Category: Fêtes et traditions

  • Les traditions autour de la fête de Saint Barthélemy

    Les traditions autour de la fête de Saint Barthélemy

    Le 25
    août, l’Eglise orthodoxe fête la Translation des reliques du Saint Barthélemy.
    Il est un des douze apôtres de Jésus Christ, qui, avec Thomas et Jude Thaddée,
    a prêché dans la région de la Grande Arménie et qui, selon des légendes
    différentes, a été soit écorché vif, soit crucifié et décapité. Mais qu’est que
    l’on célèbre du point de vue religieux le 25 août ?


    En bien, selon quelques légendes, les reliques
    du Saint ont été déposées dans un cercueil de plomb, qui a été ensuite jeté à
    la mer, a traversé la mer Noire et l’Hellespont, a passé par la mer Égée et la
    mer Adriatique, et s’est arrêté sur la côte de l’île de Lipari. Par contre, selon
    d’autres sources, ses reliques auraient été transférées à Martyropolis, dans
    l’est de l’Anatolie, vers 410, puis à Dara, en Mésopotamie, sur ordre de
    l’empereur byzantin Anastase le Ier, en 507, où Justinien a fait construire une
    église en l’honneur du Barthélemy, après à Phrygie, vers 546. Les reliques
    auraient été transférées enfin à Lipari en 580. Et c’est justement ce transfert
    des reliques de Saint Barthélemy à Lipari, en 580, que l’Eglise marque le 25
    août. Dans la tradition roumaine, cette fête, connue aussi sous le nom de
    « fête des Vârtolomei » marque
    le passage de l’été à l’automne. C’est le jour où l’on commence les préparatifs
    pour l’automne, on soigne les animaux afin qu’ils survivent l’hiver et on voit
    les premiers signes du changement de la saison. L’ethnologue Florin-Ionuț Filip Neacșu nous
    explique :


    « Le Saint Apôtre Barthélemy est un
    des douze apôtres de Jésus Christ, qui a reçu sa mission de se rendre dans
    l’ouest de l’Asie Minore d’aujourd’hui, là où se croisent aujourd’hui la
    Turquie, l’Arménie, la Géorgie, bref le Caucase, afin d’accomplir sa mission
    d’évangélisation. C’est à cet endroit que ce saint est devenu martyr. Sa fête
    suit les fêtes du « mois du Gout ». Dans la tradition populaire, son
    nom (note de la rédaction « Vartolomeu », dans quelques régions du
    pays) est lié à l’idée de « tournure » (en roumain, « învârtire »). C’est ainsi que dans le
    folklore roumain on dit qu’à l’occasion de cette fête, le jour se tourne de
    même que le poulet dans l’œuf. Dans plusieurs villages de Roumanie, on dit qu’à
    partir du 25 août, le coucou ne chante plus. Les « Vartolomei » sont associés au retour des
    jours et c’est ainsi que la durée de la nuit augmente. »


    Le
    pâturage était une des occupations principales des communautés roumaines
    archaïques puisque le climat et le relief ont facilité l’élevage des moutons
    dans les Balkans et au nord du Danube. C’est ainsi que la fête des « Vartolomei »
    est liée aux traditions concernant les moutons.


    L’ethnologue
    Florin-Ionuț
    Filip Neacșu nous offre plus de détails : « Dans les villages roumains il est interdit de filler la laine,
    d’aiguiser ou bien de préparer la polenta traditionnelle. Qui plus est, la fête
    des « Vartolomei » est
    aussi une fête des ovins, lorsqu’on se préoccupe de la bonne santé des animaux.
    C’est très intéressant qu’une fête chrétienne coïncide à une vieille
    célébration liée au fait que les coucous arrêtent leur chant et que les moutons
    doivent être soignés afin qu’ils ne tombent pas malades en fin d’été. La fête
    des « Vartolomei » est
    toujours respectée dans les villages montagneux et sous-montagneux et elle est
    très bien connue par nos bergers. Plusieurs villages ont fait du Saint
    Barthélemy le protecteur des villages des bergers. Bref, on commence les
    préparatifs pour l’automne. »



    Rapelons pour finir
    que dans la tradition roumaine le calendrier marque aussi les moments les plus
    importants dans l’activité de l’elevage des animaux. Les communautés vieilles partageaient
    l’année dans deux saisons, soit celle chaude et celle froide, chaqune marquée
    par des rituels spécifiques, transmits de génération en génération. C’est la
    fête du Saint Barthélemey qui marque le passage vers la saison froide. (Trad. Andra Juganaru)

  • Les journées du Macovei

    Les journées du Macovei

    Le Macovei est la forme populaire d’une série de personnalités du Vieux Testament, les Maccabés, ceux qui ont mis sur pieds une nouvelle dynastie royale juive durant les deux premiers siècles avant Jésus Christ. Dans le calendrier traditionnel, le mois d’août débute par des journées appelées « Macabeiul ursului », « Le Maccabé de l’ours ». Il s’agit des premiers jours du mois d’août, mais c’est sous le même signe de la domination de l’ours que se déroulent toute une série de rituels spécifiques durant le carême de l’Assomption ou de la Dormition dans la tradition orientale. Pendant plusieurs jours consécutifs, toute une série de traditions anciennes se déroulent sur tout le territoire de la Roumanie. Et pourtant, peu de passionnés du folklore roumain connaissent la vraie signification de cette période dédiée à un animal emblématique pour l’espace des Carpates. Dans les sociétés anciennes, les hommes portaient une dent d’ours en guise porte-bonheur, puisqu’on disait que celle était capable de chasser les mauvais esprits et les maladies. Détails avec l’ethnologue Florin-Ionuț Filip Neacșu : « C’est une fête mois connue puisqu’elle est répandue notamment parmi les communautés qui vivent à proximité des forêts peuplées par les ours. Aujourd’hui encore, la Roumanie détient la moitié de la population totale d’ours brun d’Europe. Rien qu’en 2009, ils étaient plus de 7 000 exemplaires. Les villages roumains situés aux pieds des Carpates, qu’il s’agisse de Moldavie, de Bucovine, de Transylvanie, du Maramures, tout comme ceux de Crisana, du Banat, d’Olténie ou de Valachie étaient rencontraient souvent ce personnage devenu mythique. Début août, les villageois pensaient qu’en cette période c’est la saison de rut des ours et que des petits oursons allaient apparaitre prochainement. En Moldavie, cette fête était marquée le 6 août, alors que dans le Pays du Heteg, elle coïncidait avec l’Assomption le 15 août. Cette fête était liée en fait à la peur qu’éprouvaient les Roumains des villages de montagne face à ce farouche mammifère »

    Les légendes populaires présentent l’ours comme un animal tout à fait spécial et la ressemblance de sa silhouette à celle de l’Homme se retrouve dans la majorité des versions de la légende évoquée par Florin-Ionuț Filip Neacșu : « Certes il provoque la peur et plus que cela, les légendes affirment que l’ours serait en effet un être humain. Lorsque Dieu et Saint Pierre sont descendus sur terre, un homme se serait déguisé en une peau de mouton, même si en réalité son métier était celui de meunier. Les meuniers n’étaient pas trop aimés par les Roumains habitants des villages de montagne, puisque le payement qu’ils demandaient était trop élevé, selon eux. Pour revenir à notre légende, Saint Pierre s’est métamorphosé en ce meunier habillé de peux de mouton, ce qui expliquerait en quelque sorte la ressemblance entre l’homme et l’ours, les deux des animaux bipèdes. »

    Les Roumains des villages dédient ces jours torrides d’été à l’ours et tentent de coexister avec cet animal sauvage sans le déranger. Il y a des lustres l’ours était perçu comme un petit voisin, qui vit dans la forêt juste à côté mais qui ne maitrise pourtant pas l’art de la création du feu. Dans le calendrier traditionnel, ces fêtes consacrées à l’ours se déroulent tant en été qu’en hiver.

  • Le mois qui fait le passage vers l’automne

    Le mois qui fait le passage vers l’automne

    Le mois d’août, de même que chaque occasion du changement du temps, est riche en traditions dans toute la Roumanie.Il s’agit du mois le plus productif dans l’agriculture.
    C’est ainsi que les Roumains l’ont appelé « le mois du gout ». C’est
    en août que l’on recueille les premières récoltes, les céréales, les fruits et
    les légumes d’automne. C’est aussi le mois d’août qui marque le début des
    préparatifs pour les vendanges ainsi que pour la saison froide qui suit.


    En ce qui
    concerne le calendrier liturgique, le 15 août on célèbre une des plus grandes
    fêtes de l’Eglise Orthodoxe. Il s’agit de la Dormition de la Mère de Dieu, soit
    la Vierge Marie, qui, selon les textes bibliques et apocryphes est la mère de
    Jésus Christ (qu’elle a conçu du Saint Esprit), le Fils et le Verbe de Dieu,
    qui, par son propre sacrifice, a offert à l’homme l’opportunité d’obtenir le
    salut. La Dormition de la Vierge Marie est la dernière fête de l’année
    liturgique, qui s’achève le 31 août, non seulement en continuant une tradition
    romane ancienne et la tradition hébraïque, mais aussi pour marquer le fait qu’à
    ce moment les croyants moissonnent leurs récoltes spirituelles. Comme chaque
    grande fête, celle-ci est aussi précédée par une période de jeûne. Dans
    l’Eglise Orthodoxe, dans une période de jeûne, on ne mange pas de viande (y
    compris de poisson), de produits laitiers, d’œufs et, les lundis, les mercredis
    et les vendredis, on s’abstient même d’huile et de vin. Dans la tradition
    populaire roumaine, donc, on croit que les « Cercles de la sainte
    Marie » protègent et apportent de la richesse à tous ceux qui ont respecté
    la période de jeûne. Delia Suiogan, ethnologue à l’Université du Nord de Baia Mare,
    nous explique :


    « Les Cercles de la Sainte Marie inspirent l’homme à se concentrer plutôt
    sur le désir d’assumer et de se purifier des pêches, au lieu de donner
    attention à ses possessions. Cette purification spirituelle a des effets
    positifs pour toute l’année qui suit. C’est la raison pour laquelle, même si les
    mardis, les jeudis et les samedis les croyants ont dispense d’huile et de vin,
    on ne renonce pas à la prière. C’est très important que, chaque soir, on fait
    une grande prière, pendant que dans toute église on chante la Paraclisis de la
    Mère de Dieu (n.d.r. du grec « Paraclisis », qui veut dire « appel,
    appeler à l’aide, supplication », soit un des plus beaux textes liturgiques).
    On dit que toutes ces grandes prières, que l’homme fait chaque jour,
    construisent autour de celui qui renonce à « avoir » pour
    « être » un cercle protecteur, qui le protège de tout ce qui est
    maléfique. »


    Après la fin du
    jeûne qui précède la fête de la Dormition de la Mère de Dieu, le 15 août, on reprend
    les cérémonies de mariages et les fêtes au sein des communautés
    traditionnelles. On pense aussi que l’été se retire peu à peu, pour laisser sa
    place à la saison froide.


    Delia Suiogan,
    ethnologue à l’Université du Nord de Baia Mare, nous offre encore de
    détails :


    « Le jeûne de la Sainte Marie court, de deux semaines, existait depuis la
    nuit des temps. Après la fête de la Dormition de la Mère de Dieu (soit la
    Sainte Marie Grande) jusqu’au jeûne de la Nativité on prévoit les plus grandes
    cérémonies de mariage, avec le vin neuf, obtenu après les vendanges. Les
    croyants se préparent aussi pour une autre grande fête, la Nativité de la Mère
    de Dieu (soit la Sainte Marie Petite, le 8 septembre). Entre ces deux fêtes, la
    Sainte Marie Grande et la Sainte Marie Petite, il faut faire tous les labours
    d’automne et faire les ensemencements d’automne. D’ailleurs, on dit que tout ce
    que l’on ensemence après la Sainte Marie Petite, le 8 septembre, ne peut pas germiner
    ou bien risque de geler dans le sol. »



    La
    dernière grande fête de l’été et celle appelée « Le Saint Jean
    d’automne ». Il s’agit de la Décollation du prophète Jean Baptiste, soit
    la mort de Jean Baptiste par décapitation, exécuté sur ordre d’Hérode Antipas,
    à la demande d’Hérodiade, avec qui il avait une relation immorale lorsqu’elle
    était la femme de son frère. C’est pourquoi il y a toute une série de
    traditions à la fin du mois d’août. Comme cette fête rappelle la décapitation
    de Saint Jean Baptiste, le jour appelé « Sântion » on ne mange aucun aliment dont la forme
    rappelle celle d’une tête, surtout le chou. Dans quelques régions de la
    Roumanie, dans ce jour on mange uniquement des raisins, tandis que dans des
    autres communautés on fait le jeûne total, sans rien manger ou boire (même pas
    d’eau) jusqu’au coucher du soleil.

  • La semaine du feu dans la tradition roumaine

    La semaine du feu dans la tradition roumaine

    Oui, il
    fait chaud à la fin juillet en Roumanie, mais il y a aussi d’autres dangers
    qu’il faut éviter. Mais sachez aussi qu’en cette période certains de nos alliés
    deviennent plus forts que jamais. Dans la tradition roumaine, on dit que du 13
    au 27 juillet, il ne faut ni jeter des pommes en haut, ni les couper au
    couteau, afin de ne pas attirer la
    grêle. Qui plus est, les plantes thérapeutiques ont des pouvoirs miraculeux durant
    cette période, parmi lesquels celui de de guérir même la paralysie. L’apogée de
    l’été est la période connue sous l’appellation de « Pantelii » ou
    « Pălii » en roumain, comme on appelle la seconde moitié du mois de
    juillet (ou le mois du Four) dans la tradition roumaine. Du 13 juillet jusqu’à
    la fin du mois, on célèbre les fêtes du feu, y compris la plus importante de
    l’été : la fête de Saint Elie (20 juillet).


    La fête
    appelée « Pantelii » a une signification à part dans le calendrier traditionnel
    roumain. Ces êtres mythologiques, considérées les sœurs du Saint Elie, étaient
    jugées comme responsables des phénomènes météorologiques extrêmes de l’été,
    surtout de la canicule. C’est pourquoi, afin de respecter les « Pantelii »,
    du nord au sud et de l’est à l’ouest, les gens ne travaillent pas durant
    certains jours. Delia Suiogan, ethnologue à l’Université du Nord de Baia Mare,
    nous explique :


    « Les
    « Pălii » commencent le 13 juillet. Elles sont les sœurs du Saint
    Elie et ont la mission de rappeler aux gens que la fête du Saint Elie approche
    à grands pas. Il y a une autre fête qui annonce celle du Saint Elie. Il s’agit
    de la « Ciurica », qui précède les « Circovi » du Saint
    Elie. C’est un cercle magique, protecteur, qui d’habitude précède les grandes
    fêtes. Selon la tradition, si on respecte les « Circovi » du Saint
    Elie, on ne sera jamais touché ni par le feu ni par la grêle, ou littéralement la
    « grande pierre » selon le vocabulaire paysan. Les « Circovi »
    nous protègent de toute maladie avant chaque grande célébration de l’année.
    C’est pourquoi il faut les respecter trois jours avant la fête, afin d’être mieux
    protégé de maladies ou afin de pouvoir être guéri. »


    Dans les
    communautés traditionnelles, les femmes faisaient don de toute sorte de
    volailles noires pour que la chaleur étouffante ne rende pas malades les
    animaux du foyer. En juillet lorsque la météo est caniculaire, il est difficile
    de nettoyer la maison ou faire d’autres activités domestiques durant la
    journée. C’est pourquoi les mères de famille choisissaient de faire de telles
    activités durant la nuit. Mais voilà que seule nuit durant laquelle les travaux
    domestiques étaient permises était celle du 16 au 17 juillet, connue aussi comme
    « la nuit de la Marine ». En effet dans le calendrier
    orthodoxe, le 17 juillet marque la fête de la Sainte Martyre Marine. Bien sûr,
    les interdictions se poursuivent jusqu’au 20 juillet, la fête du Saint Elie, ou
    bien jusqu’au 27 juillet, la fête du Saint Pantéléimon. Delia Suiogan,
    ethnologue à l’Université du Nord de Baia Mare, nous explique encore :


    « On
    respecte la fête du Saint Elie rigoureusement. On dit que ceux qui ne
    respectent pas ce jour ou les autres jours liés au feu auront à souffrir :
    leur maison, la meule de foin ou bien une personne de la famille risquait
    d’être frappé par la foudre. On dit aussi que Saint Elie sillonne le monde, tant
    dans le ciel et que sur la terre, pour chasser les diables. C’est pourquoi on
    ne doit pas se cacher de la pluie sous des arbres tels les charmes ou dans des
    lieux isolés, ou entre des murs qui forment des angles aigus, car on dit que les
    diables se cachent eux-aussi dans ces endroits. Saint Elie, qui souhaite les chasser
    de la terre et du ciel, jetterait des foudres vers tout endroit où ils peuvent
    se cacher. Donc, si les gens se cachent aussi dans ces lieux, ils mettent leurs
    vies en danger. On dit aussi que, si une tempête commence le jour du Saint
    Elie, c’est mieux de rester à ciel ouvert, au milieu des champs, que de se
    cacher, car autrement on sera frappé par la foudre. »


    On ne doit
    interpréter toutes ses significations qu’ensemble afin de pouvoir correctement
    comprendre les fêtes du feu, c’est-à-dire les « Pantelii » et
    les trois jours du feu en marge du jour de la fête de Saint Elie, ainsi que la
    fête du Saint Pantéléimon, qui est connue aussi comme « le feu
    destructif ». C’est pourquoi tous ces jours sont tellement respectés
    dans la tradition populaire, même plus que la fête du Saint Elie.





  • Les traditions du jour de Saint Procope

    Les traditions du jour de Saint Procope

    Chaque année, le
    8 juillet les Roumains des communautés rurales célébraient Le Jour du Loup. Le
    nom traditionnel de la fête était « Precup ». Son origine est
    préchrétienne, mais plus tard le jour a été lié à la fête liturgique des Saints
    Pierre et Paul (marquée le 29 juin). Et puis, le début du mois de
    juillet est la période de l’année où le loup est actif. C’est pourquoi
    les gens respectaient la fête de Saint Procope, celui qui, selon les légendes
    populaires, pouvait intervenir sur les animaux de proie pour défendre
    les foyers. Tant Saint Pierre, que le personnage de l’imaginaire populaire
    appelé « Pricopie » (Procope en français) étaient responsables pour
    les phénomènes météorologiques extrêmes caractérisant le mois appelé en
    roumain « Le Four ». Dans la tradition populaire, Procope (soit
    « Pricopie » ou « Procopie » en roumain) est respecté, car
    il veille au murissement des récoltes agricoles et il protège les cultures et
    les foyers de la foudre et de la grêle. Il avait aussi le
    pouvoir de faire les champs porter leurs fruits et de transformer la grêle en
    gouttes d’eau avant qu’elle ne tombe sur le sol.


    Si sa fête n’est
    pas respectée, on dit que Procope lance de la chaleur et sèche le grain avant d’être
    récolté. Les habitants des monts Apuseni pensent même que ceux qui n’observent
    pas les rituels de « Precup » peuvent être emportés par des vents
    violents. L’ethnologue Florin-Ionuț Filip Neacșu nous explique :


    « Le calendrier des fêtes
    traditionnelles roumaines a plusieurs jours dédiés au loup, à la fois en
    automne et en été, autour du 8 juillet. Dans le calendrier chrétien ces fêtes
    se chevauchent avec la fête du Saint Procope. Les Roumains assimilaient ce
    saint à une divinité préchrétienne, le loup, qui à cette époque de l’année
    influençait le murissement des cultures céréalières, c’est-à-dire qu’il
    accélérait la maturation des récoltes de blé. Ainsi, le blé était-il bien mûri
    et n’était pas attaqué par des ravageurs. C’est une croyance très répandue en
    Moldavie (est) et en Bessarabie (nord-est), mais aussi en Dobroudja (sud-est).
    En Munténie et Olténie (sud) et au Banat (ouest), dans les régions de Crișana (nors-ouest)
    et de Maramureș (nord)à, le jour de « Precup », il ne fallait pas
    travailler, car la grêle ou les pluies torrentielles pouvaient détruire les
    récoltes. On croyait également que ce jour-là, le coucou ne chantait pas, mais chassait
    les moineaux. Cette fête à la fin de l’été et avant la récolte est observée
    aujourd’hui dans peu de communautés et surtout par les personnes âgées. Elle
    est pourtant mentionnée dans les musées ethnographiques et dans
    les livres spécialisés, pour la faire connaître aussi à la jeune
    génération »



    Le jour
    du « Precup », on ne travaillait pas les champs et on ne lavait pas le
    linge. Il était interdit de filer la laine, pour que les loups n’attaquent
    pas les troupeaux. Il était également interdit de couper avec les ciseaux, le
    couteau ou la faux, car les loups pouvaient aussi attaquer les gens pendant
    cette période. Pour s’assurer que toute la famille suivait ces restrictions,
    les gens cachaient tous les objets du foyer qui coupaient. Le jour du loup ou le
    « Precup » reste, dans le calendrier populaire roumain l’une des
    fêtes estivales les plus importantes, même si la plupart des règles strictes
    imposées à ce jour ont disparu de nos jours. (trad. Andra Juganaru)

  • Les traditions roumaines du mois de juillet

    Les traditions roumaines du mois de juillet

    Dans la tradition roumaine, le
    septième mois de l’année est connu sous le nom de « Four ». Ce nom
    est dû à la fois au temps extrêmement chaud durant cette période de l’année et
    au fait que le blé commence à mûrir. Toujours selon les croyances
    traditionnelles, le blé et les produits alimentaires qui contiennent des grains
    de blé sont aussi utilisées dans des rituels. D’ailleurs, la farine de blé est
    l’ingrédient de base d’un pain rond, appelé « colac », qui fait
    partie de presque tous les rites de passage. Il est entre autres le symbole du
    soleil. Les semaines du mois de juillet, quant à elles, ont aussi des noms
    symboliques : la semaine de la récolte, la semaine des
    « Pantelii », la semaine du Saint Elie et la semaine de l’été. Pour
    explication, pendant la semaine de la récolte, les gens travaillent dans les
    champs à partir du lever jusqu’au coucher du soleil. Puis, la deuxième semaine de
    juillet est dédiée aux sœurs du Saint Elie, appelées « Pantelii ».


    D’ailleurs, dans le calendrier
    populaire et liturgique, le mois de juillet est marqué par les fêtes des saints
    dont le rôle est de protéger du feu les récoltes agricoles. Durant cette
    période, les températures excessives peuvent provoquer des incendies. Alors les
    gens prennent des précautions. Delia Suiogan, ethnologue à l’Université du Nord
    de Baia Mare, nous explique :


    « Cette période était
    liée à d’anciens rituels qui suivaient la structure de l’année en seulement
    deux saisons, et non en quatre saisons comme elles sont marquées de nos jours. Il
    n’y avait que l’été et l’hiver. Dès la fin de l’été, les portes de l’hiver
    s’ouvraient. L’été entrait dans la terre et l’hiver s’en allait, de sorte que
    le printemps et l’automne n’étaient que des périodes de transition, et non pas
    de vraies saisons, dans ce contexte. Les gens formaient ce qu’en roumain on
    appelait « hora », soit un cercle magique, afin d’aider le Soleil à
    rester plus de temps dans le ciel. Et pour cause. Les épis n’étaient pas encore
    tout à fait mûris et le maïs risquait de ne pas atteindre la maturité idéale.
    Le blé était déjà à un stade de murissement assez avancé. Quand même, les gens
    dansaient aussi autour des champs de blé, pour que le grain soit plein et pas
    sec. On disait que si le Soleil « mourait » à ce moment-là, le grain
    de blé ne serait plus bon pour faire de la pâte à pain. »



    Dans la tradition roumaine, au mois du
    « Four », il y a donc des danses appelées « hora », c’est-à-dire
    des rondes qui renvoyaient à un ancien culte solaire. A part cela, il y avait aussi
    plusieurs règles non-écrites que les communautés rurales traditionnelles respectent
    aujourd’hui encore. Chaque année, au milieu de l’été, les gens nettoyaient
    leurs granges et cours pour y stocker les récoltes d’automne. La première fête
    du mois du « Four » avait lieu le 8 juillet et était dédiée au Saint
    Procope. La fête est aussi traditionnellement connue comme « La journée du
    loup ». Saint Procope joue un rôle important dans le murissement des
    grains, car il les protège des phénomènes météorologiques défavorables. Si les
    gens ne respectent pas sa fête, on dit que le saint Procope envoie sur la Terre
    des éclairs, de la grêle ou de la chaleur, ou bien qu’il se transforme en loup
    pour enlever les enfants des gens qui travaillent dans le foyer pendant les
    jours de fête. (Trad. Andra Juganaru)

  • Des traditions roumaines au milieu de l’été

    Des traditions roumaines au milieu de l’été

    Le solstice du 21 juin, quand le soleil atteint son
    intensité maximale, marque le débutde l’été astronomique. C’est pourquoi, tous
    les rites traditionnels qui se déroulent à ce moment de l’année invoquent
    l’énergie solaire.


    La Fête appelée dans la tradition roumaine « Sânziene »
    est liée aux rites anciens, qui viennent compléter le culte chrétien, qui
    gardent cependant leur symbolisme préchrétien presque inchangé. Les plantes des
    champs typiques pour l’été, aux fleurs disposées en bouquet, petites et jaunes,
    sont devenues homonymes de créatures mythologiques féminines, qui ont des
    pouvoirs magiques. Ces femmes, appelées « Sânziene », également connues
    sous le nom de « Drăgaice », gouvernent les champs, les forêts et les
    eaux. Selon la foi populaire, pendant le solstice d’été, elles transmettent
    leurs pouvoirs miraculeux aux plantes médicinales. Delia Suiogan, ethnologue à
    l’Université du Nord de Baia Mare, nous a expliqué :



    « Les femmes appelées « Drăgaice »
    portaient un drapeau au sommet duquel elles attachaient neuf plantes magiques,
    de même que dans le rituel des hommes appelés « Călușari ».
    D’habitude on finit la récolte des plantes médicinales vers la mi-juin. Alors
    que l’été est à son apogée, on dit que toutes les fleurs et plantes perdent
    désormais leur pouvoir de guérison. Dans les villages roumains on dit qu’après
    le 24 juin, seules les sorcières cueillent encore des plantes, qui n’ont que
    des pouvoirs maléfiques. Le rituel appelé « Drăgaica » est très
    ancien également parce qu’il vient continuer les danses des « Călușari », qui
    sont des danses masculines. Cette fois-ci, le rituel de la « Drăgaica »
    est observé par un groupe de femmes. Il est très intéressant que dans les
    costumes des « Drăgaice » on trouve les mêmes éléments que dans les
    costumes des « Călușari ». Il y a ces couronnes des fleurs
    bleues qui ont poussé dans le blé, également appelées « drăgaice » et
    « cicoare ».


    Un autre rituel intéressant sont les couronnes des fleurs
    tressées à l’occasion de la fête des « Sânziene », qui sont ensuite
    lancées vers les toits des maisons, tant par les jeunes que par les vieux du
    village. Traditionnellement, on dit que le lieu où ces couronnes tombent montre
    des signes concernant les événements à venir tout au long de l’année. Les
    couronnes qui tombaient du toit annonçaient soit le mariage, soit la mort de
    quelqu’un. Par contre, si elles restaient sur le toit de la maison, cela
    signifiait qu’aucun changement important n’allait se produire dans la vie des
    membres de la communauté. Dans certains villages, les gens marchent avec des
    torches allumées autour de la maison et du champ. Les filles cueillent des épis
    de blé, des gaillets jaunes et d’autres plantes pour en tresser des couronnes.
    Après, elles les mettent sur leur tête et commencent la danse appelée
    « Drăgaica ». C’est une danse censée d’invoquer l’abondance, mais
    aussi la protection des foyers et des champs. On dit que cette danse entraine
    aussi le soleil à danser, alors qu’il reste dans le ciel plus longtemps que les
    autres jours de l’année. On croit aussi que, le jour des « Sânziene »,
    les cieux s’ouvrent et que le monde des défuntscommunique avec notre monde. A
    cette occasion, dans de nombreuses régions du pays, on célèbre encore des officesà
    la mémoire des défunts.(trad. Andra Juganaru)

  • Le rituel des “Paparude”

    Le rituel des “Paparude”

    Dans
    la tradition roumaine pastorale et agricole, on trouve aussi des rituels visant
    à aider la nature avoir assez d’eau et de chaleur tout au cours d’une année. La
    pluie est toujours absolument nécessaire au bon déroulement des activités
    agricoles durant l’été et, implicitement, afin d’obtenir une riche récolte à
    l’automne. Ainsi, au cours du dernier mois du printemps, y-a-t-il des rituels
    destinés à chasser la sécheresse et à convoquer la pluie pour arroser les
    champs.


    Ces
    rituels sont observés par des femmes appelées en roumain des « paparude ».
    On les retrouve dans plusieurs zones de la Roumanie, dont nous parle l’ethnologue Florin Ionuț Filip-Neacșu :




    « Il s’agit des zones où l’agriculture intensive était pratiquée, soit
    les plaines du sud du pays, et en particulier la plaine du Danube, mais aussi le
    plateau central de la Moldavie (dans l’est) et les vallées des rivières de
    Transylvanie ou dans le Banat et la Crișana (dans l’ouest). Cette coutume se
    perd dans la nuit des temps, car les ethnologues et les ethnographes tant
    roumains qu’étrangers proposent des versions différentes sur ses origines. On
    pense qu’il s’agit d’une tradition préchrétienne ancienne invoquant une
    divinité de l’eau. Le rituel des femmes appelées « paparude» était
    une censé invoquer la pluie en période de sécheresse. Dans son ouvrage
    « Descriptio Moldaviae » (La Description de la Moldavie, en latin), Dimitrie
    Cantemir (un des premiers écrivains de Moldavie) décrit un groupe de jeunes
    vierges menées par une femme plus âgée, qui à son tour avait été une
    « paparuda» dans sa jeunesse. Celles-ci étaient légèrement vêtues, se recouvrant
    d’un costume fait de feuilles d’absinthe et d’autres plantes se trouvant au bord
    de l’eau. »




    On
    dit que lorsque les « paparude », ces invocatrices de la pluie, observent
    leur rituel en parcourant le village, toutes les erreurs des femmes sont
    pardonnées. Les hommes n’ont pas le droit de se fâcher s’ils sont arrosés d’eau
    de la tête aux pieds, car tout mécontentement entraînerait l’annulation de la pluie. Les
    enfants étaient autrefois inclus dans ce rituel, en particulier les filles qui
    n’avaient pas encore atteint l’âge de l’adolescence et qui suivaient les mêmes
    règles strictes que les femmes adultes participant au rituel. Aujourd’hui,
    toute cette procession a un caractère plutôt ludique. Dans le passé, cependant,
    la danse des « paparude » avait des étapes très bien établies et
    respectées.

    Florin Ionuț Filip-Neacșu nous en offre plus de détails :


    « Les villageois attendaient cette procession devant leurs portes avec des
    seaux remplis d’eau et ils lançaient au cortège de l’argent, des fruits ou des
    fleurs. D’après certaines informations conservées par écrit, il semble que ce
    groupe des « paparude » était une sorte de confrérie initiatique, qu’un
    serment y était même prêté et que cette cérémonie était organisée de manière
    hiérarchique. De nombreuses photographies de cette coutume ont également été
    conservées. Aujourd’hui encore, en période de sécheresse, dans les villages de
    Roumanie, des réminiscences de cette coutume persistent, comme une sorte de jeu
    d’enfant. »




    Comme
    définition on pourrait dire que la coutume des « paparude » est une manifestation
    collective et publique d’un acte magique visant à attirer la pluie. Au cours
    des dernières décennies, ces processions au bord des rivières sont devenues un véritable
    spectacle et le rituel a beaucoup changé par rapport à sa forme initiale, même
    s’il est encore présent dans les régions ethno-folkloriques du sud de la Roumanie.
    La danse des « paparude » se retrouve aussi chez les voisins de la
    Roumanie, soit la Serbie, la Hongrie ou la Bulgarie. (Trad. Andra Juganaru)



  • Le rituel du Caloian

    Le rituel du Caloian

    Nous nous penchons aujourd’hui sur un
    rituel très intéressant des communautés traditionnelles roumaines : le
    « Caloian », un rituel d’invocation de la pluie. Très attendu par les
    villageois, il implique surtout les enfants et les adolescents. Ce rituel, qui
    reste un élément important du patrimoine culturel roumain, est aussi observé
    dans d’autres pays et cultures.


    Le principal objectif du rituel « Caloian »
    est de s’assurer une récolte faste. C’est pourquoi, toutes les coutumes
    spécifiques au printemps tournent autour des rituels consacrés à la fertilité
    des terres agricoles. Ainsi, les habitants espèrent attirer les conditions météorologiques
    favorables à leurs cultures, en effectuant chaque année le « Caloian »,
    comme nous l’explique Delia Suiogan, ethnologue à l’Université du Nord de
    Baia Mare :

    « Tous les mardis et les jeudis entre la Pâque
    orthodoxe et la Pentecôte, sont marqués par des rituels strictes pour avoir une
    bonne récolte. Et pour cause. L’année agraire commence à la Saint Georges (le
    23 avril), tout comme l’année pastorale. C’est pourquoi, toutes les célébrations
    suivantes visent à invoquer la richesse pour une année prospère, aussi bien
    pour les terres que pour le bétail. Le « Caloian » est une coutume très ancienne observée
    après Pâques. C’est un rituel d’invocation de la pluie qui s’inspire d’un
    rituel solaire encore plus ancien. Il était célébré notamment à l’extérieur de
    l’arc des Carpates roumaines, sans être trop répandu en Transylvanie (centre.
    Par exemple on ne le retrouve ni dans le Banat, ni à Crisana (ouest) ou dans le
    Maramures (nord). »


    Cette
    répartition géographique du « Caloian » peut être expliquée par le
    fait que c’est dans le sud de la Roumanie que se trouvent la plupart des
    plaines et des champs, alors que les autres régions sont plutôt montagneuses et
    ont d’autres spécificités agricoles. On retrouve malgré tout le « Caloian »
    dans quelques zones assez rares de Transylvanie.


    Mais de quoi s’agit-il
    concrètement ? Ce rituel d’invocation de la pluie comporte plusieurs
    étapes successives, dont nous parle Delia Suiogan :

    « Un jour après Pâques, à
    l’aube, les jeunes filles confectionnent une poupée en terre glaise qu’elles
    laisser sécher au soleil. Puis, le mardi, elles forment un véritable cortège pour
    emmener cette poupée près d’une rivière pour l’enterrer. En fait, le cortège est
    formé de jeunes filles ou de femmes âgées qui devraient « pleurer » la
    disparition de cette poupée, comme lors d’une procession d’enterrement. En
    fait il s’agit de l’enterrement symbolique du « Père Soleil », dans
    l’espoir que le soleil prendra une pause, pour ainsi dire, et laissera la pluie
    s’installer. Ensuite, le jeudi d’après cet enterrement symbolique, la poupée
    est déterrée et brisée en morceaux que l’on jette ensuite dans la rivière.
    Ainsi pense-t-on que la force du Soleil a été vaincue ».




    Le rituel que notre invitée vient de
    décrire est spécifique du sud et du sud-est de la Roumanie. Pourtant dans les
    régions d’Olténie, Munténie et de Dobroudja, le rituel du cortègecommence à disparaître.


    Comme chaque coutume, le « Caloian »
    connait lui aussi plusieurs variantes. Par exemple, avant l’enterrement, la
    poupée en terre glaise peut être décorée de coquilles d’œufs peints pour
    Pâques. On peut même lui confectionner un petit cercueil que le cortège de
    filles et de femmes portera vers la rivière. Dans certaines régions, la poupée
    n’est pas enterrée, mais lancée directement à l’eau. Dans tous les cas, tout
    tourne autour de la résurrection et de la régénération. Attesté depuis la nuit
    des temps chez les Aroumains, les Bulgares et les Grecs, le rituel du Caloian
    est encore pratiqué dans différentes régions de Roumanie. Et c’est peut-être
    justement grâce à sa complexité que ce rituel est resté presque intact au fil
    des siècles. (trad. Valentina Beleavski)

  • La “șezătoare” – la réunion des jeunes du village

    La “șezătoare” – la réunion des jeunes du village

    Dans les
    communautés roumaines d’autrefois, la cohésion du groupe était essentielle pour
    le bon fonctionnement des activités habituelles de l’année. Les villageois
    organisaient périodiquement des rencontres, dont les retombées étaient non
    seulement économiques, mais aussi sociales et culturelles.


    Ces réunions des
    villageois, par tranches d’âge et par métiers, avaient lieu dans toutes les
    régions de la Roumanie et impliquaient notamment les jeunes. On les appelait
    des « șezători », un nom provenant du verbe roumain « a ședea
    » qui signifie « s’asseoir ». C’est dans le cadre de ces rencontres
    que les jeunes apprenaient des pratiques utiles et se perfectionnaient dans les
    métiers transmis de génération en génération. Et c’est toujours à ces occasions
    qu’ils échangeaient des produits.

    Davantage de détails avec l’ethnologue
    Florin-Ionuț Filip Neacșu :


    « La transformation de la société roumaine, tout comme celle de la société
    traditionnelle, a été influencée pendant plus de 2 siècles par le progrès de la
    modernité. Aujourd’hui encore, les communautés roumaines des villages se
    réunissent à certaines périodes de l’année. Jadis, ces réunions étaient censées
    aider les villageois à mettre à l’abri les récoltes de l’année. C’était
    principalement le travail des hommes. Les femmes et les jeunes filles tissaient
    et cousaient, préparaient la dot des futures mariées avec tous les oreillers,
    les couvertures et les tapis à mettre dans les maisons paysannes. Les « sezatori
    » avaient lieu d’habitude en automne et en hiver, lorsqu’on ne travaillait pas
    les champs, ou bien en été, avant la cueillette, et aussi à tout moment où l’on
    ne travaillait pas la terre ».



    Chaque
    participant d’une «șezătoare » se mettait d’accord avec l’hôte
    concernant sa contribution à cet événement qui avait lieu les plus souvent dans
    la soirée. Aujourd’hui on pourrait l’appeler « un atelier de création ».
    Tout ce qui était nécessaire pour cette réunion était préparé d’avance dans les
    moindres détails : le pétrole pour la lampe, le bois pour le feu, la laine
    pour tisser et ainsi de suite.

    Quel autre rôle avaient ses rencontres des
    jeunes villageois ? Réponse avec Florin-Ionuț Filip Neacșu :


    « Ces réunions n’étaient pas organisées seulement en vue d’une coopération
    entre les villageois. Il s’agissait aussi d’avoir une cohésion avec les
    communautés voisines. On y racontait des contes de fées, des histoires vraies,
    des légendes, des devinettes et des anecdotes. On y chantait aussi. C’est
    durant ces rencontres qu’étaient fixées les futures fiançailles et les futurs
    mariages. Bref, c’était une bonne occasion pour les différentes communautés de
    mieux se connaître les unes les autres. De nos jours, dans plusieurs zones de
    la Roumanie, on tente de revigorer cette tradition des « șezători »,
    notamment pour les jeunes qui souhaitent avoir une meilleure idée des
    traditions de leurs ancêtres. Bien qu’elles soient maintenant organisées par
    des musées et des centres de création traditionnelle et non pas par les
    communautés elles-mêmes, les réunions d’aujourd’hui se proposent
    justement de ramener dans l’actualité cette coutume que l’on retrouve aussi,
    d’ailleurs, dans d’autres cultures d’Europe, notamment dans les Balkans ».



    Précisons aussi,
    qu’autrefois, les « șezători » étaient des activités nocturnes,
    coordonnées toujours par la hôte de la maison où l’on se réunissait, d’habitude
    une femme plus âgée. Au coucher du soleil, les jeunes filles y apportaient
    l’objet sur lequel elles étaient en train de travailler ou qu’elles voulaient
    apprendre à fabriquer auprès des autres participants. Le plus souvent il
    s’agissait de tissus à coudre, de laine à tordre ou de dentelles à tresser.
    Vers la fin de la réunion des jeunes filles, les jeunes hommes faisaient leur
    apparition accompagnés de musiciens pour raviver l’atmosphère ou bien pour
    faire la cour à leurs futures fiancées. Avant l’aube, les filles partaient chez
    elles et les garçons les accompagnaient le long du chemin. (Trad. Valentina
    Beleavski )




    .

  • Pâques orthodoxes en Roumanie et en Bulgarie

    Pâques orthodoxes en Roumanie et en Bulgarie

    Pour
    les orthodoxes, Pâques est une fête religieuse plus importante que Noël. Chaque
    pays, et même région où cette religion domine a ses propres traditions pour
    célébrer cet événement. La Roumanie et la Bulgarie sont deux pays voisins
    orthodoxes et profondément religieux et on a voulu savoir s’ils partagent les
    mêmes traditions. Notre stagiaire, Juliane Née est donc allée voir à Sofia, en
    Bulgarie, comment les fidèles orthodoxes préparaient Pâques avec le Dimanche
    des Rameaux. Puis de retour à Bucarest, elle a découvert comment les Roumains
    ont célébré cette fête. Voici son reportage.

  • Des traditions à l’occasion de la fête de Saint Georges

    Des traditions à l’occasion de la fête de Saint Georges

    En Roumanie, la fête de la Saint Georges
    est célébrée chaque année le 23 avril. Ce personnage a un équivalent
    préchrétien, dans la figure d’une divinité de la végétation, protectrice de la
    nature, des bovins et des ovins. Dans la spiritualité roumaine, Sângeorz, le
    nom traditionnel de la fête de la Saint Georges, est le deuxième pilier du
    calendrier de l’année pastorale, aux côtés du Saint Démètre ou Sâmedru, ayant
    toute une symbolique reflétée dans des rituels propres au printemps.

    Delia
    Suiogan, ethnologue à l’Université du Nord de Baia Mare, nous en parle plus en
    détail :

    « Appelée « Sângeorz »
    en milieu rural, cette fête est un rite de passage, car elle marque le début de
    l’année. C’est à la fois le début de l’année pastorale et le début de l’année
    agricole. Par conséquent, la fête de la Saint Georges est célébrée par tous les
    habitants des villages traditionnels. Qui plus est, on dit que ceux qui la fêtent
    verront leur année agricole ou pastorale placées sous de bons auspices. Tout d’abord,
    il ne faut pas travailler durant cette fête. Par contre, on participe aux
    rituels de fécondité. Un rituel très ancien est celui de l’aspersion avec de l’eau.
    Ce rituel s’est assez bien conservé dans toutes les régions du pays. Parfois,
    il est aussi associé à d’autres fêtes. Ainsi, ce jour-là, les gens n’oublient
    pas de s’asperger avec de l’eau les uns les autres, car on dit que tout ce qui
    est lavé à l’eau ce jour-là deviendra propre et pur. C’est pourquoi, les gens
    allaient à la campagne ou même à la frontière et aspergeaient les lieux avec de
    l’eau bénite. »




    A la veille de la fête de la Saint
    Georges, les habitants des villages roumains préparaient de petits sillons dans
    lesquels ils plantaient des branches de saule et des fleurs printanières
    jaunes. Le matin de la fête, les hommes plaçaient les sillons décorés à
    l’entrée de la maison, à côté des piliers. Les sillons qui gardaient la maison
    durant la fête de la Saint Georges étaient conservés comme plantes médicinales
    pour le reste de l’année ou étaient intégrés dans la nourriture des animaux,
    afin de les protéger.

    Delia Suiogan nous explique:

    « A cette
    occasion les troupeaux sont aussi bénis et les moutons montent en montagne, car
    à ce moment-là les champs sont en jachère et les moutons peuvent les traverser.
    Avant cette fête, les champs sont fermés à tous les animaux. Après la Saint
    Georges, les troupeaux peuvent y passer pendant une période très bien définie. En
    Transylvanie, on dit que la forêt est en train de reverdir, alors que les
    moutons mangent de jeunes pousses. Qui plus est, beaucoup d’églises sont
    dédiées à Saint Georges et les communautés sont réunies autour d’elles. Comme
    la fête constitue une sorte de rite de passage, un rite du Nouvel An, comme je
    l’ai déjà dit, l’idée de centre, d’unité, d’équilibre doit être préservée. »




    Comme la fête de la Saint Georges
    marque le début de l’année pastorale, des feux étaient allumés dans les
    villages le matin du jour de fête. Ce rituel purificateur et protecteur se
    déroulait soit dans la maison, soit dans un lieu prédéterminé situé au coeur du
    village. Souvent, les jeunes sautaient par-dessus le feu ou à travers la fumée,
    croyant ainsi qu’ils pouvaient se purifier et se protéger contre les maladies
    et les accidents tout au long de l’année. (trad. Andra Juganaru)

  • Saint Teodor, le patron du printemps

    Saint Teodor, le patron du printemps

    Jadis, au mois de mars
    et d’avril, juste avant l’équinoxe, la tradition consistait à répandre les
    cendres des restes de l’hiver sur les sols, dans les jardins et les vergers,
    afin de les rendre fertiles. L’objectif principal de ces feux était d’aider le
    soleil à surmonter cet événement cosmique que représente l’équinoxe. Le calendrier
    roumain traditionnel s’organise en fonction de ces différents moments de
    passage existant au cours d’une année.
    Ainsi, les célébrations de l’année, qu’elles aient ou non une date fixe, sont
    organisées en fonction de ces changements cosmiques importants. Les mois de l’année, les saisons,
    les équinoxes et les solstices sont donc souvent représentés de manière
    allégorique, avec des patrons qui les gouvernent, et ce depuis l’Antiquité.
    Parmi eux, Saint Teodor (Sântoader), le patron du printemps, dont l’équivalent
    apparaît dans le calendrier orthodoxe roumain déjà au mois de février.

    Florin-Ionuț Filip Neacșu, ethnologue, nous explique : « Toutes les commémorations du
    mois de février sont en lien avec le Saint Teodor, qui existe aussi dans le
    calendrier orthodoxe. On retrouve aussi des symboles tels que les animaux
    gardés et protégés par le Saint Teodor, comme ses chevaux par exemple. Par
    conséquent, on célèbre le 8 février le Saint Teodor Stratilat, et un autre Sait
    Teodor – le 17 février Au printemps, on nettoie les vignes et les
    vergers, très nombreux en Roumanie, et on brûle les broussailles après le
    nettoyage, afin d’éliminer les insectes qui remontent à la surface de la terre
    à cette période. L’objectif est aussi de protéger les hommes des morsures des
    serpents ou des lézards. Autrefois, certains villageois brûlaient de l’encens
    autour de leur maison afin de protéger leurs jardins des insectes et des
    serpents. »







    La légende populaire raconte que saint Teodor avait
    douze chevaux, six noirs et six blancs, représentant les deux équinoxes de
    l’année. Saint Teodor est leur gardien, et chaque année, les chevaux blancs
    tentent de chasser les noirs. Jusqu’à l’équinoxe, une lutte sans merci s’engage
    entre les deux troupeaux antagoniques, dont les chevaux blancs sortent
    victorieux, permettant ainsi au soleil de reprendre sa course ascendante à
    partir du 23 mars. Dans le calendrier traditionnel roumain, le Saint Teodor est
    celui qui établit le nouvel ordre cosmique. Il guide le soleil à travers le
    firmament, empêchant tout déséquilibre pouvant avoir des conséquences sur le
    bon déroulement de la vie sur terre, comme les catastrophes naturelles. Même si
    cette fête ne dispose pas de date fixe, ce qui explique sa disparition
    progressive dans les milieux traditionnels, certaines coutumes sont encore
    observées. Un bon moyen de faire revivre cette tradition ancestrale. (Trad : Charlotte Fromenteaud)

  • La tradition des “mucenici”

    La tradition des “mucenici”

    Le 9 mars, les Roumains chrétiens
    orthodoxes commémorent les 40 saints martyrs de Sévastie et
    suivent des rituels anciens dont les principaux buts étaient la purification et
    la protection. Dans les zones agricoles, les charrues étaient confiées aux
    forgerons qui les préparaient pour les travaux du printemps. Une fois ces
    préparatifs terminés, les charrues étaient étalées devant les portes de
    maisons, dans le cadre d’une festivité qui visait à renouer les liens entre les
    familles paysannes. La mère de famille jouait un rôle particulièrement
    important. Elle devait tourner trois fois autour de la charrue familiale
    attachée à une paire de chevaux ou de bœufs en l’arrosant d’eau bénite, et brûler
    des encens. Elle mettait aussi des œufs devant les animaux qui tiraient la
    charrue. Si les animaux les évitaient et que les œufs restaient entiers, les
    paysans allaient être protégés tout au long de l’année.


    En Bucovine, région historique du nord
    de la Roumanie, les villageois dansaient une sorte de ronde rituelle et
    frappaient la terre avec des matraques afin d’enterrer symboliquement le froid
    et « inviter » en quelque sorte la chaleur. La fête des
    « mucenici » constituait aussi une bonne occasion de prévoir la
    météo. Si le 9 mars était un jour pluvieux, toutes les cultures de l’année
    allaient être protégées contre la sécheresse. Au micro, Delia Şuiogan,
    ethnologue à l’Université du Nord de Baia Mare.


    « Un
    autre rituel important qu’il faut absolument mentionner, puisqu’il est à
    retrouver dans toutes les régions du pays, et celui des feux allumés dans
    chaque cour. Tous les membres de la famille se réunissaient et devaient sauter par-dessus
    le feu pour imiter en quelque sorte les ancêtres qui sautaient tous les ponts
    vers le monde de l’au-delà. C’était un rituel de purification, durant lequel
    les villageois cherchaient à commencer un nouveau cycle de vie plus forts et
    mieux préparés à affronter le mal. »



    Parmi toutes les pratiques ancestrales
    liées à la fête des Mucenici, aujourd’hui nous gardons toujours le côté
    culinaire, archiconnu en campagne tout comme en ville. Les mères de famille
    préparaient 40 petites brioches à la forme du chiffre 8 pour commémorer les 40
    Saints martyrs chrétiens de Sévastie. Détails avec Delia Şuiogan :


    « Après cette tradition des feux et
    des sauts, c’était le temps d’offrir des « mucenici » ou bien
    « măcinici » ou encore « petits saints ». Parfois, ces
    brioches illustraient des oiseaux mais souvent elles illustraient tout
    simplement le chiffre 8. »



    En Moldavie, les « mucenici »
    sont recouverts de miel et parsemés de noix écrasées et de cannelle avant
    d’être offerts aux enfants de la communauté. Dans le sud du pays, les
    « mucenici » sont plus petits et sont cuits dans un bouillon sucré et
    parfumé. Et n’oublions toujours par que pour commémorer les 40 saints martyrs,
    les hommes doivent absolument boire 40 verres de vin rouge !



  • Le 1er mars est la fête du Mărțișor

    Le 1er mars est la fête du Mărțișor

    Son principal élément est le fil tressé rouge et blanc, allégories de la lumière et de l’obscurité, de la chaleur de l’été et du froid de l’hiver, du jour et de la nuit, de la vie et de la mort. Initialement un simple fil tressé noir et blanc, le mărţişor évolue, le rouge remplace le noir et on y attache des pièces de monnaie ou de petits objets symboliques. De nos jours, le mărţişor peut être tout objet de petites dimensions auquel l’on attache un fil bicolore rouge et blanc. Bref – un porte-bonheur. Pour sa part, l’ethnologue Ion Ghinoiu définit le mărţişor comme « le fil bicolore des jours, des semaines et des mois de l’année ». Pour le spécialiste du folklore Simeon Florea Marian, c’est un porte-bonheur qui apporte le bien-être à son possesseur. Explications supplémentaires avec Virgil Ștefan Nițulescu, manager du Musée national du paysan roumain à Bucarest : « C’est une partie du trésor mondial et pas seulement un élément du patrimoine culturel immatériel roumain. D’ailleurs, le dossier qui a été admis à l’UNESCO illustre le fait que cette tradition est spécifique à une zone délimitée par les rivières Dniestr et la Grèce, la Bulgarie et jusqu’aux anciennes républiques yougoslaves. Presque tout l’espace chrétien des Balkans est marqué par cette tradition. Certes, il s’agit du passage de l’hiver au printemps, c’est une tradition marquée par cette renaissance de la nature. Sans aucun doute, il s’agit d’un moment d’espoir que la vie poursuivra son cours normal. »



    La foire dédiée au mărţişor organisée comme chaque année au Musée du paysan roumain de Bucarest réaffirme les significations profondes du fil bicolore rouge et blanc. Cette initiative de l’institution est déjà connue dans l’espace urbain et plusieurs milliers de Bucarestois passionnés d’art traditionnel roumain visitent cette foire chaque printemps. Détails avec Virgil Ștefan Nițulescu : « Cette foire constitue un moment au cours duquel la communauté se réunit pour célébrer l’apparition du soleil dans le ciel. Ce n’est pas seulement la fin d’un hiver astronomique, météorologique, mais aussi un moment de renaissance spirituelle. Notre foire a réussi à réunir des personnes qui respectent strictement le métier traditionnel de la réalisation des mărţişoare, et certains de ces porte-bonheurs sont très simples, de véritables objets d’art paysan qui mettent surtout l’accent sur le fil blanc-rouge plutôt que sur les objets qui l’accompagnent. Par ailleurs, nous encourageons la créativité. Il y a beaucoup d’artistes, de jeunes et même d’étudiants en art qui font état de leur créativité proposant au public des « mărţişoare » novateurs, créatifs, très beaux et très appréciés. Des foires dédiées au mărţişor ont lieu à plusieurs endroits de Bucarest, mais sans fausse modestie, je dois avouer que celle accueillie par le Musée du paysan roumain est la plus appréciée par les Bucarestois et sans aucun doute la plus visitée. »



    Le « mărţişor » était porté dans les communautés d’autrefois à la veille d’une des fêtes du printemps ou jusqu’au fleurissement des premiers arbres. Dans certaines parties du pays, les enfants portaient le mărţişor jusqu’au retour des oiseaux migrateurs. C’était le moment d’attacher le fameux fil blanc-rouge aux branches des arbres pour reconfirmer le lien entre l’homme et la nature.