Category: Société

  • Le système roumain d’assurance maladie

    Le système roumain d’assurance maladie

    En Roumanie, les soins de santé fonctionnent généralement en régime public. Bien que de nombreux cabinets médicaux, cliniques et même hôpitaux privés aient été ouverts ces dernières années, ils sont financés, eux aussi, pour la plupart, par le système d’assurance maladie public. Cela revient à dire que les employeurs et les salariés y versent un certain quota de leurs revenus; les fonds ainsi collectés sont gérés par la Caisse nationale d’assurance maladie.



    Ce quota — qui est de 5,2% pour l’employeur et de 5,5% pour le salarié — assure le paiement intégral d’un paquet de services médicaux de base et des urgences. Les Roumains peuvent se procurer parallèlement d’autres services médicaux, en choisissant de cotiser à un système privé d’assurance maladie, sans qu’ils puissent pour autant renoncer au public. Combien de Roumains souscrivent à une assurance privée ? Une étude GFK Roumanie montre que 93% des Roumains ont souscrit uniquement à l’assurance maladie publique.



    Ana Maria Drăgănică, gérant de compte de la compagnie, explique: « La grande majorité de la population bénéficient d’une assurance maladie dans le système public de santé. 2% seulement des personnes interrogées déclarent être abonnées à une clinique privée. Dans ce cas, soit elles paient intégralement l’abonnement, soit l’employeur y contribue. Et ce sont toujours 2% des Roumains à avoir souscrit à une assurance de santé privée. Donc, 4% seulement de la population ont recours au système médical privé. »



    Nous avons demandé à une assurée du système public pourquoi elle ne souscrivait qu’à une telle assurance maladie: «Parce que c’est obligatoire. Si j’avais pu, j’aurais choisi le système privé, mais il aurait fallu que ce l’un ou l’autre, pas les deux, comme à présent : à part la cotisation au système public, on doit payer la cotisation au système privé. Moi, j’aurais choisi le système privé car l’accès aux services médicaux est plus facile. On peut appeler, fixer un rendez-vous pour une consultation. A part ça, je trouve que dans le système privé les cabinets médicaux sont plus modernes, dotés de nouvelles technologies, ce qui n’est pas le cas dans le système public. »



    Les analystes du système de santé de Roumanie expliquent, eux, dans d’autres termes la réticence des patients à souscrire à une assurance maladie privée, qu’ils lient plutôt à des facteurs économiques et à une certaine vision du rôle de l’Etat. Nous passons le micro au médecin Gabriel Diaconu : « Le système de santé de Roumanie détient une sorte de monopole, le marché des assurances maladie étant dominé par l’Etat par le biais des lois. Théoriquement, rien n’entrave le marché des assurances privées, pourtant, la présence des assureurs privés est plutôt réduite, car limitée par l’offre de l’Etat ; celui-ci estime — au niveau du discours public — que la santé est une question qui lui incombe et qu’elle ne doit pas être une source de profit. Autrement dit, l’Etat social investit et redistribue une richesse qu’il accumule par les contributions de la population. »



    Une chose est sûre : la plupart des Roumains ne veulent pas ou ne peuvent pas payer deux assurances médicales — l’une publique, l’autre privée. S’y ajoute leur perception des différences de coûts entre les deux systèmes. Lorsqu’on lui a demandé si une assurance privée lui coûterait davantage qu’une assurance publique, sans avoir fait des calculs, notre interlocutrice de tout à l’heure pense que : « Le système privé semble plus cher que le public. »



    Pour ce qui est des coûts, les choses se compliquent, en raison des paiements informels — l’argent ou les cadeaux que le patient offre au personnel de la santé pour s’assurer de la qualité des soins. Ce à quoi s’ajoute la mentalité du patient roumain. Gabriel Diaconu : « Consulter un médecin est une question de nécessité et non pas une question de santé. Nécessité veut dire des douleurs insupportables que l’on n’arrive pas à atténuer par le traitement recommandé par des amis ou des pharmaciens. Il s’agit là d’une éducation précaire des gens, qui ne prévoient jamais un budget pour leur santé et qui ne pensent jamais à leur santé de manière proactive. Pourtant, si l’on additionnait les paiements informels offerts au chirurgien pour une intervention en cas d’appendicite, par exemple, et tous les autres coûts liés au fait de s’être absenté du travail, la somme obtenue dépasserait celle que l’on aurait payée à un assureur privé. Un autre facteur s’y ajoute : la proximité. Dans les régions, les gens disposaient d’un réseau de proximité qui incluait le médecin traitant, celui de l’hôpital départemental qu’ils connaissaient. Mais la réalité a changé ces derniers temps aussi à cause de la migration des médecins.”



    L’étude de l’agence GFK ne prend pas en compte un autre aspect. Beaucoup de Roumains ont recours aux cabinets médicaux privés où ils paient les consultations directement à la caisse et non pas par le biais d’une assurance ou d’un abonnement. Gabriel Diaconu: « Les personnes qui se rendent à une clinique privée le font comme s’il s’agissait d’un hypermarché de services médicaux. Ils viennent demander des analyses de laboratoires sans demander l’avis d’un médecin. Or, dans le système public, la procédure dit que le médecin traitant envoie le patient consulter un spécialiste. »



    Parmi les personnes interrogées dans le cadre de l’étude mentionnée, on peut déceler une autre catégorie. Ana-Maria Drăgănică, gérant de compte de la compagnie, nous en parle : « Plus de 15% des personnes interrogées âgées de 18 à 34 ans ne bénéficient d’aucun type d’assurance maladie. Leur situation est extrêmement délicate et constitue un signal d’alarme pour les deux systèmes d’assurance — public et privé. »



    Ces personnes font-elles partie de ceux qui vont payer directement la facture aux caisses des cabinets médicaux privés ? Le médecin Gabriel Diaconu n’est pas sûr : « Je ne le pense pas, car ces zones à déficit d’assurances publiques sont très pauvres, ont un taux de chômage élevé et un taux de mortalité prématuré élevé. Pour ces gens-là, ni le système des assurances publiques, ni celui des assurances privées n’ont trouvé une solution. »



    Prévue à plusieurs reprises et de différentes façons, en fonction de la vision sociale des gouvernements au pouvoir à Bucarest ces dernières années, la réforme de l’assurance maladie attend encore sa forme définitive.

  • Projets pour l’insertion des communautés rom de Roumanie

    Projets pour l’insertion des communautés rom de Roumanie

    Les principales difficultés auxquelles ils sont confrontés concernent leurs maigres revenus, l’absence de toute formation professionnelle et le bas niveau d’instruction, le chômage, l’accès limité aux services publics et la discrimination. La plupart des Roms habitent des logements dépourvus des éléments élémentaires de confort: cuisine, toilettes, salle de bains ou électricité. La communauté ethnique rom enregistre aussi le taux le plus élevé d’illettrés. Enfin, malgré les initiatives mises en place à l’échelle nationale et internationale visant à améliorer leurs conditions de vie et à leur insertion sociale, les Roms restent toujours la communauté la plus discriminée par rapport à d’autres minorités nationales.



    En vue d’un état des lieux plus précis, un projet a récemment été lancé à Bucarest, sous le titre « La Cartographie sociographique des communautés rom de Roumanie pour le suivi communautaire des changements relatifs à leur intégration (SocioRoMap) ». Le projet devrait fournir des informations et des données aux institutions publiques habilitées à élaborer des politiques publiques et à prendre les mesures d’inclusion de ces communautés. En outre, les résultats du projet mentionné sont censés aider les autorités à concevoir des programmes et des schémas de financement des projets visant à l’éradication de la pauvreté, au développement local et à la promotion des chances de réussite de certains groupes marginaux. Le projet SocioRoMap est déroulé par l’Institut pour l’étude des problèmes des minorités nationales, basé à Cluj Napoca, en partenariat avec la Fondation pour une société ouverte et le Centre de recherche sur les relations interethniques.



    Plus de 3000 unités administratives rurales et urbaines seront cartographiées pour avoir une idée plus nette des besoins et priorités des communautés rom. Istvan Horvath, président de l’Institut pour l’étude des problèmes des minorités nationale détaille ce projet.« Notre visée va plus loin qu’un simple inventaire. Nous souhaitons que la description de ces communautés soit facilement intelligible, que leurs problèmes soient présentés sous la forme d’une carte. Par ailleurs, nous ambitionnons de mettre sur pied un réseau opérationnel de personnes capables de fournir des informations pertinentes sur la condition de ces communautés. Il y aura le réseau des travailleurs sociaux, celui des ONGs actives auprès des communautés locales, le réseau des institutions et des personnes dédiées à la protection des Roms, tels les médiateurs scolaires ou sanitaires… notre objectif est donc celui d’inventorier ces communautés, d’apprendre ce qui a été fait ou pas en matière d’intervention…, car si dans certains cas on a fait pas mal de choses, dans d’autres on n’a pas fait assez pour différentes raisons, dont l’état de pauvreté ou d’isolement du groupe respectif. »



    L’ambassadrice de Norvège en Roumanie et en République de Moldova, Son Excellence Tove Bruvik Westberg, a été présente au lancement du projet « SocioRoMap ». Voici ce qu’elle a déclaré à ce propos: « C’est l’accès plus facile de ces groupes, les Roms compris, à l’éducation et à la santé qui est au cœur de ce projet. Ce programme repose sur ma conviction qu’une société meilleure et juste est celle qui inclut l’intégralité de la population, qui accepte et tolère tout le monde, assure des services pour tous. Tout le monde n’est pas égal en Norvège, mais l’égalité est une norme. Les gens diffèrent par leur origine, leurs revenus, mais ils sont égaux en droits, ce qui est très important. Nous devons saisir la réalité au sein des communautés rom de Roumanie et c’est ce que nous allons faire au travers de ce projet. Il est nécessaire de fournir aux décideurs les informations utiles et révélatrices dont ils ont besoin pour concevoir les politiques publiques. Pour différentes raisons, peu d’informations relatives aux Roms sont disponibles au niveau du gouvernement. Voilà pourquoi il faut créer le lien manquant entre la réalité de ces communautés et ceux qui légifèrent, recueillir des informations sur les conditions de vie, le niveau d’éducation et l’accès des membres de ces groupes ethniques aux services sociaux et médicaux. »


    Un autre projet a trait à la promotion de la culture et les arts dans les milieux défavorisés des Roms. Lancé par les Associations T.E.T.A., ADO, REPER 21 et Urbanium, le projet intitulé « Maskar », qui met le théâtre au service de l’éducation, sera accueilli par Alexandria et Turnu Măgurele, villes du comté de Teleorman, dans le sud de la Roumanie où vivent d’importantes communautés de Roms. 10 mois durant, 40 jeunes et 60 adultes participeront à toute sorte d’activités: programmes artistiques, ateliers, expositions et spectacles sur la culture et les traditions rom. Partager des expériences positives, apprendre aux jeunes à mieux communiquer avec des personnes issues de leur communauté ou de milieux différents, à cultiver la confiance en eux-mêmes et leur potentiel créatif, à jouir des mêmes droits, voilà les visées de ce projet.



    Nous écoutons Ana Maria Pălăduş, qui travaille à l’Association « L’art au service des droits humains (ADO) ». « Nous touchons à une problématique sensible, celle de la discrimination des Roms vivant dans ces deux communautés. Notre approche est pourtant très inédite, parce qu’elle repose sur des moyens artistiques. Elle propose de faire du théâtre un moyen de jeter des ponts entre les cultures roumaine et rom. Nous allons constituer deux groupes de jeunes, des deux villes, qui participeront, plusieurs mois durant, à des ateliers de développement personnel et de théâtre communautaire. Les histoires racontées permettront de déceler leur perception de la discrimination et des problèmes de leurs communautés respectives. Nous envisageons aussi de les faire dialoguer avec des jeunes qui n’appartiennent pas à leur ethnie. Ces ateliers devraient déboucher sur deux pièces de théâtre, l’une à Turnu Măgurele, l’autre à Alexandria, qui seront par la suite présentées aussi à Bucarest et à Cluj Napoca. »



    Le projet « Maskar » comporte aussi deux expositions. Elles proposeront la découverte de l’histoire et de la culture rom des deux villes du sud de la Roumanie, par le biais des objets vestimentaires et d’artisanat, des photos et décorations, des mélodies, des légendes ou des symboles. Les organisateurs ont été agréablement surpris de constater combien grand a été l’enthousiasme des enfants roms participants à ce projet. Ana Maria Pălăduş: « Notre projet a joui d’une incroyable ouverture dans les écoles et les lycées considérés comme les plus faibles. Quand on a présenté aux jeunes nos intentions, ils voulaient tous s’inscrire aux ateliers. Par contre, dans les lycées de renom l’attitude a été plus réservée, voire même raciste à l’égard de la communauté rom. »



    Les deux projets destinés aux ethniques rom sont financés par le Mécanisme financier norvégien. (trad. Mariana Tudose)

  • L’éducation à domicile

    L’éducation à domicile

    L’Education à domicile ou homeschooling, légalisée dans certains pays, est pratiquée en Roumanie aussi, même si elle n’est pas stipulée expressément dans la loi sur l’enseignement. Il existe, cependant, des solutions légales à cela, plutôt similaires à l’enseignement à distance. Ainsi l’enfant peut-il être scolarisé dans un pays étranger, où l’éducation à domicile est légiférée ou bien qui autorise l’enseignement par correspondance pour les élèves de primaire, de collège et de lycée.



    Magdalena Balica, experte à l’Institut des sciences de l’éducation, détaille les motivations de ce choix: « Depuis un certain temps, nous constatons l’intérêt accru pour cette option des parents mécontents de notre système éducatif. Pourtant, légiférer le droit à l’enseignement à domicile est un sujet délicat. A mon avis, les parents qui décident de garder leurs enfants à la maison, tout en se proposant de leur offrir un environnement propice à l’instruction, assument une grande responsabilité ».



    C’est le cas de Gabriel Curcubet, pasteur de l’Eglise presbytérienne de la ville d’Odorheiu-Secuiesc, père de quatre enfants, âgés de 13 à 18 ans, tous instruits à domicile: « En tant que pasteur presbytérien, j’ai aussi une approche chrétienne et sociale. Je pense aux acquis de l’enfant en milieu social et à la conduite qu’il devrait y adopter. Or, à la maison, l’enfant s’approprie mieux certaines règles de comportement ou différents principes éthiques que l’école ne parvient pas à lui inculquer. Nous avons adopté plusieurs méthodes d’enseignement. Par exemple, nous nous sommes chargés de l’éducation à domicile de l’aîné jusqu’à ses 13 ans, après quoi, nous l’avons inscrit à des écoles à l’étranger, respectivement aux Etats-Unis et en Hongrie. Dans cette dernière, il pouvait suivre des cours par correspondance ou via Skype. Il s’est préparé tout seul pour les examens de langue SAT et TOEFL. Ses résultats ayant été des meilleurs, il peut maintenant postuler pour une université étrangère. Nos trois autres enfants sont inscrits dans un établissement scolaire des Etats-Unis, mais c’est toujours nous, les parents, qui prenons en charge l’essentiel de leur instruction. Enfin, nous ne leur enseignons pas toutes les disciplines. Certaines choses, ils les apprennent tout seuls ou à l’aide de logiciels dédiés».



    Comme les méthodes de l’enseignement à domicile diffèrent de celles utilisées dans les écoles, il est naturel que les moyens d’évaluation soient eux aussi différents. Gabriel Curcubet: « Les tests ne ressemblent point à ceux des établissements publics. Dans ces derniers, l’évaluation débouche sur une note. Si un enfant ne maîtrise pas telle ou telle connaissance, il reçoit une mauvaise note et la leçon continue. Notre approche est toute différente. Nous pensons que les enfants doivent vraiment s’approprier les connaissances respectives et pour ce faire nous prenons tout notre temps. D’ailleurs, l’éducation à domicile permet par exemple de parcourir en une seule semaine la géographie de CM2. A l’école, les enfants sont facilement distraits. En plus, il faut mettre un bon bout de temps pour aller en classe et puis pour rentrer chez soi. Bref, un quart d’heure d’instruction à la maison avant le petit-déjeuner profite beaucoup plus à l’enfant qu’une heure de classe».



    Toutefois, la question que se posent certains sceptiques est celle de savoir si ces enfants ne se sentent pas isolés. La réponse de Gabriel Curcubet est négative et argumentée par la multitude d’activités de bénévolat et par les sports d’équipe auxquels ses enfants participent. Les spécialistes en éducation estiment pourtant que l’interaction avec les enfants du même âge est propice tant au jeu et à la socialisation qu’à l’apprentissage.



    Voici les explications de Magdalena Balica, experte à l’Institut des sciences de l’éducation: « A mon sens, maintenant que nous disposons d’immenses ressources grâce aux nouvelles technologies, l’école n’a plus l’apanage de la diffusion des savoirs. Je ne crois pas qu’un enfant non scolarisé n’ait pas assez de chances d’atteindre son potentiel maximum. Il n’est pas moins vrai, cependant, que l’apprentissage institutionnalisé a des composantes sociales importantes aussi. Certaines théories récentes révèlent qu’un enfant se trouvant devant une discipline d’étude peut atteindre son potentiel maximum en apprenant tout seul. Pourtant, l’interaction avec un individu du même âge pendant l’apprentissage lui permet de faire un saut, connu sous le nom de zone proximale de développement”. En clair, la perception de l’enfant sur l’objet de l’apprentissage est confrontée avec celle d’une autre personne. Faire des comparaisons, rapporter sa compréhension des choses à celle des autres, cela suppose une réflexion à même de produire des bonds extraordinaires de l’apprentissage. »



    Les cas individuels mis de côté, Magdalena Balica estime que la Roumanie n’est pas prête à légiférer cette alternative éducationnelle, étant donné l’important taux d’abandon scolaire dans ce pays: « Adopter du jour au lendemain une loi permettant l’éducation à l’école dans n’importe quelles conditions serait une grande perte puisque ces parents en situation difficile pourraient l’interpréter comme une excuse en plus de ne plus envoyer leurs enfants à l’école. C’est un risque que nous ne pouvons pas assumer. Au contraire, ces catégories sociales ont besoin d’appui pour envoyer leurs enfants à l’école. Les pays qui ont légiféré cette option possèdent des systèmes d’évaluation des connaissances des enfants très bien mis au point et capables de reconnaître les différentes capacités des enfants. En Roumanie, il y a encore des choses à faire pour améliorer le système d’évaluation des compétences de chaque enfants à un certain âge. Probablement qu’à l’avenir l’option de l’instruction à domicile fonctionnera dans la mesure où nous réussissons à utiliser les nouvelles technologies. Et de ce pont de vue, à présent, la situation de la Roumanie n’est pas des meilleures. »



    Et pourtant Gabriel Curcubet, par le biais de l’ONG qu’il représente, à savoir l’Association Home Schooling Romania, a contacté déjà près de 300 familles roumaines qui pratiquent l’éducation à domicile. Et le nombre de personnes qui prennent en compte cette alternative serait encore plus important, affirme M Curcubet. Mais les négociations avec les représentants du Ministère de l’Education pour la légiférer ont échoué jusqu’ici. (trad.: Mariana Tudose, Alex Diaconescu)

  • Nouvelle chance pour les adolescents vulnérables

    Nouvelle chance pour les adolescents vulnérables

    En Roumanie, 1 enfant sur 10 naît d’une mère adolescente, âgée de 15 à 19 ans. Le pays occupe, ainsi, une des premières places sur l’ensemble de l’UE pour ce qui est des accouchements survenus dans cette tranche d’âge. Par ailleurs, l’obésité, l’abandon scolaire, la consommation d’alcool et le tabagisme précoce vont croissant. C’est pourquoi un deuxième Centre de ressources pour les adolescents vulnérables a récemment ouvert ses portes à Bucarest, où ces jeunes personnes bénéficient de conseil, d’appui et de soins de récupération. Ce centre accueillera aussi des activités de groupe, lors desquelles les jeunes auront la possibilité de discuter avec les experts sur des thèmes importants tels que les relations avec les autres ou la santé. Il servira donc de pont entre les ados vulnérables et la communauté, leurs familles respectives y comprises.



    Afin de venir en aide à ces jeunes, l’UNICEF, en partenariat avec le Ministère roumain de la jeunesse et du sport, la mairie du 4e arrondissement de la capitale, Bucarest, et l’Alliance pour la lutte contre l’alcoolisme et les toxicomanies, ont lancé, dès l’ouverture du centre, le programme intitulé “Opportunités pour les adolescents”. Ce programme, qui devrait durer trois ans, sera mis en place dans cinq grandes villes à travers le pays, à savoir Bucarest, Cluj, Iaşi, Constanţa et Bacău.



    Présente à l’inauguration du Centre de ressources pour les adolescents, Sandie Blanchet, représentante de l’UNICEF en Roumanie, a souligné le fait que les environ 1,7 millions de jeunes roumains concernés doivent relever des défis similaires à ceux qui se posent devant les ados du monde entier.



    Sandie Blanchet : « Les recherches les plus récentes en matière de neurosciences montrent que l’adolescence est une étape cruciale dans le développement du cerveau humain. Si les adolescents sont plus enclins à prendre des risques c’est parce que leur cerveau n’est pas encore pleinement développé. Leurs choix ont une influence forte sur leur futur mode de vie. D’où l’importance des choix sains dans cette période de leur existence. L’an dernier, près de 17.000 adolescentes de moins de 19 ans étaient enceintes. En outre, nous assistons à une incidence accrue des cas d’obésité, de consommation d’alcool, de tabagisme et d’abus de drogues parmi les jeunes. En milieu urbain, la prise de substances hallucinogènes également appelées ethnobotaniques menace l’état de santé, voire même la vie de plusieurs centaines d’adolescents et de jeunes, qui encourent y compris le risque d’infection par le VIH. Enfin, selon une récente étude de l’UNICEF, 19% des ados âgés de 15 à 18 ans ne fréquentaient pas l’école l’an dernier, ce qui diminue drastiquement leur chance de trouver un emploi bien payé. »



    Ce type d’intervention destinée aux adolescents ayant des possibilités réduites de développement personnel et vivant dans les quartiers défavorisés du 4e arrondissement de la capitale arrive à un moment clé pour les politiques consacrées à la jeunesse de Roumanie, affirme Cosmin Cristian, secrétaire d’Etat au ministère de la Jeunesse et du Sport: « Nous nous réjouissons que la Stratégie Nationale de la Jeunesse 2015 — 2020 soit approuvée par le gouvernement. Cette stratégie vise entre autres les adolescents, cette catégorie si vulnérable, en proie à de nombreuses tentations. La Roumanie compte plus de 6 millions de jeunes âgés de 15 à 34 ans, dont 1,7 millions d’adolescents. Cette stratégie a été adoptée justement pour soutenir la participation des jeunes dans la vie active, économique, sociale et culturelle, en leur offrant des opportunités égales. Un aspect essentiel de la mise en oeuvre de la Stratégie Nationale de la Jeunesse est de la décliner en stratégies locales. Nous ne souhaitons pas que tout s’arrête là. Nous sommes en train de travailler sur les plans nationaux d’actions pour la jeunesse. Et évidemment, nous souhaitons que la stratégie devienne opérationnelle au plus vite. Il y a des villes, comme Timisoara (à l’ouest) par exemple, qui disposent déjà de leur propre stratégie destinée aux jeunes et j’aimerais bien qu’il en existe une à Bucarest aussi, même au niveau du 4e arrondissement, pour les jeunes de cette communauté. »



    Au cours de la première année de la mise en œuvre du programme «Opportunités pour les adolescents », plus de 1500 jeunes devraient être informés et 200 autres devraient bénéficier d’opportunités concrètes de développement personnel au Centre de ressources ouvert dans le 4e arrondissement de Bucarest. Ils seront 10.000 au total à profiter de ce projet pilote. L’essentiel, c’est de les mettre au courant des risques auxquels ils s’exposent, souligne Bogdan Glodeanu, directeur exécutif de l’Association ALIAT. Jusqu’ici, son association a informé et soutenu quelque 3000 jeunes, par l’intermédiaire des écoles, des lycées et des réseaux de socialisation. Désormais, c’est aux centres de ressources de mettre en valeur cette expérience.



    Bogdan Glodeanu : «En moyenne, c’est vers l’âge de 13 ans que les adolescents entrent en contact avec l’alcool, le tabac et la drogue. A 17 ans, 76% des filles et 75% des garçons ont déjà expérimenté au moins deux de ces produits. 60% des adolescents qui commencent à en consommer par curiosité, deviennent des consommateurs réguliers en une année et demie. De nombreux problèmes en découlent. Certains finissent par abandonner l’école pour intégrer des entourages douteux. Souvent la famille ne peut plus les aider. Selon les études internationales, 9% des jeunes de 15 à 29 ans meurent chaque année à cause de l’alcool. La Roumanie occupe la 8e place, sur 188 pays, en ce qui concerne la quantité d’alcool consommée par tête d’habitant. Et c’est toujours en Roumanie que plus de 40% des adolescents ont consommé de l’alcool au moins une fois, alors qu’en moyenne ils consomment près de 3 litres d’alcool par mois. »



    Dans ce contexte, les spécialistes du centre se rendront dans les écoles et les lycées pour identifier les jeunes confrontés à de tels problèmes. De même, il y aura des partenariats avec les institutions et les ONG déjà familiarisées avec la situation et peuvent diriger les jeunes vers le centre. S’y ajoute la plate-forme www.adolescenteen.ro où les jeunes pourront entrer en contact avec des spécialistes locaux, aborder les thèmes qui les intéressent le plus et se renseigner sur les opportunités de développement personnel disponibles à Bucarest. (Trad. Mariana Tudose, Valentina Beleavski)

  • Stéréotypes de genre dans la littérature et l’éducation.

    Stéréotypes de genre dans la littérature et l’éducation.

    Comment naissent les stéréotypes qui définissent le rôle de la femme et de l’homme au sein de la société ? Par quels moyens sont-ils perpétués ? Par l’éducation ? Par la culture ? C’est à ces questions que se propose de répondre une récente étude sur les stéréotypes de genre de la culture roumaine et dans la vie quotidienne, étude qui fait partie du projet consacré à «L’insertion et la promotion des femmes sur le marché du travail».



    Déroulée par la Fondation pour une Société ouverte et financée de fonds européens, l’étude a visé 4 domaines : film, théâtre, littérature et médias. Son but : vérifier l’hypothèse selon laquelle les stéréotypes de genre ou ceux liés à la féminité ont un fondement culturel.



    Mircea Vasilescu, président de la Fondation pour une société ouverte, passe en revue les conclusions de l’étude : «L’hypothèse que nous avons analysée s’est avérée correcte dans son ensemble, c’est-à-dire que la manière dont nous voyons les femmes et la féminité repose sur notre «héritage culturel». Certes, les médias y jouent un rôle très important, notamment par leur impact, vu qu’elles prolongent la pensée fondée sur des stéréotypes et elles exploitent différents stéréotypes concernant les femmes pour gagner en audience. Et je pense ici notamment aux tabloïds».



    A part les médias, l’enseignement semble être à son tour une source de stéréotypes, parfois par la simple analyse des textes littéraires proposés aux élèves. Notre interlocuteur, Mircea Vasilescu, est aussi critique et historien de la littérature. Il nous explique comment sont caractérisés différents personnages féminins dans les écoles :


    «Nous avons vérifié l’information sur ces personnages littéraires fournie par les manuels, par les recueils qui proposent aussi des commentaires littéraires et par les sites consacrés aux exposés scolaires. Ces exposés en disent long sur la manière dont on étudie la littérature à l’école, en s’arrêtant généralement sur des banalités. Et alors je me demande si une fois l’école terminée, les jeunes ne commencent pas à mettre en œuvre dans la vie réelle les idées retrouvées dans les commentaires littéraires, et ont une approche des femmes conforme aux stéréotypes. »



    Oui, l’école transmet des stéréotypes, constate l’étude. Mais souvent les interprétations des personnages féminins proposées par les manuels ne sont pas trop exactes, ni favorables aux personnages en question.



    Par ailleurs, ces dernières années, les médias, notamment les émissions télévisées de divertissement ont créé un nouveau type de femme : l’assistante de production. La jeune animatrice habillée de manière plutôt vulgaire qui divertit le public par son ignorance et par les bêtises qu’elle dit, selon le rôle attribué par le réalisateur de l’émission. Cette nouvelle apparition renforce en quelque sorte le stéréotype selon lequel il n’y a pas trop de femmes dans les émissions télévisées dites « sérieuses ».



    Mircea Vasilescu: « Il y a très peu de présences féminines dans les débats télévisés portant sur des sujets politiques ou sociaux. Il y a très peu de femmes invitées à s’exprimer en tant qu’expertes dans différents domaines. Et d’habitude on invite les mêmes femmes, qui proviennent plutôt du milieu politique ».



    Les stéréotypes sont transmis non seulement via l’école ou les émission télévisées, mais aussi par des messages des parents depuis l’âge le plus jeune. Livia Aninosanu, coordinatrice du centre Partenariat pour l’égalité — partenaire du projet « L’intégration et la promotion des femmes sur le marché de l’emploi » affirme que par la socialisation, les enfants arrivent à apprendre très tôt ce que les garçons et les filles devraient faire dans la société: « Nous encourageons certaines émotions chez les garçons et nous en décourageons d’autres. Nous procédons de même dans le cas des jeunes filles. Dans le cas des garçons, ils entendent assez souvent « ne pleure pas, tu n’es pas une fille ! ». Pour les garçons, depuis un âge assez jeune, le langage émotionnel est assez restreint. On leur permet d’exprimer leurs émotions négatives par la fureur, mais on les décourage de se montrer émotifs, d’exprimer leur peur. En échange, dans le cas de filles, elles ne sont pas encouragées à exprimer leur fureur, à dire « non » ou à mettre des barrières très claires. On leur permet d’être fragiles. Nous dirigeons les enfants vers des rôles qu’ils ont à remplir dans la société, leur inoculant l’idée que les garçons sont forts et que les filles sont faibles. »



    Les jouets différenciés ont aussi un rôle dans cette détermination comportementale : « Dans tout grand magasin pour enfants nous avons des étals pour les gamines et les gamins. Les premiers, on peut les reconnaître d’après la couleur rose foncée. On y voit des jouets qui représentent les rôles qu’elles devraient remplir à l’avenir dans la société : mini cuisines, mini-machines à laver, fers à repasser en miniature. Dans le cas des garçons, il y a des jeux qui permettent d’explorer l’espace, des voitures, des armes… Nous avons relativement peu de jouets neutres du point de vue du genre. Je crois qu’il existe de nombreuses situations quand les enfants auraient souhaité joué avec d’autres choses. En travaillant avec les enseignantes de maternelle, nous avons constaté qu’il existe une crainte très forte que les garçons jouent avec les poupées par exemple, où qu’ils s’impliquent dans le jeu des filles. Cette simple préférence provoque des craintes parmi les adultes. Le garçon en question est corrigé presque immédiatement. »



    Peut-être qu’il vaut mieux corriger les attitudes de adultes, affirment les spécialistes en égalité des sexes. Les enfants ne devraient pas être éduqués conformément à des filtres de genre, mais encouragés à expérimenter et à résoudre des situations des plus variées. (trad. Valentina Beleavski/Alex Diaconescu)

  • La Santé de Roumanie. Où en sommes-nous?

    La Santé de Roumanie. Où en sommes-nous?

    « Health At A Glance » – Panorama de la Santé 2014, publié par la Commission européenne à la fin de l’année dernière, présente les plus récentes données sur le système de santé, les facteurs de risque, ainsi que l’accès aux services médicaux dans les pays membres de l’Union, dans les pays candidats — à l’exception de l’Albanie, faute de données — et dans les pays membres de l’Association européenne du libre échange — 34 Etats au total.



    Le Panorama 2014 met en évidence, comme d’habitude, un mélange d’éléments positifs et négatifs — y compris pour la Roumanie. Par exemple, dans l’UE, l’espérance de vie à la naissance a augmenté de 5 ans entre 1990 et 2012, étant estimée à 79,2 ans. Pourtant, le décalage entre les indices despérance de vie les plus élevées (enregistrée en Espagne, Italie et France) et les indices despérance de vie les plus faibles (enregistrés en Lituanie, Lettonie, Bulgarie et Roumanie) n’ont pas diminué depuis 1990.



    Selon le même document, pour la Roumanie, cela s’expliquerait, entre autres, par le fait que notre pays dépense le moins d’argent pour les soins de santé accordés à une personne. Argument à l’appui de cette affirmation : la Roumanie est la pays où l’incidence des investigations utilisant des techniques très modernes (comme la RMN — résonance magnétique nucléaire ou le CT — soit la tomographie computérisée) est très faible.



    Les fonds insuffisants alloués au système de santé — soit 4% du PIB — ainsi que les sommes très limitées qu’une personne peut dépenser pour se faire soigner explique peut-être aussi le peu de surveillance de l’état de santé de la population. Le taux de mortalité le plus élevé du cancer du col de l’utérus en est une illustration et une conséquence, ce type de cancer pouvant être guéri s’il est diagnostiqué à un stade précoce. Le système de santé dépend donc de la situation économique d’un pays, les sources de financement du système de santé étant limitées. Le régime public d’assurance maladie en est la principale source. Payées par les salariés et par les employeurs, ces assurances sont gérées par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAS). Les assurances privées sont peu répandues en Roumanie, un grand nombre de personnes payant de leur propre poche les services médicaux. Un cinquième des Roumains assurent ainsi le financement de leur propre traitement et des examens médicaux nécessaires. La facture s’accompagne souvent de « cadeaux » offerts aux personnels, une pratique aussi critiquée que répandue.



    Cristian Vlădescu, directeur de l’Ecole nationale de santé publique, rattache ce phénomène aux salaires très bas des médecins — par rapport à d’autres secteurs d’activité, dont de la justice, par exemple.



    SON : « Il y a plusieurs années déjà, l’importance sociale du système juridique était reconnue en Roumanie. Aussi, les revenus des professionnels de ce domaine se situent-ils actuellement au niveau de la moyenne enregistrée dans le monde. Ce qui n’est pas le cas de la Santé. L’importance sociale des médecins n’est pas reconnue par les autorités. Les gens, eux, accordent aux professionnels de la Santé une importance sociale. On peut donc interpréter, de cette façon aussi, ces payements informels. Sur le court et le moyen terme, il faut trouver des solutions pour augmenter le financement du système et les revenus des professionnels de la Santé. »



    En Roumanie, non seulement les médecins ont des salaires très bas, ils aussi peu nombreux, la Roumanie comptant 2,5 médecins par millier d’habitants — un des chiffres les plus faibles enregistrés en Europe. Seuls les Polonais ont une situation encore plus inquiétante de ce point de vue. Et l’exode à l’étranger du personnel médical ne fait que l’empirer. Cristian Vlădescu.



    SON : «C’est un cercle vicieux : d’une part, on demande aux médecins de déployer une activité aussi performante que leurs collègues occidentaux ; de l’autre, l’Etat ne leur accorde pas la même reconnaissance sociale et les récompense comme s’ils exerçaient une profession de moindre importance. Ce cercle vicieux s’est brisé après l’adhésion de notre pays à l’UE : nos médecins choisissent de partir travailler ailleurs et ils seront de plus en plus nombreux à le faire, car la demande sur le marché occidental est importante. »



    L’organisation et le financement du système de santé dépendent non seulement des facteurs économiques, mais aussi des priorités de chaque pays. Bien que les institutions européennes s’intéressent à l’état de santé des citoyens de l’Union — et le « Panorama de la Santé » le prouve — ni Bruxelles, ni Strasbourg ne peuvent imposer aux Etats membres des politiques dans ce domaines. On ne peut que leur faire des recommandations — rappelait la députée européenne Renate Weber.



    SON : « Malheureusement, pour des raisons que personnellement je ne peux pas comprendre, le domaine de la santé ne fait pas l’objet d’une législation communautaire. La santé et l’éducation se voient appliquer le principe de subsidiarité : elles sont légiférés par les Etats membres. Je ne comprends pas pourquoi. Si nous voulons avoir une Union saine sur tous les plans, l’état de santé et l’éducation des citoyens devraient se trouver au même niveau dans tous les Etats membres. Pourtant, il y a des recommandations émanant de Bruxelles qui concernent les politiques dans ces domaines, mais elles ne peuvent nullement être imposées. »



    Quelle que soit la situation économique et législative qui laisse son empreinte sur le système de santé, l’état de santé de la population dépend aussi de la façon dont chacun prend soin de sa propre santé, de l’éducation et d’un minimum de connaissances sur les méthodes de prévention.



    Renate Weber : « Quand je dis « éducation », je pense à ce comportement obligatoire au niveau public pour que la maladie puisse être évitée. Et là, des progrès ont été faits par le biais de la législation. Il s’agit entre autres de l’interdiction de fumer, des réglementations concernant les cigarettes électronique, par exemple. Là, la législation rejoint l’éducation. »



    Pour en revenir au Panorama de la Santé 2014, le rapport indique pour la Roumanie le taux de mortalité par accident vasculaire cérébral et le taux de mortalité infantile les plus élevés d’Europe. En échange, notre pays compte le nombre le plus faible de personnes atteintes de diabète de type 1 — soit une centaine par millier d’habitants. Pour ce qui est de la consommation d’alcool et de tabac, la Roumanie se situe en dessous de la moyenne européenne. Nous enregistrons, aux côtés des Bulgares et des Finlandais, la plus faible consommation de fruits sur l’ensemble de l’Union, mais nous mangeons autant de légumes que les autres Européens. La Roumanie compte aussi le moins de personnes obèses parmi les pays d’Europe. (Trad. Dominique)

  • Femmes en affaires

    Femmes en affaires

    L’égalité des chances et l’encouragement des PMEs comptent parmi les priorités de l’UE et les politiques visant à les promouvoir pourraient offrir des solutions de sortie de la crise. Sortir d’une crise — globale ou personnelle — dépend des opportunités et du courage des futurs entrepreneurs, ce qui peut être un défi, notamment pour les femmes. Selon les statistiques de l’UE, en 2013, parmi les entrepreneurs européens menant une activité indépendante, 34,4% seulement étaient des femmes. Celle-ci détenaient 30% des entreprises nouvellement créées. Pourtant, leur nombre ne cesse d’augmenter.



    Fin 2014, Bucarest accueillait la première foire des femmes d’affaires de Roumanie — « B-Fair » – organisé par l’association « Femmes en affaires ». Fondée en 2009 par une jeune femme entrepreneur, cette organisation était censée soutenir les femmes qui souhaitent démarrer une affaire. La foire était en quelque sorte une extension de ce réseau rendant possible un plus ample échange d’expérience.



    Adina David, responsable de communication de l’organisation « Femmes en affaires », explique : « La foire « B-Fair » a eu lieu en 2014 pour la première fois. Jusqu’ici nous avons organisé uniquement des rencontres de réseautage d’affaires où les intervenants étaient des femmes. La foire a réuni des affaires gérées par des femmes dans un cadre plus officiel et plus général, qui, à part le réseautage, leur a permis de présenter leurs produits. »



    20 exposants ont participé à cette première édition de B-Fair, dont les stands ont été visités par 200 à 300 personnes pendant le week-end. Les sociétés présentes n’étaient pas uniquement des PMEs. Y ont également participé de grandes compagnies, voire des multinationales dirigées par des femmes et dont les produits sont destinés aux femmes.



    Faut-il conclure que les sociétés gérées par des femmes doivent s’orienter vers le marché féminin ou vers un domaine d’intérêt pour les femmes ? Adina David: « J’ai remarqué une tendance des femmes d’affaires à s’orienter vers des domaines typiquement féminins, tels le conseil ou la cosmétique. Pourtant, nombre de femmes commencent à démarrer des affaires dans les domaines informatique ou automobile. »



    Présente à la foire « B-Fair » et membre de l’organisation « Femmes en affaires », Adina Filculescu est la patronne d’une société active dans un domaine où les femmes excellent : les arrangements floraux et l’organisation d’événements. Elle s’est lancée à la fin de ses études universitaires. Elle ne s’est jamais sentie discriminée face à la concurrence masculine et n’a pas eu de difficultés supplémentaires parce qu’elle est femme. En échange, elle a dû travailler dur, mais elle aime son travail.



    Adina Filculescu: « Le travail ne manque pas, parfois je bosse 17 heures par jour sans me sentir fatiguée, parce que je pense au résultat, à la satisfaction des autres et à la mienne. Si j’avais travaillé pour quelqu’un d’autre, je ne l’aurais probablement pas fait avec autant de plaisir et de succès. J’ai passé des nuits blanches, des week-ends à la maison au lieu d’aller à la montagne avec mes amis. Quant à la bureaucratie, nous savons tous comment cela se passe : on fait la queue aux guichets, il y a toujours un nouvel impôt à payer. Il faut s’y faire. »



    En tant que membre de l’Association « Femmes en affaires », Adina Filculescu a suivi attentivement les tendances des dernières années et elle a fait plus d’une découverte : « De nombreuses femmes se sont orientées vers une carrière dans les affaires, renonçant à leurs emplois dans les multinationales ou dans les institutions publiques. Elles se sont tournées vers des domaines qui leur font plaisir. J’ai remarqué que c’était la passion qui se trouvait à l’origine de leur choix. A part un certain capital, elles ont eu besoin aussi de beaucoup de courage pour changer de vie — échanger, en fait, leur vie d’employée contre une vie de femme entrepreneur. »



    Leur courage trouve son origine dans le désir d’être indépendantes et dans un changement de leurs priorités. Adina David: « Quand elles travaillaient pour une multinationale, elles n’avaient plus de temps pour leur famille. Et si un enfant arrivait, le temps qu’elles pouvaient lui consacrer était très limité. C’est pourquoi elles ont préféré devenir femmes entrepreneurs, ce qui leur permet un emploi du temps très flexible. Même si, dans un premier temps, elles gagnaient davantage lorsqu’elles travaillaient pour la multinationale, une affaire peut se développer et assurer avec le temps des revenus substantiels. Que le début puisse être difficile, cela ne les effraie pas. »



    Nombre d’employées de compagnies publiques ou privées qui souhaitent devenir à un moment donné leurs propres patronnes gardent leur emploi un certain temps et s’occupent parallèlement de leur nouvelle affaire. Ce n’est pas facile ; pourtant, le désir d’indépendance l’emporte, dans ce cas. Et cette tendance est encouragée par les institutions de l’UE, qui ont déjà créé un réseau européen de mentors destiné aux femmes entrepreneurs, rattaché à la Direction générale pour les PMEs. (trad.: Dominique)

  • 2014, l’année des initiatives citoyennes

    2014, l’année des initiatives citoyennes

    2014, l’année des élections européennes et du scrutin présidentiel, marque en Roumanie l’anniversaire des 25 ans écoulés depuis la chute du communisme. Un quart de siècle après la mobilisation populaire de décembre 1989, l’esprit citoyen s’est à nouveau manifesté en Roumanie. En 2014 plusieurs initiatives civiques se sont fait remarquer. Démarrées depuis pas mal de temps, ces initiatives étaient nées autour d’idées censées améliorer la vie dans plusieurs quartiers bucarestois et d’autres villes roumaines.



    Timides au début, ces groupes ont pris du courage et ont fait entendre leur voix. Le groupe « l’initiative Favorit » du quartier Drumul Taberei de Bucarest par exemple a déroulé un projet de revitalisation d’une ancienne salle de cinéma, en partenariat avec la mairie du 6e arrondissement de la Capitale. Dans un autre quartier bucarestois, « Les amis du parc IOR » ont déjà obtenu l’appui d’une partie du conseil local pour lutter contre un projet de la mairie qui prévoyait la construction d’une salle polyvalente dans le parc du quartier.



    De tels exemples, on peut en retrouver aussi dans d’autres villes roumaines. Nombre de ces groupes d’initiative civique sont apparus grâce aux efforts du Centre de ressources pour la participation publique (CERE), une ONG qui s’est proposé d’apprendre aux gens leurs droits citoyens et les moyens de les défendre. Nicoleta Chirita, coordinatrice de projets au centre CERE : « J’ai commencé ce programme en 2009 lorsque de tels groupes d’initiative civique n’existaient pas dans la capitale. Au début de mon travail au centre CERE, mon objectif était d’éveiller l’esprit civique des citoyens et de leur montrer combien important c’était de lutter pour leurs droits, que ce soit un petit parc en face de son domicile ou bien des questions plus sérieuses. Moi, j’ai commencé dans Lacul Tei, une zone où nombre d’habitants voulaient faire des choses, mais n’étaient pas organisés et ne travaillaient pas en équipe. Nous les avons rassemblés autour de la même table, nous leur avons montré les problèmes auxquels ils se confrontaient et nous les avons guidés dans leurs démarche. »



    La mobilisation des gens autour d’un projet public n’a jamais été facile, elle ne l’est toujours pas d’ailleurs, avoue Nicoleta Chirita : « C’est difficile parce que nous nous heurtons souvent au scepticisme, au manque de confiance. Les gens ne font confiance ni à eux mêmes, ni à l’initiative participative, puisque leur voix compte aussi entre les différentes élections. Au moment du vote, les gens pensent qu’ils peuvent réaliser un changement réel, mais pas du tout entre les périodes électorales. Ce fut mon plus grand défi : les convaincre que les autorités locales étaient les élus des citoyens et qu’ils devaient pendre en compte ce que les électeurs disent. Peu à peu, les gens ont commencé à découvrir le pouvoir dont ils disposent s’ils choisissent de s’unir. »



    Vu justement que cette année, les initiatives civiques ont été plus actives et plus visibles que jamais, CERE a organisé une Foire des initiatives citoyennes. 200 participants, représentant 14 groupes informels et ONGs y ont participé pour se faire connaître et partager leur expérience. Les ateliers organisés à cette occasion ont appris aux citoyens comment lutter en justice contre la construction illégale d’immeubles.



    Les initiateurs d’un des plus vieux projets d’implication civique de Bucarest, « Street Delivery » ont également figuré parmi les participants à la Foire des initiatives citoyennes. Démarré en 2006, le projet prévoit de fermer au trafic routier une rue du Vieux Bucarest : la rue Pictor Arthur Verona, transormée, l’espace d’un week–end estival, en un lieu inédit, alternatif. Les initiateurs de ce projet se trouvent eux mêmes dans cette même rue, la librairie « Carturesti » et l’ordre des architectes de Roumanie. L’architecte Serban Strudza explique comment a commencé cette initiative: « Ce projet inédit est né il y a 9 ans à partir de l’initiative des gens du quartier. Ils ont remarqué la disparition des relations qui existaient entre les piétons à l’époque où les voitures étaient visiblement moins nombreuses, des relations désormais disparues…De nos jours, le piéton a du mal à traverser la ville de l’est à l’ouest. C’est pourquoi nous avons pensé à imaginer un itinéraire piéton reliant les parcs Gradina Icoanei et Cismigiu, deux endroits chers aux Bucarestois. Cet itinéraire qui longe des bâtiments importants tels l’Athénée roumain et le Musée national d’art pourrait mettre en valeur d’autres monuments de la capitale roumaine. »



    C’est pourquoi trois jours durant, en plein été, les voitures ne roulent plus dans la rue Arthur Verona, qui est occupée par une sorte de foire ou de marché où les Bucarestois se rencontrent et se redécouvrent. «Street Delivery » est également un projet culturel. Serban Sturdza : Les gens sont invités à développer et à proposer différents projets. Cette année, les enfants ont également été impliqués dans des projets urbains. L’éducation, la semaine de l’enseignement alternatif connue comme la semaine de « l’école autrement » est aussi présente. Cette année, de jeunes architectes passionnés de leur profession ont rencontré des enfants pour réaliser ensemble des maquettes et des jeux. C’était un des points forts de l’édition de cette année. »



    Conçu à Bucarest, « Street Delivery » a déjà été exporté à Iasi et à Timisoara. Il est porté par des gens qui selon Nicoleta Chirita de l’ONG CERE, « consacrent une partie du temps réservé à la famille et au loisirs à des projets censés impliquer les gens dans la vie de leur communauté. » (trad. Alex Diaconescu)

  • Du bénévolat à la veille de Noël

    Du bénévolat à la veille de Noël

    En suivant les conseils de son père, Alina s’est inscrite à l’Académie d’études économiques, mais elle n’a jamais pratiqué la profession d’économiste. Même si cela peut sembler pathétique ou démodé, Alina a fait un autre choix: « Depuis toute petite, j’ai voulu aider. Je pense que c’est ma mission. Enfant, je subtilisais de l’argent, que mes parents gardaient à la maison, pour le donner aux enfants pauvres » – révèle-t-elle. Elle aurait aimé aller en Somalie pour aider les enfants là-bas. Ensuite, elle s’est rendu compte que le besoin d’aide existe partout. Elle est donc restée en Roumanie, où elle a créé, il y a 10 ans, l’association Sens Pozitiv (Sens Positif).



    L’équipe constituée par Alina Dumitriu travaille avec les groupes vulnérables de personnes touchées par le virus VIH : SDF, enfants de la rue, prostituées, toxicomanes. Depuis un certain temps, Alina Dumitriu offre un accompagnement à des femmes séropositives de la capitale kenyane Nairobi. Pour mieux comprendre et venir en aide aux enfants et aux adultes dont elle s’occupe, Alina Dumitriu a suivi une formation en psychothérapie. Lorsqu’elle a commencé la thérapie avec les adolescents et les enfants touchés par le virus, Alina a eu un choc en constatant que ces jeunes n’avaient pas reçu des informations élémentaires sur leur maladie.



    La plupart d’entre eux n’étaient pas malades du Sida, ils étaient seulement séropositifs, explique Alina Dumitriu : « En travaillant avec ces jeunes — dont certains avaient 15 ou 16 ans — j’ai pu identifier leurs besoins. Leurs relations avec les médecins étaient difficiles, ils ne communiquaient pas avec eux, ils se croyaient plus malades qu’ils ne l’étaient. Certains d’entre eux pouvaient mener une vie presque normale, mais, ne sachant pas grand-chose sur le virus, ils attendaient la mort. Cela m’a beaucoup impressionnée et j’ai commencé à m’informer sur la séropositivité et à leur raconter des choses là-dessus. Ensuite, j’ai constaté qu’à part quelques mesures de prévention, il n’y avait aucune information en roumain sur le VIH. On conseillait aux gens ce qu’ils devaient faire pour ne pas contracter le virus, mais ceux qui l’avaient déjà contracté ne disposaient pas d’informations en roumain. Alors j’ai commencé à traduire des articles. »



    La collaboration avec les hôpitaux n’a pas été facile: « Le personnel de santé a été plutôt réticent, avant tout parce que nous parlions un autre langage. Un médecin s’est aperçu que j’étais bien informée et il a commencé à m’envoyer de plus en plus de patients. Ça m’a obligée à apprendre davantage, car les jeunes me posaient toute sorte de questions et, des fois, je devais d’abord m’informer moi-même pour pouvoir leur répondre. J’ai formé des jeunes qui vivent avec le VIH, pour en faire des éducateurs et nous les avons intégrés aux équipes médicales. Pourtant, c’est difficile. Les hôpitaux et les médecins sont réfractaires à nos suggestions, mais nous avons quand même gagné leur respect.»



    Depuis un an, Alina ne dispose plus de fonds pour payer des salaires et des activités de l’association. De temps en temps, elle reçoit de l’argent pour des conseils donnés à une compagnie pharmaceutique. Pourtant, le plus grand mécontentement d’Alina Dumitriu est de constater qu’aucun des gouvernements roumains qui se sont succédé au pouvoir depuis 10 ans n’a résolu le problème des personnes séropositives.



    « Elles n’ont pas d’accès aux services de santé et la corruption politique a un impact direct sur elles» — affirme Alina: « Dans ce domaine il n’y a pas de services. Actuellement, les autorités n’offrent absolument rien aux séropositifs, aux personnes et aux enfants sans abri. Il n’y a pas de services pour eux, toutes ces activités sont déroulées par des ONGs. A mon avis, les autorités devraient soutenir cette activité déployée par les bénévoles. Nous avons déjà de l’expérience dans ce domaine et nous avons besoin de soutien. Et je pense que si des campagnes étaient organisées, elles stimuleraient le bénévolat. Je fais du bénévolat depuis 10 ans, sans interruption. C’est très important et la gratitude des personnes que lon a aidées est une grande récompense. Je suis toujours tellement contente quand je constate qu’une personne va mieux après avoir discuté avec moi ou après sêtre adressée à une ONG. »



    Depuis quatre ans, l’Association Sens Pozitiv — Sens Positif, organise un évènement caritatif appelé « petites boîtes magiques ». Il y a quatre ans, l’équipe d’Alina et plusieurs autres bénévoles ont préparé un repas pour 150 personnes, enfants et adultes SDF ou provenant de milieux défavorisés. Cette année, le nombre des invitations à la fête a été majoré à 600. Davantage d’informations sur l’association fondée par Alina Dumitriu sur www.senspozitiv.blogspot.com



    Il y a six mois, Iarina Stefanescu fondait le programme éducationnel « Ajungem Mari », « On grandit », avant de conclure des partenariats avec les Directions de protection de l’enfant des 1er, 2eme, 3eme et 6eme arrondissements de la capitale roumaine. Le but du programme était le développement personnel des enfants, leur confiance dans leur propre forces et la création d’habilités de communication et de travail en équipe. Et les résultats n’ont pas tardé.



    « Dă-ti pasiunea mai departe » « Partage ta passion », c’est le nom d’un projet par le biais duquel 160 bénévoles s’impliquent chaque semaine pour enseigner aux enfants par le biais du jeu différents arts et sciences : littérature, cinéma, danse, anglais, histoire, biologie, etc. « Explorateur pour un jour » prévoit des visites de musées, des sorties dans des parcs, au théâtre, au cinéma et à l’opéra. Un autre projet s’appelle «Oser rêver » et vise les premiers pas dans l’orientation professionnelle des jeunes : visites chez différents employeurs, dans des usines et autres entreprises. « Iarina est l’énergie positive en personne et elle se rend partout à deux roues. D’ailleurs elle aime beaucoup son vélo. Et plus que son vélo, elle aime aider. La vie des enfants des centres sociaux est déjà plus lumineuse, grâce à son initiative qui ne cesse de grandir », affirme Anca Mihaela Tudose, bénévole.



    Depuis quelque temps, le bénévolat est beaucoup plus encouragé, affirme Iarina Stefanescu: « Tant les parents que les enseignants encouragent les bénévoles. Nous travaillons actuellement avec des lycéens et des étudiants et j’ai senti une ouverture claire dans les lycées bucarestois de premier rang d’où proviennent la plupart des bénévoles. J’ai le sentiment qu’ils sont encouragés dans leur activité. »



    Côté résultats, Iarina affirme que ceux-ci sont déjà visibles : « Les bénévoles voient les résultats apparaître chaque heure. Parfois c’est plus simple de travailler avec les enfants, parfois c’est plus difficile, cela dépend de leur situation, de la situation de chaque centre de placement. Nous travaillons aussi dans des appartements de type familial, où la situation est différente. Mais pour revenir aux résultats, on peut identifier du progrès à l’école aussi parce que les bénévoles préparent les enfants pour l’école par le biais des jeux, afin que ceux-ci aient plus de confiance en eux-mêmes. Les enfants regardent les bénévoles comme des modèles et copient leur comportement et oui les résultats sont visibles. Les enfants sont beaucoup plus ouverts, plus imaginatifs, puisque le développement de l’imagination est un autre objectif des bénévoles. Et puis, les enfants apprennent à travailler en équipe, parce que les bénévoles les impliquent dans des jeux qui développent l’esprit d’équipe, mais les résultats seront encore plus visibles dans un an. »



    Iarina Stefanescu a été déclarée bénévole de l’année dans le domaine de l’éducation lors d’un gala national du bénévolat. Davantage de détails sur le programme de bénévolat On Grandit sur http://www.ajungemmari.ro (trad. : Alex Diaconescu, Dominique)

  • Accès plus facile aux soins médicaux en milieu rural

    Accès plus facile aux soins médicaux en milieu rural

    L’accès aux services de santé est un droit de tous les citoyens. Pourtant, de ce point de vue, il y a encore un grand décalage entre le milieu urbain et celui rural. Il y a pas mal de personnes qui ont des difficultés à recevoir les soins médicaux auxquels ils ont droit. Et pour cause: il y a des communes roumaines qui ne bénéficient pas de la présence d’un médecin traitant, bien que 40% de la population du pays habite en milieu rural. Ces gens doivent aller dans une autre localité pour consulter un médecin et beaucoup d’entre eux ne peuvent pas se le permettre.



    Un autre problème s’y ajoute, signale Daniela Buzducea, directrice du lobby de World Vision Roumanie: les gens ne connaissent pas vraiment leurs droits en matière d’accès au services de santé: « Il y a des personnes qui ne savent pas, par exemple, que les enfants et les femmes enceintes ont accès aux services gratuits, quel que soit leur statut — d’assurées ou non assurées. Nous pensons qu’il faudrait investir davantage dans une information correcte de la population sur les droits des patients. Nous estimons également que l’éducation doit commencer dès le plus jeune âge. Et malheureusement, en Roumanie on enregistre un nombre croissant de grossesses non-désirées chez les adolescentes à un âge de plus en plus précoce. »



    Et au sujet du déficit d’éducation pour la santé, la Roumanie se confronte à un important taux de mortalité infantile : « Dans le milieu rural, ce taux est presque double dans certaines régions qui sont très vulnérables par rapport à la moyenne nationale. Nous observons au milieu rural que 20% des familles avec enfants de moins de 5 ans n’ont jamais emmené leur enfant au médecin, malgré des normes très claires qui précisent le nombre de visites au médecin qu’un enfant doit faire par an selon son groupe d’âge : moins d’un an, jusqu’à deux ans, jusqu’à cinq ans. Ce qui plus est, un nombre assez élevé d’enfants souffrent de malnutrition. »



    C’est sur cette toile de fond que plusieurs initiatives censées améliorer la situation ont été lancées, affirme Daniela Buzducea : « Plusieurs programmes expérimentaux ont déjà porté leurs fruits. Parmi eux, il y en a un qui entremêle la formation médicale continue à l’intention des médecins de famille et du personnel médical basé en milieu rural à l’éducation des parents et à un certain soutien accordé aux familles les plus vulnérables. Il ne s’agit pas d’une aide financière proprement dite, mais plutôt d’un coup de main accordé à ces familles en détresse afin de les aider à acquérir des habilités et de pouvoir mieux nourrir leurs enfants. Si on ne se préoccupe par la qualité nutritionnelle de l’enfant dès son âge le plus jeune, toute intervention ultérieure censée remédier aux problèmes de santé sera beaucoup plus coûteuse. »



    Ces initiatives se manifestent au niveau européen aussi. Cet automne, l’eurodéputé Victor Negrescu, du groupe des socialistes et démocrates a réussi à obtenir le vote des députés européens en faveur d’un projet pilote estimé à un million d’euros et qui vise à impliquer l’Union Européenne dans l’amélioration des services médicaux, notamment en milieu rural. Victor Negrescu nous en donne des détails: « Nous allons rencontrer les experts dans le secteur de la Santé pour identifier les solutions concrètes censées améliorer et faciliter laccès aux services médicaux en milieu rural. Les propositions des spécialistes seront mises en œuvre dans plusieurs communes – roumaines surtout, je vais militer pour ça. Suite à cette première étape du projet-pilote, nous allons sélectionner la meilleure solution, qui sera financée à hauteur de 3 millions deuros et sera à nouveau mise à lépreuve dans plusieurs communes. Si tout va bien, en trois ans, les communes roumaines et européennes auront pour la première fois à leur disposition un fonds disponible, grâce auquel les autorités locales pourront financer les services médicaux dans leurs régions, améliorer leur qualité, acheter des équipements et ainsi de suite. Cest là un premier pas vers le premier axe de financement pour les services médicaux en milieu rural ».



    Dans le même temps, leurodéputé Victor Negrescu précise que léducation en matière daccès aux soins médicaux est extrêmement importante: « Il faut apprendre aux gens ce quune bonne nutrition veut dire de même que tous les éléments importants qui contribuent à rester en bonne santé et qui préviennent des interventions plus difficiles. Justement, la prévention est la clé de voûte de ce quon est en train de construire. A part les interventions médicales concrètes, cest très important de pouvoir prévenir les situations graves avec des analyses et des examens médicaux effectués à temps. Ce sont des choses basiques en ville, mais essentielles à la campagne, car là les gens nont pas toujours d’accès direct à la pharmacie ou au médecin. Les campagnards ne sont pas toujours informés et ils se voient parfois confronter à de graves problèmes médicaux quils ne sont plus en mesure de traiter. Cest là que nous devons intervenir…»

  • Investir dans la qualité de l’éducation

    Investir dans la qualité de l’éducation

    Intitulé justement «La qualité de l’éducation », l’étude a pris en compte 157 écoles des zones rurales ou désavantagées de 6 comtés du pays. Les conclusions de la recherche confirment, partiellement, les opinions véhiculées au sein de la société civile.



    Contrairement à ce que l’on croit généralement, 90% des écoles situées en milieu rural sont dotées de laboratoires spécialisés, pourtant, 10% seulement de leur capacité est mise à profit. Comme on pouvait s’y attendre, le laboratoire le plus utilisé est celui d’informatique. Néanmoins, seulement un élève sur deux utilise l’ordinateur et un tiers de ces jeunes ont accès à Internet.



    Conclusion positive : les écoles disposent d’un nombre suffisant de salles de classe. Dans beaucoup d’écoles, tous les élèves ont des cours uniquement dans la matinée ; il y a peu d’écoles où une partie des élèves ont des cours dans la matinée et l’autre dans l’après-midi. Quant à l’implication des parents dans le processus éducatif, l’étude constate un paradoxe : bien que, dans les communautés rurales, l’école soit considérée comme une institution extrêmement importante et les gens se déclarent généralement satisfaits de la vie scolaire de leurs enfants, les parents ne savent pas exactement ce qui se passe, en fait, à l’école.



    C’est ce que nous dit le président de l’Agence roumaine chargée de la qualité de l’enseignement primaire et secondaire, Şerban Iosifescu, coordinateur de la recherche, qui nous présente d’autres éléments mis en évidence par cette étude :«On a également constaté qu’un élève a régulièrement des devoirs écrits pour 3 disciplines chaque jour. 80% des élèves affirment que pendant la moitié des heures de classe, ils écoutent les explications du professeur. Parmi les facteurs favorables au processus éducatif, les possibilités de corroborer les connaissances acquises et de les appliquer aux situations réelles enregistrent les valeurs les plus basses. Dans chaque école il y a un seul professeur qui fait des liens entre les différentes disciplines, alors que tous devraient le faire. Je mentionnerais comme élément positif le fait que les professeurs offrent leur appui et donnent un feed-back constructif aux élèves. Nous avons également constaté une amélioration de la manière d’évaluer les acquis des élèves. Pourtant les résultats de l’évaluation servent plutôt à corriger certaines erreurs commises par les élèves ou à pallier leur manque de connaissances qu’à trouver la cause de leurs faibles résultats scolaires ou à stimuler leur désir d’apprendre. »



    Les données recueillies grâce à cette étude ont été suffisantes pour permettre à ses auteurs de tirer certaines conclusions. Şerban Iosifescu: « L’activité des professeurs est centrée surtout sur la transmission des connaissances, au lieu d’être focalisée sur leur acquisition. L’autonomie des élèves est plutôt limitée. L’éducation est toujours considérée comme un transfert d’informations et l’évaluation vise notamment les aspects cognitifs, au détriment des aspects comportementaux. »



    A part le fait qu’ils ignorent souvent tout de ce qui se passe dans l’école, un tiers des parents roumains affirme se voir exclus au moment où l’école fait son choix entre les différentes disciplines facultatives. D’ailleurs, 50% des élèves se disent obligés de respecter le choix des professeurs sans avoir un mot à dire.



    Or, à part les devoirs, les évaluations des acquis et la validation des compétences, un autre aspect vient perturber le système éducatif roumain: le décrochage scolaire. Ces dernières années, marquées par la crise, les taux de déscolarisation et dabandon scolaire ont augmenté, car beaucoup denfants sont soit obligés de travailler pour soutenir leurs familles, soit ils se heurtent à des problèmes personnels et comportementaux auxquels l’école tourne le dos. Serban Iosifescu: « Un aspect inquiétant est l’absence dans les écoles de Roumanie de tout accompagnement éducatif offert aux jeunes qui risquent d’abandonner. Les élèves roumains recensent un nombre impressionnant d’absences non justifiées et les parents sont souvent au courant. Pourtant, ce sont justement les problèmes familiaux plutôt qu’une situation scolaire précaire qui poussent les jeunes vers le décrochage scolaire. Bien que le pourcentage des partisans de la scolarisation reste très élevé, un nombre important d’élèves affirme abandonner les études avant l’obtention d’un diplôme. Or, selon les experts, le taux d’abandon scolaire est en rapport direct avec le contexte économique et l’environnement éducatif familial. »



    Selon l’étude élaborée par l’ONG World Vision Roumanie, un enfant sur dix se voit contraint à abandonner ses études pour rester travailler aux côtés de ses parents. Or, à en croire une enquête UNICEF sur Le prix d’un investissement insuffisant dans l’éducation de Roumanie”, l’échec de la scolarité influe non seulement sur la vie personnelle de l’individu concerné, mais sur le niveau économique dans son ensemble. Luminiţa Costache, experte au sein de World Vision Roumanie, précise Le décrochage scolaire coûte globalement entre 100.000 et 1,1 millions d’euros pour chaque individu qui choisit d’interrompre ses études. En Roumanie, le coût de cette exclusion se monte à 0,9% du PIB. Or, les statistiques montrent qu’au niveau individuel, chaque année de scolarité réduit de 8,2%.le risque de chômage. »



    A observer la dépense d’éducation rapportée à la richesse nationale, la Roumanie arrive en queue de liste avec seulement 4% du PIB, un pourcentage bien en dessous de la cible de 6% proposée dans le Pacte national pour l’éducation. Une réalité lourde de conséquences, selon Luminiţa Costache: « On a essayé de s’imaginer la future évolution d’une Roumanie qui consacre le même pourcentage du PIB à son éducation nationale, versus un pays qui arrive à accroître ce pourcentage jusqu’au niveau de 6%. Hé bien, si l’on reste au même niveau, les cibles fixées dans le cadre de la stratégie européenne Europa 2020 ne seront pas atteintes. Par contre, une fois que l’on consacre 6% du PIB à l’éducation nationale d’ici 2025, les objectifs seront accomplis, les résultats obtenus à l’Enquête PISA seront au même niveau que la moyenne des pays de l’OCDE et une année d’études de plus entraînera une croissance du PIB entre 2,7 et 2,95% sur les dix années à venir. Concrètement, la Roumanie risque de perdre entre 12 et 17 milliards d’euros d’ici 2025 si elle n’investit pas davantage dans son éducation. »



    Par conséquent, à en croire les auteurs des deux études citées, il faudrait un changement rapide du financement du système éducationnel de Roumanie, tout comme un changement des rapports entre l’école, les élèves et leurs familles pour une meilleure éducation nationale.


    ( Trad.: Ioana Stăncescu, Dominique)

  • La population de la Roumanie en voie de vieillissement

    La population de la Roumanie en voie de vieillissement

    Le vieillissement de la population est un phénomène qui va en s’accentuant, révèlent les études de spécialité. Elles mettent en garde contre le fait que le nombre croissant des personnes âgées pose des défis significatifs pour les systèmes de sécurité sociale, de pensions de retraite et de santé, aussi bien dans les pays en voie de développement que dans les pays industrialisés. Les jeunes, toujours moins nombreux, auront à soutenir financièrement de plus en plus de seniors. Selon Eurostat, dans les décennies à venir, plus d’un tiers de la population de l’Europe aura dépassé la soixantaine.



    En Roumanie aussi, le rythme du vieillissement des habitants s’accentuera, sous l’effet de la baisse de la natalité et de la hausse de l’espérance de vie, apprend-on dans le rapport « La Roumanie vieillit — Défis et solutions », récemment lancé par la Fondation Friedrich Ebert România. Selon des données qui remontent à 2011, date du dernier recensement, les plus de 65 ans représentent 16,1% de la population roumaine et on estime que leur nombre s’accroîtra à l’horizon 2050. Par le biais du projet « La Roumanie vieillit » (réalisé par les journalistes Laurenţiu Diaconu Colintineanu et Ioana Moldovan), la Fondation Friedrich Ebert a tenté d’apprendre la réalité cachée derrière les chiffres et les données statistiques ou encore quelles sont les histoires de vie des seniors.



    Ioana Păunescu, 101 ans, a été la première femme ingénieur électromécanique de Roumanie. Elle a survécu aux deux guerres mondiales et à 73 ans s’est mariée pour la deuxième fois pour chasser la solitude: « Comme nous étions veufs tous les deux, nous avons décidé de nous marier pour ne plus être seuls. Nous avons déjà 28 ans de mariage et le même âge: 101 ans. Jusqu’il y a peu, nous avons mené une existence normale. Ce n’est plus le cas depuis que je dois prendre soin de mon mari, atteint de la maladie d’Alzheimer. Puisqu’il ne parle plus, on a du mal à communiquer. C’est très dur. C’est vrai que j’ai aussi des aides, car je ne peux plus cuisiner. Mes mains et mes jambes sont devenues très faibles. J’ai du mal à garder mon équilibre; je n’arrive pas à marcher toute seule, sans appui ».



    Une autre catégorie est celle des personnes âgées prises en charge par leurs proches. Laura Tudor a 52 ans. Sa vie a complètement changé depuis que sa mère, 89 ans, est grabataire. Celle – ci s’est cassé le col du fémur, après une chute. N’ayant pas les moyens d’embaucher une aide-soignante, Laura est obligée de concilier vie familiale et devoir filial: « Ce n’est pas facile du tout de gérer mon temps, m’occuper de ma mère, de mon travail et de ma famille en même temps. Heureusement que ma mère et moi nous habitons des appartements situés au même étage du même immeuble. J’ai pensé recourir à un service d’aide et de soins à domicile, mais, après un calcul rapide, je me suis rendu compte que je ne pouvais pas me le permettre. Je me débrouille comme je peux. J’aide ma mère d’un point de vue physique, mais je sais qu’elle aurait besoin de quelqu’un qui lui fasse la conversation plus longtemps, parce que je n’ai ni la patience ni le temps de le faire. Cette situation me touche surtout sur le plan psychique, parce que je suis contrainte d’assister à une dégradation progressive, lente et irrémédiable… »



    La Roumanie dénombre seulement 131 centres d’accueil pour personnes âgées. Petru Rotarciuc, 63 ans, est un des 7.152 pensionnaires de ces établissements. Situé à Leorda, commune du comté de Botoşani, dans le nord-ouest de la Roumanie, cet établissement abrite 70 personnes. Le personnel de spécialité est formé d’une infirmière et de deux aides-soignantes. Petru Rotarciuc est content de sa vie au centre: « Je suis resté sans emploi. Partout où j’allais chercher du travail, on me refusait tout poste en raison de mon âge. Complètement fauché et dans l’impossibilité de payer les charges communes, je me suis retrouvé dans la rue… J’ai vécu plus d’une année comme SDF, avant qu’un employé du Conseil local ne m’emmène au centre d’accueil. Je m’y sens bien. Ce n’est pas comme dans la rue. Ici on est à l’abri du mauvais temps. Quand j’aurai ma retraite, j’habiterai toujours au foyer et ce jusqu’à la fin de mes jours. Ma femme est morte. Mes trois enfants sont partis je ne sais où. J’ai essayé de les trouver, mais sans succès. Ils me manquent. Je n’ai pas besoin qu’ils m’aident. Je veux seulement les voir et leur parler… »



    Le Rapport « La Roumanie vieillit » présente aussi des données optimistes : le taux de pauvreté affectant les personnes âgées (soit les plus de 65 ans) a baissé en Roumanie, de 65% en 2007 à 35% en 2013. Néanmoins, il continue d’être presque double par rapport à la moyenne de l’UE qui est de 18%. Autre élément positif : l’introduction, en 2009, de la retraite minimale garantie qui est de 356 lei, soit environ 80 euros. Le pays compte presqu’un demi-million de bénéficiaires, dont 123.000 sont des retraités de l’agriculture, qui étaient à la limite de la subsistance.



    Malgré cela, nous avons encore des raisons de préoccupation, considère Victoria Stoiciu, coordinatrice de programmes à la Fondation Friedrich Ebert: « Le pays continue d’avoir une des retraites d’Etat les plus basses de l’Union européenne et un des taux de remplacement le plus faible (soit le rapport entre la retraite moyenne et le salaire moyen). Une autre raison d’inquiétude, c’est une polarisation très importante à l’intérieur des catégories de retraités. 81% de l’ensemble des retraités touchaient en 2009 des pensions inférieures à 1.000 lei par mois (227 euros). Un quart des retraités se sont vu attribuer des pensions inférieures au panier de consommation mensuel qui est de 444 lei (100 euros). 40% des retraités, donc deux millions de personnes, ont des retraites en dessous du seuil minimum de subsistance, calculé par l’INS en 2014 à 587 lei (133 euros). Une autre catégorie particulièrement vulnérable, ce sont les retraités agriculteurs : 98% d’entre eux ont des retraites en dessous du niveau minimum de subsistance. »



    Le problème de l’absence des soins à domicile, le manque de places dans les centres de placement pour les personnes âgées, mais aussi celui du personnel spécialisé dans les centres d’Etat, les tarifs élevés pour les retraités malades qui souhaiteraient résider dans un tel centre, mais un centre privé, ne sont que quelques aspects qui caractérisent le niveau de vie des personnes âgées de Roumanie. (trad.: Ligia Mihaiescu, Mariana Tudose)

  • Nouvelles chances pour les personnes défavorisées

    Nouvelles chances pour les personnes défavorisées

    Focalisés sur nos préoccupations quotidiennes, nous les croisons sans les remarquer ou, quand c’est le cas, l’impuissance se lit sur nos visages – si ce n’est le déplaisir. Il s’agit des SDFs qui errent dans les rues de la capitale et d’autres villes du pays. Bien souvent, leur histoire est celle d’un échec auquel chacun de nous peut être confronté et qui aurait pu être surmonté avec un peu d’aide de la part des autres. Pourtant, quelle sorte d’aide peut-on offrir à ces êtres? Un simple geste de charité passagère qui prolongerait leur statut de personnes assistées ou la possibilité de prendre leur vie en main, comme l’affirme Patrick Ouriaghli, directeur exécutif des « Ateliers sans frontières ».



    C’est le cas de Cătălin, militaire jusqu’en 1998 et qui a trouvé un emploi dans une société de sécurité privée. Suite à des problèmes professionnels et familiaux, il s’est retrouvé sans logement : « Il y a un an, j’habitais dans un abri situé dans le quartier Drumul Taberei avec un ami qui travaille avec moi. Je n’y habite plus, maintenant — c’était d’ailleurs la raison pour laquelle je suis venu aux « Ateliers » : trouver un logement convenable, assurer ma survie et ma reconversion professionnelle. »



    C’est toujours en quête d’un emploi stable et pour apprendre un autre métier qu’une autre personne en difficulté a rejoint les « Ateliers sans frontières ». Notre interlocuteur a travaillé comme électricien.



    Cătălin: « Je suis venu d’un centre communautaire, « La maison Ioana ». Avant, j’habitais un immeuble nationalisé qui a été rétrocédé. J’ai loué un logement, quelque part, pourtant je ne trouvais pas d’emploi ou bien, là où je travaillais, je ne touchais pas le salaire à temps. Je souhaite avoir un emploi stable, afin de pourvoir aux besoins de ma famille, de mes 4 enfants. Ma femme nettoie les escaliers de plusieurs immeubles d’habitations pour gagner un peu d’argent. Depuis 3 ans nous avons quitté « La maison Ioana ».



    Les personnes en difficulté embauchées par les « Ateliers sans frontières » reçoivent au début un salaire correspondant au SMIC, un repas chaud à midi et un abonnement leur permettant d’utiliser le transports publics. Là, ils remettent en état de vieux ordinateurs et participent également au recyclage des bannières publicitaires dont on fait des sacs chic. Ils acquièrent ainsi un savoir-faire qui leur sera utile pour se faire embaucher ailleurs et leur activité leur imprime un certain rythme de vie et de travail nécessaire à leur réintégration sociale. Pourtant, au-delà de ces gains palpables, selon Patrick Ouriaghli, regagner leur estime de soi est peut-être la chose la plus importante.



    Dans le nord du pays, à Beclean, petite localité du comté de Bistriţa-Năsăud, les autorités locales ont trouvé, à leur tour, une solution pour aider les 10 SDFs de la communauté: ils ont impliqué les églises de toutes les confessions de la ville — nous dit le maire Nicolae Moldovan : « Nous avons construit un centre communautaire d’assistance sociale comportant 6 pièces, bien grandes. Ils seront 2 ou 3 dans la même chambre. C’est la municipalité qui paiera l’eau, l’électricité et le gaz. Pour leur assurer le repas quotidien et une assistance morale ou spirituelle, nous avons conclu un partenariat avec toutes les églises de la ville, 12 au total. A tour de rôle, pendant une semaine, elles s’occupent de ces personnes de la façon dont elles l’entendent. Je leur ai recommandé de leur assurer un repas chaud à midi ou même 3 repas par jour, si possible. Nous avons également conclu un partenariat avec l’hôpital de Beclean, pour qu’ils puissent avoir accès aux soins. »



    A Beclean, tout le monde connaît les 10 SDFs, qui ont été, il n’y a pas si longtemps, des personnes intégrées dans la communauté, mais qui ont actuellement besoin d’aide pour regagner leur statut — au début avec le concours des autres, ensuite grâce à leurs propres efforts.



    Nicolae Moldovan : « Je pense que, petit à petit, nous réussirons à les réintégrer, quand ils constateront qu’ils bénéficient de notre aide. Jusqu’ici nous n’avions pas trouvé de solution pour eux et ils se sont sûrement sentis quelque peu abandonnés, mais quand ils verront que toute la communauté s’occupe d’eux, ils pourront être récupérés. »



    Le soutien et l’encouragement des autres ainsi que la reconquête de leur propre autonomie constitue, pour les SDFs, la clé d’un retour à la normalité — un retour souvent difficile, voire problématique. (Trad. : Dominique)

  • Le tabac et ses retombées sur l’économie

    Le tabac et ses retombées sur l’économie

    Le tabac tue dans lUnion européenne environ 700 mille personnes par an. Il continue de poser un sérieux défi à tous les Etats membres. En Roumanie, le tabagisme constitue la principale cause de maladie et de décès. Sur les plus de 42 mille victimes du tabac, deux tiers sont âgées de 35 à 69 ans, dans les conditions où, en 2011 par exemple, les fumeurs représentaient 27% de la population du pays.



    Il y a cinq catégories de maladies associées au tabagisme et des plus graves: maladies cardio-vasculaires, cérébro-vasculaires, la tuberculose, le cancer et les maladies respiratoires. Ce n’est pas que la santé qui en souffre, mais aussi l’économie, relève la récente étude intitulée « L’impact économique de la consommation de tabac sur le système de santé public de Roumanie ».



    Pour un décompte exact des dépenses de santé publique de 2012 destinées au traitement des maladies causées par le tabac, ont été considérés les frais d’hospitalisation pour les personnes souffrant de toutes les cinq catégories de maladies susmentionnées, ainsi que l’argent dépensé à travers les programmes nationaux de santé qui couvrent les traitements nouveaux de certaines d’entre elles.



    Le docteur Magdalena Ciobanu, qui travaille au ministère de la Santé en tant qu’experte du contrôle du tabagisme, nous a fourni des détails sur les résultats de cette étude. « Les médicaments remboursés, les consultations du médecin spécialiste ou du médecin traitant et tous les examens para cliniques nécessaires pour diagnostiquer ces maladies n’ont pas pu être quantifiés. Voilà pourquoi la somme indiquée dans l’étude est moindre que celle dépensée en réalité. En outre, les frais qu’implique le traitement de telles maladies dépassent le montant des recettes provenant de la taxe prélevée sur les produits de tabac. Ceci étant, la somme d’argent dépensée en 2012 à cette fin a été supérieure à 4 milliards de lei. Sur ce montant, 1,2 milliards de lei ont été alloués au seul traitement anti-tabac, alors que la taxe sur les produits de tabac n’a rapporté que 1,1 milliards. Il en résulte un déficit 100 millions de lei en 2012. En fait, ce déficit est beaucoup plus grand, mais en l’absence des données mentionnées, on n’a pas réussi à en déterminer le volume exact ».



    Près de 28% du montant total de plus de 4 milliards de lei affecté au traitement des cinq catégories de maladies représentent donc « la facture » du tabac. Voici les explications de Magdalena Ciobanu : «Quand on affirme que le tabagisme provoque par exemple le cancer du poumon ou l’infarctus du myocarde, la part du tabac varie d’une maladie à l’autre. C’est vrai qu’il peut causer une ou plusieurs de ces maladies, mais il est tout aussi vrai qu’il n’est pas responsable de la totalité des cas d’infarctus du myocarde ou de cancer du poumon. Il est à l’origine de seulement un quart des infarctus et de 86% des cancers du poumon. C’est ce qui explique la présence, dans l’étude mentionnée, de deux sommes: l’une représente le montant total des frais de traitement pour l’ensemble des maladies, l’autre – l’argent déboursé pour les seules maladies liées au tabagisme ».



    Instituée en 2006, afin de combattre la consommation excessive de tabac et d’alcool autre que la bière et le vin, « la taxe sur le vice » s’est avérée être soit insuffisante, soit inefficace. Elle devrait être appuyée par les six recommandations de l’Organisation mondiale de la santé : suivre la consommation de tabac, protéger les personnes face aux conséquences de la consommation de tabac, offrir de l’aide à ceux qui souhaitent renoncer au tabac, avertir au sujet du danger de la consommation de tabac, interdire la promotion des produits de tabac et augmenter les taxes.



    Ces mesures sont-elles applicables en Roumanie ? Réponse avec Magdalena Ciobanu : « Toutes les six mesures sont appliquées, mais pas du tout au maximum. Des pas importants ont été faits en 2007 — 2008 suite à l’adhésion de la Roumanie à l’UE. Dès lors, des progrès ont été enregistrés dans deux domaines, celui de la majoration des taxes sur les produits de tabac et celui du soutien à ceux qui souhaitent renoncer au tabac. Pour le reste, des stagnations ont été constatées, même s’il s’agit notamment de mesures législatives. Ce sont des mesures qui n’impliquent pas des investissements matériels de la part de l’Etat, mais uniquement un investissement de volonté du Parlement. Le meilleur exemple, c’est la loi sur l’interdiction de la cigarette dans les endroits publics fermés. Le projet de loi est au Parlement depuis 2011 et jusqu’ici il n’a pas été encore soumis au vote de la Chambre des députés. »



    Un certain appui dans la lutte contre le tabac peut venir aussi des institutions de l’UE par la révision, en avril dernier, de la Directive sur le tabac. L’eurodéputé Cristian Busoi, membre de la Commission d’environnement, santé publique et sécurité alimentaire, passe en revue le contenu de la nouvelle directive : « La directive révisée sur le tabac a constitué un sujet sensible et largement débattu au Parlement européen. C’est à peine en décembre de l’année dernière qu’un compromis entre le Parlement et le Conseil de l’UE a été trouvé. Une nouvelle directive révisée a pu être publiée en avril. Les Etats membres disposent d’un délai de deux ans avant de mettre en place cette directive qui en grande partie impose des avertissements de santé couvrant 65% de la superficie d’un paquet de cigarettes ou de tabac pour pipe. Les produits de tabac avec différents arômes sont interdits, tout comme les additifs, tels la caféine, les vitamines, les additifs de couleur et ceux qui facilitent l’inhalation et l’absorption de la nicotine. Des demandes supplémentaires sur la forme et le contenu du paquet ont été introduites dans le sens où les éléments présents sur le paquet et susceptibles de tromper le consommateur seront également interdits. »



    Par ces mesures, les institutions européennes espèrent rendre la consommation de tabac moins attractive, notamment parmi les jeunes. (trad. Mariana Tudose, Alex. Diaconescu)

  • Des livres accessibles à tous les porte-monnaies

    Des livres accessibles à tous les porte-monnaies

    Dans la Roumanie libérée du communisme et avide de récupérer la culture et la littérature jusqu’alors censurées, de nombreuses foires du livre sont organisées, depuis des années, à Bucarest et dans d’autres grandes villes du pays. « Bookfest », organisé en juin et « Gaudeamus », qui se tient en novembre, comptent parmi les plus connues et les plus fréquentées. La foire internationale du livre « Gaudeamus », lancée par la Radiodiffusion roumaine, est itinérante, des caravanes étant organisées tout au long de l’année à travers le pays. A cette occasion, les lecteurs peuvent acheter les plus récentes parutions, assister à des lancements de livres et à des conférences de presse, ils peuvent rencontrer les auteurs et acheter des livres à des prix promotionnels.



    Bien que le marché éditorial de Roumanie soit riche en publications, les ventes n’atteignent pas le niveau des tirages ni le nombre de titres publiés. La plupart des Roumains jugent le prix des livres trop élevé. Celui-ci va, en général, de 20 à 60 lei (soit de 5 à 16 euros), alors que le salaire net mensuel se monte à 1.700 de lei, soit 380 euros.



    Pour aider les lecteurs à se procurer leurs livres préférés à des prix accessibles, cela fait 10 ans qu’ à Bucarest est organisée la foire « Kilipirim », mot qui vient de « chilipir » – aubaine et qui propose aux visiteurs des livres à prix discount.



    Oana Boca-Stănescu, chargée des relations publiques de «Kilipirim», nous explique la spécificité de cette foire : « Nous avons d’autres foires du livre, comme, par exemple, « Bookfest » et « Gaudeamus », qui offrent également aux visiteurs des prix promotionnels. Pourtant, ces deux foires proposent surtout de nouveaux titres. A « Kilipirim » on trouve plutôt des titres plus anciens, que les gens ont l’occasion d’acheter à des prix cassés — alors que pour ces livres, les maisons d’édition ne pratiquent pas le discount aux autres foires. Sur les 24.000 titres publiés annuellement en Roumanie, un lecteur s’intéresse, peut-être, à une centaine. Et même ces 100 livres, il ne peut pas se permettre de les acheter tous. Il reste donc sur sa faim et garde dans sa tête — et dans son cœur — les titres laissés de côté. La raison d’être de « Kililiprim » est justement de nous permettre de récupérer ces livres qu’on a peut-être voulu acheter il y a un an ou deux, mais auxquels on a renoncé, faute d’argent, et qui se vendent à présent à 5 lei chacun, disons — soit environ 1 euro. »



    Les foires du livre sont utiles aux lecteurs, qui peuvent s’acheter plus facilement les livres souhaités, mais aussi aux maisons d’édition, confrontées au problème de la distribution.



    Oana Boca-Stănescu : « Si les foires du livre sont nécessaires, c’est généralement pour une raison moins réjouissante : les réseaux de distribution du pays sont peu nombreuses et ne réussissent pas à faire face à la quantité immense de livres proposés par les maisons d’édition roumaines. On publie énormément, par rapport au nombre de lecteurs. C’est pourquoi, de nombreuses chaînes de librairies ont fermé, d’autres ont tout simplement disparu. Dans les petites villes ou dans les moyennes, il n’y a plus de librairies, il y a éventuellement des papeteries où l’on vend aussi quelques livres, relégués dans un coin. »



    Bien que cette année « Kilipirim » ait été organisée dans un endroit différent, les visiteurs fidèles de cette foire ont trouvé le chemin, comme, par exemple, cette lectrice : « Je visite la foire « Kilipirim » depuis plusieurs années. Cela me permet d’enrichir ma bibliothèque et de voir quelles sont les nouveautés sur le marché du livre. Cette foire est une très bonne idée. Même si depuis quelque temps les prix des livres ont baissé, ils continuent d’être inaccessibles à certaines catégories de personnes. En outre, si plusieurs éditions se réunissent pour exposer, l’offre est plus variée et, du coup, les chances de trouver des titres qui vous intéressent, sont plus grandes. »



    Ce sont toujours les prix accessibles et l’offre variée qui attirent cette autre lectrice aux foires du livre: « Je m’intéresse aux foires « Kilipirim » et « Gaudeamus », ainsi qu’à la foire d’été, depuis des années. C’est une bonne chose, surtout par ces temps-là. Important ou insignifiant, un discount est toujours le bienvenu. A présent, que l’on dispose de librairies en ligne, avant de me rendre aux foires, je jette un coup d’œil sur Internet, pour voir ce qui me manque. Ensuite, je visite les foires qui rassemblent tous les livres publiés, classés par thèmes. »



    Quant aux prix des livres, elle avoue qu’ils sont élevés, notamment pour certaines catégories sociales. Et il lui arrive d’acheter des livres qu’elle a déjà. Pourquoi ? « Pour les offrir. C’est un effort pour moi, mais ça me fait plaisir. Ce livre-là est pour mon amie, qui ne peut pas se permettre de l’acheter. Nous, les amies, nous regardons sur Internet, nous nous renseignons mutuellement. J’ai des amies plus âgées, qui sont à la retraite et qui ne sont pas connectées à Internet et je leur annonce toujours la date de cette foire.»



    De l’autre côté de la barricade se trouvent les éditeurs et les prix qu’ils pratiquent. Oana Boca-Stănescu: « J’ai travaillé pendant 9 ans dans une maison d’édition et je sais pourquoi les livres coûtent autant en Roumanie. Les tirages sont faibles et un cercle vicieux s’est créé: les gens ne se permettent pas de dépenser beaucoup d’argent pour les livres ou ne sont pas au courant des nouvelles parutions — car on publie énormément — et alors ils n’achètent pas. S’ils n’achètent pas, les tirages restent faibles. Alors les livres ont les prix qu’ils doivent avoir. Que cela nous plaise ou pas, les maisons d’éditions sont des entreprises et elles ne peuvent pas travailler à perte. Dans le prix d’un livre se retrouvent les coûts du papier, de la traduction (si c’est le cas), les salaires du rédacteur, de la personne qui s’occupe de la promotion du livre etc. »



    Organisée deux fois par an, au printemps et en automne, la foire des livres à prix cassés vient en aide aussi bien aux lecteurs qu’aux maisons d’édition, qui vendent ainsi plus de livres et gagnent des acheteurs. (Aut.: Christine Leşcu; Trad. : Dominique)