – 1977). Lors d’une visite en Bulgarie en 1967, en tant qu’adjoint au ministre de la Culture, Alexandru Balaci a essayé de défendre la nouvelle méthode de création littéraire, celle de l’humanisme socialiste.



    Cristian Vasile: « Balaci a également eu des rencontres avec les activistes politiques de plusieurs villes, avec des personnalités culturelles. Par la même occasion, il a visité différentes institutions culturelles et artistiques et donné une conférence à l’Ecole politique supérieure de Sofia. Des sources roumaines mentionnent au total 4 conférences tenues par Alexandru Balaci lors desquelles on lui aurait posé pas moins de 80 questions. Pour certaines d’entre elles, il lui a fallu faire attention aux nuances et faire preuve de tact et de diplomatie. On lui a entre autres demandé des détails sur la littérature des minorités ethniques de Roumanie et sur le stade des relations culturelles avec l’URSS. Pourtant, la plus intéressante de toutes ces questions a été celle de savoir la position de l’intellectualité roumaine à l’égard du réalisme socialiste. Une question apparemment anachronique et quelque peu provocatrice. Il y avait deux raisons à cela. Premièrement, le réalisme socialiste était l’unique méthode de création acceptée, associée au stalinisme et imposée par les Soviétiques. Les communistes bulgares étaient, eux, plus proches du Kremlin que ne l’étaient les Roumains. Deuxièmement, Nicolae Ceauşescu et la bureaucratie culturelle et politique avaient renoncé, au moins au niveau déclaratif, de prétendre aux intellectuels d’obéir aux normes du réalisme socialiste. En quelque sorte, la méthode unique de création des années 1950 avait été remplacée par l’humanisme socialiste, mentionné dans les documents du parti et les discours de Ceauşescu. Alexandru Balaci se serait dit étonné et aurait prié ses interlocuteurs de définir le réalisme socialiste dans le nouveau contexte ».



    L’autre cas de figure, celui de l’écrivain Alexandru Ivasiuc, est bien plus triste, affirme l’historien Cristian Vasile : « Plus tard, en 1956, lorsquil est écrivain et étudiant en philosophie, dans le contexte du déclenchement de la révolution de Budapest, Alexandru Ivasiuc conteste la raison même denseigner ce cours, considéré comme fondamental jusque là: “Les bases du marxisme – léninisme”. Ivasiuc refuse de promouvoir la discipline marxiste – léniniste, payant ce défi par 7 années de prison et de domicile obligatoire. A part cette contestation, il avait lintention de rallier les étudiants roumains à la révolution hongroise. Adulte, Alexandru Ivasiuc subit une transformation. Il opte pour une forme étrange de marxisme qui lapproche du même régime politique qui, une décennie auparavant, le considérait comme ennemi, instigateur et contre-révolutionnaire et qui lavait même jeté en prison. Bien quil ait connu de 1956 à 1963 toutes les humiliations de lunivers prisonnier et du domicile obligatoire, les rapports entre lindividu et le pouvoir lobsèdent à tel point quil tente, dans la seconde moitié des années 1960, une réinsertion sociale qui le rapproche des maîtres de l’idéologie. Juste après 1963, il devient fonctionnaire à lambassade des Etats-Unis à Bucarest. En même temps, il se consacre à lécriture et occupe différentes fonctions de direction. Durant cette période on remarque le changement qui se produit en lui, visible également dans ses romans (“Intervalle”, “Les oiseaux” et autres.). Dans la prose politique contemporaine avec Ivasiuc, à savoir le roman de lobsédante décennie (comme les intellectuels vivant sous la terreur avaient appelé les années 1950), sont réhabilitées en fiction les personnes agressées par le régime. Par contre, les critiques et historiens de la littérature constatent que dans les oeuvres dAlexandru Ivasiuc, les personnages réhabilités sont les tortionnaires, alors que les victimes sont condamnées encore une fois. Peu importe si Ivasiuc a été un marxiste sincère ou tout simplement cynique, son cas en dit long sur le succès des mécanismes pervers de la pédagogie communiste. Son comportement dans la sphère politique donnait limpression que cétait une personne qui avait subi de fortes transformations intérieures ».



    Lhumanisme socialiste a disparu en 1989, comme dailleurs lensemble de la politique culturelle du régime de Ceausescu. Ce nest quun autre exemple de la manière dont limposture dans lart, bien quelle bénéficie temporairement du soutien du pouvoir politique, ne peut pas simposer en tant que valeur authentique. (Trad. Valentina Beleavski)

  • L’écrivain Mike Ormsby, Roumain par alliance

    L’écrivain Mike Ormsby, Roumain par alliance

    Mike Ormsby est un écrivain britannique qui a débuté dans la littérature par un livre sur la Roumanie. Ancien musicien professionnel, ensuite journaliste et formateur à la BBC de 1990 à 1997, il s’est marié avec une Roumaine, un jour de Noël, à Las Vegas, devenant ainsi Roumain par alliance. Même s’il habite Bakou, il écrit sur son site que son chez lui c’est la Transylvanie. Son premier livre, Grand Bazar România, Grand Bazar Roumanie, paru en 2008 à la maison d’éditions Compania, a joui d’un succès prévisible à une époque où les Roumains s’intéressaient au regard que portaient sur eux les étrangers.



    Les histoires de Mike sur les personnages pittoresques qu’il a pu croiser dans une capitale roumaine fraîchement intégrée dans l’UE ont été appréciées tant par les lecteurs autochtones que par la communauté assez nombreuses d’expats. Ces derniers se sont peut-être retrouvés dans les étonnements et les moments de perplexité vécus par Mike Ormsby. Comme il ne s’est pas limité à un seul livre — trois autres s’en étant suivis – nous lui avons demandé où en est sa relation avec la Roumanie. « Comme n’importe quel autre pays, la Roumanie a plusieurs visages, que je découvre peu à peu. Même si je la connais depuis pas mal d’années, j’ai encore des découvertes à faire. Certaines choses qui la concerne m’attristent, comme la migration des jeunes dont je connais plusieurs. Par exemple, j’ai un ami roumain de seulement 18 ans, qui vit aux Etats-Unis. Il n’a plus revu son pays natal depuis l’âge de 5 ans et il commence déjà à perdre la maîtrise de sa langue maternelle. Sa mère et son père envoient de l’argent aux grands-parents qui sont restés en Roumanie, mais cela ne saurait combler le vide laissé par le petit-fils. C’est ça la situation et malheureusement il y a peu de chances qu’elle change bientôt. Le capital humain s’est raréfié comme après la guerre. Je me réjouis, pourtant, de ce que certains aspects dont j’ai parlé dans mon premier livre soient plutôt rares aujourd’hui. Et je me réfère par exemple aux chauffeurs carrément dangereux de Bucarest et aux conducteurs de taxi totalement dépourvus de scrupules. Si ceux-là ne me manquent pas, il me manque, en échange, l’hospitalité et la sagesse des Roumains. Moi, qui travaille longtemps à l’étranger, j’aime écouter la musique d’Enesco, laquelle, je pense, exprime le mieux l’esprit de ce pays.



    6 ans après la parution de son livre sur la Roumanie, Mike Ormsby continue de recevoir des lettres de ses lecteurs. “La semaine passée, une jeune femme écrivait sur ma page Facebook que je suis le seul étranger à dire la vérité sur la Roumanie Comme tout écrivain, j’ai aussi des retours moins agréables, mais cela ne me dérange pas. A mon avis, l’art controversé est le plus intéressant et puis chaque lecteur a le droit d’exprimer librement son opinion, pourvu qu’elle soit étayée par des arguments. Je suis en train de forger une relation avec des lecteurs plus jeunes, grâce à mon deuxième livre, «Le moulinet sans peur». Tout un village sort de l’obscurité grâce à un moulinet, qui est une sorte de turbine éolienne. J’ai présenté mon livre dans différentes écoles de Roumanie, ce qui m’a donné l’occasion d’expliquer aux enfants le fonctionnement des turbines et de leur apprendre qu’elles génèrent non seulement de l’électricité, mais aussi des controverses. Il paraît que les enfants aiment mon histoire, tout comme les dessins de Sorin Sorăşan, lequel, à mon avis, est un vrai génie. Je reçois des messages intéressants de mes lecteurs roumains à l’égard de mon dernier livre publié en 2013, Child Witch Kinshasa. Je suis très heureux qu’ils aient la curiosité de lire ce livre, d’autant plus qu’il y a quelques années, un éditeur de Bucarest me disait que les Roumains ne s’intéressaient pas trop à l’Afrique. Cette opinion, je ne l’ai pas partagée. J’espère même parvenir à prouver le contraire.”



    Child Witch Kinshasa, un roman inspiré de la réalité, raconte l’histoire des enfants congolais auxquels les adultes font porter toutes les difficultés de ce monde. Lorsque les choses ne tournent pas rond en famille ou dans le village, lorsqu’une grande personne perd son emploi ou tombe malade, les enfants sont jetés dans la rue, accusés de sorcellerie. Le livre de Mike Ormsby a un peut de tout: humour, magie noire, fragilité, crainte, incertitude, tension. Mike affirme qu’il vaut la peine de raconter l’histoire des enfants possédés par le diable. En 2002, j’étais au Congo pour tenir un cours de formation à l’intention des journalistes. Ma femme, Angela, travaillait comme freelance. J’ai vu alors beaucoup d’enfants de la rue. Si à l’époque ils étaient quelque 30.000, maintenant ils doivent être bien plus nombreux. Bien d’entre eux sont accusés de sorcellerie et soumis à des brutalités inimaginables. Certains arrivent même à trouver la mort pendant les sois-disant exorcisations. J’ai donc pensé que c’était un thème qu’il fallait développer. J’ai rencontré plusieurs enfants qui ont vécu des expériences affreuses, ainsi que des prêtres qui dirigent les séances d’exorcisation. La réaction tout à fait naturelle de quiconque entend parler de ces choses est de se dire que c’est une barbarie. La réaction est justifiée, mais ces choses relèvent, en quelque sorte, du contexte socio-économique. La guerre est une étrange bête. Elle est à l’origine d’un vide politique et moral. Peut-être réagirions – nous de la même façon si nous étions à la place de ces gens pauvres, dépourvus d’instruction et qui croient que si les choses vont mal c’est la faute au diable’’.



    Il est rare qu’un écrivain puisse affirmer avoir changé en mieux le monde. Mike, lui, peut le dire sans que cela ait l’air d’une vantardise. Depuis deux ans, une loi punit les violences faites aux enfants ou les accusations de sorcellerie portées à leur encontre. Avec sa femme, Angela, Mike a réalisé deux vidéo clips musicaux sur ce thème au Congo, diffusés par les télévisions locales. Par ces clips et son livre, il tente d’attirer l’attention du monde sur cette histoire douloureuse. J’ai utilisé ces clips vidéo lors des cours de formation pour les journalistes et je les encouragés à essayer de traiter ce sujet de manière plus objective, car, dans la plupart des cas, ils se limitaient à donner les seuls points de vue des prêtres ou des parents paranoïaques, en oubliant qu’un enfant avait été maltraité physiquement et psychologiquement. Ce livre est en fait ma manière à moi de changer quelque chose, de dire au monde ce qui se passe et pourquoi cela se passe, d’inciter les gens à l’action. Le problème n’a pas été écarté. Peut-être que l’on dénombre maintenant à Kinshasa beaucoup plus d’enfants de la rue qu’il n’y avait auparavant, mais il existe désormais cette loi qui pourra améliorer la situation, pourvu qu’elle soit appliquée’’.



    A quelques semaines de la publication par la maison d’éditions roumaine Nicoaro Books, le livre « Child Witch Kinshasa » de Mike Ormsby est déjà un best – seller. La deuxième partie de cette histoire, à paraître bientôt, parle du périple londonien d’un enfant accusé de sorcellerie. (trad.: Mariana Tudose)


  • 03.12.2013 (mise à jour)

    03.12.2013 (mise à jour)

    Budget — Le projet de budget 2014 reflète la réalité économique et sociale actuelle en Roumanie et le programme politique de l’Union sociale libérale, l’alliance qui a remporté les élections en 2012. C’est ce qu’a déclaré ce mardi au plénum du Parlement de Bucarest, le premier ministre Victor Ponta. D’après lui, le principal objectif du projet de budget 2014 est celui que la croissance économique soit visible sur les revenus de chaque citoyen. Le chef du gouvernement a également évoqué quelques mesures concrètes prévues au budget 2014, dont l’indexation de toutes les pensions de retraite, la hausse du SMIC et du RMI, et la baisse des contributions à la sécurité sociale. Par contre, l’opposition se dit mécontente de n’avoir pas réussi à faire adopter les amendements qui auraient entraîné, selon elle, la relance économique.



    Accord — Le FMI surveille les évolutions de Roumanie et attend que les autorités de Bucarest décident si elles souhaitent modifier les politiques nécessaires pour assurer la cible de déficit fixée. La prise de position du FMI, soit un des trois bailleurs de fonds internationaux de la Roumanie, aux côtés de la Banque Mondiale et de la Commission européenne, intervient suite au refus du président de la République, Traian Basescu, de signer le mémorandum avec ces institutions financières. Pour sa part, la Commission européenne estime que c’est à la Roumanie de décider si elle souhaite poursuivre le programme agréé.



    Corruption — La Roumanie arrive 69e sur un total de 177 pays et territoires étudiés au classement 2013 des pays les plus corrompus au monde, avec un indice de perception de la corruption de 43 sur 100, indique le rapport de l’organisation Transparency International rendu public ce mardi à Berlin. Selon le document, l’Italie et le Koweït ont un indice similaire à celui de la Roumanie. Lindice est compris entre zéro pour un pays perçu comme hautement corrompu et 100 pour un pays considéré comme très vertueux. Les pays les mieux notés sont le Danemark et la Nouvelle Zélande, avec un score de 91, suivis par la Finlande et la Suède. Au pôle opposé on retrouve l’Afghanistan, la Corée du Nord et la Somalie. Transparency International établit chaque année un indice de perception de la corruption au sein des partis politiques, de la police, du système judiciaire et des services publics de ces pays.



    Visas — Le taux de refus de visas pour les Roumains qui souhaitent se rendre aux Etats-Unis a reculé jusqu’à 11,5% dans l’année fiscale 2012-2013, contre 17% dans la période précédente, selon les données publiées sur le site du Département d’Etat. Le ministère roumain des Affaires étrangères a salué l’annonce et espéré que cette tendance se poursuivrait à l’avenir aussi. Selon le ministère de Bucarest, la baisse du taux de refus des demandes de visas par les Roumains ainsi qu’une éventuelle adoption par le Congrès américain d’un acte réglementaire qui modifie les critères d’accès au programme Visa Waiver pourraient jouer un rôle important dans la suppression, aussitôt que possible, du régime des visas aux Etats-Unis, soit un objectif de Bucarest.



    OTAN — Le ministre roumain des Affaires étrangères, Titus Corlatean, participe deux jours durant à Bruxelles à la réunion des chefs de diplomaties des Etats membres de l’Alliance nord-atlantique. A l’agenda des discussions figurent des sujets tels les préparatifs du sommet de 2014 au Royaume Uni, le rôle de l’Alliance après la fin des opérations en Afghanistan, le renforcement de la relation transatlantique, le développement des partenariats et la poursuite de la politique des « portes ouvertes ». D’autres rencontres auront lieu également en présence d’autres Etats partenaires de l’Alliance, à savoir la Russie et la Géorgie.



    Environnement — La ministre roumaine de l’Environnement et des changements climatiques, Rovana Plumb sera reçue mercredi à Londres par l’héritier de la couronne britannique, le prince Charles. La ministre roumaine fait une visite de trois jours au Royaume-Uni afin d’élargir les projets d’environnement de la Roumanie et les faire intégrer dans des programmes européens, voire globaux. A Londres, Rovana Plumb doit également avoir des entretiens avec son homologue britannique, Edward Davey, et à la Chambre des Lords.



    Justice — La Haute Cour de Cassation et de Justice de Bucarest a condamné ce mardi Codruţ Şereş et Zsolt Nagy à respectivement six et cinq ans de prison ferme dans l’affaire des privatisations stratégiques. Ancien ministre de l’économie et du commerce, Ioan Codruţ Şereş, a été jugé pour association de malfaiteurs et trahison par la divulgation d’informations économiques classées secret défense. Dans le même dossier, un citoyen tchèque et un autre roumano – anglais ont eux aussi été condamnés pour complicité à des peines de prison fermes comprises entre neuf et dix ans. La décision judiciaire n’est pas définitive.



    Défense — La position de Washington sur l’importance de la défense antimissile en Europe reste inchangée, a fait savoir mardi l’ambassade américaine à Bucarest. Cette précision fait suite aux déclarations du chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov. Selon ce dernier, le bouclier antimissile n’a plus de raison d’être après la signature d’un accord nucléaire entre l’Iran et la communauté internationale et compte tenu des affirmations de Washington qui considère Téhéran comme principale menace en matière d’attaques balistiques. Quant à la décision des Etats-Unis de construire conjointement avec la Roumanie une base de défense antimissile, la mission diplomatique américaine à Bucarest a évoqué une étude du Département américain de la défense aux termes de laquelle, «la position géographique de la Roumanie permet une riposte efficace aux éventuelles menaces».



    Littérature — Parvenu à sa 6e édition, le Festival International de Littérature Bucarest se déroule jusqu’au 6 décembre sous la devise « Re-writting the map of Europe ». Y participent des noms importants de la littérature universelle contemporaine ainsi que de jeunes écrivains roumains. Parmi les invités étrangers figurent la Britannique Sarah Dunant — romancière, critique littéraire et réalisatrice d’émissions de radio et de télévision, une des auteures les plus prisées en Europe et aux Etats-Unis et Zeruya Shalev, l’écrivaine israélienne la plus réputée du moment. L’événement de Bucarest est le plus important festival international indépendant de littérature de Roumanie.

  • 03.12.2013

    03.12.2013

    Budget — Le projet de budget 2014 reflète la réalité économique et sociale actuelle en Roumanie et le programme politique de l’Union sociale libérale, l’alliance qui a remporté les élections en 2012. C’est ce qu’a déclaré ce mardi au plénum du Parlement de Bucarest, le premier ministre Victor Ponta. D’après lui, le principal objectif du projet de budget 2014 est celui que la croissance économique soit visible sur les revenus de chaque citoyen. Le chef du gouvernement a également évoqué quelques mesures concrètes prévues au budget 2014, dont l’indexation de toutes les pensions de retraite, la hausse du SMIC et du RMI, et la baisse des contributions à la sécurité sociale. Par contre, l’opposition se dit mécontente de n’avoir pas réussi à faire adopter les amendements qui auraient entraîné, selon elle, la relance économique.



    Accord — Le FMI surveille les évolutions de Roumanie et attend que les autorités de Bucarest décident si elles souhaitent modifier les politiques nécessaires pour assurer la cible de déficit fixée. La prise de position du FMI, soit un des trois bailleurs de fonds internationaux de la Roumanie, aux côtés de la Banque Mondiale et de la Commission européenne, intervient suite au refus du président de la République, Traian Basescu, de signer le mémorandum avec ces institutions financières. Pour sa part, la Commission européenne estime que c’est à la Roumanie de décider si elle souhaite poursuivre le programme agréé.



    Corruption — La Roumanie arrive 69e sur un total de 177 pays et territoires étudiés au classement 2013 des pays les plus corrompus au monde, avec un indice de perception de la corruption de 43 sur 100, indique le rapport de l’organisation Transparency International rendu public ce mardi à Berlin. Selon le document, l’Italie et le Koweït ont un indice similaire à celui de la Roumanie. Lindice est compris entre zéro pour un pays perçu comme hautement corrompu et 100 pour un pays considéré comme très vertueux. Les pays les mieux notés sont le Danemark et la Nouvelle Zélande, avec un score de 91, suivis par la Finlande et la Suède. Au pôle opposé on retrouve l’Afghanistan, la Corée du Nord et la Somalie. Transparency International établit chaque année un indice de perception de la corruption au sein des partis politiques, de la police, du système judiciaire et des services publics de ces pays.



    Visas — Le taux de refus de visas pour les Roumains qui souhaitent se rendre aux Etats-Unis a reculé jusqu’à 11,5% dans l’année fiscale 2012-2013, contre 17% dans la période précédente, selon les données publiées sur le site du Département d’Etat. Le ministère roumain des Affaires étrangères a salué l’annonce et espéré que cette tendance se poursuivrait à l’avenir aussi. Selon le ministère de Bucarest, la baisse du taux de refus des demandes de visas par les Roumains ainsi qu’une éventuelle adoption par le Congrès américain d’un acte réglementaire qui modifie les critères d’accès au programme Visa Waiver pourraient jouer un rôle important dans la suppression, aussitôt que possible, du régime des visas aux Etats-Unis, soit un objectif de Bucarest.



    OTAN — Le ministre roumain des Affaires étrangères, Titus Corlatean, participe deux jours durant à Bruxelles à la réunion des chefs de diplomaties des Etats membres de l’Alliance nord-atlantique. A l’agenda des discussions figurent des sujets tels les préparatifs du sommet de 2014 au Royaume Uni, le rôle de l’Alliance après la fin des opérations en Afghanistan, le renforcement de la relation transatlantique, le développement des partenariats et la poursuite de la politique des « portes ouvertes ». D’autres rencontres auront lieu également en présence d’autres Etats partenaires de l’Alliance, à savoir la Russie et la Géorgie.



    Environnement — La ministre roumaine de l’Environnement et des changements climatiques, Rovana Plumb sera reçue ce mardi à Londres par l’héritier de la couronne britannique, le prince Charles. La ministre roumaine fait une visite de trois jours au Royaume-Uni afin d’élargir les projets d’environnement de la Roumanie et les faire intégrer dans des programmes européens, voire globaux. A Londres, Rovana Plumb doit également avoir des entretiens avec son homologue britannique, Edward Davey, et à la Chambre des Lords.



    Littérature — Parvenu à sa 6e édition, le Festival International de Littérature Bucarest se déroule jusqu’au 6 décembre sous la devise « Re-writting the map of Europe ». Y participent des noms importants de la littérature universelle contemporaine ainsi que de jeunes écrivains roumains. Parmi les invités étrangers figurent la Britannique Sarah Dunant — romancière, critique littéraire et réalisatrice d’émissions de radio et de télévision, une des auteures les plus prisées en Europe et aux Etats-Unis et Zeruya Shalev, l’écrivaine israélienne la plus réputée du moment. L’événement de Bucarest est le plus important festival international indépendant de littérature de Roumanie.

  • La littérature roumaine primée à Bruxelles

    La littérature roumaine primée à Bruxelles

    Pour ceux épris de la ville de Bucarest et de la prose dont l’atmosphère invite à des voyages à rebours dans le temps vers 1897 — selon le critique littéraire Dan C. Mihàilescu — Ioana Pârvulescu publiait en 2009 son roman « La vie commence vendredi ». Un homme est retrouvé sans connaissance en plein champ, près de la capitale. Personne ne sait exactement qui il est et chacun s’imagine quelque chose de différent. Est-ce un escroc international qui veut perdre sa trace ? Un criminel ? Un malade ?



    Petit à petit, toute une série de personnes s’agglutinent à ses côtés, un médecin et sa fille, un policier, un commissionnaire âgé de 8 ans qui sillonne toute la ville de Bucarest avec ses lettres et ses colis et, non pas en dernier lieu, des journalistes d’un journal de l’époque — UNIVERSUL.



    Le roman, palpitant ayant un fil d’action comme dans un roman policier, avec des personnages particulièrement vivants, cette catégorie qui se transforme en amis, se déroule pendant seulement treize jours, depuis le vendredi 19 décembre jusqu’à la fin de l’année. L’atmosphère du monde bucarestois du début du XX-ème siècle est recrée comme dans un film. Il suffit d’ouvrir le livre pour s’y trouver, déjà. Pour « La vie commence vendredi », Ioana Pârvulescu s’est trouvée parmi les 12 gagnants des prix de l’Union Européenne de Littérature qui ont été décernés à Bruxelles. Une question classique : comment êtres vous après avoir reçu ce prix ?



    Voici la réponse, à chaud, de Ioana Pârvulescu : “C’est formidable ! Certes, ce n’est pas facile de représenter un pays, c’est pour la première fois qu’il m’arrive de représenter officiellement la Roumanie et j’ai été assez consciente de cette mission. »



    Ioana Pârvulescu enseigne la littérature roumaine moderne à la Faculté de Lettres de l’Université de Bucarest, elle était 18 années durant rédacteur de ROMANIA LITERARA, publication pour laquelle elle écrivait chaque semaine. Chez HUMANITAS, prestigieuse maison d’édition, elle a initié et coordonné la collection « Le livre de la table de nuit ». Avec son roman « La vie commence vendredi » elle a fait son début dans le roman de fiction après avoir écrit des essais: « Je n’ai pas été un critique proprement dit. On m’a classifié ainsi, mais j’ai écrit surtout des essais, de l’histoire littéraire mais maintenant j’écris avec plaisir de la fiction, des romans. Ce mot-écrivain- couvre tout. »



    Dans une interview accordée en 2009, année de parution du roman « La vie commence vendredi », Ioana Pârvulescu racontait : «les personnages du roman m’ont prié de les laisser entrer dans le monde du XXI-ème siècle car ils étaient préoccupés par l’avenir plus que tout au monde. Je les ai averti: bon, soit, mais c’est à votre entière responsabilité, c’est un tout autre monde que celle que vous connaissiez, ne venez pas ensuite chez moi pour vous plaindre si vous n’aimez pas. Et ils m’ont dit qu’ils étaient bien curieux de savoir ce qui nous arrive et rencontrer les gens d’aujourd’hui. »



    Nous sommes hideux par rapport aux gens beaux d’antan et Ioana Pàrvulescu nous offre un repère de notre chute – disait Gabriel Liiceanu, directeur des éditions HUMANITAS. Mais, hormis tout cela, dans « La vie commencer vendredi », un roman retro et chaleureux, la ville de Bucarest de jadis est ressuscitée…(trad.: Costin Grigore)

  • Le Festival international de littérature et de traduction de Iasi

    Le Festival international de littérature et de traduction de Iasi

    Une centaine dévénements, 200 invités du monde des livres, plus de 12.000 spectateurs — voilà le résumé statistique de la première édition du Festival international de littérature et de traduction de Iaşi (FILIT) – qui a eu lieu à la fin du mois doctobre. Des auteurs et des traducteurs prestigieux de littérature contemporaine ont partagé des expériences professionnelles diverses, ce qui a permis aux lecteurs passionnés de découvrir ce quest lécriture dun roman, comment vivre de la création littéraire, comment on peut devenir un traducteur à succès.



    Le Festival international de littérature et de traduction a prouvé, dès sa première édition, quil a sa place parmi les plus importants événements du genre du monde de la culture – une affirmation qui appartient à Ulrich Schreiber, fondateur et directeur du Festival international de littérature de Berlin, une des plus grandes manifestations culturelles dEurope. “Le public a été extraordinaire, la presse internationale a été quelque peu prise de court puisque personne nimaginait quune telle chose puisse être possible à Iaşi, ville dont on entendait parler pour la première fois.



    Moi-même, jai été étonné.”, disait lécrivain Dan Lungu, manager du FILIT, lorsquil a remercié les bénévoles et léquipe organisatrice. “Bref, cet événement est allé loin au-delà de mes attentes, la solidarité des institutions autour du projet a été extraordinaire, le public a été nombreux, la presse – active et appliquée. Cest un festival professionnel, qui vise très haut et qui jouit également dune très large participation. Je peut dire que le FILIT na rien à envier aux grands festivals dEurope.”



    Lécrivaine Florina Ilis. ”Au deuxième jour du festival, nous avons rencontré les élèves du Lycée Mihai Eminescu, et à Paşcani, lécrivain Radu Pavel Gheo a participé à une lecture de texte, suivie dun débat avec des lycéens de la ville. Moi, jai essayé dêtre présente à un maximum dévénements, car il ma été impossible de participer à tous. Ils en ont été nombreux, très bien organisés, ce qui a rendu le choix très difficile.”



    Le poète Mircea Dinescu avait lui aussi répondu à lappel des organisateurs du Festival international de littérature et de traduction de Iaşi. “Cétait sympa, il y a eu beaucoup de monde qui a vibré à ma lecture et à mes propos. La rencontre a été assez gaie, ce qui nest pas la règle; dhabitude les réunions de ce genre sont plutôt ennuyeuses et moi, je ne supporte pas ça. Je naime pas ennuyer les gens avec de longs poèmes, qui ne sont pas faits pour être lus devant un public. Il existe une diversité de genres poétiques, certains se prêtent à une lecture publique, dautres non. Jai aussi apprécié la diversité des structures et des écritures poétiques, tout a été très bien.”



    Lécrivaine Adriana Bittel. “Moi, je crois que ça a été une grande réussite, de par la qualité des écrivains invités et de lintérêt surprenant du public. Jai trouvé extraordinaire de voir, lors de certaines séances de lecture ou de rencontres, des centaines de gens venus connaître les écrivains et acheter leurs livres. Or, cet intérêt est lultime satisfaction de tout auteur. Les organisateurs du festival ont fait un travail extraordinaire et je peux me déclarer heureuse.”



    Choyés pendant tout le festival, les jeunes ont eu le dernier mot : un jury de 20 élèves des meilleurs lycées de Iaşi, a élu “le livre le plus aimé de lannée 2012”, un projet de lInspection scolaire départementale Iaşi. “Le Festival international de littérature et de traduction existe parce que la littérature roumaine le vaut bien. Cest une très bonne période pour les livres des auteurs roumains, tout comme pour les films de Roumanie, malgré les temps économiquement difficiles que nous vivons”, pense le traducteur néerlandais Jan Willem Bos. La traductrice française Laure Hinckel a apprécié elle aussi la qualité de ce qui sest passé à Iaşi: “Je salue lexistence de ce festival.



    Le FILIT est organisé en province, sans lappui du centre, cest un festival porté par de nombreux bénévoles et par des programmes conçus effectivement pour le destinataire, pour le lecteur, surtout pour les jeunes.” (trad. : Ileana Taroi)