Category: Espace Culture

  • Open Practice Society – une initiative de l’association Qolony

    Open Practice Society – une initiative de l’association Qolony

    Organisé
    par l’association Qolony – La colonie pour l’art et la science – et cofinancé
    par le Centre culturel ARCUB de la Mairie de Bucarest, le projet Open Practice
    Society se déroule dans le cadre du Programme Bucarest – ville ouverte 2021. Il
    soutient l’infrastructure et le développement des Ateliers Malmaison, un accès
    plus facile du public aux initiatives artistiques de cette communauté d’appui
    actif aux jeunes artistes.






    Vieux
    de 177 ans, le bâtiment Malmaison, une caserne à l’origine, a une importance historique
    remarquable. Il a servi d’Ecole d’officiers des armées, de tribunal militaire, de
    prison pendant le régime du maréchal Antonescu et de centre d’enquête et de
    détention de la Securitate (la police politique) au début du régime communiste.






    A
    l’heure actuelle, les Ateliers Malmaison se proposent de réintroduire le
    bâtiment dans le circuit vivant de la ville et d’inaugurer un nouvel âge de sa
    longue histoire. Ils sont à la fois une communauté artistique et un espace
    partagé par des artistes, ateliers, projets et galeries d’art de la capitale
    roumaine.






    L’Open
    Practice Society cible en égale mesure la communauté artistique, les nouvelles
    générations d’artistes et le grand public de Bucarest. A travers les
    conférences données par des acteurs de poids du secteur culturel, tels qu’artistes
    avec une notoriété internationale, commissaires d’expositions ou galeristes, l’Open
    Practice Society a pour but d’offrir, aux élèves et aux étudiants entre 16 et
    20 ans, une alternative au programme éducationnel habituel, en leur donnant la
    possibilité de travailler avec des artistes internationalement connus.






    Mihaela
    Ghiță, membre de l’association Qolony et journaliste à Radio Roumanie Culture,
    explique : «Nous avons passé ces informations, utiles aux jeunes
    apprentis, au Lycée d’arts plastiques « Nicolae Tonitza », à
    l’Université nationale des arts de Bucarest, au Collège (lycée) national « Sfântul
    Sava », au Collège (lycée) national « Octav Onicescu ».
    D’ailleurs, un professeur d’arts du Collège (lycée) national « Sfântul
    Sava » a assisté à l’inauguration du projet. Nous faisons de notre mieux
    pour le promouvoir partout où il y a des élèves et des étudiants qui souhaitent
    mettre en œuvre des projets artistiques. Nous insistons sur cette activité
    pratique alternative, qui n’est pas enseignée à l’école, mais qui fait partie
    de l’expérience des artistes concernés. En fait, on peut dire que nous sommes
    en train de déblayer le terrain, d’y introduire un nouveau style, avec un
    système moins classique, moins conservateur, de learning by doing,
    d’apprentissage par la pratique, l’imagination et la créativité pouvant ainsi
    s’exprimer en toute liberté. N’oublions pas que l’art du moment est assisté par
    la technologie et par des choses alternatives, proches plutôt de la science que
    de l’aisance. C’est ce qui rend nécessaire cette éducation visuelle, cette
    éducation artistique des jeunes, puisque l’art trouvera une autre manière de
    s’exprimer. Le changement est normal, le monde actuel est complètement
    différent de celui d’il y a cent ans, et même d’il y a cinquante ans ou d’à
    peine deux ans. Et ces changements naissent de plus en plus de notre
    interaction avec l’environnement en ligne. »









    L’Open
    Practice Society inclut des sessions de mentorat et d’activité pratique avec 9
    jeunes, issus de la sélection des candidats et divisés en équipes de trois
    membres chacune. Chaque groupe est coordonné par un des artistes, reçoit le
    soutien du commissaire d’exposition et du galeriste, et travaille aux Ateliers
    Malmaison sur le développement des habilités pratiques.




    Mihaela
    Ghiță fournit davantage de détails : « Trois
    sont les artistes ayant assumé le rôle de mentors : Sabina Suru, qui fait
    de l’holographie, Floriana Cândea, une bio-artiste impliquée dans le projet Fusion
    Air, et Larisa Crunțeanu, spécialiste du son qui travaille à la frontière entre
    vidéo et performance. Nous mettons donc un choix plutôt bien fourni à la
    disposition des jeunes qui veulent étudier et se faire la main dans le domaine
    de l’art. J’ai mentionné le nom de Sabina Suru, qui est passionnée de
    photographie alternative et d’holographie ; cet été, elle a eu une exposition
    très complexe, mélangeant danse et holographie. Floriana Cândea est une
    bio-artiste qui travaille avec de la matière vivante. Cette année, elle a
    participé au projet Fusion Air de résidence artistique avec des
    expérimentations réalisées avec les chercheurs de l’Institut national de
    recherche et développement en physique des matériaux. Les artistes proposent de
    nombreux projets d’éthique, car l’art contemporain, l’art assisté par la
    science s’adresse plutôt à l’esprit, s’attaque à des problèmes, fait naître des
    émotions, ne nous laisse pas indifférents. Une telle œuvre d’art, qui ne montre
    pas nécessairement la maîtrise d’un artiste peintre, a le mérite de poser ces
    problèmes d’éthique. »







    L’association
    Qolony est une organisation sans but lucratif, qui crée des liens entre l’art,
    la science et la technologie, entre les professionnels de ces domaines. Créée
    en 2019, elle prend appui sur la conviction de ses fondateurs – Mihaela Ghiță,
    Sabina Suru et Floriana Cîndea – que les pratiques transdisciplinaires
    constituent une source d’idées novatrices. L’association Qolony soutient et
    organise des événements divers, tels qu’expositions, conférences, projets de
    production, débats entre artistes et scientifiques, résidences artistiques, le
    tout construit autour de la recherche scientifique et la création artistique. (Tra. Ileana Taroi)

  • « Nous contre nous-mêmes » – désigné meilleur film de la section Roumanie, à l’Astra Film Festival

    « Nous contre nous-mêmes » – désigné meilleur film de la section Roumanie, à l’Astra Film Festival

    « Nous contre nous-mêmes », le documentaire
    réalisé par Andra Tarara, a remporté le grand prix de la section roumaine à la
    XXVIIIe édition d’Astra Film Festival (qui a eu lieu du 5 au 12 septembre). Le
    jury a expliqué son choix comme suit : « Pour une analyse émouvante et
    honnête de la relation entre l’auteur et son père, ainsi que pour leur dialogue
    sincère autour de la maladie qui a bouleversé leur existence. Le jury a
    apprécié la collaboration de deux cinéastes de générations différentes ainsi
    que leur manière de trouver un moyen de communication à travers le langage
    cinématographique ».






    Film de début de la jeune réalisatrice Andra Tarara, « Nous
    contre nous-mêmes » se construit sur des dialogues qui dessinent la
    relation père – fille, une relation marquée par une passion commune et par un
    trouble mental. Leurs échanges touchent à des sujets délicats, tels
    l’incapacité de communiquer, l’éducation et le développement personnel ou le
    stigmate des maladies mentales. Chacun d’eux raconte son histoire – en fait, sa
    perception des mêmes événements -, à travers la parole et la caméra. « Nous
    contre nous-mêmes » a eu la première mondiale au Festival international du
    film documentaire Jihlava 2020, en République tchèque, et il a aussi été
    présenté au Festival Les Films de Cannes à Bucarest en 2020.






    L’été dernier, le documentaire a fait partie de la
    sélection officielle de plusieurs festivals, dont Moldova Film Festival et
    Moscow International Documentary Film Festival DOKer, le Festival Ceau Cinema!
    de Timișoara et le Festival international du film Transilvania (TIFF), dans la
    section « Les journées du film roumain ». C’est en se documentant
    pour son premier long-métrage « Une mort dans ma famille », nommé
    d’ailleurs au prix Gopo du meilleur espoir en 2019, que la réalisatrice était
    tombée sur plusieurs vidéos, enfouies dans les archives familiales et réalisées
    par son père, Ion Tarara.






    Ce fut le point de départ de « Nous contre
    nous-mêmes », raconte Andra Tarara : « C’est comme ça que je suis arrivée à
    cette histoire, en fouillant dans les vidéos archivées de ma famille. Quand
    j’ai trouvé ces cassettes VHS, je me suis rendu compte que mon père avait fait
    tout ce travail incroyable d’archiver l’histoire de notre famille et que
    j’étais très présente dans ces enregistrements. C’est pour ça que le sujet
    principal de toutes ces images et de tous ces enregistrements est en fait notre
    relation. Alors, j’ai pensé qu’il serait intéressant d’en débattre, de parler
    de ce qu’est pour mon père le fait de s’exprimer par le biais du film, de
    comment j’ai hérité de cette passion. C’est ainsi que mon film a commencé,
    comme un exercice de connexion entre nous deux et d’exploration de notre
    relation par le film. Et puis, l’histoire gagne en complexité constamment, parce
    que mon père a été un super-passionné du film, parce qu’il a eu la chance de
    faire du film, mais, malheureusement, il n’a pas pu continuer faute de moyens
    et aussi parce que ses parents n’étaient pas d’accord avec sa passion. Moi,
    pour ma part, j’ai reçu un appui total, comme une sorte de compensation, de
    revanche sur l’impossibilité, pour mon père, de vivre sa passion. Les histoires
    à l’origine de ce film existaient donc dans notre famille et mon père acceptait
    d’en parler. »






    Par son documentaire « Nous contre
    nous-mêmes », Andra Tarara réussit à donner voix à tous ceux qui souffrent
    de troubles mentaux et subissent la stigmatisation sociale, attirant
    l’attention sur une maladie dont parle trop peu.




    Andra Tarara :
    « Mon père a fait ainsi que la maladie soit bien plus présente dans le
    film. Il a tenu à raconter son histoire et, d’une certaine manière, son enjeu à
    lui a été de la faire entendre, pour aider d’autres gens, souffrants, comme lui.
    Le film est finalement né de cette négociation entre moi, avec mon agenda et
    mon intention de faire un certain type de film, et lui, avec son désir de
    raconter son histoire personnelle. Moi, je lui ai expliqué mon idée, et lui
    s’est très bien préparé avant le tournage, il a réfléchi à ce qu’il voulait
    dire. Ça m’a amenée, parfois, à avoir le sentiment de perdre le contrôle et à
    des réactions presqu’agressives. C’est comme ça qu’est né « Nous contre
    nous-mêmes », de la tension entre nos deux perspectives, entre nos deux
    agendas, entre nos deux manières de vivre séparément et pourtant ensemble la
    même situation. Mon père parle beaucoup du stigmate qu’il a ressenti, il a
    beaucoup parlé du fait que les gens stigmatisent les malades aussi parce qu’ils
    ne connaissent pas des personnes atteintes d’une telle maladie. »






    De l’avis de la productrice Anda Ionescu, de la société
    de production Tangaj Production, le documentaire « Nous contre
    nous-mêmes » ouvre un débat nécessaire sur la santé mentale, sur des
    problèmes le plus souvent ignorés ou mal identifiés, sur la relation avec nos
    proches, souffrant de troubles mentaux, sur l’existence de plateformes de
    soutien. (Trad. Ileana Taroi)

  • Sortie en salle de « Otto le Barbare », meilleur long-métrage roumain au TIFF

    Sortie en salle de « Otto le Barbare », meilleur long-métrage roumain au TIFF

    « Otto le Barbare », le premier long-métrage de la réalisatrice roumaine Ruxandra Ghiţescu, sera diffusé dans les salles de cinéma en Roumanie le 24 septembre prochain. Le film, qui a été présenté en première mondiale à la 26e édition du Festival international Sarajevo, a été désigné « meilleure production » dans la section « Les journée du cinéma roumain », au Festival international du film Transilvania (TIFF). Le film raconte l’histoire d’Otto, un adolescent punk de 17 ans, qui fait face à la mort de sa petite amie et qui devient prisonnier d’un cercle vicieux créé par ses parents, son grand-père, la mère de sa petite amie et l’enquête déroulée par les services sociaux. Pour survivre, Otto doit affronter ses sentiments, surtout celui de culpabilité. « Sous l’œil bienveillant de Ruxandrei Ghițescu (tout ce qu’un personnage en détresse souhaite le plus), Otto est le protagoniste le plus attachant des films roumains des dernières années. », écrit le critique de cinéma Victor Morozov, alors que la réalisatrice elle-même espère que « Otto le Barbare » soit une récompense émotionnelle pour le public.

    Le film est né d’un article publié il y a quelques années, qui racontait l’histoire d’Octavian Albu, superviseur musical et compositeur, avec la troupe Cardinal, de la musique du film. Ruxandra Ghițescu explique : « Oui, dans mes recherches pour trouver un point de contact dramaturgique avec l’âge de l’adolescence, je suis tombée sur un article qui parlait d’Octavian Albu, surnommé Otto le Barbare, ce qui fut un heureux hasard pour moi. En tant que soliste d’une troupe de musique punk, avec toute l’architecture extérieure de la culture punk, Octavian m’a paru incarner la marginalité d’une tranche d’âge dont les rapports sociaux, le film, la littérature évitent plutôt d’aborder. Dès le début, Octavian Albu a été notre conseiller musical, ensuite notre superviseur musical, il a composé, avec la troupe Cardinal, une grande partie de la musique du film et nous avons choisi ensemble les chansons d’autres troupes punk que nous avons reprises dans le film. De l’article que j’ai mentionné, nous avons gardé le nom, la coupe de cheveux, avec la crête iroquoise, et le blouson. Le reste est une fiction sans aucun rapport avec la vie d’Octavian. En fait, nous nous somme rencontrés plusieurs années après la publication de l’article, quand Otto avait déjà 23 ans ; il faisait des études à Londres et il m’a autorisée à faire de cet article une source d’inspiration. J’ai eu le sentiment qu’il était très content de l’idée de réaliser ce film. Il est quelqu’un de positif et sa contribution, y compris les retours sur le scénario, m’a beaucoup aidée. »

    Ruxandra Ghiţescu a voulu faire un film sur l’adolescence comme âge d’un tourbillon d’émotions et de la solitude, où la musique joue un rôle essentiel. « Otto le Barbare » est en même temps un film qui parle aussi bien aux adolescents qu’aux parents, une invitation à parler et à débattre de la dépression et ses conséquences. Ruxandra Ghițescu : « Dès le début, nous avons voulu construire un film qui interpelle sur un plan plutôt affectif qu’intellectuel, surtout qu’il se penche sur cet âge porté davantage par les émotions que par une construction rationnelle. Ça a été surtout une expression de vécu intérieur. Otto est un personnage très critique, introverti, qui parle à peine et dont les interactions avec les autres sont le résultat de ses émotions et de ses états d’âme. J’ai exprimé le parcours émotionnel du personnage à travers ses relations avec les autres: ses parents, la mère de sa petite amie, avec les enregistrements vidéo de sa petite amie, et surtout la musique. J’ai beaucoup développé cette relation avec la musique durant le montage et le travail sur la bande-son, car nous avons voulu que le rythme rappelle celui de la musique punk. Je suis très contente de cette sortie en salle et de la rencontre avec le public, parce que c’est à peine maintenant que j’ai la confirmation d’avoir fait un film qui a atteint son but. L’année dernière, avec toutes les restrictions liées à la pandémie, avec des salles de cinéma tellement facilement fermées et l’expérience cinématographique si facilement abandonnée, m’a fait vivre une expérience très douloureuse, partagée aussi par d’autres, je suppose. J’ai donc profité au maximum de la participation à des festivals récents, de la rencontre avec le public et du retour devant l’écran d’une salle de cinéma. »

    « Ruxandra Ghițescu dessine avec tendresse un portrait qui ne manque pas de surprises et moments d’interprétation spectaculaires. », écrit la critique de cinéma Georgiana Mușat dans la revue « Acoperișul de sticlă/Le toit de verre » au sujet du film « Otto le Barbare », une coproduction de Alien Film, Polar Bear et Alien Films Entertainment. (Trad. Ileana Ţăroi)

  • La poterie de Horezu inscrite au patrimoine immatériel de l’UNESCO

    La poterie de Horezu inscrite au patrimoine immatériel de l’UNESCO

    C’est à Horezu,
    petite localité du département de Vâlcea (sud de la Roumanie), que la poterie
    est plus qu’un métier, elle est un véritable art traditionnel qui se transmet
    de génération en génération depuis des centaines d’années. La rue Olari (des
    Potiers) est bordée de maisons-ateliers des maîtres artisans des lieux. Des
    vérandas où s’entassent des objets en céramique, des palissades, des portes et
    des fenêtres auxquels s’accrochent plats, cruches et autres tasses bariolées -
    tout est imprégné de couleurs, de joie et de traditions roumaines.




    Le maître potier
    Mihai Bâscu accueille les passants dans son atelier, où il explique ce métier
    tellement particulier : « En fait, quand on dit Horezu, on évoque
    la seule localité de Roumanie à être deux fois représentée au patrimoine de l’UNESCO,
    par la poterie de Hurez et par le Monastère Hurezi. Laa poterie de Hurez est
    très connue dans le monde, grâce à sa présence sur la liste du patrimoine
    mondial, certes, mais aussi pour sa décoration unique au monde et pour nos
    outils singuliers – la corne de bœuf, la plume d’oie et la plume de geai des
    chênes. Dans la décoration des objets, notre symbole général est « Le Coq
    de Hurez », mais nous avons aussi plusieurs symboles disons secondaires, tels
    l’arbre de la vie, le poisson, le serpent, la spirale de la vie, ainsi que des
    motifs traditionnels de l’araignée, de l’épi de blé, de la roue du paon, de la
    fleur, du trèfle, du tourbillon. La décoration que nous utilisons met ensemble
    des motifs traditionnels et des symboles ».






    La céramique de Horezu
    affiche des couleurs, des formes et des dimensions des plus variées, comme
    l’explique Mihai Bâscu : « Quand on dit poterie de Hurez, on dit
    objets, notamment des plats, qui mesurent entre 8 et 40 centimètres. Comparé à
    la « génération d’or » de mon père, moi-même, je peux me vanter
    d’avoir fait « irruption » dans les années 2000, en produisant les
    objets les plus grands de Horezu, des assiettes plates et creuses. On y ajoute
    nos tasses, nos tasses à tzuica, nos assiettes « încolțurate » (angulaires)
    et puis aussi quelques nouveautés, par exemple un aimant souvenir ou même un
    lavabo en céramique ».






    Le maître potier
    Mihai Bâscu a expliqué son apprentissage de ce métier traditionnel : « Ce
    métier, c’est un métier qui passe de père en fils. Moi, j’ai commencé à
    l’apprendre quand j’étais enfant, en préparant l’argile pour mon père. A
    l’époque, il n’ya avait pas d’outils électriques, donc je luis préparais les
    vernis à la main. L’argile est locale, on la trouve à Dealul Ulmului (la
    Colline de l’Orme), où je me rends chaque automne pour m’en approvisionner pour
    toute l’année. Il faut creuser jusqu’à deux mètres de profondeur pour trouver
    de la bonne argile, que je nettoie sur place. Je la transporte ensuite dans une
    remorque propre jusque chez moi, où je la laisse dehors durant l’hiver ;
    elle gèle et se dégèle, et ça la morcèle. Alors je la passe deux fois au
    malaxeur, puis je la travaille à la main et la pâte d’argile est prête. Les
    vernis sont tous naturels, à base de terres que je prépare moi-même. Le blanc,
    la terracotta et le noir sont extraits de terres pures, tandis que le vert et
    le bleu, je les obtiens en mélangeant de l’oxyde de cuivre et du caolin (de
    l’argile blanche) pour le vert, ou du cobalt et de l’argile blanche pour le
    bleu. Viennent ensuite les étapes du travail: d’abord, le modelage,
    c’est-à-dire modeler l’objet – assiette, écuelle, tasse ou autre ; ensuite
    la décoration, qui est l’étape la plus spectaculaire et la plus importante. On
    l’applique sur l’objet encore frais, mais déjà durci. Après, on y creuse le
    petit trou qui permet de l’accrocher au mur et, chose très importante, j’y
    écris mon nom. Quand les objets sont parfaitement secs, ils sont cuits une première fois à 850°,
    durant 8 heures. Après, il y a l’étape de l’émaillage et une deuxième cuisson à
    1020°, et on obtient l’objet final ».






    Le maître artisan
    potier Mihai Bâscu est fier de son métier-art, dont les origines remontent au
    XVIIe siècle, à l’époque du prince régnant de Valachie, Constantin Brâncoveanu
    (1654-1714), grand protecteur de la culture et de l’art.







    Mihai Bâscu : « J’ai oublié de vous
    dire quelque chose de très important, que je tiens de mon père: chez nous, la
    poterie existe depuis le règne de Constantin Brâncoveanu, car il était un
    passionné de céramique et nous a laissé
    même un style de décoration dit « brâncovenesc/brancovan. »
    (Trad. Ileana Taroi)

  • “La civil”, premier long métrage de Teodora Ana Mihai,

    “La civil”, premier long métrage de Teodora Ana Mihai,

    La réalisatrice belgo-roumaine Teodora Ana Mihai a remporté le Prix de l’Audace de la section « Un Certain Regard » de la dernière édition du Festival de Cannes, pour son film La Civil. Une occasion pour Thierry Frémaux, délégué général du festival, de se réjouir que cette section a renoué enfin à sa mission initiale, de faire connaître le jeune cinéma. La première en Roumanie du film « La civil » aura lieu à l’occasion du Festival des Films de Cannes à Bucarest prévu du 22 au 31 octobre. Produit par la société anversoise Menuetto, le film est coproduit par Les Films du Fleuve des frères Dardenne, Mobra Films (Roumanie) et Teorema (Mexique) avec le soutien du Fonds audiovisuel de Flandre (VAF). Son directeur d’image est nul autre que Marius Panduru, qui a déjà travaillé pour des productions roumaines célèbres, telles « Policier, adjectif », « Closer to the Moon », « Aferim » ou encore « Si je veux siffler, je siffle ».

    Née à Bucarest en 1981,Teodora Ana Mihai a déménagé avec sa famille en Belgique, en 1989, avant de continuer le lycée à San Francisco, en Californie. C’est là qu’elle allait découvrir sa passion pour le cinéma qui l’a poussée à s’inscrire à la Faculté de film de New York. Sa carrière cinématographique, elle l’a commencée en Belgique, en tant que scénariste et après comme assistante réalisateur. Son premier long-métrage, « La Civil » raconte l’histoire déchirante de Ciélo, une mère mexicaine qui perd sa fille kidnappée par un cartel de la drogue. Puisque les autorités refusent de lui venir en aide, Cielo décide de prendre elle-même les choses en main. Inspiré des faits réels, le scénario du film est le résultat de plusieurs années de documentation entreprise par la réalisatrice en collaboration avec l’écrivain mexicain, Habacuc Antonio de Rosario.

    Dans un premier temps, les deux avaient en tête de faire un film documentaire, avoue Teodora Ana Mihai :« Moi, je connais le Mexique depuis mon enfance, sauf qu’à l’époque, c’était un pays tout à fait différent de ce qu’il est devenu entre temps. On pouvait circuler en voiture en toute sécurité, on pouvait visiter ou faire du tourisme. Depuis 2006, quand le président Felipe Calderon a lancé la guerre des cartels, plus de 60.000 personnes sont portées disparues. Ce fut une décision politique à fort impact sur les gens. Bien sûr qu’il reste des régions où l’on peut faire toujours du tourisme, mais dans la partie nord du pays, vers la frontière avec les Etats-Unis, la situation est problématique. En plus, elle commence à se propager petit à petit à travers tout le pays. Voilà pourquoi j’ai choisi ce sujet, car je trouve qu’on a fort besoin de parler de ce qui se passe actuellement au Mexique. Ce n’est pas normal de quitter son appartement le matin pour partir au boulot ou à l’école et de disparaître sans trace et que personne ne sache rien. Je me suis posé la question comment font les adolescents dans ce pays, comment font les parents qui élèvent des enfants dans un climat si insécurisé ? Dans un premier temps, quand moi et Habacuc Antonio de Rosario, on a commencé à documenter le phénomène, en 2015, on voulait interroger des familles dont les membres avaient été victimes des cartels. Deux ans et demi durant, on a parlé avec de nombreuses personnes afin de faire un documentaire sur le sujet. Sauf qu’à la fin, on a abandonné cette idée, car on n’a pas voulu présenter des illégalités ou encore laisser les gens à faire des déclarations qui les auraient pu mettre par la suite, en péril ».

    Une fois l’idée d’un documentaire tombée à l’eau, Teodora Ana Mihai et Habacuc Antonio de Rosario ont décidé de raconter l’histoire de Miriam Rodríguez Martínez, une femme qui a été tuée sur le seuil de sa maison pour avoir trouvé et menacé les assassins de sa fille.« Lors de mes enquêtes, j’ai fait la connaissance de Miriam Rodriguez Martinez dont l’histoire a fait à l’époque, couler beaucoup d’encre dans presse.Même The New York Times lui a consacré un article, malheureusement quatre ans après sa mort. Nous, on a eu la chance de la rencontrer et de lui parler et c’est elle qui nous a inspiré le personnage, Ciélo, la mère d’une fille séquestrée et tuée par les membres d’un cartel de drogues. Après avoir essayé dans un premier temps à obtenir le soutien des autorités, cette femme a décidé de prendre le taureau par les cornes. Comme je viens de vous le dire, pour ce film, j’ai fait de nombreuses interviews et dans un premier temps, j’avais en tête de raconter les faits du point de vue d’un adolescent. Sauf que j’ai connu Miriam Rodríguez Martínez qui était au courant de ce que nous étions en train de faire et du coup, elle a voulu nous raconter son histoire. C’est comme ça que j’ai décidé de dire les choses de la perspective d’une mère. Mon film est dédié à elle et à toutes les familles qui ont accepté de raconter leurs histoires. Des histoires pour la plupart puissantes et tragiques ».Le tournage du film « La Civil » a eu lieu entre novembre et décembre 2020 à Durango, au Mexique, en pleine pandémie de coronavirus. (Trad. Ioana Stancescu)

  • La restauration : un métier et une passion

    La restauration : un métier et une passion

    L’occasion pour les visiteurs de découvrir les laboratoires de restauration des peintures et des objets en métal, bois, céramique, papier ou textile. Une incursion dans le passé et, en même temps, un clin d’œil dans les coulisses du musée, là où les objets sont gardés, entretenus et restaurés par des gens passionnées.



    Pour mieux connaître ces gens et le métier de restaurateur, nous avons invité au micro Sorina Gheorghiță, collaboratrice du Musée national d’histoire de la Roumanie, au sein du laboratoire de restauration des peintures. Quelles toiles sont passées par son laboratoire ? Sorina Gheorghiță répond :



    « Depuis 2013, lorsque le laboratoire de restauration des peintures sur chevalet fut accrédité, environ 25 œuvres ont été restaurées. La plupart appartiennent à des maîtres roumains, tels Luchian, Tonitza, Ressu, Stoica ou Teodorescu-Sion. Ces toiles représentent notamment des scènes de guerre, dont celle d’indépendance ou la Première Guerre mondiale. Un autre ouvrage important que nous avons restauré est la très connue « Proclamation de l’Union », de (Theodor) Aman —- il s’agit de l’Union des Principautés roumaines. »



    Quel effort derrière les peintures restaurées et en quoi consiste concrètement le travail d’un restaurateur ? Quels sont les pas concrets à parcourir ? Sorina Gheorghiță répond :



    « Au moment où l’on prend la décision de restaurer une toile, celle-ci a déjà été examinée par la personne en charge du dépôt de peintures et par le restaurateur. Au moment où le tableau arrive au laboratoire de restauration, il subit tout un processus de vérification à l’aide de différents moyens : lumière directe, lumière latérale, lumière ultraviolette, des fois on utilise de la lumière infra-rouge ou des rayons X. Le laboratoire d’investigations du musée est très bien équipé… Puis, une fois toutes ces investigations finies, on établit très clairement la composition de la couche de vernis, ainsi que les dégradations subies par l’œuvre et leur origine. Ensuite, on fait un plan très détaillé, réunissant toutes les opérations nécessaires pour restaurer le tableau, et on le soumet à une commission appelée à donner son avis. Evidemment, à la fin du processus de restauration, l’œuvre est à nouveau présentée à la commission, qui vérifie l’application du plan mentionné et l’état de la toile après la restauration. Après, le tableau rentre au dépôt ou bien il est exposé. Les plus belles surprises apparaissent durant le nettoyage, qui est une action spectaculaire. On y met au jour de nombreux détails qui n’étaient plus visibles ou bien on ravive les couleurs de la peinture. De même, si au fil du temps la toile en question a été couverte de plusieurs couches de vernis, nous avons souvent la surprise de découvrir des détails qui étaient devenus invisibles, voire des signatures. »



    L’exposition « Fragment. L’expérience de la restauration » nous invite à découvrir aussi le laboratoire de la restauration des objets en métal, une des sections les plus spectaculaires. Plus encore, le public peut y admirer en première des objets en bronze et en fer découverts en 2012 sur le site archéologique de Tărtăria, dans le département d’Alba, au centre de la Roumanie. Une découverte importante et impressionnante dont nous parle l’archéologue Corina Borș :



    « Le site archéologique de Tărtăria a été découvert au printemps 2012 dans le contexte d’amples fouilles archéologiques préventives, réalisées en liaison avec la construction d’une autoroute longeant la vallée de la rivière Mures. Les deux dépôts d’objets en bronze et en fer ont été découverts dans un contexte archéologique tout à fait spécial (…). Le premier contient plus de 400 vestiges, la plupart datant des IXe-VIIIe siècles avant Jésus-Christ. Le second contient une cinquantaine d’objets de la même période. »



    Corina Borș nous présente les objets les plus importants découverts sur le site de Tărtăria et exposés au Musée national d’histoire de la Roumanie :



    « Parmi les pièces d’exception, je mentionnerais un collier pour homme, un harnais et plusieurs médailles en or qui étaient offertes aux soldats romains en guise de prix et qui étaient portées autour du cou. S’y ajoutent d’autres accessoires en bronze. Le collier pour homme, avec ses 7 composantes, est exposé sur un buste grandeur nature, tout comme le harnais. Pas en dernier lieu, on expose aussi un collier pour femme, également en bronze, une pièce très rare datant de la période appelée le Hallstatt moyen et située dans le bassin du Danube. Vu que les archéologues ont fait très attention au moment où ils ont recueilli ces objets, il a été possible de dater avec beaucoup de précision ces vestiges, grâce au matériel organique qui a été récolté en même temps. »



    Tous ces objets fascinants, dont certains récemment restaurés, d’autres découverts lors de fouilles archéologiques, sont exposés au Musée national d’histoire de la Roumanie, à Bucarest. Mais vous pouvez aussi y jeter un coup d’œil sur internet. N’hésitez pas, c’est vraiment impressionnant. (Trad. Valentina Beleavski)



    https://www.mnir.ro/index.php/expozitia-temporarafragment-experienta-restaurarii/

  • La maison-musée d’Ion Luca Caragiale de Ploiești

    La maison-musée d’Ion Luca Caragiale de Ploiești

    Nous sommes à
    Ploieşti, importante ville du sud de la Roumanie, à une soixantaine de km de la
    capitale. Près du centre-ville, cachée derrière des immeubles à l’architecture spécifique
    de l’époque communiste, il y a une maison historique, toute blanche, bâtie au
    début des années 1900, qui abrite un petit musée. C’est la maison-musée d’Ion
    Luca Caragiale, le plus grand dramaturge roumain. Il est célèbre pour pièces de
    théâtre satyriques, qui critiquaient durement les mœurs et les pratiques
    politiques de leur époque. Ses textes décrivent la société roumaine du début du
    20e siècle, mais ils ont dépassé leur temps, s’avérant très actuels
    de nos jours encore. Pour son humour, son ironie fine et ses personnages hors
    du temps, Ion Luca Caragiale est considéré comme un des 4 grands classiques
    roumains, aux côtés du poète Mihai Eminescu et des prosateurs Ion Creangă et
    Ioan Slavici.








    Nous franchissons
    le seuil de la maison-musée de ce grand dramaturge roumain aux côtés de la
    muséographe Monica Bostan. Pour commencer, elle nous parle de l’histoire de cet
    endroit : « Il a ouvert ses portes le 30 janvier 1962, grâce aux
    efforts du professeur Nicolae Simache, qui a ouvert la plupart des musées du département
    de Prahova. Ce musée est un hommage rendu par les habitants de Ploieşti à notre
    grand dramaturge, 110 ans après sa naissance. Caragiale est né le 30 janvier
    1852, dans la localité de Haimanale, au département de Dâmboviţa, une localité
    qui aujourd’hui porte son nom. A l’âge de 6 ans sa famille déménage à Ploieşti.
    Il passe donc toutes ses années d’école, pratiquement les plus belles années de
    sa vie, ici, à Ploieşti. »






    Avant de visiter
    la maison-musée de Caragiale, Monica Bostan nous fournit plus d’explications
    sur la jeunesse de ce grand dramaturge roumain : « Lorsqu’il est en 2e
    année de l’école primaire, Ploieşti accueille la visite mémorable du prince
    régnant Alexandru Ioan Cuza. Celui-ci visite justement la classe de Caragiale,
    dont l’instituteur était Vasil Drăgoșescu. C’est un moment que Caragiale évoque
    dans son ouvrage intitulé « 50 ans plus tard » (Peste 50 de ani),
    où il décrit son instituteur comme son parent spirituel, disant c’est grâce à
    lui qu’il a tout appris sur la langue roumaine. Dans le même ouvrage, il parle
    de Zaharia Antinestu, son professeur de français, qui va lui servir de modèle
    pour le célèbre personnage Zaharia Trahanache de la pièce de théâtre « Une
    lettre perdue » (O scrisoare pierdută). Puis, Caragiale suit les cours
    du collège Saints Pierre et Paul, créé en 1864. Il termine le collège en 5e
    position sur 8 collégiens. A regarder le catalogue de notes, qui existe
    toujours, on constate que l’élève Caragiale n’était pas le meilleur de sa classe,
    il n’a pas eu les meilleures notes en roumain, comme on aurait pu le croire. En
    revanche, il excellait en français, en maths et en histoire. En fait, plus tard,
    il enseigne le français dans un lycée privé de Bucarest. Aujourd’hui, le bâtiment
    qui accueillait à l’époque le collège de Caragiale est le siège du Musée
    départemental d’histoire et d’archéologie de Prahova. Une plaque commémorative fait
    état de la période où le dramaturge a fréquenté cette l’école. Caragiale fait
    aussi une année de collège à Bucarest, puis il étudie la mimique et l’art de la
    déclamation au Conservatoire d’art dramatique de Bucarest, avec un de ses oncles,
    Costache Caragiali. Ses oncles avaient organisé les premières troupes de
    théâtre de la Roumanie de l’époque, pouvant être considérés comme les
    fondateurs du théâtre roumain moderne. Le poète national des Roumains, Mihai
    Eminescu lui-même, a été souffleur pour les troupes de théâtre des oncles de
    Caragiale. C’est à ce moment-là qu’Eminescu et Caragiale deviennent amis. »






    Ce n’est donc pas
    un hasard que Caragiale soit devenu un grand dramaturge : le théâtre a
    fait partie de sa vie dès sa jeunesse. Entrons maintenant dans sa maison de
    Ploieşti, aujourd’hui un très beau musée.






    Notre invitée,
    Monica Bostan, nous y guide : « Dans la 2e salle on a
    reconstitué l’univers des maisons où Caragiale a vécu. Il n’a jamais eu une
    maison à lui. Toute sa vie, il a loué des habitations. En témoigne la nouvelle « Je
    cherche une maison » (Caut casa). Il semble qu’il était en permanence à la
    recherche de la maison idéale. Sur le mur de cette salle, il y a un miroir en cristal
    avec un cadre en bois de rosier qui avait appartenu à l’écrivain ainsi qu’une
    petite table ronde à un seul pied. Les meubles, la table, les chaises, le canapé,
    le tapis attaché au mur – tout cela a appartenu à Caragiale. S’y ajoutent les
    deux tableaux originaux, le bol en faïence ou encore le boc de bière à couvercle.
    Il y a aussi un portrait orignal d’Eminescu, qui est très intéressant, puisqu’il
    est réalisé sur verre, une technique spéciale pour cette époque-là. Bien que
    les divergences qui ont existé à un moment donné entre les deux soient connues
    de tous, les deux grands écrivains ont été amis dès leur adolescence. Lorsqu’Eminescu
    est mort, le 15 juin 1889, Caragiale lui a dédié l’article « Nirvana », où
    il a décrit le poète comme un bel ange descendu d’une icône ancienne. Les
    photos d’Eminescu et Caragiale lorsqu’ils étaient adolescents nous accueillent
    dans le hall du musée. S’y ajoute une photo moins connue de Caragiale, lorsqu’il
    avait 20 ans et fréquentait les cours de ses oncles au Conservatoire d’art
    dramatique. Il y a aussi un buste du dramaturge réalisé par le célèbre sculpteur
    roumain Ion Jalea, des caricatures, des esquisses de costumes, une galerie de
    portraits de différents acteurs qui ont interprété au fil du temps les
    personnages de Caragiale, ainsi que le portrait de sa fille, Ecaterina Caragiale,
    à l’âge de la maturité, peint par Rodica Maniu. Au-dessus du portrait, il y a un
    autre tableau, de la maison de Bucarest du dramaturge, qui existe de nos jours
    encore, rue Maria Rosetti, et vis-à-vis de laquelle il y a la statue de
    Caragiale et une plaque commémorative rappelant aux passants que c’est là que
    Caragiale et sa famille ont vécu en l’an 1900. »








    Avant de
    terminer notre visite à Ploieşti, Monica Bostan nous dit où l’on peut se renseigner
    davantage sur la maison-musée de Caragiale : « Toutes
    les informations sur les activités du musée ou sur les objets qui y sont
    exposés sont à retrouver sur notre page Facebook et sur le site du Musée
    départemental d’histoire et d’archéologie de Prahova. Et nous vous
    attendons nombreux à franchir notre seuil pour entrer dans le monde fascinant de
    Caragiale et de ses personnages mémorables ».









    Sur ce prend fin
    notre visite virtuelle de la maison de Ploieşti où a vécu le plus grand dramaturge
    roumain de tous les temps, Ion Luca Caragiale. Recherchez-la sur Internet pour
    mettre de images sur les mots que vous venez d’écouter et si jamais vous
    arrivez à Ploieşti, n’hésitez pas à la visiter. (Trad. Valentina Beleavski)

  • Le Musée Nichita Stanescu de Ploiesti

    Le Musée Nichita Stanescu de Ploiesti

    C’est dans une petite ruelle de la ville de Ploieşti, à une soixantaine de kilomètres de Bucarest, que se trouve, dans le quartier du « Marché serbe », au fond d’un jardin, à l’ombre de quelques arbres, la maison- musée Nichita Stănescu. Poète de génie, considéré par certains critiques comme le poète phare du XXe siècle, Nichita Stănescu, auteur des « Non-paroles », selon le titre d’un de ses volumes, est né en 1933 dans cette maison coquette aux murs blancs et à l’architecture spécifique au département de Prahova. Mort prématurément à l’âge de 50 ans, Nichita Stănescu est resté dans la mémoire collective et dans celle des habitants de la ville de Ploieşti comme un véritable sorcier des mots et des phrases. Davantage sur ce sorcier de la plume qui a malheureusement quitté ce monde en 1983, avec Ioana Roşu, conservatrice du patrimoine :

    « Je voudrais rappeler qu’à Ploieşti, les gens s’enorgueillissent de dire que leur ville a fourni à la Roumanie non seulement des ressources importantes d’or noir, mais aussi des valeurs artistiques et littéraires telles le dramaturge Ion Luca Caragiale, le comédien Toma Caragiu ou encore le poète Nichita Stănescu. La Roumanie a commencé à lui rendre hommage depuis 1986, année de la première édition du Festival de poésie homonyme, organisé chaque année le 31 mars, jour de la naissance de Nichita. En 2000, la maison familiale du poète a été achetée par le Ministère de la Culture, ce qui nous a permis d’y aménager le musée, en aidant le poète à rentrer chez lui, dans la maison où il est né. On a eu de la chance car à l’époque, sa sœur, Mariana, était toujours en vie et elle nous a conseillés pour arriver à refaire l’ambiance de sa maison familiale. »

    Dans les minutes suivantes, Ioana Roşu nous invite à une incursion dans l’univers de la famille Stănescu et de l’enfance du poète :

    « Nous avons exposé plusieurs manuscrits, des données biographiques, des photos, des diplômes que Nichita Stănescu s’est vu remettre, mais à part tout cela, la maison refait l’univers de l’enfance du poète. On y trouve la chambre à coucher du petit Nichita, avec son nounours qui trône sur le lit. On y trouve son bureau et son piano dont il jouait en rentrant de l’école. Tous ces objets ayant appartenu à la famille Stănescu nous ont été généreusement offerts par Mariana, la sœur du poète et la gardienne de ce patrimoine familial. Il convient de préciser que son frère a décidé d’emménager à Bucarest pour y passer dans un premier temps sa jeunesse et, plus tard, toute sa vie de poète, sans changer pourtant d’adresse sur sa carte d’identité. Parmi les objets offerts par la sœur de Nichita, les plus précieux sont des livres dédicacés et les prix – dont deux sont particulièrement importants, à savoir le prix Herder décerné en 1976, à Vienne, pour son volume « 11 Elégies », et le prix décroché en 1982, lors des Soirées de poésie de Struga, en Macédoine du Nord, et consistant en une jolie couronne en or exposée dans une armoire avec vitrine et que les visiteurs aiment bien admirer. Je suis certaine que ce prix a été convoité par de nombreux autres poètes, mais ce fut Nichita qui l’a obtenu. A part ces deux prix, il en reste beaucoup d’autres, car chacun de ses volumes de vers a été primé par l’Union des écrivains de Roumanie.Dans son enfance, Nichita Stănescu avait une gouvernante, Ana Silaghi. Elle était chargée de son éducation et de ses sorties. A six ans, il commence à apprendre à jouer du piano. Sa mère, Tatiana Stănescu, a remarqué que le petit Nichita avait l’oreille musicale. Un constat tout à fait vrai, puisque même Nichita disait plus tard, dans un entretien à la radio dans les années 1975, que s’il n’avait pas emprunté la voie de la poésie, il serait certainement devenu un grand musicien. Surtout qu’il a bénéficié de toutes les conditions nécessaires, notamment du soutien maternel. Sa première poésie date, selon sa mère, de l’époque où il était à la maternelle. C’était un jour d’automne et Tatiana se trouvait dans la cour, en train de faire cuire de la marmelade quand elle a entendu son fils balbutier quelque chose. Elle lui a demandé de dire à haute voix ce qu’il était en train de murmurer, elle a pris un bout de papier et a tout noté. Des années plus tard, elle lui a montré ce premier poème en rimes et d’une rythmicité surprenante pour un gamin. Il était un enfant futé, le jeune Nichita. A l’école, son prof de maths écrivait des épigrammes. Il a donc compris le talent du gamin et même si les maths n’étaient pas le point fort de Nichita, il s’en est inspiré pour écrire plus tard ses poésies La leçon du cube, La leçon du cercle ou encore Géométrie. Véritable signe de feu selon l’astrologie, ce Bélier a eu une enfance heureuse jusqu’au moment où les Américains ont bombardé les raffineries de Ploieşti et la famille s’est vu contrainte de fuir la maison et de se réfugier ailleurs. Par chance, la maison a échappé aux bombes et la famille a pu y revenir. Pourtant, des images de cette période néfaste sont restées figées dans la tête du garçonnet dont les poèmes reprennent souvent le symbole du soldat ou de l’arbre en feu. »

    A la fin de notre visite, Ioana Roşu a précisé :

    « J’espère avoir réussi à vous convaincre que cette maison-musée est un endroit accueillant dont la visite vaut le coup. Une fois sur place, de nombreux visiteurs affirment avoir le sentiment que le poète se cache quelque part et qu’il pourrait même être leur guide. Nichita a mené une vie intense. Il est mort très jeune, mais dans les 50 années de sa vie, il a vécu plus profondément que d’autres ne le feraient en 150 ans d’existence. C’est tout ce qui compte », a ajouté Ioana Roşu, conservatrice du patrimoine à la Mason-musée Nichita Stănescu de Ploieşti. (Trad. Ioana Stancescu)

  • Marina Palii, sélectionnée pour le programme « Berlinale Talents » 2021

    Marina Palii, sélectionnée pour le programme « Berlinale Talents » 2021

    Les participants venaient de 65 pays du monde et ont été choisis sur pas moins de 3 000 candidats. Également de Roumanie, la productrice Anda Ionescu et la directrice d’image Biró Boróka ont aussi été sélectionnées. Marina Palii a évoqué les rôles qui ont marqué sa carrière, mais aussi sa participation au programme « Berlinale Talents ». « Pour moi, ce fut très important, puisque Berlinale Talents est un des événements majeurs dans le monde du film. C’est pourquoi être sélectionné à Berlinale Talents est une preuve de très haute appréciation. Après avoir participé l’été dernier au concours Sarajevo Talents, j’ai décidé de postuler aussi pour cet atelier organisé de la Berlinale. A cause de la situation mondiale, une variante de compromis a été trouvée et tous les ateliers ont migré sur Zoom. C’est ainsi que j’ai eu la possibilité de prendre part à des ateliers avec des cinéastes du monde entier, du Pérou, du Chili, des Philippines, de Thaïlande, d’Australie, tout le monde a migré sur Zoom : très intéressant de ce point de vue, même si le contact direct nous a manqué. Et pourtant, pouvoir parler avec des collègues de tous les coins du monde depuis sa chambre, ce fut une nouveauté. J’ai participé à des ateliers de trois heures environ chaque jour, des ateliers qui nous ont familiarisé avec la méthode Alexander Technique. Les ateliers ont été menés par deux formateurs, Kristof Konrad et Jean-Louis Rodrigue, qui pratiquent cette méthode depuis longtemps. Les deux ont organisé leurs ateliers le plus souvent aux Etats-Unis et il y a déjà de nombreux acteurs qui travaillent d’après cette méthode, essayant d’aborder la construction d’un personnage utilisant la technique Alexander. Il s’agit, grosso modo, d’une série d’exercices de mouvement et de relaxation de la respiration. J’ai travaillé sur des scènes de films célèbres avec les collègues d’autres pays sur Zoom, ce qui a été une nouveauté, mais nous nous sommes adaptés et les choses se sont très bien passées. »

    « La facilité d’interpréter un rôle tant en français qu’en roumain et la capacité de construire des personnages puissants ». Ce ne sont que deux des arguments énoncés par le jury qui a sélectionné l’actrice Marina Palii au programme Berlinale Talents 2021, une composante de la 71e édition du Festival du film de Berlin. Marina Palii est diplômée de l’Université nationale d’art théâtral et cinématographique I. L. Caragiale de Bucarest et de la Faculté de lettres, spécialisation Philologie (polonais-français). Actuellement, elle est comédienne au Théâtre classique Ioan Slavici d’Arad, dans l’ouest de la Roumanie. Elle a joué dans quatre films roumains et étrangers réalisés par des cinéastes renommés. Ecoutons Marina Palii parler du rôle qui l’a consacrée, Olga, de « Malmkrog », du cinéaste roumain Cristi Puiu. Ce film a été primé au Festival du film de Berlin. « Après la participation au Festival du film de Berlin de l’année dernière, les choses sont allées plutôt bon train. Tant à Sarajevo qu’à Berlin j’ai proposé un fragment vidéo, un collage des films Malmkrog et La forêt d’argent, probablement que cet aspect-là a également compté dans cette sélection. Pour en revenir à Malmkrog, ce fut une très belle expérience, qui m’a beaucoup aidée. Pratiquement, ce fut mon début dans le film d’auteur. Malmkrog et Olga ont constitué un véritable tour de force, qui m’a beaucoup aidée à renoncer à tout ce que je croyais être le jeu de l’acteur de cinéma et la construction d’un personnage, parce que dans ce film, je n’ai pas appliqué grand-chose de ce que j’avais appris à la faculté. Certes, à la faculté il n’y a pas de module entièrement consacré au cinéma, il n’y a que des ateliers, des cours qui ont lieu lorsque différents cinéastes sont invités. Une formation solide pour le cinéma n’est pas possible à la faculté et c’est pourquoi chacun arrive à apprendre comme il peut, par imitation, et en apprenant des choses auprès d’autres collègues. Ce fut donc un défi immense que de jouer le rôle d’Olga, de travailler avec Cristi Puiu, qui m’a conduite jusqu’à certaines limites que j’ai dû dépasser. Et là je pense surtout à la résistance physique, car jouer un rôle en français n’a pas été simple du tout. Ce qui plus est, il s’agit d’un texte assez difficile, il y a eu des improvisations, ce que j’ai beaucoup aimé. Le fait qu’un cinéaste m’a conféré la liberté d’improviser et m’a investie de sa confiance a été pour moi une immense joie, j’ai ressenti cela comme un moment de liberté totale. Il est extraordinaire que sur dix propositions faites, une seule est acceptée. Pour résumer, Olga a été un personnage à la création duquel j’ai beaucoup travaillé. »

    Marina Palii fait également partie de la distribution du spectacle « L’école et la famille », une démarche théâtrale construite sur des textes du grand dramaturge roumain Ion Luca Caragiale par le metteur en scène Cristian Ban et réalisé au Théâtre classique « Ioan Slavici » d’Arad.

  • La productrice Anda Ionescu, sélectionnée pour le programme Berlinale Talents

    La productrice Anda Ionescu, sélectionnée pour le programme Berlinale Talents


    Trois cinéastes de Roumanie – la productrice Anda Ionescu, la directrice de la photographie Biró Boróka et lactrice Marina Palii – ont participé cette année au programme Berlinale Talents, qui se déroule au sein du Festival de film de Berlin. Notre invité du jour est Anda Ionescu, productrice de quatre films roumains qui ont tous eu leur première mondiale en 2020, dans différents festivals internationaux : « Mia îşi ratează răzbunarea » / « Mia rate sa vengeance » de Bogdan Theodor Olteanu, « Otto Barbarul » / « Otto le barbare » de Ruxandra Ghiţescu, « Noi împotriva noastră » / « Nous contre nous-mêmes », signé Andra Tarara et « Tatăl nostru » / « Notre père » dAndrei Dăscălescu. La rencontre dAnda Ionescu avec le cinéma en tant quindustrie a eu lieu durant ses études au Danemark, à lUniversité dAarhus. Là-bas elle a fondé Aarhus Short Film Challenge, un festival de court-métrages qui encourageait les étudiants et les diplômés à faire des films indépendants. A la même époque, avec quelques amis passionnés de cinéma, elle a fondé lassociation FilmSense pour développer une plateforme de promotion du cinéma et mettre en place des programmes déducation. En 2016, elle a travaillé dans une équipe internationale sur une mini-série de science-fiction filmée au Qatar. Après cela, elle sest lancée dans la production et a commencé à travailler sur le développement et le financement des quatre films qui ont eu leur première lannée dernière.



    Cest de ses productions que nous nous sommes entretenus avec elle, mais aussi de latelier Berlinale Talents auquel elle a participé le mois dernier. Ce programme, qui a lieu au même moment que la Berlinale, réunit chaque année des jeunes talentueux du milieu du cinéma. Lidée cest de leur offrir une plateforme pour se rencontrer, pour développer leurs réseaux professionnels, mais aussi pour participer à des sessions de formation avec de grands noms de lindustrie. Anda Ionescu : « Cétait une semaine avec beaucoup dinformations, de nouveautés, avec des discussions, des débats, une semaine très créative. Cest intéressant, on vit pratiquement dans une bulle pendant cinq jours, où du matin au soir on est dans toute sorte de programmes, il faut choisir parmi les différentes possibilités proposées pour en profiter au maximum. Cétait une expérience très particulière. Importante pour toute personne travaillant dans le cinéma, mais surtout pour les producteurs. Pour nous, cest essentiel détablir des liens avec dautres producteurs, car parfois cest préférable de produire un film avec plusieurs partenaires. Cest pourquoi ces ateliers et ces événements sont très utiles, cela permet de se connaître et ça aide à trouver des collaborateurs pour des projets futurs. Cest important de faire avancer les projets, de les faire passer au niveau supérieur. Dans le même temps, grâce à Berlinale Talents, jai pu rencontrer et discuter avec des réalisateurs et des scénographes dont on peut beaucoup apprendre. Quelle chance de discuter pendant une heure avec des artistes tels le réalisateur thaïlandais Apichatpong Weerasethakul ou avec la réalisatrice de documentaires Kirsten Johnson ! Cétaient des discussions très importantes avec des gens quil nest pas aisé de rencontrer, une opportunité de grandir de beaucoup de points de vue différents. »



    Anda Ionescu a produit deux films indépendants, cest-à-dire sans financement du Centre national de la cinématographie de Roumanie, avec Tangaj Production, où elle est associée avec Anamaria Antoci : le film de fiction « Mia rate sa vengeance » et le documentaire « Nous contre nous-mêmes ». Pour « Otto le barbare », Anda Ionescu a été productrice déléguée via Alien Film, et dans « Notre père », elle a été la productrice principale. Anda Ionescu, sur ses motivations à travailler sur chacun de ces projets : « Je crois que jai résonné très fort avec ces histoires et leurs auteurs. Avant de travailler sur les projets de Andra Tarara et de Andrei Dăscălescu, je ne soupçonnais pas que les documentaires personnels pouvaient mattirer, mais je me suis rendu compte que finalement cette direction mattirait. Les quatre projets mont attiré dès le début, jai senti une authenticité, et je crois que cest la première chose, de résonner avec ce quon te propose. En tant que producteur, il faut être motivé, il faut beaucoup aimer ton travail et il faut croire jusquau bout que tel ou tel projet pourra se réaliser. Je me suis proposée de prendre des projets très différents et de travailler autant que possible, dapprendre, cétait cette énergie de début-là. Et les choses ont pris aussi car jai rencontré les bonnes personnes pour mener à bien ces projets. Je men réjouis, car tous ces projets mintéressaient, je souhaitais voir le travail sur un documentaire, je voulais travailler tant avec des débutants, quavec des réalisateurs avec de lexpérience, qui étaient à leur deuxième ou troisième film, comme Bogdan Theodor Olteanu et Andrei Dăscălescu. Donc le travail sur ces quatre films a été une expérience très complexe, car les projets sont très différents. Cela a été intense et exigeant à un moment donné, car tous ces films ont eu leur première la même année. Mais tout sest bien passé et jespère continuer avec la même énergie. » (Trad. Elena Diaconu)


  • L’Association pour le Développement du cinéma roumain (ADFR)

    L’Association pour le Développement du cinéma roumain (ADFR)

    C’est depuis l’année dernière que la Roumanie est représentée auprès du réseau de promotion des films européens, EFP, par l’Association pour le Développement du cinéma roumain. Au bout d’une année d’absence, voilà que cette organisation a permis le retour des films roumains au sein de ce prestigieux réseau de promotion des industries cinématographiques européennes dont l’ADFR en est devenu le 38ème membre. Créée fin 2016- début 2017, l’ADFR est une organisation non gouvernementale dont le principal but est de soutenir et d’encourager la production et la distribution du cinéma indépendant de Roumanie, parallèlement à l’épanouissement d’une nouvelle communauté de cinéastes et cinéphiles autochtones.

    L’Association cherche à promouvoir le cinéma roumain et européen par l’intermédiaire de la publication numérique bilingue, Films in Frame qui, dans des situations exceptionnelles, peut financer les productions indépendantes restées à court de fonds. Laura Musat, à la tête de l’Association pour le développement du cinéma roumain, raconte « Cette association, je l’ai fondée fin 2016, peu de temps après mes études à l’Université The School of Film, Media & Performance de Londres. C’est à ce moment-là que j’ai pris la décision de mettre sur pieds l’ADFR, d’abord pour répondre à un besoin personnel de combler ou de réduire les déficits dont souffrait l’industrie cinématographique roumaine. Sur l’ensemble des projets mis en place par notre association, le plus important reste, je pense, la publication en ligne Films in Frame. Il s’agit d’un magasine quotidien qui s’enorgueillit d’une des meilleures équipes de journalistes et de critiques de film de Roumanie : Ionuț Mareș, Victor Morozov, Georgiana Mușat, Flavia Dima et d’autres. Je leur suis très reconnaissante pour m’avoir fait la confiance de s’impliquer dans ce projet que j’ai démarré à zéro, en octobre 2019. Dans cette publication, on discute de tous les films importants du moment, on parle notamment du cinéma européen et indépendant et on propose différents types d’articles, puisqu’il s’agit d’un magasine à contenu divers qui s’efforce de couvrir les points forts de l’actualité. Films in Frame se veut aussi une modalité de promouvoir le cinéma roumain et le cinéma indépendant de Roumanie partout dans le monde afin de toucher un public le plus large possible en lui donnant envie de se rendre en salle de ciné pour voir aussi autre chose que des succès américains ».

    Lancé fin 2016, « The Script Contest » est le premier projet mis en place par l’Association pour le développement du cinéma roumain. Imaginée sous la forme d’un concours de scénario pour les court- métrages, cette compétition a gagné de l’ampleur d’une édition à l’autre jusqu’à ce qu’elle ait fini par offrir une résidence artistique aux meilleurs scénaristes. Cette année, les inscriptions ont eu lieu du 1 mars au 24 avril nous le rappelle Laura Musat :Le but de cette résidence est de dénicher des scénaristes et de leur apprendre à développer leurs compétences littéraires. Chez nous, en Roumanie, il est monnaie courante que les réalisateurs les plus connus écrivent leurs propres scénarios. Ce qui c’est une bonne chose, surtout que parmi eux, il y en a qui le font très bien. Mais à partir du moment où le fait d’écrire son propre scénario renvoie plutôt à l’orgueil qu’au talent, mieux vaut se remettre à un véritable scénariste. Malheureusement, en Roumanie, ils se font plutôt rares. Peut-être qu’à force d’avoir des réalisateurs qui se chargent d’écrire leurs propres scénarios, les scénaristes se sentent découragés et du coup, ils ont du mal à pénétrer dans l’industrie du film. Or, par notre The Script Contest, on se propose justement de trouver de bons scénaristes. Dans le cadre de cette résidence qui dure une semaine, les participants ont la chance de rencontrer différents cinéastes consacrés qui sont là pour les guider, leur donner du feed-back avant d’en choisir un seul gagnant. Ainsi, le meilleur scénario sera-t-il produit sous forme d’un court-métrage. La résidence signifie donc sept jours pendant lesquels les participants ont droit à toute sorte d’ateliers, de cours de maître, de débats en marge de leurs textes qu’ils pourront réécrire compte tenu des informations reçues. La résidence se déroule dans le village de Cobor, dans le département de Brasov, un patelin au cœur de la nature, loin du tumulte de la ville et privé de connexion Internet afin de laisser aux scénaristes la possibilité de se consacrer entièrement à leurs projets. A la fin de cette petite semaine, les concurrents envoient les manuscrits revisités et un lauréat sera décerné. La résidence The Script Contest s’est déroulée en 2020 aussi, malgré la pandémie. Avec nos collègues du Festival International du Film Transylvania, TIFF, on a réussi à mener nos projets à bon terme, en présentiel, tout en respectant les mesures sanitaires. Prévue dans un premier temps au mois de mars, la résidence a fini par être reportée en août, justement pour nous permettre de bien l’organiser » a conclu Laura Musat, à la tête de l’Association pour le développement du cinéma roumain.

  • Le musée de l’Horloge

    Le musée de l’Horloge

    Madame,
    Monsieur, cette semaine, nous prenons la route en direction de la ville de
    Ploieşti, pour y découvrir l’un des musées les plus beaux de Roumanie : le
    Musée de l’Horloge. Sise à seulement 60 kilomètres de la capitale, Bucarest,
    Ploieşti s’enorgueillit d’abriter ce musée rare, créé il y a plus d’un
    demi-siècle par les soins de l’historien Nicolae Simache.

    On vous propose donc
    de faire le tour virtuel de ce petit joyau, en compagnie de la commissaire
    d’exposition Carmen Banu : « Nous voilà arrivés au Musée de
    l’Horloge, « Nicolae Simache »
    din Ploiești. Fondé en 1963, le musée doit son existence au professeur émérite
    d’histoire Nicolae Simanche. Directeur, à l’époque, du Musée régional d’Histoire
    de la ville, Simanche a ouvert 18 sections muséales, dont ce musée qui,
    apparemment, lui a été le plus cher parmi tous les autres. L’édifice est un
    joyau d’architecture, un bâtiment dressé à la fin du XIXème siècle par Luca
    Elefterescu, homme politique, chef du Parti conservateur, magistrat et pétrolier,
    qui était à l’époque le préfet du département de Prahova dont Ploieşti est le chef-lieu.
    C’est une des bâtisses les plus belles de la ville. Construite en style
    néoromantique, elle se trouvait à l’époque dans la zone résidentielle sud de
    Ploiesti. »



    Voici ce que Carmen Banu nous a raconté sur les débuts du musée et les
    collections qu’il renferme : « Le Musée de l’Horloge de Ploiesti
    renferme une riche collection. Les premiers objets exposés ont été procurés
    dans les années 1954. Une année plus tard, s’y ajoutent les premières pendules dites
    « transylvaines » parce qu’elles provenaient de foyers de
    Transylvanie, quoique de fabrication allemande. La collection s’enrichit
    davantage au moment de l’achat d’un lot de 55 montres issues de la collection
    du fameux horloger de Bucarest, Sebastian
    Sașa. Et c’est à partir de ce moment-là que l’idée d’un Musée de l’Horloge
    commence à se crayonner. Les acquisitions ont continué et de nos jours, les
    collections permanentes renferment 4000 objets auxquels s’ajoutent 500 présentés
    dans les expositions temporaires. Le musée met en évidence l’évolution
    enregistrée dans la mesure du temps. Les visiteurs peuvent admirer des objets
    allant des cadrans solaires, en passant par des clepsydres, des horloges
    hydrauliques pour arriver aux montres réalisées manuellement et datant du début
    du XXème siècle. On y trouve aussi quelques objets exceptionnels tels plusieurs
    horloges en style Renaissance, fabriquées vers la seconde moitié du XVIème
    siècle par des horlogers de France ou d’Allemagne. Parmi ces exposés, le plus
    ancien est une horloge de Blois, datant de 1544 et portant la signature du
    maître-horloger Jakob Acustodia. C’est une de nos pièces de résistance, voir
    même la plus importante. S’y ajoute une autre, une horloge fabriquée en 1562
    par le fameux horloger allemand Jeremias Metzker. C’est une série limitée à
    trois objets seulement dont celui de Ploieşti est apparemment le plus ancien. »





    Le tour du musée commence dans une toute première salle où Carmen Banu
    nous emmène : « Parmi les objets qui font la particularité de cette salle
    consacrée aux premiers dispositifs pour mesurer le temps, on trouve une horloge
    hydraulique. Il parait que c’est la seule collection de ce type à détenir un
    tel objet. Appelées comme ça en raison de leur ressemblance à des lampes-
    torche, les horloges- torche ont été fabriquées pour la première fois au
    XVIIème siècle, en Angleterre, et leur succès leur a assuré la survie jusqu’au
    XIXème. Nos collections en possèdent deux.
    »





    C’est le moment
    de découvrir la salle des grandes horloges. Carmen Banu : « La deuxième salle est consacrée aux
    différents dispositifs de mesure du temps datant du XVIIIème au début du XIXème
    siècle. Ces objets impressionnent notamment par leurs dimensions, mais aussi
    par leur beauté. C’est le cas, par exemple, des pendules du XVIIIème siècle.
    D’autres objets qui attisent notre curiosité sont les montres de poche, dont
    les plus anciennes datent de la fin du XVIIème siècle et jusqu’au début du
    XIXème, et qui portent la signature d’horlogers anglais, français ou suisses.
    Le patrimoine du Musée de l’Horloge n’a rien à envier à celui des musées
    similaires d’Allemagne, Suisse ou Etats-Unis. Par exemple, nous avons quelques
    objets créés par le célèbre horloger Abraham Louis Breguet, dont les montres
    sont exposées au Musée Topkapî de Turquie. Il est considéré comme l’horloger le
    plus célèbre de tous les temps.
    »



    Et nous voilà arrivés dans la troisième salle, en compagnie de notre
    guide, la commissaire d’exposition, Carmen Banu : « Les montres de poche que l’on retrouve
    exposées dans cette troisième salle datent des XIXème et XXème siècles. Outre
    leurs qualités techniques, ces montrent impressionnent par leurs qualités
    artistiques et par leurs propriétaires: des personnalités de la vie politique
    ou culturelle de Roumanie. Un tout premier exemple en ce sens serait les deux
    montres ayant appartenu au roi Carol I. On a encore une montre de la collection
    du Tsar Alexandre II de Russie dont nous a fait don, en 1992, une Roumaine
    établie en Suisse. Dans la catégorie des montres aux propriétaires célèbres, on
    en a, par exemple, une ayant appartenu au diplomate roumain Nicolae Titulescu.
    Il s’agit d’un modèle Reverso, créé en
    1931 par la marque LeCoultre. Les collections se complètent par d’autres
    montres tout aussi belles, des montres étranges, fixées dans un lorgnon par
    exemple, ou gravées d’inscriptions maçonniques.
    »



    A la fin, notre
    guide, Carmen Banu nous attire l’attention sur d’autres exposés : « Nos collections comportent aussi
    des pendules de cheminée, d’origine française pour la plupart, dont les
    décorations, notamment en bronze doré, indiquent leur période de création. On a,
    par la suite, des horloges murales. Originaires notamment d’Allemagne, de la
    région du Massif de la Forêt Noire, ce sont surtout les horloges à coucou qui
    attirent l’attention du visiteur. Nos collections renferment des horloges de
    table ou de mur, telle celle issue du patrimoine du prince régnant Alexandru
    Ioan Cuza. C’est une horloge au mécanisme astronomique, qui indique les jours,
    les solstices, les équinoxes et les années bissextiles. S’y ajoute la
    collection de montres ayant appartenu à l’homme politique Mihail Kogalniceanu,
    ou encore au romancier Duiliu Zamfirescu, au peintre Theodor Aman ou encore au
    poète George Coşbuc. En cette période de pandémie, on attend les visiteurs dans
    un endroit beau, unique et sûr »
    . (Trad. Ioana Stancescu)



  • Le marché d’art en Roumanie

    Le marché d’art en Roumanie

    Quelles ont été les performances du marché d’art et d’objets de collection de Roumanie en 2020? Nous avons échangé avec Alina Panico, responsable des relations publiques de la Maison de vente aux enchères « A10 by Artmark », sur les plus importantes maisons de vente aux enchères et transactions d’arts, sur les tendances du marché et sur les artistes plasticiens roumains les plus convoités: « Nous trouverons 5 maisons de vente aux enchères sur le marché d’art de Roumanie: A10 by Artmark, Alice, Quadro, Historic et Vicart. Si nous calculons la moyenne arithmétique des 10 transactions les plus importantes de 2020, il en résulte une moyenne de 116.250 euros. Si nous comparons ce chiffre à la moyenne du top 10 de 2019, soit 119.000 euros, il n’en résulte pas de différences significatives -environ moins 2,36%, mais, du point de vue du volume total du marché, les calculs partiels et provisoires indiquent pour 2020 une hausse de quelque 20% du nombre et de la valeur des transactions par le biais des enchères. Dans les enchères d’art de Roumanie, l’art de patrimoine continue d’en être le principal segment, notamment les créations des artistes d’importance nationale, qui concrétisent toujours les valeurs de marché les plus élevées. L’année 2020 a offert un nouveau record absolu pour le marché d’art de Roumanie: l’œuvre « Țărăncuță cu fuior pe cale/Jeune paysanne à la quenouille » de Nicolae Grigorescu a été adjugée 220.000 euros. Le peintre national est suivi par les grands maîtres Ștefan Luchian et Nicolae Tonitza, dont les œuvres « Vas cu garoafe/Vase aux œillets » et « Irina » ont été adjugées 125.000 euros et 120.000 euros respectivement. En 2020, l’art de patrimoine a été suivi par l’art contemporain, dont le record a été enregistré par l’œuvre « Untitled (Memory) » signé par l’artiste roumain contemporain le plus convoité dans le monde, qu’est Adrian Ghenie. L’œuvre a été achetée au bout de 27 pas d’enchère et de 10 minutes et 42 secondes, avec un prix de départ de 20.000 euros et adjugée 110.000 euros. »

    Nous avons voulus apprendre par Alina Panico des détails du processus d’authentification des œuvres d’art, combien sûrs les acheteurs peuvent être de l’objet d’art acheté: « Pour authentifier une toile, l’on prend en compte plusieurs aspects: le sujet, le support utilisé (toile à peindre, papier ou autres), les inscriptions au verso du tableau, les couleurs, la touche, les reproductions et les mentions dans les journaux de l’époque ou dans des catalogues d’exposition. En même temps, les œuvres d’art, les pièces de collection sont authentifiées par des experts autorisés par le ministère de la culture, par domaines d’expertise (par exemple, art plastique ou décoratif). Le travail d’expertise prend en compte le style, l’exécution, le thème, offrant plus d’informations que la signature de l’auteur. Ultérieurement, chaque œuvre est évaluée par un évaluateur qualifié, qui nous dit la valeur financière de l’ouvrage sur le marché, à ce moment-là. Seulement après avoir parcouru toutes ces étapes, les acheteurs peuvent être sûrs à 100% de l’authenticité des ouvrages qui viendront compléter leurs collections. »

    Notre interlocutrice, Alina Panico, nous a parlé du profil de l’acheteur d’art de Roumanie, des collectionneurs et du record roumain du marché d’art en 2020: « Nous avons des acheteurs intelligents et éduqués, qui continuent à acheter des objets d’art, car il n’en voient pas que la valeur culturelle, mais aussi un récipient de valeur financière dans lequel ils peuvent garder leur argent pendant une période d’insécurité. En thésaurisant par l’art, on s’attend à récupérer, à la fin d’une crise, au moins la valeur transférée dans l’œuvre d’art. Nous avons des acheteurs qui préfèrent une plateforme en ligne, car cette année, dans le contexte tellement connu qui a favorisé le transfert dans l’espace virtuel de toute l’activité de vente d’art, Le nombre de comptes de participation actifs, ouverts par les collectionneurs ou les investisseurs dans l’art, a littéralement explosé, ayant triplé en seulement quelques mois. Mais nous avons aussi des acheteurs qui deviennent solidaires avec les actions caritatives que nous lançons, en 2020 ayant eu 6 ventes aux enchères caritatives. Compte tenu du nombre double de ventes aux enchères au cours d’une année qui nous a déconcertés, secoués et mis très à mal, mais aussi compte tenu de la hausse de 20% des transactions d’art, de manière contre-intuitive, probablement, pour la plupart d’entre nous, nous pouvons conclure que, par des temps éprouvants, de nombreux Roumains ont opté plus clairement pour des valeurs fondamentales et durables, telles l’art, l’identité culturelle, l’histoire nationale et, pas en dernier lieu, l’action caritative. Il n’y a pas de classement officiel des collectionneurs d’art de Roumanie, mais nous pouvons dire que ces dernières années l’on a compris en Roumanie qu’avoir des objets d’art à la maison ne signifie pas nécessairement avoir un revenu substantiel. Les Roumains ont commencé à acheter des pièces de collections, des objets d’art même avec des valeurs financières moyennes. Mais en 2020, le record a été établi par le même artistes roumain contemporain le plus convoité, Adrian Ghenie, dont l’ouvrage de la série « Lidless Eye », qui déconstruit le portrait du peintre Van Gogh, a été adjugé plus de 5 millions d’euros chez Sotheby’s à Hong Kong. Et c’est toujours Ghenie qui occupe les positions 2, 3 et 4 avec des œuvres adjugées entre 2 et 4 millions d’euros chez Sotheby’s ou Christie’s. »

    A la fin de notre entretien, Alina Panico nous a fait part de plusieurs conclusions sur le marché d’art de Roumanie en 2020: « Donc, l’année 2020 s’inscrit dans la tendance à la hausse suivie par le marché d’art de Roumanie depuis quelques années. Continuant les hausses spectaculaires enregistrées déjà, les années précédentes, 2020 a été l’année où les joueurs du marché d’art se sont concentrés sur l’établissement de nouveaux records et hausses inattendues sur le marché, ils ont cherché un marché alternatif, où ils puissent sécuriser leur argent, en suivant les recommandations des investissements qui approchent la zone de thésaurisation – une destination qui a été utile pour préserver la valeur des épargnes, de l’argent, et l’art représente une forme extrêmement stable, comparé aux banques, par exemple. » (Trad. Ileana Taroi)

  • « Framing the Change »

    « Framing the Change »

    Organisée au Royaume-Uni par l’Institut culturel roumain de Londres en partenariat avec les festivals roumains Astra Film de Sibiu et One World Roumanie, mais aussi avec les festivals britanniques de Sheffield Doc Fest et d’Open City Doc, la première rétrospective du film documentaire roumain contemporain se déroule du 26 avril au 31 juillet sous le titre « Framing the Change » / « Encadrer le changement ». Plus de 30 films et événements se trouvent à l’affiche de ce projet qui se propose d’offrir au public une incursion dans l’univers roumain des deux dernières décennies. Les documentaires révèlent donc de l’actualité roumaine sous différents aspects : les effets de la migration en masse, la perspective religieuse et laïque, l’écart entre l’éducation à l’école et celle en famille, ou encore l’histoire récente du pays. Le festival comporte aussi une sélection de films qui proposent des introspections dans la vie personnelle de leurs réalisateurs ou qui mettent en lumière la variété de styles et l’esthétique différente qui se retrouvent dans le cinéma roumain contemporain.

    Réalisée par Adina Marin, la première partie de cette rétrospective cinématographique propose des noms tels Alex Brendea, Dumitru Budrala, Radu Ciorniciuc, Răzvan Georgescu, Oana Giurgiu, Florin Iepan ou Alexandru Solomon, pour vous donner seulement quelques exemples. Adina Marin : « Je me suis réjouie de mettre en place ce projet qui a eu comme point de départ une initiative de Magda Stroe, qui dirige l’ICR de Londres. C’est elle qui a voulu réaliser une petite rétrospective du film documentaire roumaine et c’est grâce à ses efforts que le projet a fini par se concrétiser sous la forme actuelle. Au fur et à mesure que le temps passe, le documentaire roumain est devenu un sujet de plus en plus ample et compliqué que l’on n’aurait pas pu épuiser en deux ou trois projections. Quant à la sélection des titres, je dois dire qu’au moment où l’on se propose de faire une rétrospective, soit on met à l’affiche tous les films sortis dans cette période-là, ce qui est impossible, soit on finit par faire un choix qui est automatiquement subjectif. Or, mon petit côté subjectif m’a poussée à regarder en arrière, vers tous les documentaires à l’affiche déjà du Festival Astra Film pour en choisir ceux ayant marqué un tournant dans la carrière de leur réalisateur ou ceux ayant raconté des histoires d’actualité. Cela m’a beaucoup touchée de revoir tous ces films pour faire mon choix. Ce fut comme si j’avais rencontré d’anciens copains. J’étais très curieuse de voir l’impact que tous ces films auraient pu encore avoir une fois les années passées. Et, à ma grande surprise, je me suis rendu compte qu’en fait, l’une des qualités du film documentaire, c’est sa force de rester d’actualité. Il n’est pas périssable. Bien sûr, on peut avoir affaire à une technologie dépassée, mais quelle que soit l’évolution des techniques, le documentaire conservera cette qualité de surprendre tel ou tel moment, tout en offrant au public des connotations diverses. »

    En ouverture de la rétrospective du film documentaire roumain contemporain de Grande Bretagne – une discussion avec Adina Marin du Festival Astra Film, Andrei Rus de One World Roumanie, Cíntia Gil de Sheffield Doc Fest et Michael Stewart d’Open City Docs, animée par le journaliste Jonathan Romney. Adina Marin : « J’ai trouvé très intéressante cette proposition lancée par l’ICR de Londres d’organiser ce débat qui nous a permis, à moi et à Andrei Rus, d’argumenter le choix des films auquel on avait procédé. Quant aux invités, les discussions se sont déroulées entre des gens qui, d’une manière ou d’une autre, sont entrés en contact avec le documentaire roumain ces 20 dernières années. La discussion s’est avérée très intéressante, surtout qu’elle a mis en lumière plusieurs points de vue, en dehors de notre perspective à nous, les programmateurs du festival. Je me suis réjouie de me retrouver en présence de Jonathan Romney qui s’intéresse non seulement au film documentaire, mais au cinéma roumain en général et dont les chroniques, je les lis depuis des années. Notre débat est intervenu peu de temps avant le Gala des Oscars. Cela nous a permis de créer une sorte de pont entre le documentaire « Sur la route », réalisé par Dumitru Budrala en 1998 et « l’Affaire Collective » d’Alexander Nanau, deux fois nominé aux Oscars. »

    Prévue du 15 au 31 juillet, la deuxième partie de la rétrospective du film documentaire roumain comporte une sélection réalisée par le critique Andrei Rus, directeur et programmateur du Festival One World Roumanie. Les films seront diffusés sur les réseaux en ligne de l’ICR de Londres et ils seront sous-titrés en anglais. Sur l’ensemble de tous ces documentaires, une partie sera également disponible pour un bref laps de temps seulement au Royaume-Uni. Pour plus de détails, veuillez consulter le site de l’Institut culturel roumain de Londres. (Trad. Ioana Stancescu)

  • Les archives vivantes – des films issus des archives de l’UNATC

    Les archives vivantes – des films issus des archives de l’UNATC

    Lancé en 2020 par lUniversité dart théâtral et cinématographique de Bucarest, UNATC, pour marquer ses 70 années dexistence, le projet « Les archives vivantes » réunit pour linstant 15 court-métrages des années 1966-1971. Ce sont des films faits après une dizaine dannées de pause et portant la signature des étudiants issus de la première génération des réalisateurs roumains. On y retrouve des noms célèbres tels Radu Gabrea, Ada Pistiner, Vivi Drăgan Vasile, Dan Pița ou Mircea Veroiu.



    Le critique de film Andrei Rus, directeur artistique du Festival du film documentaire One World Roumanie, et commissaire des Archives vivantes nous en parle :« Les Archives vivantes sont nées dune passion et dune préoccupation plus ancienne que moi et plusieurs personnes à la tête de lUNATC, nous avons pour les archives. En 2020, lUniversité dart théâtral et cinématographique de Bucarest a marqué son 70ème anniversaire. Du coup, avec le concours du recteur Liviu Lucaci, infatigable dans son désir de revigorer linstitution, jai mis en place le projet des Archives. On sest posé la question si on connaissait vraiment lhistoire de cette université, puisquon ne sétait jamais intéressé au passé de cette institution connue dans un premier temps sous le nom de lInstitut dart théâtral et cinématographique. Or, cette structure est celle qui a donné la majorité des professionnels du théâtre et du cinéma roumain davant 90 et qui a fixé, pour ainsi dire, les normes. Concrètement, toutes ces règles stylistiques selon lesquelles on continue à faire du théâtre ou du cinéma datent de cette période-là. Moi, jai commencé à visionner en ordre chronologique tous les films réalisés par les étudiants à compter des années 60 et lannée dernière, jai présenté au programme du TIFF, le Festival international du film Transilvania, neuf courts- métrages issus des archives de lUNATC. Au moment où leur invitation est tombée, javais déjà vu 200 courts-métrages datant des années 1966-1971. Et, jai eu la surprise de découvrir plusieurs productions presque expérimentales qui ne ressemblaient guère aux films réalisés dans ces années-là. Jai vu donc une sélection de films hors norme qui ont la force, je pense, de revigorer lintérêt pour le cinéma roumain marginal. De nos jours encore, les productions réalisées par les étudiants sont marginalisées par rapport au cinéma officiel de fiction, le seul susceptible de passer à la télé. Il en va de même pour les documentaires ou les films danimation, très peu accessibles. Ce que je veux dire, cest quil ny a pas un seul type de cinéma roumain, mais plusieurs, et il est important de commencer à les explorer tous. Pourtant, avant de nous lancer à étudier toutes ces formes de cinéma, on devrait commencer par les conserver, les faire passer en format numérique afin de les rendre plus accessibles à la recherche. A force de visionner tous ces films issus des archives, jai constaté quune grande partie de lavant-garde roumaine provenait de lunique endroit où lon étudiait le théâtre et le cinéma. »




    Dans les années à venir, on préconise la mise en place dun ample processus permettant la numérisation de quelque 2000 de films de 16 ou 35 mm issues des Archives vivantes. Dans le cadre du même projet, on se propose didentifier et de rendre accessibles plusieurs types de documents darchives : photographies, illustrations de décors, mémoires de maitrise, notes sur les spectacles mis en scène pendant les sept décennies dexistence ou encore dossiers administratifs reflétant lévolution pédagogique dans le domaine des arts du spectacle et du cinéma.



    Le commissaire des Archives vivantes, Andrei Rus, détaille :« Le court-métrage est un type de cinéma moins coûteux que le long-métrage et cest la raison pour laquelle à lépoque, on en réalisait pas mal. Même dans les années 70 quand le cinéma roumain a connu un grand essor, on ne faisait quune vingtaine de longs-métrages, alors que les courts-métrages produits par les Studios Sahia dépassaient les 200. Il y avait aussi les Studios danimation Animafilm, mais leurs productions étaient pour la plupart indisponibles. Et puis, on avait plusieurs centaines de cinéclubs et je suis certain que parmi les productions que lon y faisait il y en avait qui renvoyaient au cinéma expérimental et que le public narrivait jamais à voir. Dans lactuel contexte quand on assiste à une sorte de revigoration du département de recherche de lUNATC et à un renforcement de lintérêt pour les archives, jespère que lon arrivera à ressusciter lintérêt du public pour ce domaine. Car cest là un sujet sensible pour toute la culture roumaine, non seulement pour le théâtre et le cinéma. Il arrive souvent que les artistes naient personne à qui confier leurs archives. Du coup, la plupart de ces documents restent en famille ou chez des amis, ce qui les rend inaccessibles à la recherche. Il serait très important de mettre en place des centres qui se chargent de toutes ces archives personnelles car, comme vous le savez, il existe de nombreux musées ou institutions qui sy intéressent. » (Trad. Ioana Stancescu)