Author: Rateau Grégory

  • L’exil

    L’exil

    Elle n’avait encore jamais été une étrangère,
    là où les terrasses des cafés auraient dû lui mettre du baume
    au cœur, ces espaces bruyants et trop éclairés où des gens
    célébraient l’amitié, lui renvoyaient en plein visage sa solitude
    et son égarement. Soudain, la ville de Bucarest et ses blocs
    tout déglingués lui manquaient, sa grand-mère l’attendant sur
    le perron de sa maison de campagne, semblait à présent
    relayée de l’autre côté du globe.

  • Miracle

    Miracle

    Ionut avait l’habitude de se rendre au chevet des mourants, de rassurer les familles en leur offrant le réconfort d’une vie possible après la mort. Il en avait vu des gens mourir, des personnes qui fréquentaient l’église depuis ses débuts, vieillissant à leurs côtés, mais ce qu’il n’avait jamais eu l’occasion de voir, c’est une femme dans la fleur de l’âge, avec toute la vie devant elle, être soudainement rappelée par le Seigneur.

  • Ana

    Ana

    L’obscurité gagnait du terrain, les nuages voilaient un ciel tirant sur
    ces dernières lueurs roses-orangées et la lucarne toute poussiéreuse filtrait
    les rayons de lumière qui venaient y rendre l’âme. En cherchant au plafond, je
    compris qu’il n’y avait pas d’électricité, pas la moindre lampe ou interrupteur
    dissimulé dans un coin.



  • Les couples franco-roumains

    Les couples franco-roumains

    Elle n’arrivera jamais à comprendre je crois comment, je cite : « je peux manger du fromage périmé avec de la moisissure dégueulasse ! ». Et bien je n’insiste pas, je mecontente de lui demander, avec mon sourire le plus agaçant, pourquoi aucun fromage chez elle n’est jamais totalement porté à maturation et pourquoi ils ont tous la même tête, me gardant bien de luidire, le même goût.



  • La campagne roumaine, un monde encore préservé mais pour combien de temps?

    La campagne roumaine, un monde encore préservé mais pour combien de temps?

    Je suis conscient que toutes ces vieilles bâtisses, avec leurs histoires, leurs familles, seront un jour vendues, cédant la place à des auberges, des supermarchés ou à de riches propriétaires terriens, autrefois nommés des boyards. Devant chaque maison ancienne, on peut encore trouver de petits bancs, les vieilles dames s’y assoient pour se raconter les derniers potins, les jeunes filles attendent leurs futurs prétendants et les hommes trinquent entre voisins…



  • Veiller la mort

    Veiller la mort

    Dans le prolongement de son livre Hors-piste en Roumanie, Grégory Rateau revient avec un nouveau portrait sur le deuil. Mihail n’est plus, sa famille et ses amis se réunissent trois jours et trois nuits durant pour veiller sur sa dépouille.



  • Le gratar

    Le gratar

    Grégory Rateau revient avec un nouveau portrait radio dans le prolongement de son livre Hors-piste en Roumanie, il nous raconte un moment de convivialité cher à une famille roumaine autour du gratar, de la viande et d’un verre de vin local…

  • Le feu sacré

    Le feu sacré

    Le soir, je pars à la messe de Pâques avec mon ami, nous retrouvons d’autres familles qui nous offrent une part de cozonac (un gâteau traditionnel) et des œufs peints à la main. Nous nous serrons en deux rangées bien distinctes devant le parvis de l’église pour laisser le pope circuler entre les fidèles et leur transmettre le feu sacré tout spécialement apporté du tombeau du Christ à Jérusalem. La flamme circule, elle vacille dangereusement, je dois même la rallumer à deux reprises en suppliant mes voisins de me tendre la leur. La lumière éclaire des visages abîmés, fatigués mais dont les yeux sont d’une incroyable vitalité pour cette soirée de fête Pascale.



  • De la marche

    De la marche

    Le rapprochement fut des plus simples car personne en dehors de nous trois ne dormait dans la cabane cette nuit-là, tant le vent dehors hurlait à s’en briser les cordes vocales et le verglas rendait les pentes impraticables. Michael et Bridget m’ont fait la confidence qu’ils venaient ici, en Roumanie depuis maintenant 15 ans. Chaque année, c’était comme un rituel bien huilé, ils commençaient leur trek très tôt en partant des petits villages en amont puis ils discutaient en longeant la route et en admirant les montagnes qui se dressaient à l’horizon, avec comme unique projet, de se retrouver tout là haut avant la tombée de la nuit.



  • Mes voyages imaginaires

    Mes voyages imaginaires

    Ma belle-mère doit s’embarquer d’urgence, travaillant entre Tripoli et Bucarest, elle fait la navette chaque mois le cœur à l’envers. Son mari ainsi que ma fiancée et moi-même l’accompagnons jusqu’à la dernière ligne blanche. Je suis affecté de la voir repartir dans ce pays qui n’est pas très accueillant pour une femme vivant seule, une étrangère somme toute, dont la beauté n’a presque pas pris une ride. Elle cache son désarroi derrière une démarche masculine, ne laissant trahir aucune faiblesse dans ses épaules, nous présentant son dos, rempart efficace pour parer à tout sentimentalisme.



  • La tempête de neige

    La tempête de neige

    Pendant plusieurs jours, je traversais mon quartier comme une ombre, je croisais d’autres ombres déguisées en bonhommes de neige. Certaines d’entre elles avançaient comme des mollusques sans décoller les pieds du sol, cinq couches de vêtements enfilés les uns par dessus les autres à la manière des poupées russes, avec des sacs de courses minuscules qui semblaient peser 3 tonnes. D’autres avaient des sandwichs à la main qu’ils n’arrivaient même pas à mâcher tant le givre les pétrifiait avant la première bouchée.



  • Un couple, un nouvel appartement, des meubles, des projets, un risque sismique de niveau 1…

    Un couple, un nouvel appartement, des meubles, des projets, un risque sismique de niveau 1…

    Pierre et Gabriela sentaient qu’ils avaient droit au bonheur, ils voulaient l’arracher à tout prix et le garder jalousement pour eux, accélérant les choses, les précipitant même. C’était aussi, et ils le sentaient tous les deux, leur dernière chance pour sauver leur couple d’un quotidien déjà bien entaché par les reproches.



  • Le jour du cochon

    Le jour du cochon

    Le couteau est encore dans lanimal quand son dernier son est sectionné par le tranchant de la lame. Il y a un bain de sang sur le sol que la terre refuse bien évidement de boire. La sœur de Lucian, une femme forte de corps comme de caractère et habituée depuis lenfance à ce spectacle, arrive avec un seau rempli de terre et le jette sur la scène de crime pour faire disparaître toutes les preuves.








  • Le revenant

    Le revenant

    Son portable sonne, Arthur ne répond pas et pourtant il ne quitte jamais son téléphone. Au bout d’une heure d’angoisse Ana, sa fiancée, se demande terrifiée : mais a-t-il jamais existé?

  • Gilles

    Gilles

    Il a quitté son Havre natal et est venu sinstaller ici à Bucarest il y a quelques mois seulement. Pour les gens qui ont droit au sommeil, la vie connaît une rupture, se coucher, oublier, pour ensuite tout recommencer. Pour lui, il ny avait jamais eu aucune discontinuité, chaque jour se prolongeait sans sarrêter. Il avait donc tout son temps pour contempler la profonde absurdité de tout ce qui lentourait. Son inconscient sétait fait la malle, il était donc conscient 24 h sur 24, une vraie torture pour ses nerfs.