Category: La Roumanie chez elle

  • La Nuit des idées … porte conseil !

    La Nuit des idées … porte conseil !

    Les quatre antennes de l’Institut français de Roumanie – Bucarest, Cluj-Napoca, Iaşi et Timişoara – ont proposé des affiches généreuses, contenant débats, expositions, ateliers créatifs. S’y est jointe l’Alliance française de la ville de Ploieşti, avec également plusieurs débats et ateliers interactifs. Cette année, la Nuit des idées a eu pour thème « l’être vivant », une ambiguïté voulue entre le verbe et le nom, puisque l’événement est avant tout une invitation à la réflexion, loin des traditionnelles rencontres avec des experts détenteurs de la vérité qu’ils révèlent aux autres mortels.

    Quelle est notre place dans le monde vivant ? Comment le fait d’être vivant nous oblige-t-il à passer à l’action ? Comment l’acte créateur peut-il sauvegarder l’environnement? Cristian Neagoe, responsable des relations publiques à Greenpeace Roumanie, explique: « La nature et la culture vont main dans la main ; sans la nature, il n’y aurait pas de culture et réciproquement. La manière dont nous réussissons à comprendre ce qui se passe à présent est, je crois, vitale pour ce se passera plus tard. »On dit qu’à l’intérieur de chaque être humain se cache un artiste. Suzana Dan, manager culturel de la Résidence BRD Scena9, a reformulé cette phrase, disant que: « Aujourd’hui, il faudrait que chaque être humain soit un activiste. A mon avis, que l’on soit artiste ou acteur dans un autre domaine d’activité, il est très important d’avoir le courage d’assumer une réaction, ce qui est en fait une forme d’activisme par rapport à nos problèmes, qui sont communs. Les artistes ont effectivement un fort atout, celui d’être présents et visibles. L’image a une grande richesse et une force de communication qui transmettra un message très fort. J’aimerais que nous soyons aussi réactifs que possible.»

    Mihai Stoica, directeur exécutif de l’Association 2Celsius, a élargi l’activisme à d’autres acteurs du quotidien: « J’ai un ami photographe qui est en même temps doctorant en biologie, à l’Université de Hambourg, où il étudie les algovirus et la transmission des virus de différents organismes hôtes à l’homme. Il disait, récemment, que le changement climatique a commencé à modifier l’aire de dissémination des virus. Et il a choisi de documenter sa recherche en exposant des photos. Est-il un scientifique ou un photographe? A-t-il une responsabilité de communiquer ? Ses photos sont généralement très poétiques, sans aucun rapport avec le fait qu’il est un homme de science. Mais il a assumé aussi ce rôle, de nous dire quelque chose aussi sur les virus, et de le dire d’une manière qui fasse réfléchir au changement climatique. »

    Cristian Neagoe, responsable des relations publiques de Greenpeace Roumanie, a ajouté: « A mon sens, le grand problème de l’humanité est le fait qu’elle ne s’est jamais considérée comme une partie de la nature, qu’aux yeux de tous nos ancêtres, jusqu’il y a cent ans, la nature devait être conquise, soumise, exploitée. Toutes les religions, toutes les croyances nous disent que la nature nous est donnée par Quelqu’un, pour l’utiliser à nous développer et nous multiplier. Platon et Aristote la voyaient immuable, impossible à détruire et infinie. Eh bien, nous sommes arrivés au point où nous constatons qu’elle très fragile et que nous autres humains, nous nous sommes multipliés beaucoup plus qu’il ne le fallait. Nous sommes devenus une société de la consommation excessive. Aux yeux de Greenpeace, les plus grands problèmes sont la nature et la paix. Nous essayons de les protéger, nous essayons de convaincre aussi d’autres de se joindre à nous. »

    Présente dans 55 pays, Greenpeace se bat en Roumanie pour la protection des forêts, le poumon vert de l’Europe, puisque nous détenons deux tiers des forêts séculaires du continent tandis que le bois est coupé à un rythme effréné, a rappelé Cristian Neagoe. « L’art réussit à rendre accessibles des choses apparemment très éloignées de nous. Il est donc différent de l’activisme, qui est plus acharné ; l’art nous conquiert en douceur. C’est d’ailleurs pour ça que l’art et l’activisme, ensemble, pourraient faire des miracles en matière de protection de l’environnement. »

    La Nuit des idées ne produit pas que des débats, l’échange d’idées peut prendre d’autres formes aussi – danse, photographie, bande dessinée, peinture, caricatures, installations artistiques. Cette année, la responsabilité écologique a occupé le devant de la scène : la BD en tant que manifeste, des projets innovants dans la protection de l’environnement et l’utilisation efficace des ressources, l’implication des jeunes dans la protection de l’environnement, l’engagement citoyen à l’époque des urgences climatiques. (Trad. : Ileana Ţăroi)

  • L’histoire à la portée de tous – L’exposition « The Dracula Investigation »

    L’histoire à la portée de tous – L’exposition « The Dracula Investigation »

    De double origine, hollandaise et roumaine, ils ont grandi à Sighișoara, renommée ville médiévale transylvaine, au centre de la Roumanie. Ils sont passionnés d’histoire et c’est de là qu’est partie la décision d’enrichir l’offre culturelle de leur ville natale. Même si Sighișoara se trouve déjà sur toutes les cartes touristiques, on peut toujours mieux faire. C’est ainsi qu’une exposition inédite a vu le jour, une invitation dans le monde fascinant de Vlad Țepeș, connu aussi sous le nom de Vlad l’Empaleur. Vlad Țepeș est né en 1431, à Sighișoara, d’un père prince de Valachie, Vlad II ou bien Vlad Dracul. Vlad II rejoint l’Ordre du dragon, qui visait à protéger les intérêts de la chrétienté de l’Empire ottoman, d’où son surnom de « Dracul », le Dragon. Son fils, Vlad Țepeș, sera désigné du même nom, transformé par les étrangers en Drăculea ou Dracula. L’appellation est rendue célèbre bien plus tard, par Bram Stoker, dans le roman homonyme. Vlad Țepeș a lui aussi été prince de Valachie, à trois reprises, en 1448, de 1456 à 1462 et en 1476. C’est autour de cette personnalité historique que les huit frères ont construit une exposition.

    « The Dracula Investigation » / « L’Investigation Dracula » présente l’histoire de Vlad Țepeș au-delà des légendes. Une personne sensible, un enfant traumatisé, Vlad Dracula – le fils, le frère, le guerrier.Un des huit frères, Timon, 26 ans, raconte pour Radio Roumanie comment a commencé le projet :
    « Ca fait longtemps que nous voyons tous ces jeunes qui partent de Sighișoara. Il y a peu d’opportunités ici et très peu de monde démarre de nouveaux projets ou crée des activités pour les touristes. Les gens qui visitent la ville disent qu’il n’y a rien à faire outre les 2-3 heures de promenade dans la ville médiévale. C’est comme ça que nous nous sommes dit qu’il y avait sûrement des possibilités. C’était un long processus, nous n’étions pas toujours d’accord, mais, jusqu’à présent, c’est une réussite. Au début, par exemple, nous pensions faire nous-même la scénographie de l’exposition. C’est ainsi que nous avons rencontré Silvia, car nous savons que nous ne pouvons pas tout faire ou bien que d’autres peuvent faire certaines choses mieux que nous. Et maintenant nous pensons déjà à des projets futurs. »

    Silvia dont parle Timon est la scénographe Silvia Ioana Horobeanu. Elle nous raconte comment elle s’est jointe au projet : « Au départ, Timon m’a contacté et m’a parlé de leur initiative. J’ai trouvé ça intéressant qu’ils voulaient raconter notre histoire d’une façon innovante. Je leur ai proposé une version moderne et minimaliste, car je crois que la simplicité est primordiale quand ont veut raconter des faits historiques. Au départ, j’ai eu l’idée de faire des projections ou d’utiliser l’animation. Après, j’ai pensé aux jeux d’ombres et de lumières, pour arriver ensuite à l’idée de transparence. »

    Petit à petit l’exposition a pris forme et aujourd’hui elle utilise toutes ces techniques, les projections, l’animation, les ombres chinoises et les sculptures. C’est Vlad lui-même qui guide le visiteur à travers les cinq pièces et qui raconte l’histoire de sa vie. La technologie est mise au service de l’histoire, pour créer une expérience immersive et interactive pour le visiteur. Le résultat final a aussi à voir avec l’âge des entrepreneurs. Lemre, le frère cadet de Timon, explique : « J’aime beaucoup tout ce qui est médiéval, j’aime l’histoire. Nous savions qu’il y avait du potentiel, sans savoir exactement quoi faire. Nous réfléchissions autour de Sighișoara, où nous avons grandi, et dont le centre-ville est inscrit au patrimoine de l’UNESCO. Or, dès qu’on entend parler de la Transylvanie, on pense à Vlad Țepeș, à Dracula. Or d’habitude les gens ne connaissent pas la vraie histoire, mais plutôt les contes avec des vampires. Nous avons décidé de raconter la vérité, car elle est aussi intéressante. Mais il fallait rendre la réalité attrayante, unique pour les gens qui visitent l’exposition. »

    C’est vrai que la mise en scène de « L’Investigation Dracula » interpelle. La scénographe Silvia Ioana Horobeanu parle d’un élément de décor un peu particulier : « Je voulais créer une certaine sensation pour les visiteurs. Toute la narration de l’exposition se déroule à l’extérieur. Nous avons alors décidé d’introduire dans cet espace fermé, entièrement blanc, un élément de l’extérieur. Nous pensions aussi au son, avoir comme un son extérieur, mais diffuser ça dans les enceintes semblait artificiel. En plus, on voulait que les gens ressentent une sensation physique. C’est là qu’est apparue l’idée du gravier. Les garçons m’ont détesté, ils en ont porté des seaux et des seaux. Mais, au final, ils étaient contents : ils ont vu que c’était cohérent avec le projet. »

    D’autres jeunes artistes roumains ont travaillé aux côtés de Silvia Ioana Horobeanu, des écrivains, des sculpteurs, et ensemble ils ont créé un parcours d’exposition qui dure 20 minutes. Les huit frères sont ouverts aux critiques : ils ont placé deux urnes à la sortie de l’expo et encouragent les visiteurs à y déposer un billet avec leurs impressions. Une urne accueille les avis positifs, l’autre – les avis négatifs. D’ailleurs, un écriteau « Satisfait ou remboursé » est affiché au même endroit.Plusieurs lieux de Roumanie évoquent la figure historique de Vlad Țepeș : la Vieille cour royale de Bucarest ou le Château des princes à Târgovişte. Voilà que l’exposition « L’Investigation Dracula » de Sighișoara peut venir s’inscrire dans un itinéraire qui retrace la vie du plus célèbre prince roumain. (Trad. Elena Diaconu)

  • Le costume traditionnel – une nouvelle tendance

    Le costume traditionnel – une nouvelle tendance

    Les costumes traditionnels roumains sont de nouveau à la mode. Resserrées ou non autour du cou, simples ou richement décorées de broderies, les blouses roumaines reviennent à la mode.Virginia Linul est née dans la contrée de Bistriţa-Năsăud, dans le nord du pays. Confectionner des blouses roumaines est une tradition dans sa famille. Virginia a fait de sa maison un musée du costume traditionnel et elle a réuni autour d’elle une soixantaine de femmes avec lesquelles elle crée des blouses roumaines.

    Virginia Linul a pris confiance dans son travail après la participation de la Roumanie au Washington Smithsonian Folklife Festival, en 1999, avec des costumes traditionnels, des produits gastronomiques et des créations folkloriques. C’est un métier qui suppose une grande responsabilité – estime Virginia Linul.« Au début, j’ai confectionné des costumes traditionnels de Bistriţa- Năsăud, ma contrée natale ; ensuite, j’ai commencé à travailler des costumes spécifiques d’autres régions du pays. La technique est quasiment la même, mais les modèles sont différents. Je travaille avec beaucoup d’application, après avoir fait des recherches aussi bien dans les musées que dans les villages. Je ne travaille pas n’importe comment, en pensant que ça va aller. Je ne produis pas d’imitations de costumes traditionnels ; j’ai une grande responsabilité vis-à-vis des générations futures, car si nous habillons nos enfants d’imitations, quand ils grandiront, ils croiront que c’est ça, une blouse roumaine. Nous, en tant que parents, nous avons une responsabilité envers les jeunes générations, nous devons les habiller de costumes authentiques, cousus main, pour que l’enfant ait une idée claire de ce qu’est le costume traditionnel roumain. »

    La Roumanie compte 450 zones ethnographiques, dont il est important de garder les spécificités. Comment le costume traditionnel roumain est-il devenu tendance ? Virginia Linul. « En 2011, un designer français, Philippe Guiller, est venu en Roumanie, comme attaché culturel à l’Ambassade de France à Bucarest. Il a visité la Roumanie et il s’est épris du pays et de toutes ses beautés. Il a lancé une collection couture 100%.ro, qui défie les préjugés et qu’il a réalisée avec le concours de dizaines d’artisans et de designers roumains. Il est venu chez nous et il a travaillé avec moi. 60% de sa collection a été travaillé ici, avec des artisans du Maramureş, de Bucovine, de Braşov, d’Olténie, de tout le pays, mettant en valeur l’art traditionnel roumain. Les télévisions ont médiatisé cet événement, elles ont promu le costume traditionnel. Les vedettes ont commencé à porter des blouses roumaines. Une année plus tard, Andreea Tănăsescu, créait sur Facebook la page « La Blouse roumaine » et ensuite elle a commencé à organiser des événements partout. »

    Une autre présence des costumes traditionnels dans l’espace virtuel est due à l’association « Semne de cusut » – « Motifs à coudre », qui, depuis juin dernier, propose, sur Google Arts and Culture, l’exposition « Costumes de contes de fées ». Cette exposition fait découvrir aux internautes l’art de créer des chemises et des blouses traditionnelles roumaines et explique la signification des couleurs et des symboles utilisés pour leur décoration. C’est un voyage à la frontière de l’art et de la tradition. Ioana Corduneanu, fondatrice de l’association « Motifs à coudre » nous a parlé de l’art de créer une blouse roumaine. « J’espère que les tissus bon marché seront oubliés et que l’on commencera à coudre, comme nos arrière-grand-mères, avec du lin, du chanvre, de la soie et de la laine, parce que ces fibres végétales sont plus saines pour nous et pour la planète. Elles sont également plus précieuses, plus nobles, comme nos blouses traditionnelles le méritent. Nos dames portent surtout des blouses et plus rarement des jupes traditionnelles, recouvertes du tablier appelé « fota », pourtant, certaines d’entre elles souhaiteront compléter leur tenue avec ces pièces aussi. »

    Les membres de l’Association « Motifs à coudre » créent les blouses traditionnelles avec amour et par amour pour le costume traditionnel roumain. « La plupart, je les crée parce que ça me fait plaisir, parce que la broderie est un art et un loisir. Les femmes qui les travaillent le font pour elles-mêmes, pour les porter, pour leurs familles, pour des personnes chères, pour des amis. Certaines blouses sont destinées à nos expositions, que l’on peut découvrir sur Internet aussi. » Toutes les femmes qui souhaitent rejoindre les créatrices de blouses roumaines de l’association peuvent le faire.

    Ioana Corduneanu: « Il leur suffit de visiter notre blog, pour se renseigner sur ce que nous faisons, exprimer leur désir de nous rejoindre et nous dire ce qu’elles souhaitent exactement réaliser et elles recevront de l’aide. Les symboles que l’on utilise sont universels, c’est un langage visuel que tout le monde comprend. Ce qui est spécifique, c’est la « grammaire », pour ainsi dire, la façon d’agencer les lettres de cet alphabet des couleurs et des motifs pour en faire des « phrases ». C’est ce qui nous rend uniques. Et on peut distinguer une blouse traditionnelle roumaine de toutes les blouses de nos voisins, on peut même distinguer une blouse avec une telle précision, que l’on peut arriver à découvrir la région et même le village d’origine. Il y a des femmes des Pays-Bas, de Bulgarie, du Japon qui s’intéressent à cet art et qui créent de telles blouses, car elles se rendent compte qu’il ne s’agit pas strictement d’une blouse roumaine, que les valeurs dont cette blouse est porteuse sont universelles et pérennes. »


    Finissons sur une bonne nouvelle : cette année, lors de la fête nationale de la Roumanie à Paris, au Centre Pompidou, plusieurs jeunes femmes accompagnées par Ioana Corduneanu portaient fièrement leurs blouses traditionnelles, complétées par une jupe d’un bleu plus clair ou plus foncé. Pourquoi cette couleur ? Pour le comprendre, il suffisait de voir le grand nombre de visiteurs qui s’empressaient de prendre en photos ces Roumaines portant leurs blouses traditionnelles et leurs jupes bleues à côté du tableau de Matisse « La Blouse Roumaine », que le célèbre peintre a achevé en avril 1940. (Trad. : Dominique)

  • Poêles objets d’art

    Poêles objets d’art

    Il y a plus de 100 ans, en 1906, le Saxon Gref Iulius créait la fabrique de terre cuite de Mediaș, en Transylvanie. Entre 1938 et 2015, la fabrique a changé plusieurs fois de propriétaire, étant détenue, entre autres, par l’Etat roumain. Depuis 2015, elle appartient à nouveau à un entrepreneur saxon, Uwe Draser. Après 111 ans, la fabrique Teracota Mediaș produit, selon le mode traditionnel, les mêmes carreaux peints utilisés dans la construction des poêles en terre cuite des temps jadis. La fabrique a gardé les fours anciens, la même technologie et le même nombre d’employés et elle respecte la recette originale pour les mélanges de terre servant de matière première. A part les 5 éléments importants qui constituent l’extérieur d’un poêle, on y produit aussi des pièces strictement ornementales – piliers, arcades, médaillons, étagères, bordures, frontons – dont on embellissait jadis les poêles des manoirs ou des maisons de boyards.

    Radu George Stelian, directeur de la fabrique de Mediaş, nous raconte l’histoire de ce métier artisanal d’autrefois, ravivé de nos jours : « Nous essayons de perpétuer la tradition, nous utilisons de nos jours comme matière première le même mélange qu’en 1906 et les mêmes fours. Nous faisons un travail artisanal, les carreaux sont fabriqués par pressage manuel, alors que les autres producteurs sur le marché utilisent le pressage mécanique. Ce fut un pari fou, car, dans ces conditions, il est difficile de faire face à la concurrence sur le marché. Pour vous faire une idée des différences entre les deux technologies, je vous dirai que chez nous un ouvrier fabrique par pressage manuel environ 800 carreaux par mois, alors que, si l’on avait utilisé le pressage mécanique, on aurait réalisé 7 à 8 mille carreaux par jour. La différence est énorme. » L’art de fabriquer manuellement des carreaux en terre cuite a été presque oublié au début du 20e siècle, lorsque les poêles ont été remplacés par des systèmes modernes de chauffage.

    Malgré leurs nombreux avantages, ces systèmes n’ont pourtant pas réussi à remplacer la beauté des poêles ou des cheminées en terre cuite peinte, ni l’ambiance particulière qu’ils créent dans une maison. Radu George Stelian nous explique comment ils ont réussi à résister sur le marché. « Nous avons voulu faire quelque chose de différent ; nous avons eu des clients qui ont souhaité contribuer à la réalisation de leur poêle, mettre dans les carreaux quelque chose d’eux-mêmes et alors nous leur avons offert la possibilité de faire eux-mêmes le pressage des carreaux et de les peindre. Si une famille constituée de la mère, du père et de trois enfants viennent pour se faire construire un poêle tout à fait particulier, nous pouvons faire le pressage et vernir les carreaux, qu’ils peuvent peindre eux-mêmes dans notre fabrique et ils sauront par la suite quels carreaux ils ont réalisé chacun. Nous avons de nombreux clients qui choisissent de le faire. Il y a aussi des clients qui apportent le dessin d’un carreau sur une feuille de papier. Nous coulons le carreau dans des moules en plâtre et quand le poêle est prêt, ils emportent le poêle et les moules et leur poêle sera une pièce unique. Nous pouvons également restaurer de vieux poêles, pour ceux qui souhaitent les garder – et c’est là une autre différence par rapport à d’autres producteurs. C’est la niche que nous avons trouvée pour faire face à la concurrence. Ce n’est pas facile, mais nous avons eu la chance de collaborer avec de bons partenaires de Bucarest, de Viscri, du Musée Astra de Sibiu, du musée de la ville de Mediaş. A présent nous avons ouvert une exposition à l’église fortifiée de Viscri, pour essayer de montrer aux gens qu’un poêle en terre cuite n’est pas uniquement un objet utilitaire, il peut être aussi un objet d’art. »

    L’archive de la fabrique réunit des carreaux et des moules de carreaux transylvains, y compris des reproductions de poêles anciens exposés au Musée Astra de Sibiu. Radu George Stelian: « Nos archives comptent plus de 300 modèles de carreaux. Une de nos collègues, Iulia Costescu, fait un mastère en peinture et nous produisons donc nos propres carreaux, ainsi que des répliques de carreaux anciens provenant du musée Astra ou d’autres musées du pays. Alors, l’offre est très variée. Le client peut choisir en fonction de la région où il habite. A nos clients de Bucovine, par exemple, nous proposerons des carreaux anciens spécifiques de cette contrée, à ceux de Transylvanie, de même. En Transylvanie, les carreaux sont blancs, avec des peintures en bleu, en Bucovine, les ornements sont plus chargés et ils sont en rouge, en vert et même en jaune. Si le client souhaite des carreaux modernes, nous pouvons leur proposer un tel design. Il faut dire qu’à présent, un poêle en terre cuite n’est plus ce qu’il était jadis. A un poêle que nous vendons peuvent être connectés 10 à 15 calorifères, il est une véritable mini-centrale thermique. » La fabrique vend une trentaine de grands poêles et une centaine de poêles préassemblés par mois. Elle compte une trentaine d’ouvriers et elle peut être visitée.

    Les touristes peuvent participer à la fabrication des carreaux, ils peuvent faire eux-mêmes le pressage de carreaux en miniature, qu’ils peuvent emporter. Tous ceux qui le souhaitent peuvent ainsi connaître ce vieil art traditionnel, perpétué à Mediaş. (Trad. : Dominique)

  • Rétrospective 2019

    Rétrospective 2019

    Chers amis, encore une année s’est achevée, durant laquelle nous avons essayé de vous proposer des sujets intéressants. Aujourd’hui nous jetons un coup d’œil en arrière, pour en évoquer quelques-uns. Début 2019, nous avons visité le camp de construction d’iglous de la station de Parâng, dans les Carpates méridionales, arrivé à sa troisième édition. Une initiative censée nous faire découvrir comment on peut survivre à des températures extrêmes, dans une construction en neige, mais aussi promouvoir la vie au sein de la nature. Adi Cîmpeanu, de Petroşani, expliquait : «En 1996, je me suis enrôlé dans la Légion étrangère, où je suis resté jusqu’en 2001. Cinq ans durant, j’ai fait partie des troupes de montagne et j’y ai appris comment construire un iglou pour m’abriter. Après avoir quitté la Légion étrangère, je me suis dit que je devais construire des iglous chez moi aussi, dans le Massif de Parâng, dans la vallée de la rivière Jiu, contrée chère à mon âme. Au début, je l’ai fait pour m’amuser. J’ai réuni des amis pour leur apprendre la technique, avant de vieillir, car c’est dommage de ne pas partager ses connaissances. Et voilà que, vendredi soir, quand j’étais déjà dans le Massif de Parâng, j’ai constaté avec étonnement qu’une quinzaine de personnes étaient là, qui avaient entendu parler de cette initiative. Ce fut un succès et je me suis dit que cette année la couche de neige est assez épaisse pour que je puisse tenter une fois de plus cette aventure. J’ai été surpris de voir que, de nouveau, les gens étaient venus en grand nombre. L’expérience a été magnifique, une vraie réussite.

    En février, nous nous sommes rendus sur les ondes au Festival du Lard – SlanaFest – de Cluj. Le chef Radu Gârba est entré en compétition avec plusieurs recettes des plus inédites : « J‘ai préparé du lard au paprika, du lard à la purée d’ail et aux pousses d’oignon, du lard à la coriandre et, enfin, du lard juste fumé. J’y ai ajouté plusieurs friandises à base de lard : éclairs fourrés aux lardons réduits en purée, bouchées au caviar de haricots blancs et au bacon, quiche jambon, gruyère, lardons, enfin, bonbons pralinés faits d’un mélange chocolat, chili et lard. »

    Au printemps, nous avons été présents au Festival du film de montagne. Pourquoi un tel festival ? Nous écoutons les explications de Dan Burlac, son directeur artistique : «Je pense que la montagne a besoin d’un tel événement parce qu’elle nous fascine. On ne cesse d’y retourner. « Aller à la montagne, c’est aller chez soi » – dit-on, et moi, j’aime beaucoup cette pensée. Elle m’a d’ailleurs inspiré pour créer ce festival du film de montagne. En fait, le festival propose non seulement des films, mais aussi des livres, des photos, des compétitions sportives. La culture alpine et l’éducation à la montagne y sont présentes dans toute leur complexité. »

    En 2019, nous avons fait également une halte dans les écoles, avec le théâtre radiophonique. La coordinatrice de ce projet, Manuella Popescu, de la rédaction « Théâtre radiophonique » de la Radio publique nous en parle : « Ce nouveau projet s’appelle « La classe de théâtre radiophonique dans les écoles ». Il est censé attirer un public très jeune, étant destiné aux élèves du secondaire, alors que nous menons déjà un autre projet dans les lycées : Radio Fiction Desk. Aux élèves du secondaire nous proposons des auditions et nous avons choisi « Mythes et légendes. Les dieux de l’Olympe ».

    A chaque fois, nous expliquons aux élèves comment est réalisée une pièce de théâtre radiophonique, comment on fait un enregistrement. Et à chaque fois nous leur réservons une surprise : la rencontre avec un acteur. Notre premier invité a été Mircea Constantinescu et en avril c’est l’actrice Anne Marie Ziegler qui a été présente à notre rencontre avec les élèves. Les invités leur racontent des choses intéressantes sur leur profession, sur leur travail, sur la façon dont ils entrent dans la peau du personnage et sur leur amour pour le théâtre radiophonique, car ces acteurs consacrent une partie importante de leur vie et de leur âme aux enregistrements réalisés dans les studios de théâtre radiophonique. »

    Nous avons également exploré les limites de l’imagination aux côtés des fondateurs du « Cénacle Planetar », relancé à Bucarest. Son initiateur, l’écrivain Constantin Pavel, nous en raconte l’histoire. «Nous nous sommes dit : « Et si l’on créait un cénacle?» D’accord, mais où ? Et nous avons trouvé une grande compréhension auprès d’un professeur d’histoire du lycée « Tehnometal » – l’actuel lycée «Doamna Stanca». Nous avons collé des annonces partout, j’ai averti mes amis et nous voilà réunis. Notre lieu de rencontre était une petite salle de classe, comme on en trouve d’habitude dans les lycées. J’y suis allé habillé d’un costume bleu ; j’avais une belle chemise, une cravate et une serviette élégante en cuir. Ces jeunes-là ils ont été impressionnés et un groupe s’est formé par la suite. »

    Nous espérons que cette année aussi sera riche en découvertes surprenantes !(Trad. : Dominique)

  • Les Fêtes du Nouvel an célébrées de maintes façons

    Les Fêtes du Nouvel an célébrées de maintes façons

    Les traditions et coutumes conservées à travers le monde défient la modernité. En Grèce, on brise des assiettes, pour que la nouvelle année soit abondante, au Danemark on dit que si l’on trouve devant la porte de la vieille vaisselle, on sera chanceux et on aura beaucoup d’amis. Et ainsi de suite.


    Par leur pittoresque, les coutumes des Roumains ne cèdent en rien à celles des autres. Coup d’œil aujourd’hui sur quelques traditions conservées de nos jours : Sorcova, Pluguşorul (la Petite charrue) la Chèvre ou l’Ours. Le 31 décembre en soirée, des groupes de jeunes masqués s’en vont d’une maison à l’autre chasser les mauvais esprits et favoriser l’abondance.


    En Bucovine, dans le nord-est du pays, les masques figurent des personnages comme l’ours, la chèvre, les cerfs, les diables, les docteurs etc. etc.


    En Moldavie, c’est la tradition de l’ours. Un jeune homme portant sur sa tête et ses épaules la fourrure de cet animal, décorée de pompons rouges aux oreilles, danse au son des tambours et de la flûte champêtre, s’appuyant sur un bâton. Le masqué pousse des grognements et imite la marche de l’ours. Cette coutume est censée purifier et fertiliser le sol pour la nouvelle année et elle pourrait avoir son origine dans un culte thrace.


    La coutume de la Chèvre est pratiquée entre Noël et le Nouvel An. En fait, le nom du masque change d’une région à l’autre : on l’appelle « cerf » dans la contrée de Hunedoara, chèvre en Moldavie, « boriţă » dans le sud de la Transylvanie, « brezaie » en Valachie et en Olténie, dans le sud du pays. Le masque est réalisé à l’aide d’un morceau de bois enveloppé de papier rouge et de papier noir, froissé, pour figurer une tête de chèvre. Le masque comporte une partie mobile, maniée par le jeune homme qui le porte et qui exécute une danse rythmée par le son sec de cette partie mobile frappant la partie immobile de la tête de chèvre. Selon les chercheurs, la danse de la chèvre provient des cérémonies sacrées archaïques de la mort et de la renaissance de la divinité.



    Une coutume pittoresque est préservée à Cavnic, dans le département du Maramureş (dans l’extrême nord du pays), qui se déroule entre Noël et le début janvier, celle des « Brondoşi ». On dit que les gens des parages, ainsi masqués, aurait chassé les Tartares, en 1717. De nos jours, les « Brondoşi » sont censés chasser les mauvais esprits.


    Dans le sud du pays, c’est la coutume des « Brezoaie ». Ştefan Costel, habitant de la commune de Domneşti, du comté d’Ilfov, explique :



    « Nous, les « Brezoaie », nous entrons dans les maisons des gens de la commune le 1er janvier de chaque année, pour effrayer les mauvais esprits des maisons et les faire partir. Cette coutume s’était perdue il y a des dizaines d’années et nous avons tenté de la faire revivre. Nous sommes une équipe qui s’est proposé d’apprendre aux enfants et aux jeunes ces coutumes anciennes. Les « Brezoaie » ne sont pas en nombre fixe, tous les habitants du village peuvent y participer. Les costumes spécifiques sont faits de haillons, de cloches et de masques ornés de plumes. »



    Entre fin décembre et le 6 janvier, à Luncaviţa, dans le département de Tulcea (dans le sud-est du pays) on rencontre les groupes de « Moşoaie ». Nous les avons retrouvés, nous, au Musée du village de Bucarest. Le professeur Marcu Trandafir nous en parle.



    « C’est une tradition locale. Le masque est fait d’une plante apparentée à la courge. A la différence de la courge, cette plante n’a en dedans que des graines. Les vieilles gens l’utilisaient jadis lors des vendanges : une partie du fruit de cette plante était coupée et utilisée comme récipient pour verser le moût, un autre fruit, avec sa tige, était utilisé comme entonnoir. Pour en faire des masques, les gens accrochent la plante et à mesure que la fane grandit, elle se retourne, ce qui fait que le nez du masque est retroussé. »



    Les « Moşoaie » sont tellement laides que les mauvais esprits s’enfuient, quittant la maison où elles entrent. Pour le cas où leur laideur ne suffit pas pour chasser les esprits, les « Moşoaie » sont munies de massues en jonc, dont elles les frappent.


    Mention spéciale pour la Petite charrue et la « Sorcova », celle-ci étant réservée, le premier jour de l’an, aux tout petits. Les enfants s’en vont d’une maison à l’autre, munis d’une petite branche ornée de rubans multicolores et de fleurs en papier gaufré, dont ils touchent les membres de la famille en chantant un joli cantique versifié.


    (Trad. : Dominique)

  • Le Père Noël est là !

    Le Père Noël est là !

    Si, dans les villages, les traditions sont préservées précieusement et les groupes de jeunes s’en vont d’une maison à l’autre chanter des noëls, en ville ce sont surtout les marchés de Noël et d’autres initiatives similaires qui viennent compléter l’atmosphère des fêtes. Nous sommes donc partis en balade à travers le pays, voir ce que les villes nous offrent.


    A Bucarest, nous nous sommes rendus au Musée du paysan roumain, où nous avons été accueillis par la muséographe Oana Otilia Constantin.



    « Cette année aussi, nous avons organisé un marché de Noël à la Saint Nicolas. C’était la 24e édition, nous avons grandi, mais nous avons toujours gardé nos âmes d’enfants. C’est pourquoi nous avons invité des artisans de tout le pays pour nous apporter les objets spécifiques de leur contrée d’origine, ainsi que des produits culinaires qui ont fait les délices des petits : pain d’épices, brioches, gâteaux faits maison. Cette édition a été très réussie, elle a attiré plus d’artisans et plus de visiteurs.»



    Ville de l’ouest du pays, Arad est elle aussi prête pour les fêtes. Nous y sommes accueillis par Doru Nardea, de la compagnie de transport urbain.



    « Comme chaque année, pendant la période des fêtes d’hiver, nous avons mis en circulation un tram spécial, un tram de Noël. C’est une tradition qui a commencé en 1997. Le tram circule entre le 5 et le 29 décembre, de 8 heures du matin jusque très tard en soirée. Pendant cette période, la demande est importante, car de nombreux groupes d’enfants l’utilisent pour fêter Noël et la Saint Nicolas. Ils échangent des cadeaux dans ce tram, ils chantent, tout le monde est joyeux. Nous avons des groupes d’enfants qui viennent de tout le comté. Après 4 h de l’après-midi, le tram circule en ville et le voyage est gratuit pour tout le monde. C’est une belle initiative qui réjouit beaucoup les enfants. Les wagons de ce tram sont colorés et bien éclairés, on le voit de loin quand il arrive. »



    Un tram du Père Noël circule à Cluj-Napoca aussi, jusqu’au 30 décembre. Il est orné pour la fête, avec des guirlandes et de petites lumières. Le prix du billet est le même que pour tout autre tram. Là, Père Noël voyage en tram entre 16 h et 19 h. Pendant ce laps de temps, il écoute les souhaits des enfants, et leur distribue des sucreries. Les petits lui récitent de petits poèmes. »


    Depuis 2015, à Bistriţa-Năsăud, il y a non pas un tram, mais un train du Père Noël. Il compte 140 places et de larges espaces pour la rencontre des enfants avec Papa Noël : les petits peuvent faire des selfies avec lui, lui confier leurs souhaits, chanter des cantiques avec lui.


    La Musée du village de Bucarest est une zone rurale au cœur même de la capitale roumaine. Nous découvrons dans ses ruelles quelques traditions anciennes des différentes régions du pays. Entre le 6 décembre et le 6 janvier, à Luncaviţa, dans le comté de Tulcea (dans le sud-est du pays) se déroule une coutume appelée « Moşoaie ». Le professeur Marcu Trandafir explique:



    « Cette coutume est spécifique de la commune de Luncaviţa. Je m’occupe de l’ensemble qui la présente depuis que j’étais enfant. La Saint Nicolas ouvre la période des fêtes de fin d’année. C’est à ce moment-là que nous commençons à préparer les masques. La veille de Noël, un défilé des masques a lieu à Luncaviţa. Ici, au Musée du village, nous avons emmené 9 « moşoaie », alors qu’à Luncaviţa, nous en avons 60, qui se réunissent au centre du village et tout le monde les admire. Les personnes portant des masques appelée moşoaie sont accompagnées d’un groupe de jeunes qui chantent des cantiques. Elles entrent dans la cour de chaque maison, munies d’une massue en jonc — puisque nous nous trouvons aux portes du delta du Danube. Ces personnes masquées chassent les mauvais esprits qui pourraient se trouver dans la cour de la maison respective. Si le masque ne suffit pas pour les mettre en fuite, elles ont cette massue et elles se battent contre les mauvais esprits pour les vaincre et les chasser, afin que les bons esprits viennent s’installer. »



    A Asău, dans le comté de Bacău, dans l’Est du pays, les mauvais esprits sont également chassés en faisant beaucoup de bruit. Florin Andrieş est venu au Musée du village de Bucarest pour présenter une coutume où il joue le rôle d’un ours.



    «Nous, les ours, nous dansons au rythme du tambour. C’est une coutume propre à la Moldavie. Le groupe compte au moins 10-15 personnes, mais leur nombre peut aller jusqu’à 100-120. Ici, nous sommes une vingtaine : 12 ours, 3 tambours, le vieil homme et le maire. Ce groupe est censé chasser les mauvais esprits de la maison. »



    Voilà ! Une fois ces rituels accomplis, il ne sous reste qu’à vous souhaiter « Joyeux Noël » et « La mulţi ani! » — notre vœu traditionnel pour les fêtes.


    (Trad. : Dominique)


  • Contes de fées

    Contes de fées

    Aujourd’hui, Lunia et Azalée nous entrainent dans une aventure qui s’appelle « l’école des fées ». Nous avons parlé avec Georgeta Poiana, alias la fée Lunia, et l’histoire qu’elle nous raconte est, bien sûr, celle de cette idée. « L’école des fées est née de notre désir de créer des contes pour enfants, mais des contes sains, issus d’un amour pour la vie et du respect pour tout ce qui nous entoure. Nous avons voulu offrir une alternative aux contes traditionnels, qui comportent de nombreux personnages négatifs et même beaucoup de violence. Nous estimons qu’il n’est pas nécessaire d’inculquer la peur aux enfants à un âge très tendre. Nous apprécions les contes traditionnels roumains et nous savons qu’ils contiennent certaines vérités – même initiatiques – mais nous ne jugeons pas nécessaire de les proposer aux tout petits. Nous avons souhaité leur offrir, par contre, des contes fondés sur d’autres valeurs, plus correctes, à notre avis, pour cet âge-là, qui cultivent le respect de la nature, des autres et de tout ce qui nous entoure. »

    C’est ainsi qu’est né, par exemple « Le Rêve dans les chaussettes », qui apprend aux enfants comment évaluer leur journée et la rendre meilleure, mais aussi être empathiques avec leurs parents et leur demander, à eux aussi, quelle note ils accorderaient à leur journée. C’est de la même façon qu’est né le conte « Le Vent curieux », qui raconte l’histoire du bébé-vent, qui tâche de comprendre ce qu’écrit dans son cahier un enfant assis à son bureau, pour découvrir enfin, en même temps que le lecteur, la joie que chacun de nous peut puiser dans son monde intérieur. Les fées Lunia et Azalée se sont donc associées, elles ont cherché ensemble des idées pour éduquer tout d’abord leurs propres enfants et elles ont mis sur pied ce projet. Elles se sont demandé, par exemple, comment apprendre aux enfants à ne pas arracher les fleurs des jardins et des prés ? La fée Lunia explique : « Nous nous sommes demandé derrière quel conte cacher cette idée et alors nous avons expliqué aux enfants qu’une fée prend soin de chaque fleur, que cette fée est toute petite et entourée de beaucoup de couleurs, qu’elle protège la fleur et la réchauffe quand il fait froid et qu’elle ne serait pas heureuse si quelqu’un arrachait cette fleur. Et cette histoire a eu un grand effet – du moins sur nos enfants. Alors la fée Azalée m’a répété sans cesse que nous devions nous mettre à écrire, elle m’y a poussée. Et c’est ainsi que sont nés ces contes, l’un après l’autre. Ensuite, la fée Azalée a mis ces contes en vers, de sorte que chaque conte est suivi par une poésie qui raconte à nouveau l’histoire, d’une autre façon. »

    Au début, il n’y a eu qu’un site : şcoaladezâne.ro, pourtant les mamans qui l’ont visité ont souhaité vivement que les contes qui y figuraient soient également disponibles en format papier. Et c’est ainsi qu’ils furent réunis dans un livre, publié aux Editions Coresi. Les deux fées se proposent de sortir également un volume de prose et un autre de poésie. C’est qu’en lisant ces contes, les parents deviennent, eux aussi, les élèves d’une véritable école accréditée des fées. La fée Lunia précise : « Oui, en effet, nos contes sont pleins de sens ; les parents, les grands-parents et tout lecteur peut y trouver un sens caché. Pour donner une image, je dirais que chaque conte est comme la pointe d’un iceberg et que le lecteur peut plonger dans les profondeurs pour l’explorer aussi loin qu’il le peut. A n’importe quel âge, on y trouve quelque chose à comprendre. C’est ce qui nous séduit, car, en relisant les contes, nous avons été surprises d’y découvrir de nouveaux sens. Par exemple, dans notre livre il y a un conte qui s’appelle « L’Arbre sage », dont nous avons compris la profondeur après l’avoir lu une dizaine de fois. »Sur le site des fées figure une trentaine de contes et un grand nombre de poésies, ainsi que des pensées ayant mené à leur création. « Une lectrice nous a dit, par exemple, qu’après la lecture du conte « Le Voyage de l’akène de pissenlit » qui se trouve dans notre livre, ses enfants lui avaient posé des questions auxquelles elle a répondu et que ce dialogue avait duré plus d’une demi-heure. Les questions portaient aussi sur les sujets plus sensibles, comme par exemple celui des personnes qui nous quittent. Et la lectrice s’est sentie comme la mère-pissenlit du conte, elle a senti qu’elle préparait ses enfants pour leur chemin dans la vie. Et elle nous a écrit combien il avait été important d’apprendre à ses enfants ces choses qu’autrement elle n’aurait pas su comment exprimer. En lisant ça, nous avons, évidemment, été émerveillées ! Les chroniques sont très bonnes, les retours sont positifs, les mamans sont enchantées et elles souhaiteraient écouter plus de contes. »

    Pour terminer, la fée nous donne un avant-goût de ces contes. « Le livre déjà sorti réunit entre autres les contes « L’Arbre sage », « Le Voyage de l’akène de pissenlit », « La Petite robe enchantée ». Le conte « L’Alchimiste » est né, par exemple, du désir d’une mère de susciter la curiosité de ses enfants pour les légumes et les fruits. Le conte « Le Collier » raconte l’histoire d’un garçon qui veut faire un cadeau tout à fait spécial à sa mère et qui ne sait pas où aller le trouver.

    Ce sont des contes utiles et bénéfiques, qui favorisent une pratique du respect. »Sur leur site, les deux fées – Lunia et Azalée – nous offrent aussi un guide d’utilisation des contes – je cite : « Les contes naissent bercés par les oreilles des tout petits. On les sert arrosés de rêves et saupoudrés d’une poussière sucrée d’étoiles. » (Trad. : Dominique)

  • La bibliothérapie

    La bibliothérapie

    Bien que la lecture semble attirer de moins en moins de personnes, ces derniers temps, la bibliothérapie commence, elle, à susciter de l’intérêt. C’est une offre nouvelle sur le marché roumain du livre, même si l’idée n’est pas récente. Alexandra Rusu, éditrice et bibliothérapeute, explique. «La bibliothérapie n’est pas une idée qui nous appartient. C’est une pratique qui est apparue aux Etats-Unis, dans les années 1920, en tant que branche de la psychothérapie. La bibliothérapie consiste à recommander à une certaine personne la lecture de certains livres, en fonction de ses caractéristiques psychologiques. Et il y a des études qui prouvent que cela donne de bons résultats. Aux Etats-Unis, cette thérapie par les livres a été utilisée, il y a des années, pour aider les vétérans de la guerre du Vietnam, qui souffraient de stress post-traumatique – et il paraît qu’ils lisaient beaucoup Jane Austin. Ce furent-là les débuts de la bibliothérapie. Au fil du temps, la pratique s’est déplacée vers la psychothérapie, les éditeurs et surtout les libraires. A un moment donné, les libraires ont commencé à pratiquer la bibliothérapie, sous différentes formes, notamment par la recommandation personnalisée de certaines lectures. En fait, à mon avis, nous la pratiquons tous, et depuis longtemps, d’une façon ou d’une autre, lorsque nous recommandons un livre à quelqu’un dans un certain but, en connaissant bien la structure psychologique de la personne en question. »

    Si le concept est ancien, le projet lancé par notre interlocutrice est nouveau. « Tout a commencé par des rencontres – à présent en tête-à-tête – avec des personnes, comme dans une séance de psychothérapie, pourtant sans rapport avec celle-ci. Ce sont des séances de développement personnel. Moi, je suis psychologue, psychothérapeute et éditrice. Mes recommandations reposent sur mon expérience de lectrice professionnelle et je les fais à la suite d’un entretien libre avec une personne – homme ou femme – qui se propose d’atteindre certains objectifs, qui souhaite obtenir quelque chose de précis par ses lectures, à un certain moment de sa vie. Il faut dire que jusqu’ici, ce sont uniquement des femmes qui se sont présentées à ces rendez-vous bibliothérapeuthiques. »

    Pourquoi et quand les gens choisissent-ils la bibliothérapie ? Alexandra Rusu. « Les raisons qui les amènent sont multiples. Pour la plupart, ce sont des femmes qui vivent une crise existentielle – soit une crise de milieu de vie, soit elles sont devenues mères pour la première fois ou pour la deuxième fois ou bien il leur arrive quelque chose qui marque une rupture avec le passé ou un passage vers autre chose. Et elles cherchent des réponses dans les livres. Des fois, leurs amis leur font des recommandations, mais elles semblent avoir besoin de lire des livres sur certains thèmes, qui les intéressent et qu’elles ont déjà formulés, d’une certaine façon. Je suis prête à aider éventuellement la personne à découvrir quel est le thème qui la préoccupe, pourtant, en venant chez moi, la plupart le savent déjà clairement. J’ai également eu en consultation des personnes, moins nombreuses, qui viennent parce qu’elles souhaitent orienter leur vie professionnelle vers un certain domaine et elles ont besoin de lire des ouvrages spécialisés. Maintenant, bien sûr, ce sont elles les experts et pas moi, mais elles ont besoin de livres qui ouvrent leur horizon. »

    En général on pense que certains livres sont appropriés pour un certain âge et moins pour un autre. Alexandra Rusu ne croit pas à ces étiquettes. « J’ai récemment eu une discussion, à propos des enfants et des adolescents, de ces étiquettes qu’utilisent les maisons d’éditions et les librairies : livres pour enfants, livres jeunesse etc. Et je me souviens qu’en fait les livres de notre adolescence ont été pour la plupart des livres pour adultes, placés de nos jours très loin sur l’étagère réservée aux livres jeunesse. Je trouve que ces étiquettes sont un peu artificielles. Elles ont leur efficacité, elles sont utiles quand on est pressé ou quand on cherche quelque chose écrit d’après un certain modèle. Pourtant, quand notre quête est profonde, ces étiquettes ne servent pas à grand-chose, même pas pour choisir un livre pour un enfant. Beaucoup de livres pour enfants sont écrits pas des adultes pour les adultes, ils ont un double registre et leur humour s’adresse plutôt aux adultes qu’aux tous petits. Par contre, certains livres pour adultes contiennent beaucoup de poésie et les enfants goûtent beaucoup la poésie dadaïste, par exemple. Ces catégories sont donc interchangeables et il faut goûter à tout pour trouver quelque chose qui soit pertinent pour soi-même. »

    Nous avons lancé à Alexandra Rusu un défi : nous conseiller un livre approprié pour nous tous. Et elle nous a proposé « La vie secrète des arbres » (Das geheime Leben der Bräume) de Peter Wohlleben. Pourquoi ? « Parce que c’est un livre très intéressant pour les Roumains d’environ 35 ans, pour les personnes de mon âge. C’est un livre très intéressant sur la vie secrète des arbres, sur les forêts, dans les conditions où nous sommes bombardés de tous les côtés par toutes sortes d’informations. C’est surprenant, mais en fait les forêts sont des communautés dont nous savons très peu de choses. Les arbres communiquent entre eux. Il y a toute une histoire sur les arbres qui bénéficient de plus de soleil et sur d’autres qui vivent dans l’ombre, sur la façon dont certains perdent leurs feuilles ou leurs branches, pour que les rayons bienfaisants et nourrissants du soleil puissent arriver jusqu’aux arbres qui sont en souffrance. Je vous recommande ce livre, je pense que nous pouvons beaucoup apprendre en le lisant. Ce n’est pas seulement un livre sur la biologie, c’est un ouvrage sur la communauté, sur le vivre ensemble. »

    C’était donc une première rencontre avec la bibliothérapie et le premier livre qui nous aidera à mieux vivre est une allégorie de la survie humaine. (Trad. : Dominique)

  • Adopte un tilleul!

    Adopte un tilleul!

    Les tilleuls de Iași sont un repère historique de la ville. Situé sur la colline Copou, le parc Copou, le plus ancien et un des plus grands de Iași, abrite un monument historique – l’Obélisque aux lions – et un arbre monument. Il s’agit du « Tilleul de Mihai Eminescu ». Associé historiquement à notre poète national, cet arbre vieux de 540 ans est un symbole de la ville et compte parmi les arbres monuments les plus précieux de Roumanie. Au fil du temps, le Tilleul de Mihai Eminescu a reçu des soins importants ; pourtant, c’est plutôt un phénomène biologique rare qui lui a permis de survivre : des racines supplémentaires (adventives) ont poussé de l’intérieur de son tronc putréfié et ont pénétré dans la terre.

    A part le « Tilleul de Mihai Eminescu », la ville de Iași compte des centaines d’autres tilleuls qui poussent dans le parc Copou et tout au long de la principale avenue qui traverse la ville et qui date de la seconde moitié du 19e siècle. Le tilleul étant donc un symbole de la ville, il n’est pas étonnant que des initiatives civiques aient été lancées visant à accroître le nombre de ces arbres à laşi. Ainsi, l’Athénée national de la ville et l’Association Mihai Eminescu de Vienne ont démarré la campagne « Adoptez un tilleul !» Comment est née l’idée de cette campagne et comment les tilleuls vont-ils être plantés ?

    Andrei Apreotesei, manager de l’Athénée national de Iaşi : « En fait, c’est un cumul d’idées, car, dans une ville qui se développe, il y a inévitablement de la pollution, contre laquelle on doit lutter. Et nous avons pensé à le faire en plantant une centaine de tilleuls. Pourquoi des tilleuls ? Parce que l’on ne peut pas parler de la ville de Iaşi sans parler de ses tilleuls, c’est une des symboles de la ville. Et pourquoi une centaine ? Parce que, cette année, l’Athénée national de Iaşi fête un siècle d’existence. Nous avons donc souhaité marquer cet anniversaire aussi par cette campagne. Après la tournée nationale « Union par la culture », dans le cadre de laquelle nous avons été présents sur les scènes d’une centaine de localités de tous les comtés du pays, nous voilà engagés, aux côtés de l’Association Mihai Eminescu de Vienne, dans ce magnifique projet au bénéfice de la ville de Iaşi. »

    Laura Hant, présidente de l’Association Mihai Eminescu de Vienne, précise : « Nous avons pensé venir ensemble en aide à la ville de Iaşi, par l’intermédiaire de ce projet et planter une centaine de tilleuls dans la « ville des tilleuls ». Nous avons souhaité impliquer aussi la communauté et nous avons lancé une campagne de collecte de fonds, que l’Association Mihai Eminescu a assumée et initiée. A notre grande surprise, la communauté s’est investie activement, on a réussi à collecter une somme importante d’argent qui nous permettra d’acheter une partie des tilleuls, les autres seront achetés par la municipalité. »

    En effet, Iaşi est une des villes les plus polluées du pays. Au centre-ville, la circulation est intense et l’air est fortement chargé de substances nocives et de poussières fines. Un tilleul adulte peut absorber 28 à 67 kilos de dioxyde de carbone et produire 20 à 50 kilos d’oxygène par an. Il peut retenir, en outre, d’importantes quantités de poussière qui, lavée par les pluies, arrive dans le sol. Les tilleuls excrètent également des phytocides, substances organiques complexes qui détruisent le bacille de Koch, responsable de la tuberculeuse, les agents infectieux qui causent la dysenterie ou certaines maladies pulmonaires.

    Quelques jours avant le moment où les tilleuls allaient être plantés, Andrei Apreotesei, manager de l’Athénée national de Iaşi, nous racontait avec enthousiasme qu’il s’agissait d’un projet plus complexe.« Adopter un tilleul ne signifie pas uniquement en planter un, mais aussi prendre soin de ces arbres magnifiques jusqu’à ce qu’ils grandissent et commencent à prendre, eux, soin de nous. C’est pourquoi nous avons lancé un appel à la population, à la société civile, afin de trouver des espaces dans différents endroits de la ville, pour les planter. Nous avons contacté la municipalité et obtenu l’accord nécessaire. Les tilleuls seront plantés dans le quartier de Tătăraşi, où se trouve l’Athénée national, et sur un axe Tătăraşi-Copou. De nombreuses institutions nous ont offert leur aide pour embellir la ville. »

    C’est que Iaşi souhaite être une ville des gens et non une ville des bâtiments. Laura Hant, présidente de l’Association Mihai Eminescu de Vienne, lance un appel à tous : « Nous tous, la communauté, où que nous soyons, en Roumanie ou à l’étranger, nous devons aimer la Roumanie et nous impliquer activement, chaque jour, car nous pouvons, nous aussi, être les catalyseurs du changement que nous souhaitons ! »Voilà donc une ville qui s’apprête à devenir plus belle, plus saine et plus… poétique. (Trad. : Dominique)

  • HeArt Couture – la couture du cœur

    HeArt Couture – la couture du cœur

    Ils ont défilé joyeusement sous les
    applaudissements du public, ils ont souri et ils ont savouré le succès de leurs
    tenues. Comme on pouvait s’y attendre, ils ont positivé leurs émotions et ont
    offert un spectacle à la mesure de la joie qu’ils y ont investie. Une vingtaine
    de jeunes touchés par le syndrome de Down et une vingtaine de jeunes
    accompagnants bénévoles sont montés sur scène pour un défilé de mode inédit où,
    pour la première fois, les créateurs et les mannequins étaient des personnes
    trisomiques. La collection présentée s’appelle heART COUTURE (Couture du cœur,
    si vous voulez) et elle a été minutieusement préparée lors des ateliers créatifs
    organisés à Bușteni, en juillet dernier, et à Bucarest.

    « La musique
    rencontre la couleur » est le slogan d’un atelier dans le cadre duquel les
    enfants écoutent de la musique classique et apprennent à traduire les sons
    qu’ils entendent par des peintures abstraites. Leurs créations ont été
    sélectionnées et réinterprétées par l’équipe ROXY&KIDS ART sous la forme
    d’ouvrages intégrés à la collection de vêtements heART COUTURE (constituée de jupes,
    tabliers traditionnels, T-shirts, écharpes). Le travail dans le cadre du projet
    heART COUTURE a reposé sur un livre bilingue « Do you see what I see ? » /
    « Est-ce que tu vois ce que je vois ? », qui est en fait un
    manuel conçu par l’artiste Roxana Ene. Il présente le mieux la méthode ROXY&KIDS
    ART. Roxana Păsculescu, responsable de communication de l’association nous l’explique : « La
    méthode que nous appliquons dans le cadre de notre atelier « Roxy and Kids
    Art » est de pratiquer la synesthésie : les enfants sont invités à
    peindre sous l’influence de la musique. D’où le rôle de la musique dans notre
    atelier de « heart couture » – couture du cœur. Les enfants ont fait
    des échanges, ils se sont amusés, étant constamment accompagnés par des enfants
    typiques et par des bénévoles provenant du lycée d’art Nicolae Tonitza de
    Bucarest. »




    Comment est né ce projet ? Sa coordinatrice Cristina
    Moraru, raconte : « L’Association
    Down Plus Bucarest dédie son activité aux enfants trisomiques. Nous leur
    proposons des activités tous les jours de la semaine. Nous sommes très
    attentifs à leurs sentiments et nous les entraînons dans des activités
    susceptibles d’accroître leur confiance en eux-mêmes. Ils ont été très heureux
    de présenter leurs dessins et ensuite les vêtements réalisés à partir de ces
    créations. Nous avons rencontré les membres de l’association ROXY&KIDS ART
    et leur activité, la façon dont elles travaillent avec les enfants, la manière
    dont elles interprètent et utilisent leurs dessins, nous a enthousiasmés. Nous
    avons décidé de mettre en œuvre ce projet ensemble, de dessiner, de nous
    réjouir, en écoutant de la musique, en dansant. Nous commençons avec des
    croyons, des feutres, des fruits, du chocolat et… de la dentifrice. Les enfants
    ont dessiné avec tous les moyens mis à leur disposition et les dessins collectifs
    ont été réinterprétés par Roxana Ene. Sur scène, les enfants ont défilé avec
    leurs créations non-interprétées, ensuite avec celles réinterprétées. »




    Roxana Ene est alors l’artiste qui a réinterprété les
    créations des enfants. Comment a-t-elle vécu cet événement ? « C’était tout à fait inattendu,
    super ! Les enfants y ont investi tous leurs sentiments et toute leur
    énergie ; ils ont été heureux et ils ont défilé, tout simplement, avec
    leurs âmes. Ils ont eu la liberté de travailler avec des matériaux qu’ils
    n’avaient jamais utilisés avant. C’était inédit et surprenant pour eux de constater
    qu’ils pouvaient peindre avec de la dentifrice noire, avec de l’écorce, avec
    des feuilles d’arbres… Et les idées proposées les ont également surpris. Ils
    ont été curieux de voir ce qu’allaient devenir leurs créations. Ils savaient
    déjà de quoi il s’agissait, nous leur avons expliqué pour qu’ils ne soient pas
    choqués, ils savaient donc que leurs peintures allaient être réinterprétées.
    Nous ne les avons pas transformées, nous les avons réinterprétées : nous
    avons travaillé sur les copies des leurs dessins, les originaux sont restés
    intacts. C’est un début, le début d’une nouvelle ère, car jusqu’ici, les toiles
    restaient exposées sur un mur. Maintenant, c’est fini ! Les toiles se sont
    envolées dans le monde, elles seront portées par des enfants, par les frères et
    les sœurs de ces enfants, par leurs mamans. Lors du défilé, même le cameraman a
    porté un de ces tabliers réalisés à partir de leurs peintures ! C’est
    super ce qui s’est passé ici ! »




    Pour Larisa Bucur, de l’Association Down Plus Bucarest,
    ce fut un événement inédit, fruit d’un travail intense : « Cette expérience a été extraordinaire,
    car nous avons constaté, pour la énième fois, que les personnes touchées par le
    syndrome de Down ont des dons et un riche savoir-faire, elles dépassent
    quotidiennement leurs limites et nous donnent des leçons de vie. Ce n’était pas
    une présentation Haute Couture, c’était une réinterprétation Heart Couture, car
    on sait bien que les personnes trisomiques sont très affectueuses. C’est
    d’ailleurs pourquoi cette réinterprétation était une sorte de mélange d’art
    contemporain et de tendresse. Nous essayons toujours de prévoir dans notre
    programme des activités aussi diversifiées que possible et quand nous avons proposé
    à ces enfants des classes de peinture, ils ont été très ouverts. Et lorsqu’ils
    ont entendu qu’ils allaient aussi monter sur scène, leur enthousiasme a été
    sans bornes. »



    Et ce n’est que le début, car deux autres défilés de mode
    organisés avec les enfants sont encore prévus, ainsi que deux autres
    expositions réunissant leurs peintures.


    (Trad. : Dominique)

  • UTOPICA, une exposition pas comme les autres

    UTOPICA, une exposition pas comme les autres

    Le point de départ fut l’idée d’un atelier destiné aux enfants provenant d’une zone défavorisée de la capitale : le quartier de Giuleşti-Sârbi. Les enfants ont joué, ils ont découvert des musées, ils se sont rapprochés de l’art et des artistes et ils ont créé « Le monde parfait ». Le monde parfait était leur réponse à la question lancée aux participants à cet atelier : « A quoi ressemblerait le monde parfait ? » C’est à partir de leurs idées et créations que l’exposition interactive UTOPICA a été réalisée. Lancé par l’association Da’DeCe (Mais pourquoi ?) et cofinancé par l’Administration nationale du fonds culturel, le projet « UTOPICA par l’art » a débuté par un atelier urbain, organisé du 8 au 12 juillet 2019 au Manoir Golescu-Grant et auquel ont participé 15 enfants bénéficiaires du Programme intégré d’éducation à la diversité. Iulia Iordan, éducatrice au sein de l’Association Da’DeCe raconte le cheminement des artéfacts réalisés par les enfants dans le cadre de cet atelier, jusqu’à l’exposition « Utopica » :

    « Utopica » est le premier de toute une série de projets expérimentaux censés évaluer l’intérêt des enfants pour un changement de la société où ils vivent. Notre association met en œuvre, d’habitude dans des musées, des projets culturels pour les enfants. Le projet « Utopica » est pourtant une première. L’été dernier, nous avons organisé un atelier urbain au manoir Golescu-Grant, qui a accueilli notre exposition. Les enfants qui y ont participé provenaient d’un quartier pauvre de la capitale, celui de Giuleşti-Sârbi. Educateurs et artistes ont travaillé côte à côte avec eux, tâchant d’évaluer leur intérêt pour la culture, pour les espaces destinés à l’art et pour un monde idéal. Cette exposition en est le résultat. « Utopica » n’est pas une exposition classique, c’est une exposition interactive, une expérience. Le visiteur suit un certain trajet, mais avant d’y avoir accès, il doit déposer « une plainte », à laquelle il devra aussi trouver une solution à la fin de sa visite. Cette exposition est un espace de réflexion : chacun de nous doit penser au monde où il vit, avec ses problèmes, qu’il est invité à transformer par l’intermédiaire de l’art, dans l’espace que nous avons conçu. »

    Quel genre de « plaintes » les enfants ont-ils déposée, quels mécontentements ont-ils exprimé ? Iulia Iordan dit et on cite : « Les plaintes des enfants sont liées pour la plupart à l’école, mais beaucoup d’entre elles concernent également la pollution, les déchets. Ils s’avèrent très attentifs, en fait plus attentifs que l’on ne l’aurait cru, au monde où ils vivent et l’état de fait qu’ils signalent n’est pas très encourageant. Il est intéressant de voir les solutions qu’ils proposent, pas à pas ; d’une certaine façon, ils sont réalistes, très bien ancrés dans la réalité. Il y a aussi des « plaintes » liées aux relations interhumaines. Certains enfants ont déploré le mensonge, le manque d’affection, l’absence de quelqu’un avec qui ils puissent échanger. Leurs mécontentements sont très divers. Et, ce qui est très important, à mon avis, l’exposition n’est pas destinée uniquement aux enfants, mais aussi aux adultes. On m’a demandé en quoi les plaintes déposées par les adultes sont différentes de celles déposées par les enfants. Et il paraît qu’en fait, nos enfants font preuve d’une grande maturité, ils se posent des questions importantes, similaires à celles des adultes. »

    Iulia Iordan nous a ensuite expliqué quelles étaient les différences entre les enfants provenant des milieux défavorisés et les autres enfants. « Il y a des différences liées, avant tout, à leur expérience de vie. Ces enfants ont moins accès à la culture, mais ils sont, en échange, plus habitués aux activités en plein air, dans la rue, ils sont attirés par le sport. Pourtant, d’où qu’ils proviennent, nous devons éduquer ces enfants, les déterminer à s’intéresser à l’art, par les méthodes que nous proposons. Nous les avons emmenés visiter des musées, ils n’avaient jamais vu un atelier d’artiste. Dans le cadre de notre projet, ils ont eu la possibilité de rencontrer le peintre Ştefan Câlţia et de visiter son atelier. Ce fut un enchantement et une révélation pour eux. Ils se sont ouverts, ils lui ont posé de nombreuses questions; l’expérience a été extraordinaire non seulement pour eux, mais aussi pour nous, qui y avons assisté. »

    Et pour accroître l’impact du projet, nous souhaitons que cette exposition devienne itinérante. Iulia Iordan: « C’est une exposition de petites dimensions. Elle a été ainsi créée à dessein, parce que nous souhaitons la présenter dans toutes les écoles qui ont une salle de classe disponible. Nous espérons pouvoir l’ouvrir dans de nombreux endroits, car toutes les informations que nous avons recueillies de nos visiteurs méritent d’être partagées. Il y a notamment cette « plainte », présente dans la partie introductive et à la fin, ensuite nous parlons de la maison idéale. Là, nous avons plusieurs beaux ouvrages réalisés par les enfants durant notre atelier. C’est également un espace où chaque visiteur apporte un élément qui lui permet de se sentir chez soi et l’ajoute à ceux déjà mis en place par les visiteurs qui l’ont précédé. Le volet « Ecole » propose deux personnages, l’Utopique et l’Ennuyée, qui portent un dialogue sur l’histoire et les problèmes de l’école. »

    L’exposition UTOPICA s’adresse aux jeunes et très jeunes, âgés de plus de 7 ans, qui souhaitent changer quelques chose dans le monde. (Trad. : Dominique)

  • L’art de rue et la Nuit blanche des galeries

    L’art de rue et la Nuit blanche des galeries

    Galeries dart, musées, instituts culturels, espaces informels, hubs créatifs et ateliers dartistes ont offert au public un programme nocturne dart contemporain à Bucarest et dans 13 autres villes du pays : Alba Iulia, Arad, Braşov, Cluj-Napoca, Craiova, Iaşi, Miercurea Ciuc, Petrila, Reşiţa, Sfântu Gheorghe, Sibiu, Târgu Mureş et Timişoara. La Nuit blanche des galeries fait découvrir au public la culture contemporaine dans toute sa diversité, des arts visuels aux arts performatifs, en passant par la musique et le film. Cet événement utilise toutes les formes de présentation, depuis lexposition proposée par les musées aux œuvres accessibles directement dans les ateliers des artistes.



    Cette 13e édition a été spéciale, car, pour la première fois, la Nuit blanche des galeries laissait derrière elle une œuvre permanente, dans lespace culturel de la Résidence BRD Scène 9, à Bucarest. Il sagit du projet « Outside Histories » (Histoires extérieures), dans le cadre duquel les artistes Alexandru Ciubotariu, alias Pisica Pătrată (le Chat carré), Robert Obert, Maria Bălan et John Dot S ont fait de la peinture en live recouvrant les décorations qui ornaient les murs de la cour de cette Résidence. Des scènes bizarres inspirées de la culture aztèque, auxquelles se mêlent des éléments dinspiration byzantine, entourent la cour de ce bâtiment déclaré monument historique. Cadeau fait par le Roi Ferdinand à la Reine Marie, ce bâtiment datant de 1890 a appartenu au Roi Michel I. Cette résidence porte les traces de toutes les destinations quelle a eues depuis un siècle : propriété royale, siège dune institution publique, restaurant mexicain et actuellement, centre culturel contemporain.


    Alexandru Ciubotariu, alias Le Chat Carré, est un des illustrateurs et artistes de rue les plus appréciés de Roumanie ; il est également le fondateur du Musée de la bande dessinée. Surpris en train de peintre en live, durant la soirée du vernissage, il nous explique ce quil travaillait :« Je suis en train de réaliser un objet tridimensionnel, ce qui est nouveau dans mon champ dactivité. Mon imaginaire reste à peu près le même, mais jessaie de le transposer en trois dimension. Je suis encore au début dans ce genre de création. »


    Et puisque les artistes de rue ont été les vedettes de cette édition de la Nuit blanches des galeries, Le Chat Carré nous parle dun de ses projets : « Cest un projet visant à cartographier lart de rue – qui sest développé initialement à Bucarest, mais qui a gagné à présent tout le pays. Il sagit, en fait, dune carte interactive à laquelle tout le monde peut avoir accès et où se retrouve tout lart de rue de Bucarest et de nombreuses autres villes. Lorsquun artiste crée un ouvrage dans lespace public, cette carte se met à jour presque instantanément. »



    Comment lart de rue est-il accueilli en Roumanie ? « A mon avis, des ouvrages importants ont été réalisées ces derniers temps dans lespace public et les gens semblent se rendre compte quil y a une différence entre les graffitis et lart de rue. Alors, celui-ci est mieux accepté dans lespace public. »


    Lexposition personnelle du Chat Carré intégrée à ce projet a trouvé sa place aux Galeries Imbold spécialisées dans la reconstitution de lépoque communiste. Comment lartiste explique-t-il cette association ?« Jai beaucoup collaboré avec ces galeries et ce sont elles qui mont proposé de faire cette exposition. Jai accepté, à la condition de pouvoir faire ce que je fais à chaque nouvelle exposition, à savoir créer une nouvelle œuvre dans chaque espace où jinterviens. Cest ainsi quest né lobjet tridimensionnel auquel vous mavez vu travailler. Jai encore quelques murs à peindre en vitesse, lorsque la météo le permettra, et 4 ouvrages de bande dessinée, qui paraîtront simultanément. A la maison dédition de la Radio, je coordonne depuis longtemps la collection «Radio Prichindel » destinée aux tout petits et que jaime bien. Peut-être à la prochaine foire du livre Gaudeamus, prévue en novembre, pourrons-nous proposer quatre nouveaux titres. »


    La bande dessinée demeure la première passion de lartiste et elle lui permet de mettre sur papier les personnages qui peuplent son imagination.


    Bien quarrivée cette année à un nombre déditions considéré comme néfaste, la Nuit blanche des galeries a été, une fois de plus, un succès de lart contemporain. (Trad. : Dominique)

  • Un livre, deux livres…

    Un livre, deux livres…

    Quatre jours durant, Bucarest a accueilli, sous la coupole de la Bibliothèque nationale de la Roumanie, la Foire internationale du livre pour enfants Bookerini. Un événement qui a joint l’utile à l’agréable – nous assure Valentina Bâcu, coordinatrice de l’événement : «Cette foire est née du besoin que les petits lecteurs aient un endroit qui leur soit destiné – à eux, tout comme aux auteurs et aux illustrateurs de livres de jeunesse, de plus en plus nombreux ces dernières années. On écrit et on traduit beaucoup, il y a actuellement une riche littérature pour enfants. Bookerini est la matérialisation d’une pensée que nous avons eue en visitant d’autres foires et salons du livre du monde et cette idée nous a enthousiasmés, nous tous, qui aimons le livre pour enfants. Nous avons commencé par tester le marché roumain, pour savoir si un tel événement répondait à un besoin. Accueillie il y a deux ans par la librairie Cărtureşti Verona, la première édition de la foire a confirmé nos attentes : un projet conçu pour les enfants était le bienvenu. Et nous voilà arrivés à sa deuxième édition, avec deux fois plus d’invités, aussi bien de Roumanie que de l’étranger, et beaucoup plus de participants. »

    Les organisateurs de la foire Bookerini nourrissent de grands espoirs pour l’avenir. Valentina Bâcu, coordinatrice de l’événement :« Cette foire est une bonne chose et, par rapport à la première édition, beaucoup plus de maisons d’édition ont repris cette initiative d’encourager la littérature roumaine de jeunesse. Les livres pour enfants de la littérature universelle sont traduits depuis des années et on commence actuellement à encourager aussi la création littéraire autochtone. Nous sommes contents de constater, par ailleurs, que non seulement les grandes maisons d’édition, mais aussi les petites y pensent déjà. Bientôt nous aurons une littérature créée par des auteurs et des illustrateurs qui pourront vivre de ce qu’ils gagnent en écrivant ou en dessinant, et c’est réjouissant, car jusqu’ici, la quasi-totalité de ceux qui écrivent des livres pour enfants sont obligés d’avoir aussi une autre source de revenus, la littérature étant le plus souvent pour eux un hobby, un hobby coûteux, il faut le dire. Nous ne disposons pas encore d’agents et d’éditeurs pour ce genre de littérature. Bookerini ne s’adresse pas uniquement aux enfants, mais aussi aux gens passionnés de littérature pour la jeunesse, car nous estimons que cette littérature n’est pas faite pour être lue uniquement par les petits. Notre foire s’adresse également aux parents et aux professeurs, les encourageant à donner aux jeunes le goût de la lecture, la passion des livres, des beaux livres, que nous apprécions, nous aussi. »

    L’édition de cette année a été consacrée aux « voyages ». Un voyage avec tout moyen de transport créé par notre imagination et qui nous permet d’accéder au monde des contes. Les livres n’ont pas été les seuls à attendre les visiteurs, des ateliers et d’autres activités ont été organisés durant les quatre jours de l’événement. Tenter les petits lecteurs et susciter leur intérêt pour les livres a été un des buts de cet événement, dont le slogan était : «Bookerini – de bons livres à dévorer» Valentina Bâcu: «A cette deuxième édition, nous avons invité des maisons d’édition qui proposent de beaux livres, des livres-objets. A la prochaine édition, nous nous proposons d’avoir parmi nous plus d’invités de l’étranger et de susciter un enthousiasme dont nous avons besoin en Roumanie. Et nous souhaitons également que les écrivains et les illustrateurs puissent signer des contrats par l’intermédiaire de Bookerini – pourquoi pas ? Pour la troisième édition nous nous proposons d’élargir notre équipe, d’ouvrir la foire dans un espace généreux, pour attirer les enfants dans le monde des livres. Nous aimerions leur offrir une expérience inédite, fascinante, afin qu’ils puissent quitter la foire dans un état d’enchantement, avec des livres dédicacés, en souhaitant passer leur temps à lire et à offrir des livres. A Bookerini, l’entrée est libre ; la participation aux ateliers et à toutes les activités et également gratuite, sauf que le nombre de places est limité, alors il est souhaitable de faire des réservations à l’avance. »

    Cette année, les petits visiteurs ont pu rencontrer leur auteur préféré ou dessiner, coude à coude, avec des dessinateurs admirés, sous la coupole de la Bibliothèque nationale de Bucarest. (Trad. : Dominique)

  • Le Musée Nikolaus Lenau du département de Timiş

    Le Musée Nikolaus Lenau du département de Timiş

    Il arrive souvent qu’un lieu acquière une notoriété
    après qu’une personnalité qui y a habité se fait connaître. Et tout aussi
    souvent, un musée ou une maison musée y sont créés, portant le nom de cette
    personnalité. Ce fut le cas de Nikolaus Lenau et du Musée des poupées de
    Lenauheim, dont nous vous racontons aujourd’hui l’histoire. Située dans le département
    de Timiş, à proximité de la frontière serbe, dans l’ouest de la Roumanie, la
    commune de Lenauheim porte le nom du poète romantique autrichien Nikolaus
    Lenau, né dans les parages en 1802. Et puisque le père du poète avait été
    caissier, le bâtiment de l’Office des impôts de l’époque, transformé plus tard en
    siège de la mairie, abrite depuis 1930 le Musée souabe « Nikolaus Lenau ».
    Elfriede Klein, conservatrice du musée, explique et on cite :


    « Le
    bâtiment, dont la construction est due à l’impératrice Marie-Thérèse, a été
    érigé en 1774, pour accueillir l’Office des impôts. L’église catholique fut
    construite en même temps. Ce bâtiment garde la mémoire du poète Nikolaus Lenau.
    Plusieurs pièces accueillent une exposition ethnographique de poupées vêtues du
    costume traditionnel souabe de la région du Banat. Chaque village a son costume
    spécifique, nous avons donc quelque 56 couples de poupées. Un seul village est
    représenté par des poupées portant des habits de femmes mariées, auxquelles il
    était permis de participer à la prière du village, tenue une fois par an et qui
    s’appelle Kirvai en allemand.
    »


    Quand le poète avait 4 mois à peine, sa famille
    s’établit en Hongrie. Après avoir passé sa jeunesse à Pest et Tokaj, il part à
    Vienne, où, entre 1822 et 1832, il étudie la philosophie, l’agronomie et la
    médecine. Bénéficiant d’un bon héritage de famille, Nikolaus Lenau allait
    passer sa vie à écrire. Entre 1832 et 1844, il mène une vie paisible, partagée
    entre Vienne et Schwaben. Ses œuvres ont été publiées en 1855, après sa mort. Pour
    son village natal, il est quelqu’un de très important. Elfriede Klein:


    « Tout le
    monde est fier, parce que le village porte le nom de Nikolaus Lenau, mais il
    faut dire qu’avant, cette localité s’appelait Csatád. Les Roumains disaient
    « Ceaţa », les Allemand « Szadat ». Depuis 1926, le village
    s’appelle Lenauheim, ce qui veut dire le foyer de Lenau. Un grand poète autrichien,
    né au Banat roumain, qui est parti pour un certain temps en Amérique, mais
    là-bas il n’a pas écrit de poèmes. Il a passé la plupart de sa vie en Autriche
    et il a aussi vécu un certain temps en Allemagne. »


    La maison-musée se dresse dans la rue principale.
    L’architecture du bâtiment est typiquement souabe, avec une cour intérieure. Elfriede
    Klein nous parle du musée qu’il abrite à présent:


    « Celui, qui
    souhaite le visiter, a plein de choses à voir. Chaque village a réalisé le
    costume traditionnel qui lui est spécifique. Ce sont des couturières qui les
    ont travaillés et il faut dire que c’est un travail minutieux, car les costumes
    sont très complexes et difficiles à réaliser. Dans chaque village une
    couturière s’en est occupée. Les poupées, qu’elles ont habillées, sont achetées
    à la fabrique de poupées « Arădeanca » de la ville d’Arad. Cinq salles
    du musée accueillent les poupées. S’y ajoutent trois salles que nous avons
    aménagées avec des pièces de mobilier datant de 1821 : un lit et une armoire
    peints à la main, une cuisine, une salle de séjour, une chambre à coucher et le
    joyau de toute maison : la resserre, appelée « şpaiţă » – du mot
    allemand Speisekammer. »


    L’exposition Lenau occupe sept salles à l’étage de l’aile
    gauche du bâtiment. Y sont présentés des photos, des manuscrits et des lettres
    de Nikolaus Lenau, illustrant des aspects de la vie et de la création du poète
    et reflétant la manière dont son œuvre était perçue à l’époque. Dans cette
    exposition on trouve aussi des outils et des installations agricoles. La table
    déjà mise, la cuisine semble attendre les convives. Un fer à repasser du début
    du 19e siècle semble prêt à défriper une nappe. Le carrelage en
    pierre rougeâtre garde la fraîcheur de la resserre et les barattes en bois
    semblent vous inviter à imaginer le goût de la crème et des laitages de ces
    temps-là.

    Le musée garde également des livres et des manuscrits ayant appartenu
    au poète Nikolaus Lenau, ainsi que des photocopies, des estampes, des toiles
    illustrant la vie du poète et de sa famille, des premières éditions de certains
    ouvrages, ainsi que des versions roumaines des poèmes de Lenau. En 1905, une
    statue du poète a été élevée au centre-ville de la commune de Lenauheim.


    (Trad. : Dominique)